[revue-presse-FNH] Petite revue de presse spéciale Enquête 'La France des oasis', une série en 6 épisodes (lundi 31 août)

Florence de Monclin f.demonclin at fnh.org
Lun 31 Aou 08:03:15 CEST 2020


Bonjour à tous,

Un petit tour d'horizon avec deux possibilités d'accès aux dépêches et articles suivants : 
–> Un accès 'rapide' direct à la source de l'article (hors abonnement) par un lien hypertexte sur son intitulé dans le sommaire ; si un lien vers un article ne fonctionne pas, vous pouvez retrouver son contenu dans le corps du mail à l'item correspondant.
–> Un accès 'lent' et plus complet dans le corps du mail sous le sommaire et les extraits, incluant les articles réservés aux abonnés, des liens vers d'autres articles sur le même sujet et des pour en savoir plus (sources, etc.)
1- Enquête « La France des oasis » (1/6). Voyage dans la France des utopistes <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/17/voyage-dans-la-france-des-utopistes_6049108_3451060.html>, Le Monde, 17/08/20, 21h41
2- Enquête « La France des oasis » (2/6). Ecovillages, logements participatifs… Une autre manière d’habiter la Terre <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/18/ecovillages-logements-participatifs-une-autre-maniere-d-habiter-la-terre_6049180_3451060.html>, Le Monde, 18/08/20, 05h57
3- Enquête « La France des oasis » (3/6). De la Bretagne à la Drôme, s’autogouverner pour changer le monde <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/19/de-la-bretagne-a-la-drome-s-autogouverner-pour-changer-le-monde_6049304_3451060.html>, Le Monde, 19/08/20, 19h04
4- Enquête « La France des oasis » (4/6). « On doit changer la société » : rencontre avec des pionniers de la nouvelle économie du partage <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/19/on-doit-changer-la-societe-rencontre-avec-des-pionniers-de-la-nouvelle-economie-du-partage_6049386_3451060.html>, Le Monde, maj le 20/08/20 à 15h42
5- Enquête « La France des oasis » (5/6). Dans les écolieux, on réinvente des rituels pour se retrouver <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/21/dans-les-ecolieux-on-reinvente-des-rituels-pour-se-retrouver_6049512_3451060.html>, Le Monde, 21/08/20, 07h00
6- Entretien « La France des oasis » (6/6). « Nous allons connaître les dix années de transformation écologique les plus remarquables de l’histoire » <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/22/nous-allons-connaitre-les-dix-annees-de-transformation-ecologique-les-plus-remarquables-de-l-histoire_6049616_3451060.html>, Le Monde, 22/08/20, 07h00

Bien à vous,
Florence

NB : En pied de page de chaque message, vous disposez d’une adresse url qui vous permet de vous abonner, de changer votre adresse mail ou de vous désabonner directement à votre gré.

SÉRIE DU JOUR : « La France des oasis", une série en 6 épisodes. Refusant de jouer le jeu d’une économie jugée destructrice de la planète et des liens sociaux, les utopistes réalistes se rassemblent de plus en plus dans des « écolieux », sortes de laboratoires du futur. Et vivent, déjà, dans « le monde d’après ». (cf. item 1 à 6)
NOTRE ACTU : A suivre sur notre site Internet <http://www.fondation-nature-homme.org/>, Facebook <https://www.facebook.com/FondationNH/>, Twitter <https://twitter.com/fondationNH> ou Instagram <https://www.instagram.com/fondationNH/>.
> Plan de relance, loi climat... Décryptage et propositions pour des avancées écologiques et sociales qui comptent <http://www.fondation-nature-homme.org/sites/default/files/presse/dp-plan-relance-fnh.pdf>
> Le temps est venu de poser les premières pierres d’un nouveau monde <https://letempsestvenu.org/>
> 10 mesures pour juger de la pertinence des programmes des candidats aux élections municipales <http://www.fondation-nature-homme.org/magazine/ecolos-et-sociales-les-prochaines-municipales>
> Baromètre des mobilités du quotidien - Coût, manque d'alternatives : les Français prisonniers de la voiture <http://www.fondation-nature-homme.org/magazine/cout-manque-dalternativesles-francais-prisonniers-de-leur-mode-de-transport>
> Guide en ligne. 7 propositions pour contribuer au grand débat national <http://www.fondation-nature-homme.org/magazine/7-propositions-pour-contribuer-au-grand-debat-national/>
> Pétition. L’Affaire du Siècle. Climat : stop à l’inaction, demandons justice ! <https://laffairedusiecle.net/>
> Let’sbio ! Le Bonus cantine Bio et Locale <https://www.letsbio.org/>
> 30 gestes et astuces pour réduire sa conso d’énergie <https://www.lesgesteseclaires.com/>
> Groupe Facebook "Infos et astuces pour économiser l’énergie <https://www.facebook.com/groups/208132273169772/?utm_campaign=GE2018&utm_medium=E5&utm_source=GE2018E516>"
> Une collection de vidéos pour décrypter les enjeux écologiques et climatiques <https://www.youtube.com/playlist?list=PLh--7obE3XQ4Ku7J6VzsvlsKayQqvJTq9>
> Pétition. TAFTA, CETA : des traités climaticides qui menacent nos démocraties. <http://fondation-nicolas-hulot.org/action/tafta-ceta-des-traites-climaticides-qui-menacent-nos-democraties/?_ga=1.254849352.1537587716.1214298697>
> Pétition. Crèches : arrêtons d’intoxiquer nos enfants <https://formulaires.fondation-nicolas-hulot.org/fra/petition_ecolocreche>
> Pour répondre PRÉSENT à l’APPEL DES SOLIDARITÉS porté par plus de 120 ONG & associations de tous horizons <https://www.appel-des-solidarites.fr/>
> 2nd édition de My Positive Impact : les 6 lauréats du public et les 3 lauréats du jury <http://www.mypositiveimpact.org/les-solutions>
______________________________________________________________________________________________________________________
1- Enquête « La France des oasis » (1/6). Voyage dans la France des utopistes, Le Monde, 17/08/20, 21h41
Nicolas Truong 

« La France des oasis » (1/6). Refusant de jouer le jeu d’une économie jugée  destructrice de la planète et des liens sociaux, les utopistes réalistes se rassemblent de plus en plus dans des « écolieux », sortes de laboratoires du futur. Et vivent, déjà, dans « le monde d’après ».
Il n’y en a pas un sur cent et pourtant, ils existent : les utopistes. Les uns sont des zadistes anticapitalistes, les autres de simples écologistes. Certains sont anarchistes chrétiens, d’autres hindouistes décroissants, bouddhistes végétariens ou permaculteurs musulmans. La plupart sont des athées soucieux d’égalité et de fraternité. Ingouvernables, ils occupent des « zones à défendre » (ZAD) ; citoyens écoresponsables, ils s’installent en famille ou entre amis dans des éco-hameaux, au sein d’habitats légers et partagés. La France des oasis s’étend. La crise sanitaire a renforcé la légitimité de ces écovillages où l’on veut cohabiter de manière plus accordée et solidaire, loin d’une vie jugée insensée, prédatrice et solitaire. Les résidents de ces lieux collectifs, souvent qualifiés de « résilients », vivaient déjà dans le « monde d’après » : le confinement dû à la pandémie de Covid-19 a conforté leur conversion.
Car beaucoup d’entre eux ont quitté leurs études, leur travail, leur région et parfois leur famille pour ces nouvelles terres d’adoption. Au départ, il y eut souvent un déclic, après une longue ou subite évolution, mais le refus de jouer le jeu de la compétition sociale ou scolaire, de faire tourner une économie qui corrode les relations humaines et ravage la biosphère l’a emporté sur le confort et le conformisme de la pensée : vivre de son salaire, réussir sa carrière, devenir propriétaire, mais pour quoi faire ? Ils sont tous « en quête de sens », l’une des phrases les plus entendues dans le cadre de cette enquête réalisée entre 2019 et 2020, sur le territoire français. Ils sont l’inscription sensible et la déclinaison pratique d’un vaste tournant écopolitique.
Mais comment les nommer ? On parle souvent d’« écolieux », mais c’est trop peu. L’écologie est assurément l’un des ciments de ces microsociétés, mais l’envie de vivre au quotidien une relation plus apaisée aux autres l’est tout autant. On parle parfois de communauté, mais c’est souvent trompeur, car les leçons des années 1970 ont été tirées et chacun entend vivre pleinement son individualité. Sans compter que le mot est désormais chargé, plombé par les débats lancinants sur le « communautarisme » et le « séparatisme ». Le collectif prime, non l’identité et moins encore la grégarité. D’autant que ces lieux se veulent ouverts – aux amis, aux alliés, aux curieux qui cherchent à se ressourcer ou à s’inspirer d’eux, aux migrants, aux fracassés de la vie et aux gens de peu – et non des enclaves fermées.
Ménager des espaces de liberté
« Oasis » est un terme géographique plus imagé, mais aussi un symbole poétique, philosophique et politique qui pourrait davantage définir l’objet. L’oasis, c’est la vie qui résiste et se maintient dans le désert. L’image est simple et forte : au sein de l’aridité modernisatrice qui assèche les ressources et accentue la « désolation » planétaire, l’oasis est un abri, un écrin. Car le véritable danger, écrit Hannah Arendt (1906-1975), consiste à ce « que nous devenions de véritables habitants du désert et que nous nous sentions bien chez lui », alors qu’au contraire, les « oasis » sont « des fontaines qui dispensent la vie ».
Mais les oasis ne se réduisent pas, comme elle l’envisageait, aux passions « antipolitiques », tels que l’amour ou l’amitié, ou à la joie de créer et de penser. « Un discours sur le présent qui donne de l’espoir aux gens assemblés pour entendre un philosophe, c’est une petite oasis, poursuit Jacques Rancière dans En quel temps vivons-nous ? (La Fabrique, 2017). Une place occupée dans une métropole, une ZAD, ce sont des “oasis”, à savoir des espaces de liberté au milieu d’un désert, à ceci près que le “désert” n’est pas le vide mais le trop-plein du consensus. » 
> Lire aussi Jacques Rancière : « Entre esthétique et politique, les frontières deviennent poreuses »
Le terme a été popularisé par l’agroécologiste Pierre Rabhi avec l’association Terre et humanisme dans le Manifeste pour des oasis en tous lieux, publié en 1997. Un appel à « construire des regroupements géographiques d’unités de vie (terrain et habitat), fondées sur la terre nourricière et les échanges favorables à la reconstruction du lien social ». Depuis, ces oasis sont sorties de terre. Elles sont près de 1 000 aujourd’hui, et 500 à fonctionner pleinement. Pas étonnant que cette image ait surgi de la tête d’un homme qui est lui-même né au cœur du désert, dans une oasis fondée par un thaumaturge soufi, en Algérie. « La différence, c’est que l’oasis où j’ai grandi était un désert dépeuplé, déclare-t-il, alors qu’aujourd’hui, notre monde ressemble à un désert surpeuplé dans lequel personne ne se parle et dont nous avons perdu le sens. »
Dans le sillage de Pierre Rabhi
Installé à Montchamp, près du hameau des Buis, sur les collines ardéchoises, Pierre Rabhi se réjouit de cet « essaimage ». Mais il n’en est plus que l’inspirateur. D’autant que, sur le mariage homosexuel, la place des femmes ou la PMA, une partie de ses continuateurs souhaitent se démarquer de ses propos jugés conservateurs.
A la suite du manifeste de 1997, qui appelait à adopter « la sobriété de vie comme valeur de bien-être », ou à « promouvoir un habitat écologique à faible coût », une première association, appelée Oasis en tous lieux, désormais disparue, a porté le projet. A partir de 2014, celui-ci est repris par le mouvement Colibris, connu pour le slogan « Faire sa part » – tiré d’une légende amérindienne dans laquelle l’un de ces oiseaux-mouches s’active à éteindre un incendie de forêt avec les gouttelettes d’eau qu’il porte dans son bec fin. Depuis le printemps 2020, le projet Oasis est désormais porté par la Coopérative Oasis, dont Mathieu Labonne est le président-directeur général.
> Lire aussi Pierre Rabhi : « Comment échapper à la frénésie de notre société ? »
Lui-même installé en famille à l’éco-hameau de la ferme du Plessis (Seine-et-Marne), dans une oasis de sept maisons (sur les vingt-huit logements prévus) qu’il a fondée à deux pas du centre hindouiste Amma (du nom de la gourou indienne qui parcourt le monde en étreignant tous ceux qui le lui demandent), cet ingénieur Supaéro (Institut supérieur de l’aéronautique) de 37 ans, ancien chercheur au CNRS sur le climat et expert sur les questions liées au carbone, est représentatif du profil d’une partie de ces nouveaux résidents de la République. Infatigable animateur du réseau des 1 000 oasis existantes, Mathieu Labonne confirme l’impression qu’un récent tour de France des oasis lui a laissée : « La crise sanitaire a démontré la pertinence de modes de vie écologiques et collectifs. Les demandes de visites et de formations sont plus importantes, les sollicitations constantes, notamment autour de la notion d’autonomie. »
> Lire aussi Coronavirus : « L’épidémie doit nous conduire à habiter autrement le monde »
Cofondateur avec Pierre Rabhi du mouvement Colibris, coauteur avec Mélanie Laurent du film Demain (2015), et avec Laure Noualhat du film Après-demain (2018), qui répertorient toutes ces initiatives alternatives, Cyril Dion constate aujourd’hui que « le concept d’oasis s’élargit ». Il ne se réduit plus à ces « tiers lieux », mais s’étend à toutes les volontés de quitter la ville et d’investir un territoire, de restaurer ou construire une maison « passive », de vivre de façon plus harmonieuse et moins dispendieuse. « Les oasis sont la preuve qu’on peut vivre une vie plus riche avec peu d’argent », résume-t-il. Retour de balancier de la mondialisation, il y a deux manières opposées de s’enraciner, assure-t-il, « soit fermée et identitaire, soit ouverte et solidaire ».
Lorsqu’il a commencé sa tournée des oasis, en 2007, se souvient-il, les utopistes étaient « roots et souvent marginaux », ancrés dans des régions connues pour leurs traditions alternatives, comme la Drôme, l’Ardèche, les Cévennes ou la Bretagne. Aujourd’hui, on voit également, dans l’Orne ou le Limousin, des profs et des designers, des communicants et des ingénieurs qui veulent « se désaliéner d’un monde où tout est financiarisé ». Oui, « on y croise ceux qu’on appelle les “bobos” et c’est tant mieux, insiste Cyril Dion, car ils nouent de nouvelles relations avec les ruraux ».
Les oasis contribuent en effet à revivifier les territoires. Elles estompent l’inexorable « fin du village », enrayent à leur manière la désertification des campagnes en leur donnant un nouveau visage. Considérées au départ comme des sectes ou de subversifs rassemblements anarchistes, elles deviennent souvent, avec le temps, des acteurs incontournables d’une commune, rouvrent des écoles, redynamisent l’économie d’une région, notamment à partir de ses produits locaux. « Ma femme et notre voisin dans l’éco-hameau sont désormais conseillers municipaux à la demande du maire, alors qu’au début, nous étions pris pour les membres d’une secte », relate Mathieu Labonne.
Alors que de nombreux combats syndicaux ont échoué (contre la loi travail en 2016 et 2017, ou contre la réforme des retraites à l’hiver 2019-2020), la frange la plus radicale gagne des batailles politiques, comme à Notre-Dame-des-Landes (avec l’arrêt du projet d’un aéroport), au quartier des Lentillères à Dijon (l’abandon, en novembre 2019, de l’extension d’une zone résidentielle, au terme de neuf ans de lutte), dans le triangle de Gonesse (l’arrêt du complexe commercial EuropaCity, dans le Val-d’Oise, en novembre 2019), ou, plus récemment, à Roybon, dans l’Isère (l’abandon, en juillet, d’un projet Center Parcs).
Ces victoires confirment ainsi la sentence du sociologue Bruno Latour, délivrée sous forme de question : « Avez-vous remarqué que les émotions mises en jeu ne sont pas les mêmes selon que l’on vous demande de défendre la nature – vous bâillez d’ennui – ou de défendre votre territoire – vous voilà tout de suite mobilisé ? » Et les intuitions du philosophe Michel Serres (1930-2019) : « En Utopie, il faudra manger sans aller chercher la nourriture à 10 000 km, comme le fait aujourd’hui la grande distribution. Peut-être alors verrons-nous la fin de la “guerre rurbaine”, pour une résurrection du rural ? »
> Lire aussi Notre-Dame-des-Landes, terrain fertile pour les intellectuels
Ces lieux, qui veulent vivre avec « moins de biens » en créant « plus de liens », réhabilitent l’utopie – ce mot inventé en 1516 par Thomas More dans son récit Utopia, néologisme gréco-latin qui signifie le « lieu de nulle part ». Sauf qu’ici, les lieux sont situés et ancrés dans la réalité. Ils sont non seulement des utopies réalistes, mais des utopies réalisées. « Les socialistes utopiques du XIXe siècle ont été beaucoup plus féconds qu’on ne le croit, rappelait Michel Serres. C’est à eux que l’on doit des idées folles – les crèches pour les enfants, les banques pour les pauvres, des ébauches de sécurité sociale, les mutuelles, etc. – qui nous rendent la vie douce aujourd’hui. »
La politique des communes
Qu’ils en soient conscients ou non, les habitants de ces oasis sont les héritiers d’une tradition d’expérimentateurs de l’émancipation. Et des lointains cousins de Charles Fourier (1772-1837), « le premier écologiste social à faire surface dans la pensée radicale », comme l’écrit le philosophe libertaire Murray Bookchin (1921-2006) qui est devenu l’une des grandes références du mouvement (L’écologie sociale, Wild Project, 336 p., 22 euros).
> Lire aussi Le municipalisme ou la commune au pouvoir
Car les nouvelles utopies sont « communalistes » : elles s’articulent autour de communes – irréductibles à des villes ou des villages – librement créées, où prime la démocratie participative, et qui veulent s’inscrire dans de futures « bio régions ». C’est pourquoi la politique des communes « n’est pas qu’une lubie d’anarchistes et de révolutionnaires sans révolution », écrit le politiste Laurent Jeanpierre, mais « un appel venu du futur auquel les mouvements sociaux à venir auront sans doute à répondre » (In girum. Les leçons politiques des ronds-points, La Découverte 2019). Ces oasis sont aussi des « écotopies », des utopies écologistes dont le nom provient du roman d’anticipation d’Ernest Callenbach, Ecotopia : Les Carnets de notes et de rapports de William Weston (1975), qui influença fortement la contre-culture américaine. Des lieux où l’on veut vivre de manière plus accordée à la nature.
> Lire aussi Philippe Moati : « L’utopie écologique séduit les Français »
Mais attention : l’utopie, ce n’est pas la perfection. Si les oasis sont d’incontestables laboratoires en matière d’habitat, de gouvernance, de solidarité et de partage des communs, de réinvestissement des rituels, de permaculture ou de monnaie locale, nombre d’entre elles se fracassent sur ce que l’essayiste altermondialiste Patrick Viveret appelle « le putain de facteur humain ». Sans parler de « quelques dérives sectaires », témoigne Cyril Dion, que l’on rencontre parfois « lorsque de fortes personnalités exercent leur emprise sur une communauté plus refermée et certains individus perdus ». Les oasis ne sont pas des paradis. Mais, chacune à sa manière, des tentatives échouées ou réussies d’échapper à l’enfer de notre désert.
<https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/17/voyage-dans-la-france-des-utopistes_6049108_3451060.html>
---------------------------------------------------------------------
« La France des oasis », une série en six volets
• Voyage dans la France des utopistes <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/17/voyage-dans-la-france-des-utopistes_6049108_3451060.html> 
• Ecovillages, logements participatifs… Une autre manière d’habiter la Terre <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/18/ecovillages-logements-participatifs-une-autre-maniere-d-habiter-la-terre_6049180_3451060.html>
• De la Bretagne à la Drôme, s’autogouverner pour changer le monde <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/19/de-la-bretagne-a-la-drome-s-autogouverner-pour-changer-le-monde_6049304_3451060.html>
• « On doit changer la société » : rencontre avec des pionniers de la nouvelle économie du partage <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/19/on-doit-changer-la-societe-rencontre-avec-des-pionniers-de-la-nouvelle-economie-du-partage_6049386_3451060.html>
• Dans les écolieux, on réinvente des rituels pour se retrouver <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/21/dans-les-ecolieux-on-reinvente-des-rituels-pour-se-retrouver_6049512_3451060.html>
• « Ne laissons pas le réenchantement du monde aux mystiques » <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/21/ne-laissons-pas-le-reenchantement-du-monde-aux-mystiques_6049511_3451060.html>• Rob Hopkins : « Nous allons connaître les dix années de transformation écologique les plus remarquables de l’histoire » <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/22/nous-allons-connaitre-les-dix-annees-de-transformation-ecologique-les-plus-remarquables-de-l-histoire_6049616_3451060.html>
______________________________________________________________________________________________________________________
2- Enquête « La France des oasis » (2/6). Ecovillages, logements participatifs… Une autre manière d’habiter la Terre, Le Monde, 18/08/20, 05h57
Nicolas Truong et Pascale Tournier 

« La France des oasis » (2/6). Soucieux de réduire leur consommation d’énergie et d’utiliser des matériaux locaux, de vivre en harmonie avec leurs voisins, des Français, nouveaux adeptes de vie communautaire, choisissent de vivre en harmonie avec leurs convictions.
Le gazon n’a pas encore été planté, ni le potager bio. La maison pour les seniors est aussi à l’état de plan. Mais déjà, sept blocs de maisons de couleur ocre et un habitat commun, rassemblant buanderie et chambres d’amis, sont sortis de terre. Situé dans l’Eure-et-Loir, à quelques centaines de mètres du centre hindouiste Amma, l’oasis du Plessis va, à terme, accueillir 28 familles soucieuses d’un mode de vie écologique et harmonieux.
Célia, 28 ans, a quitté son travail d’ingénieur bien payé à Saint-Gobain pour rejoindre cette aventure avec son conjoint. Retrouver du lien social « dans un monde qui le piétine » et déployer sa préoccupation pour l’avenir de la planète sont à la source de ce qu’elle considère comme un engagement. « On travaille pour les générations futures, pas pour soi, soutient la jeune femme. Il s’agit de prendre le temps de changer un lieu à son échelle : l’Eure-et-Loir n’est pas avant-gardiste en matière de culture bio et de respect de la biodiversité. » Au loin s’étendent en effet des champs de culture intensive de la Beauce.
Dans les pas de Charles Fourier
Comme Célia, ils sont de plus en plus nombreux à s’installer dans des éco-hameaux ou des habitats participatifs. A se mettre consciemment ou non dans les pas, version écologique, du philosophe du XIXe siècle Charles Fourier et de son projet utopiste de phalanstère, ou de son héritier Jean-Baptiste Godin, avec son familistère de Guise (Aisne). Pas question pour ces nouveaux adeptes de vie communautaire de construire des maisons de solitaires à la Henry David Thoreau (1817-1862), ou des citadelles de survivalistes attendant l’arrivée de la catastrophe. Ils sont ingénieurs, architectes ou juste désireux d’être en accord avec leurs idées. Ils pensent que le changement de société passe par une autre façon d’habiter. L’architecture arrêtée reflète leur volonté de respecter l’environnement et de créer du commun.
> Lire aussi notre série de 2017 sur les grandes utopies : Le phalanstère de Charles Fourier
Comme le souligne l’écrivaine et essayiste Marielle Macé, habiter constitue en soi un projet politique, car c’est « faire face autrement à ce monde-ci, à ce présent-là, avec leurs saccages, leurs rebuts, mais aussi leurs possibilités d’échappées. Et occuper autrement le terrain » (Nos cabanes, Verdier, 2019). Une occupation de terrain parfaitement comprise par les zadistes de Notre-Dame-des-Landes qui considèrent que « ce geste simple, habiter, est inséparable de celui de lutter » (Habiter en lutte. Quarante ans de résistance, collectif Comm’un, Le passager clandestin, 2019).
Car habiter, ce n’est pas seulement se loger. Ce n’est pas uniquement résider. Comme le soutient le philosophe Martin Heidegger (1889-1976), « habiter est le trait fondamental de l’être » (Essais et conférences, 1951). Bien sûr, l’urbanisme peut y contribuer. Et Michel Serres (1930-2019) avait su s’adresser aux architectes afin qu’ils s’intéressent autant à la botanique qu’à l’esthétique (Habiter, Le Pommier, 2012).
C’est pourquoi les nouvelles constructions des oasis essaient de s’appuyer sur des techniques qui réduisent l’empreinte de l’homme sur le sol. L’habitat est « passif » – l’isolation thermique réduit la consommation d’énergie et se trouve complétée par les apports solaires. Les toilettes sont sèches. L’eau est souvent purifiée dans des stations de phytoépuration, et l’autonomie alimentaire visée. On parle aussi d’« architecture de cueillette », quand les matériaux locaux et simples comme le bois sont utilisés.
SCI, SAS, SCIA: chaque collectif choisit la forme juridique qui permet la propriété et l’animation collective sans qu’il n’y ait de spéculation en cas de vente. Avec la loi Alur (accès au logement et la rénovation de l’urbanisme rénové) de 2014, le statut de coopérative ne doit plus être réduit au champ de l’entreprise, il doit aussi embrasser le logement. Mais les décrets d’application tardent à être publiés. En attendant, c’est la société coopérative par actions simplifiées (SAS) à but commercial, régie par la loi de 1947, qui est privilégiée. Les coopérateurs sont propriétaires d’une société qui est elle-même propriétaire d’un bien.
Habitat léger
Quand le droit n’épouse pas les nouvelles aspirations, on essaie de l’infléchir. Après avoir lutté avec succès contre la construction d’un projet immobilier en périphérie de Dijon afin de maintenir un potager collectif, les habitants du quartier des Lentillères ont trouvé un nouveau combat. Ils souhaitent la création de la catégorie d’urbanisme « zone d’écologie communale ». Le but : autoriser l’habitat, l’agriculture et les « non-humains » sur un même lieu. « Habiter, cela crée un rapport différent à l’espace », clament Nicolas, Maria, Abdel et les autres, installés dans leur « snack friche » construit de leurs mains, La Grange rose, ou dans leurs masures à charpente en bois de récupération.
Souvent, les jeunes attirés par l’esprit communautaire font le choix de l’habitat léger dont la yourte est devenue l’emblème. D’autres, comme François Salliou, maire de Trémargat (Côtes-d’Armor), en « amoureux du bois » qui rêvait d’une charpente à l’ancienne, construisent leur maison grâce à un chantier participatif et des matériaux locaux. Car habiter, c’est aussi composer avec le territoire et son histoire.
Agroécologie et boulangerie paysanne
Dans cette France des éco-hameaux, l’agencement des pièces est aussi pensé pour favoriser de nouvelles relations, fondées sur la mutualisation des dépenses et le partage des activités. « Nous voulons un lieu de vie qui construit de la résilience, de l’interdépendance et de l’interconnexion », affirme Raphaël Notin, 46 ans, de l’éco-hameau Grain&Sens, perché dans les montagnes ardéchoises. A l’abri de tilleuls centenaires, quatre familles françaises et anglo-saxonnes vivent dans une ancienne ferme réhabilitée depuis deux ans. Dans les salles communes – le séjour boisé, l’atelier où l’on répare, la bibliothèque –, ils échangent et partagent leurs savoir-faire et leur savoir-être pour développer leur projet d’agroécologie, de boulangerie paysanne et d’« English camps » dispensant des cours d’anglais.
Au Moulinage de Chirols, ils sont toute une bande à s’être embarqués dans l’aventure ambitieuse de l’autoconstruction. Trônant au-dessus de la rivière ardéchoise de La Fontaulière, cette ancienne usine de tissage de la soie a été investie par un collectif de près de vingt-cinq personnes. L’objectif : rénover l’espace de 4 000 m2 pour le transformer en tiers lieu, composé d’habitats participatifs, de résidences d’artistes et de salles de coworking. Le site est chargé d’histoire. « Les gens dans la région sont contents que cela revive : beaucoup ont vu leur mère ou leur grand-mère y travailler », explique Gaëlle, une militante du CCFD-Terre solidaire,impliquée dans ce « pôle d’expérimentation collective, sociale et solidaire ».
En ce jour de février, une forte activité règne au Moulinage. Tous les mercredis est organisé un chantier collectif. Déjouant les stéréotypes sexistes liés au travail dans le bâtiment, des jeunes femmes formées sur le tas enlèvent la charpente qui menace de s’écrouler. Ça tape, ça cogne, ça dégage les gravats dans la bonne humeur. Chacune est à sa place, en fonction de ses compétences.
Sweat-shirt poussiéreux, Julia s’est découvert un goût pour les coups de pioche qui « défoulent ». Avec ses amies venues de la région ou d’ailleurs, elle renoue avec cette pratique de chantiers collectifs de jeunes. Une façon aussi de repenser le travail en dehors des contraintes économiques en se fondant sur les valeurs de l’entraide, de l’autogestion et de l’expérimentation, plaçant ainsi l’apprenant, à la suite du philosophe pragmatiste américain John Dewey (1859-1952), dans un rôle actif.
« J’aime la part d’improvisation possible en fonction des besoins du projet, explique Gaëlle, dans la seule salle chauffée, à la déco foutraque. L’intelligence collective nous définit et nous accompagne dans notre volonté de transformer le système. » Et cette intelligence semble être saluée. Sur la page du site Internet du collectif du Moulinage de Chirols s’affichent en effet les logos officiels de la région Rhône-Alpes, de la Fondation de France et du Fonds social européen. Preuves d’un soutien financier, ils marquent aussi le début de la reconnaissance d’une nouvelle manière d’habiter le monde.
---------------------------------------------------------------------------------------------------
L’écologie intérieure : se changer soi-même pour changer le monde
Avant de fonder avec l’économiste Gaël Giraud le Campus de la transition (installé à Forges, en Seine-et-Marne), qui forme les décideurs de demain à un modèle de croissance plus soutenable, Cécile Renouard est allée étudier au Schumacher College. Dans ce centre à la notoriété internationale, fondé par l’Indien Satish Kumar près de la ville « résiliente » de Totnes, en Angleterre, cette religieuse, professeure de philosophie au Centre Sèvres (Paris), s’est frottée tant à des cours d’économie régénérative qu’à la dimension de l’écologie intérieure.
Selon cette approche, la lutte contre le réchauffement climatique ne reposerait pas seulement sur l’installation d’éoliennes mais sur une mutation d’ordre psychologique. Pour amorcer la transition, il s’agirait de s’affranchir de la pensée dualiste qui sépare l’homme de la nature et l’invite à en prendre possession. La finalité : « réconcilier la terre, l’âme et la société », selon Satish Kumar. Bref, l’écologie extérieure serait indissociable de l’écologie intérieure.
Pour une éthique biocentrée
Ce nouveau concept, prisé dans la France des oasis, prend appui sur deux mouvements de pensée nés aux Etats-Unis, qui se sont structurés à partir des années 1960-1970. Il y a d’abord l’« écologie profonde », courant philosophique développé par le Norvégien Arne Naess (1912-2009), qui a lui-même enseigné au Schumacher College. Influencé par Spinoza et Gandhi, cet alpiniste et penseur de l’« écosophie » critique l’« écologie superficielle » des gouvernants, qui ne luttent contre la dévastation planétaire que sous forme de « pansements » (comme le recyclage des déchets ou des mesures contre la pollution), et défend une « écologie profonde » à l’éthique biocentrée prônant l’égalité entre les êtres vivants.
> Lire aussi  « Ecologie intégrale », écofascisme… : une histoire des écologies identitaires
Au point d’ouvrir, assure l’autrice et traductrice Mathilde Ramadier, « une nouvelle voie pour le développement personnel » (Pour une écologie joyeuse, d’Arne Naess, Actes Sud, 2017). Une approche discréditée en France jusque dans les années 1990, notamment par le philosophe et ancien ministre de l’éducation nationale Luc Ferry, qui fit de Naess un anti-humaniste dans Le Nouvel Ordre écologique (Grasset, 1992).
« Le travail qui relie »
Deuxième courant de pensée de l’écologie intérieure : l’écopsychologie. Théorisé dans les années 1960 sous la plume de Robert Greenway mais prononcé pour la première fois en 1992 par l’historien américain Theodore Roszak (1933-2011), le mot renvoie au champ de recherche qui intègre la notion environnementale dans le domaine de la psychologie. Selon cette hypothèse, la santé mentale de l’individu dépendrait aussi de l’état de son habitat naturel.
La prêtresse en la matière est la militante écologiste américaine Joanna Macy, qui développe une pratique méthodologique, « le travail qui relie ». S’appuyant sur l’accueil de notre mal-être à l’égard de l’état de la planète, les enseignements des peuples premiers et des bouddhistes, elle propose de raviver le lien à la terre et de « transformer nos vies afin de guérir notre monde ». Très en vogue en France dans la mouvance des collapsologues, ces pratiques sont aussi critiquées pour leurs penchants new age et ésotériques.
<https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/18/ecovillages-logements-participatifs-une-autre-maniere-d-habiter-la-terre_6049180_3451060.html>
---------------------------------------------------------------------
« La France des oasis », une série en six volets
• Voyage dans la France des utopistes <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/17/voyage-dans-la-france-des-utopistes_6049108_3451060.html> 
• Ecovillages, logements participatifs… Une autre manière d’habiter la Terre <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/18/ecovillages-logements-participatifs-une-autre-maniere-d-habiter-la-terre_6049180_3451060.html>
• De la Bretagne à la Drôme, s’autogouverner pour changer le monde <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/19/de-la-bretagne-a-la-drome-s-autogouverner-pour-changer-le-monde_6049304_3451060.html>
• « On doit changer la société » : rencontre avec des pionniers de la nouvelle économie du partage <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/19/on-doit-changer-la-societe-rencontre-avec-des-pionniers-de-la-nouvelle-economie-du-partage_6049386_3451060.html>
• Dans les écolieux, on réinvente des rituels pour se retrouver <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/21/dans-les-ecolieux-on-reinvente-des-rituels-pour-se-retrouver_6049512_3451060.html>
• « Ne laissons pas le réenchantement du monde aux mystiques » <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/21/ne-laissons-pas-le-reenchantement-du-monde-aux-mystiques_6049511_3451060.html>• Rob Hopkins : « Nous allons connaître les dix années de transformation écologique les plus remarquables de l’histoire » <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/22/nous-allons-connaitre-les-dix-annees-de-transformation-ecologique-les-plus-remarquables-de-l-histoire_6049616_3451060.html>
______________________________________________________________________________________________________________________
3- Enquête « La France des oasis » (3/6). De la Bretagne à la Drôme, s’autogouverner pour changer le monde, Le Monde, 19/08/20, 19h04
Nicolas Truong

« La France des oasis » (3/6). « Sociocratie », « holacratie »… Les collectifs alternatifs, qui cherchent à inventer un autre modèle de société, utilisent des outils empruntés à la science ­politique ou au management pour faciliter la démocratie interne.
« Dès qu’on est plus d’une dizaine, c’est comme une petite cité à gérer », confie une jeune habituée des oasis, qui a séjourné dans de nombreux lieux collectifs alternatifs avant de s’installer au village de Trémargat, dans les Côtes-d’Armor, municipalité où s’exerce le « génie créatif des communes », assure le consultant Mathieu Rivat (Ces maires qui changent tout, Actes Sud, 2017). En tâtonnant avec entêtement, les oasis se sont dotées d’outils utiles pour s’autogouverner. Car derrière l’idéal de l’habitat partagé, il y a la réalité du budget et des tours de vaisselle, la gestion des communs et les tensions du quotidien. Sous la maison passive (à faible consommation énergétique), il y a la politique active. Il faut réaliser en pratique ce à quoi on aspire parfois de manière très théorique. Et trouver les bons processus de prise de décision.
Ce qui frappe, dans la plupart des oasis visitées, qu’elles soient d’inspiration zadiste, communaliste ou spiritualiste, c’est la récurrence de modèles ou de pratiques largement inconnus du grand public, comme la « sociocratie » ou l’« holacratie » (qu’on appelle aussi « holocratie »), termes qui empruntent autant à l’univers de la science politique qu’à celui du management économique.
La décision par consentement
Qu’est-ce que la sociocratie ? Le mot aurait été inventé au XIXe siècle par Auguste Comte (1798-1857), qui souhaitait « délivrer l’Occident d’une démocratie anarchique et d’une aristocratie rétrograde, pour constituer, autant que possible, une vraie sociocratie, qui fasse sagement concourir à la commune régénération toutes les forces humaines » (Cathéchisme positiviste, 1852). Mais c’est Gerard Endenburg, un ingénieur néerlandais en électronique, né en 1933, de culture quaker et scolarisé dans une école alternative, qui lui a donné son acception la plus courante. Celle-ci repose principalement sur la décision par consentement : les orientations stratégiques d’un groupe peuvent être adoptées si elles ne rencontrent aucune objection argumentée d’aucun de ses membres.
> Lire aussi Comment fonctionne la « démocratie locale » à la strasbourgeoise
Faut-il agrandir l’écolieu et acheter de nouvelles parcelles de terrain ? Comment organiser le travail ? Dans la sociocratie, la décision n’est pas prise à l’unanimité (difficile à obtenir) ni à la majorité (qui mécontente forcément les minoritaires), mais au consentement. En résumé, dans la décision par consensus, tout le monde dit oui, dans la gouvernance par consentement, personne ne dit non.
La sociocratie fonctionne aussi par cercles et élections sans candidat.« On est toujours confronté à quinze manières de penser avec lesquelles il faut composer », observe Laurence, initiatrice d’un écolieu cévenol et institutrice de métier. « Au début, nous pensions un peu naïvement que nous n’avions pas besoin de règles. Aujourd’hui, nous reprenons les principes de la sociocratie en les complétant par la dimension émotionnelle », explique Patrick Buret, l’un des fondateurs de l’Aerium de Peyraube, oasis campée à Arrigas (Gard).
« L’anti-hiérarchie »
Il faut dire que le collectif fondé en 2012 a failli exploser lorsque, sur les quatre couples qui avaient lancé l’aventure, deux ont quitté le lieu. Car le turnover des oasis est important. « C’est souvent à cause des relations interpersonnelles que certaines oasis échouent », témoigne l’agroécologiste fondateur du mouvement Colibris, Pierre Rabhi. C’est pourquoi la sociocratie et son dérivé plus organique, l’holacratie – méthode développée par l’entrepreneur américain Brian Robertson afin de briser le fonctionnement pyramidal au profit d’un management horizontal – sont devenus des outils prisés par la galaxie des écolieux. Bien plus que des bouées de sauvetage, ils en sont devenus les indispensables rouages.
Ce qui surprend, c’est l’usage récurrent de méthodes venues du management dans des collectifs souvent réfractaires à la culture d’entreprise. « Il y a un trait commun entre la tendance libertaire – plutôt anarchiste – et la tendance libertarienne – d’inspiration libérale : c’est l’anti-hiérarchie », explique le politiste Yves Sintomer, auteur de Petite histoire de l’expérimentation démocratique (La Découverte, 2011).
> Lire aussi Tordre le cou aux contrevérités, par Yves Sintomer
« Les mots de l’autonomie politique n’existent pas encore, d’où le recours à ce vocabulaire alternatif pour expliciter ces modes de décision », observe le politiste Samuel Hayat, auteur de Démocratie(Anamosa, 96 pages, 9 euros). « Oui, c’est une langue hybride qui vient en partie du management, mais il n’y a jamais d’agencement social pur », prévient le sociologue Laurent Jeanpierre, auteur de In girum. Les leçons politiques des ronds-points (La Découverte, 2019). D’autant qu’en activant les réseaux sociaux et le crowdfunding « certains entrepreneurs de communautés rapprochent les écolieux du modèle de la start-up, l’actionnariat en moins », poursuit ce professeur de science politique à l’université Paris-VIII, qui dirige un séminaire sur les communautés utopiques.
La démocratie du « faire »
Une posture critique consisterait à disqualifier ces pratiques parce qu’elles seraient récupérées par le système capitaliste. C’est oublier que les résidents des oasis ne sont pas des théoriciens qui mettent en œuvre une idéologie, un petit livre vert en main. Ce sont des « makers », qui activent la « démocratie du faire ». Peut-être s’agit-il même du contraire : en faisant feu de tout bois, en éprouvant les méthodes qui marchent et celles qui ne marchent pas, les oasis récupèrent et détournent des outils venus du monde de la communication au profit de leur projet d’émancipation, à l’image de ces objets industriels qui connaissent une seconde vie dans les ressourceries.
On peut toutefois s’interroger sur ce « procéduralisme politique » qui occupe l’espace et prend beaucoup de temps dans ces endroits, tempère Laurent Jeanpierre. Car, ici comme ailleurs, le risque de tomber dans la « réunionite » existe. « C’est magnifique, mais parfois épuisant, la démocratie participative, et j’ai l’impression d’avoir un agenda de ministre ! », témoigne une élue de Trémargat. Pour éviter ces travers, les oasis ajustent leurs pratiques et mettent en place des « maîtres du temps » ou des « facilitateurs » de réunion. D’autres recourent à la « gestuelle d’assemblées », expérimentée par le mouvement des « indignés » (né en Espagne en 2011) ou Nuit debout (la contestation citoyenne, à Paris, au printemps 2016) : bras en croix pour s’opposer, moulinets des mains lorsqu’une prise de parole est jugée trop longue ou applaudissements silencieux pour exprimer son accord.
En lien avec les mairies
La portée politique des oasis n’est pas qu’interne, mais se mesure également aux liens que celles-ci tissent avec les autres collectifs, les mairies et les régions avoisinantes. Pour Yves Sintomer, la question est la suivante : « Vont-ils se contenter de vivre heureux dans leurs niches écologiques et politiques ou bien être un point d’appui pour inventer un autre monde ? » La plupart estiment qu’il est possible de relier les deux dimensions, d’être à la fois un lieu d’expérimentation, de mobilisation et de diffusion : « Nous voulons essaimer », déclarent la plupart des résidents de ces lieux qui s’érigent contre le consumérisme, la déshumanisation des relations sociales et le productivisme.
« Une communauté n’a de sens que si elle est au service du monde, et la transformation personnelle doit servir la transformation sociale », atteste Margalida Reus, responsable de l’Arche de Saint-Antoine, une communauté installée dans l’Isère. D’ailleurs, les mairies, les régions et parfois même l’Europe soutiennent parfois ces initiatives inventives.
Comment nommer la politique des oasis ? « Le communalisme peut s’appliquer à certaines situations locales », comme l’expérience de démocratie participative à Saillans (Drôme), explique Samuel Hayat, qui préfère cependant parler plus globalement de « citoyennisme », à savoir une demande de participation plus forte des citoyens aux prises de décisions politiques. A la suite du sociologue américain Erik Olin Wright (1947-2019), Laurent Jeanpierre utiliserait plutôt l’expression « transformations interstitielles » à propos de ces expérimentations politiques à visée transformatrice, qui s’élaborent dans les interstices de la globalisation.
Certains, comme Frédéric Bosqué à l’écovillage Tera (Lot-et-Garonne), veulent « greffer le meilleur de la social-démocratie » à cette « révolution des communs ». D’autres, comme au quartier libre des Lentillères à Dijon, sont inspirés par le mouvement zapatiste au Mexique ou des sans-terre d’Amérique latine : « Il y a de l’espoir là-bas, les luttes payent. Cela donne envie de tenter de nouvelles formes basistes et communautaires qui dessinent les contours de la société post-capitaliste », confie Benjamin.
> Lire aussi « Des tomates séchées, pas des écoquartiers » : la lutte victorieuse des « jardiniers-squatteurs » de Dijon
Les outils de gestion de groupe comptent pour faire vivre ces collectifs alternatifs. Mais si les écolieux se défont souvent à cause du facteur humain, ils perdurent aussi grâce à lui. Comme le résume Gaëlle Berge, du Moulinage de Chirols, en Ardèche, « ici, on tient par l’amitié ». Communalistes ou citoyennistes, les oasis dessinent peut-être cette « promesse de démocratie encore impensée »que le philosophe Jacques Derrida appelait « politique de l’amitié ».
--------------------------------------------------------------------------
Désamorcer les conflits par la communication non violente
Lorsque le différend s’installe entre deux personnes ou que les oppositions dans le groupe sont patentes, les résidents des écolieux ont une réponse, une méthode, presque une clé : la communication non violente (CNV). A tel point qu’elle est devenue presque un réflexe. « A chaque fois que je sens une embrouille monter, je me mets en mode CNV », explique Gus, trentenaire installé dans une oasis des Cévennes et investi dans une brasserie artisanale. « Au lieu de m’énerver contre celui qui émet une parole que je juge blessante, j’essaye de comprendre d’abord pourquoi je réagis de la sorte », témoigne Pierre, bénévole au centre Amma (Seine-et-Marne). Il faut dire que les oasis expérimentent toutes les facettes du vivre-ensemble, avec ses bonheurs – « je n’ai jamais vécu des vaisselles aussi joyeuses », s’enthousiasme une membre du collectif Moulinage de Chirols –, mais aussi ses heurts.
Car autant le collectif porte et soutient, autant il contraint de vivre sous le regard des autres. D’où le recours à la communication non violente, développée par le psychologue américain Marshall Rosenberg (1934-2015) dans les années 1970 afin d’aider tout un chacun à éviter la spirale de la violence. La CNV, explique la formatrice Isabelle Desplats, dans un MOOC, une formation en ligne de l’université des Colibris, consiste notamment à « être capable d’écouter quelqu’un qui s’exprime de manière agressive sans le prendre personnellement », en comprenant que cette personne exprime, certes de façon véhémente, son besoin d’être prise en considération. La reconnaissance de ce « besoin » est une première étape vers l’apaisement.
Observer (les faits sans jugement), accueillir les sentiments (qu’ils font naître en nous), clarifier les besoins (non reconnus) et formuler une demande réalisable (et non une exigence) : tels sont les piliers de la CNV. Celle-ci permet de sortir du dialogue de sourd « j’ai raison et tu as tort » ou « je suis pour, tu es contre », indique Nathalie Achard, autrice de La communication non violente à l’usage de ceux qui veulent changer le monde (Marabout, 208 p., 17,90 euros). Une façon à la fois simple et élaborée de désamorcer les conflits par l’écoute de soi et des autres. Beaucoup d’oasis l’utilisent ou consultent les fiches synthétiques de l’Université du nous (UdN) de Chambéry, centre de ressources prisé des écolieux.
Certaines oasis se spécialisent même dans cette gestion des relations. Ainsi l’Arche de Saint-Antoine a-t-elle créée, en 2010, la Formation et expérimentation au vivre-ensemble (Feve), dont les enseignements sont très suivis. « Certains bénéficient du logo “haute qualité environnementale”, ici ce serait plutôt celui de “haute qualité relationnelle” », affirme Guillaume Gardette, membre de cette communauté fondée par le poète et philosophe franco-italien Lanzo del Vasto en 1987.
<https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/19/de-la-bretagne-a-la-drome-s-autogouverner-pour-changer-le-monde_6049304_3451060.html>
---------------------------------------------------------------------
« La France des oasis », une série en six volets
• Voyage dans la France des utopistes <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/17/voyage-dans-la-france-des-utopistes_6049108_3451060.html> 
• Ecovillages, logements participatifs… Une autre manière d’habiter la Terre <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/18/ecovillages-logements-participatifs-une-autre-maniere-d-habiter-la-terre_6049180_3451060.html>
• De la Bretagne à la Drôme, s’autogouverner pour changer le monde <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/19/de-la-bretagne-a-la-drome-s-autogouverner-pour-changer-le-monde_6049304_3451060.html>
• « On doit changer la société » : rencontre avec des pionniers de la nouvelle économie du partage <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/19/on-doit-changer-la-societe-rencontre-avec-des-pionniers-de-la-nouvelle-economie-du-partage_6049386_3451060.html>
• Dans les écolieux, on réinvente des rituels pour se retrouver <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/21/dans-les-ecolieux-on-reinvente-des-rituels-pour-se-retrouver_6049512_3451060.html>
• « Ne laissons pas le réenchantement du monde aux mystiques » <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/21/ne-laissons-pas-le-reenchantement-du-monde-aux-mystiques_6049511_3451060.html>• Rob Hopkins : « Nous allons connaître les dix années de transformation écologique les plus remarquables de l’histoire » <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/22/nous-allons-connaitre-les-dix-annees-de-transformation-ecologique-les-plus-remarquables-de-l-histoire_6049616_3451060.html>
______________________________________________________________________________________________________________________
4- Enquête « La France des oasis » (4/6). « On doit changer la société » : rencontre avec des pionniers de la nouvelle économie du partage, Le Monde, maj le 20/08/20 à 15h42
Nicolas Truong

« La France des oasis » (4/6). Transformer la société par la production locale, le revenu de base et l’économie sociale et territoriale, c’est le but de plusieurs initiatives en France. Dans le Lot-et-Garonne, le projet Tera se veut un « écosystème coopératif ».
A Tournon-d’Agenais (Lot-et-Garonne), une bonne quarantaine d’utopistes réalistes font vivre Tera : un projet de développement territorial, qui, depuis 2014, vise à créer un « écosystème coopératif » destiné à relocaliser la production et à la valoriser en monnaie citoyenne locale.
Composé de jeunes employés dans l’humanitaire, d’étudiants en sciences ayant bifurqué et voulant « donner du sens » à leur vie, mais aussi d’anciens chercheurs ou entrepreneurs reconvertis dans l’économie sociale et solidaire, Tera n’est pas une communauté fermée, mais une « entreprise à but communal » qui souhaiterait essaimer au niveau national.
Rencontre avec deux de ses membres, Frédéric Bosqué, l’un des fondateurs, et Marie-Hélène Muller, spécialiste en génétique des populations.
Qu’est-ce qui vous a amené à monter le projet Tera ?
Frédéric Bosqué : On peut réparer les gens, mais ce n’est pas suffisant, on doit aussi changer la société. Après avoir subi de plein fouet le krach financier de 2000 avec ma start-up, j’ai monté une entreprise d’insertion pour handicapés. Parallèlement, pendant vingt ans, j’ai milité pour l’instauration d’un revenu de base inconditionnel, et cocréé le « sol violette » – du nom de la monnaie de la Révolution française, le sol, contre-garantie par les biens de l’Eglise –, la monnaie citoyenne de Toulouse, la première à avoir été pensée en partenariat avec une municipalité.
En 2013, j’ai fait un premier tour de France à vélo – deux autres allaient suivre – pour aller voir de près une quarantaine d’initiatives citoyennes respectueuses des humains et de la nature, qui ne font jamais la « une » des médias. J’ai pris conscience que la révolution des communs s’était déjà produite. C’est un peu comme les glands dans une forêt, ils sont là, partout, mais on ne les voit pas. Je crois que les héros sont à la campagne, mais que leur travail n’est pas reconnu à leur juste valeur par le système marchand.
A l’issue de ce périple, j’ai eu envie de réunir toutes ces initiatives isolées, de leur apporter la culture d’entreprise qui leur fait défaut et d’y greffer le meilleur de la social-démocratie.
Je crois profondément, comme le stipule l’article premier de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, que « les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité commune ». Cette phrase signifie qu’il faudrait valoriser celles et ceux dont les actions, activités, travaux ou métiers sont les plus utiles à la société. Or, ce n’est pas le cas aujourd’hui, alors que ce sont ces principes qui font réellement société.
Marie-Hélène Muller : Chercheuse en génétique des populations à l’Institut national de recherche agronomique [INRA] de Montpellier, je me suis retrouvée dans une impasse. Comprendre par la science le monde et ses problèmes ne suffit pas. Le rythme de la recherche n’était pas adapté à mon besoin de concret et d’action.
J’ai été marquée par une phrase de Noam Chomsky, qui dit en substance que la linguistique est plus intéressante que la politique, mais que si plus personne ne fait de politique, on ne pourra plus étudier la linguistique. Je connaissais les écolieux, les nouvelles formes de gouvernance, la communication non violente, mais je n’y avais pas associé la dimension économique, qui est souvent le point aveugle des oasis.
Après un engagement dans l’association Artisans du monde, consacrée au commerce équitable, j’ai rejoint le mouvement des monnaies locales. J’y ai rencontré Frédéric, que j’ai suivi dès son premier tour de France. Frappée par la richesse des nouvelles formes de vie qui s’inventaient partout, mais aussi par la pauvreté et la désespérance de certains territoires que nous traversions, j’ai eu envie d’inventer et d’expérimenter un autre système économique.
Comment fonctionne votre « écosystème coopératif » ?
F. B. : Il repose d’abord sur la réappropriation de la production, la mise en œuvre de circuits de distribution et d’un revenu de base rémunéré en « abeilles », la monnaie citoyenne locale. Créée à Villeneuve-sur-Lot en 2010, contre-garantie par une production durable locale et gérée par l’association Agir pour le vivant, celle-ci est complémentaire de l’euro : une abeille égale un euro.
Nous ne sommes pas contre la monnaie unique européenne. Mais une fois qu’elle a circulé 2,5 fois, elle sert les transactions financières et non plus la sphère économique réelle. La monnaie locale, qui permet de payer des prestataires locaux respectueux de critères durables, est échangée entre six à douze fois avant de nourrir les échanges du monde de la finance. Cette mécanique qui, selon nos objectifs, doit monter en puissance d’ici à dix ans, valorise ceux qui agissent pour le commun et assure une revitalisation du territoire. C’est un facteur de cohésion sociale.
> Lire aussi Le collaboratif au secours des communes
M.-H. M.  : Aujourd’hui, grâce à des fondations privées comme Zoein et au financement participatif, cinq membres de Tera – un maraîcher, un composteur, un cuisinier et deux personnes travaillant dans les fonctions supports (gestion et secrétariat) – bénéficient ou ont bénéficié d’un revenu d’autonomie de 896 euros par mois. Tous sont payés en abeilles à hauteur de 85 %, grâce à un système assuré par Co-actions, une coopérative d’entrepreneurs solidaires.
Le montage est totalement légal. Avec cette somme, ils peuvent payer en abeilles une centaine de prestataires : principalement pour acheter des produits alimentaires, mais aussi aller au cinéma de Monsempron-Libos, régler un ostéopathe ou un loyer (deux propriétaires ont accepté de jouer le jeu). De même, la commune de Lacapelle-Cabanac paie une partie du salaire de son secrétaire de mairie en abeilles.
L’idée est d’élargir ce système au secteur de l’énergie, aux voitures partagées. Ou encore à l’écoconstruction, qui nécessite beaucoup d’investissements et injecte donc beaucoup de monnaie dans le territoire.
Pour augmenter le volume des échanges et mieux les tracer, une plate-forme numérique a été élaborée, et nous espérons interconnecter les monnaies locales entre elles pour créer de vrais territoires de valeurs et « sortir du bocal ». Il s’agit par exemple de pouvoir payer en abeilles à Bordeaux, grâce à un système de compensation entre les monnaies.
> Lire aussi « Radis », « sol violette », « pêche » : les monnaies locales essaiment en France
Il y a plus de quatre-vingts monnaies locales en France. Certaines, comme l’eusko au pays basque, ont un stock qui dépasse le million d’unités. On pourra alors s’appuyer sur un vrai levier pour faire évoluer le système financier.
Votre modèle repose pour le moment sur des subventions privées. Comment le rendre pérenne ?
F. B. : Il est similaire à celui d’une entreprise qui fait appel à du capital afin de dégager progressivement un excédent brut d’exploitation : c’est une entreprise à but communal. Une fois que les premières activités (maraîchage, boulangerie…) seront rentables, les détenteurs de ces projets abonderont un fonds de dotation avec une partie de leurs recettes. Ils verseront une forme d’impôt volontaire. Ce fonds de dotation financera de nouveaux écolieux et des revenus d’autonomie à des personnes dont l’activité n’est pas forcément monétisée par le marché, comme du service à la personne ou de l’accompagnement des personnes âgées. Le modèle, qui s’équilibrerait avec une cinquantaine de personnes, vise aussi, à terme, à reproduire en petit les services de l’Etat.
Des écolieux nous sollicitent pour essayer de le dupliquer. Mais, pour l’heure, nous sommes à l’état d’expérimentation. Nous ne savons pas encore si notre dispositif peut fonctionner. Tout dépend du niveau de
M-H. F. : Même si cela ne va pas assez vite, qu’il y a parfois du découragement, voire de l’épuisement, j’ai de quoi être optimiste. Grégor, qui assure des formations de permaculture, a décidé de réaffecter spontanément 10 % de ses revenus à l’écosystème. Il aide notamment Julie à acheter du matériel pour son activité de transformation de produits alimentaires. Nous sommes bien un écosystème coopératif.
<https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/19/on-doit-changer-la-societe-rencontre-avec-des-pionniers-de-la-nouvelle-economie-du-partage_6049386_3451060.html>
---------------------------------------------------------------------
« La France des oasis », une série en six volets
• Voyage dans la France des utopistes <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/17/voyage-dans-la-france-des-utopistes_6049108_3451060.html> 
• Ecovillages, logements participatifs… Une autre manière d’habiter la Terre <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/18/ecovillages-logements-participatifs-une-autre-maniere-d-habiter-la-terre_6049180_3451060.html>
• De la Bretagne à la Drôme, s’autogouverner pour changer le monde <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/19/de-la-bretagne-a-la-drome-s-autogouverner-pour-changer-le-monde_6049304_3451060.html>
• « On doit changer la société » : rencontre avec des pionniers de la nouvelle économie du partage <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/19/on-doit-changer-la-societe-rencontre-avec-des-pionniers-de-la-nouvelle-economie-du-partage_6049386_3451060.html>
• Dans les écolieux, on réinvente des rituels pour se retrouver <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/21/dans-les-ecolieux-on-reinvente-des-rituels-pour-se-retrouver_6049512_3451060.html>
• « Ne laissons pas le réenchantement du monde aux mystiques » <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/21/ne-laissons-pas-le-reenchantement-du-monde-aux-mystiques_6049511_3451060.html>• Rob Hopkins : « Nous allons connaître les dix années de transformation écologique les plus remarquables de l’histoire » <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/22/nous-allons-connaitre-les-dix-annees-de-transformation-ecologique-les-plus-remarquables-de-l-histoire_6049616_3451060.html>
______________________________________________________________________________________________________________________
5- Enquête « La France des oasis » (5/6). Dans les écolieux, on réinvente des rituels pour se retrouver, Le Monde, 21/08/20, 07h00
Nicolas Truong 

« La France des oasis » (5/6). Prières laïques, moments de gratitude ou fête du solstice d’été… Dans ces îlots de résistance, on renoue avec des temps de spiritualité qui piochent dans toutes les traditions religieuses. Le but : se reconnecter à soi, aux autres et à la nature.
Ce jour-là, à Grains & Sens, écolieu situé sur le domaine de Lavenant, à Boffres, en Ardèche, où trois familles bilingues sont venues vivre leur « passion pour l’environnement et l’ouverture au monde », il est plus que l’heure de se mettre à table. Kim Notin (42 ans), ancienne biologiste devenue paysanne boulangère, n’est pas encore revenue du marché où elle vend son pain bio aux céréales anciennes. Avant le repas, son mari, Raphaël (46 ans), entame le « cercle des gratitudes ».
C’est Jonah, 6 ans, leur enfant instruit en famille, qui se lance : il remercie Igor, le cuisinier, d’avoir préparé ses raviolis maison, et les animaux de la basse-cour de se laisser attraper. Raphaël, lui, exprime sa gratitude pour l’aide apportée au collectif par de jeunes écologistes belges et luxembourgeois. Les invités hésitent, puis gratifient les êtres chers de leur présence, de leur courage, de leur constance. Une sorte de prière laïque qui permet d’honorer la terre et ses bienfaits, une volonté de faire attention aux produits et à ceux qui les fabriquent, une façon simple et non excluante de mettre de la transcendance dans l’immanence, de donner forme à l’unanime « quête de sens ».
Recueillement et méditation
Les oasis renouvellent les rituels et réinvestissent le spirituel. Des rituels parfois christiques ou animistes, bouddhistes ou chamaniques, des cérémonies souvent bricolées et rarement dogmatiques. Au centre Amma, dans l’Eure-et-Loir, tourné vers la spiritualité indienne, on découvre, au milieu d’un jardin forestier où poussent des rangées touffues de poireaux perpétuels, un sanctuaire des abeilles, maison hexagonale dont les murs en paille intègrent des ruches vitrées. « Un lieu idéal pour le recueillement et la méditation », témoigne Pierre, ingénieur de 34 ans, pour qui cette reconnexion avec la nature est « bouleversante ».
> Lire aussi « Ne laissons pas le réenchantement du monde aux mystiques »
Emblème de la monnaie locale dans la région de Villeneuve-sur-Lot ou objet d’un culte au centre Amma, l’abeille peut être considérée comme un symbole, une mascotte ou un totem des oasis, parce qu’elle est l’insecte pollinisateur le plus menacé par les pesticides néonicotinoïdes, mais aussi l’un des plus féconds en matière de production et d’imaginaire. « Un homme est fait pour planter, construire une maison et s’occuper des abeilles », déclare religieusement Pierre, qui fait également des maraudes à Paris et envisage l’approche des sans-abri comme un « état de présence et de vigilance » proche d’une « pratique spirituelle ».
« S’enraciner dans la gratitude, honorer notre souffrance pour le monde, porter un nouveau regard et aller de l’avant » : les mots de Joanna Macy et de Chris Johnstone, figures reconnues de l’écopsychologie (qui prône la reconstruction du lien entre les humains et la Terre), résonnent dans de nombreuses oasis, quelle que soit leur orientation ou confession. Pour les chrétiens, mais pas seulement, car les écolieux renouent avec de nombreux rites païens.
On pourrait dire que les oasis réinventent ainsi la vie monastique au XXIe siècle, entre méditation et travaux des champs. Au Campus de la transition de Forges (Seine-et-Marne), cofondé notamment par l’économiste Gaël Giraud et la philosophe Cécile Renouard, afin de former des étudiants des grandes écoles à la transition écologique, la journée démarre par le moment de la « météo intérieure » au cours duquel chaque participant montre aux autres un dessin de soleil, d’orage ou de nuage qui représente son état d’âme du jour. Les bénévoles du domaine de Forges partagent également à voix haute un texte de leur choix – un poème de Christian Bobin ou des extraits de l’encyclique du pape François (laudato si, 2015), qui a converti tant de jeunes chrétiens à l’écologie. 
> Lire aussi En Seine-et-Marne, le château pour étudiants en quête de sens
A l’heure du déjeuner, pas de cercle des gratitudes, mais un rituel bien rodé. Les cuisiniers détaillent le menu du jour, expliquent ce qu’ils ont voulu confectionner, donnent parfois la provenance des aliments qui, bien souvent, viennent du potager ou du maraîcher d’à côté. Il se dégage de ces cérémonies un parfum de bénédicité laïcisé. Mais pas seulement : c’est une façon de scander les moments de la journée et de vivre une vie accordée. « Le premier temps permet de se relier à sa vie intérieure et de faire corps en tant que groupe par le biais du partage des émotions. Le second moment nous reconnecte à l’environnement », explique Cécile Renouard, professeure de philosophie au Centre Sèvres, à Paris, et sœur assomptionniste, qui se réjouit de vivre, au domaine de Forges, « la grâce des commencements ».
L’écologie, un « rapport au divin »
Cette inventivité liturgique a des effets pédagogiques, affirme le secrétaire général du Campus de la transition, Xavier de Bénazé, car la pédagogie « tête/corps/cœur », qui mêle intellect, sens et affects, « facilite les apprentissages ». Au centre Amma, le modèle est presque identique, mais orienté vers les mythes et chants védiques (de tradition hindouiste). Chacune à sa manière, ces oasis spirituelles s’entendent avec l’agroécologiste Pierre Rabhi pour dire que « l’écologie, c’est le rapport au divin » et qu’« être proche de la nature, c’est en expérimenter le mystère et la puissance ». Par ces rituels, il s’agit également de retrouver la dimension sacrée de gestes quotidiens que la modernité a largement désenchantée.
Installée depuis 1987 en face du Vercors, au cœur de bâtiments ayant appartenu à l’ordre hospitalier des Antonins, dans le petit village médiéval de Saint-Antoine-l’Abbaye (Isère), la communauté de L’Arche de Saint-Antoine est devenue une référence en matière de formation au vivre-ensemble, mais aussi dans sa manière d’éprouver librement et collectivement un rapport pluriel à la spiritualité. Fondé dans la mouvance de Lanza del Vasto (1901-1981), un Italien disciple chrétien de Gandhi, le lieu accueille chaque année 3 000 personnes pour des stages de ressourcement personnel et de communication non violente. La prière est de mise, considérée comme « la clef du matin et le verrou du soir ». Celle du matin est chrétienne ; celle du soir, souvent chantée, s’ouvre à d’autres spiritualités. Les danses et les chants ponctuent également les journées. Et les fêtes rythment les saisons : « Pour nous, c’est la célébration de l’unité et de la présence du vivant parmi nous », explique Margalida Reus, la responsable de la communauté Saint-Antoine et autrice de Sortir de la seulitude (Le Souffle d’or, 2013).
La communauté honore les femmes au printemps, les hommes à l’automne. Une semaine durant, la moitié genrée de la communauté prépare cette célébration pour l’autre sexe dans le secret. Autant de rituels qui « soudent la communauté aussi sûrement que les fêtes sacrées », assure la journaliste Christine Kristof-Lardet dans Sur la terre comme au ciel, enquête sur « les lieux spirituels engagés en écologie »(Labor et Fides, 2019). Bien sûr, Noël n’est pas oublié, à ceci près qu’on y offre des cadeaux faits maison afin d’échapper aux excès de la société de consommation. Mais il n’y a pas que les communautés d’inspirationhindouiste ou chrétienne qui célèbrent la nature par le truchement des rituels ou de la permaculture. Il y a aussi les écolieux animés par des musulmans.
La nature comme « un Coran ouvert »
« Beaucoup de versets du Coran poussent vers une approche harmonieuse avec les animaux, les plantes et le ciel », soutient Jean-Philippe Cieslak. Autrefois de confession catholique et converti à l’islam à l’âge de 19 ans, cet ancien professeur anime l’îlot des Combes, oasis des Colibris (le mouvement lancé par Pierre Rabhi) situé sur les contreforts de la ville industrielle du Creusot (Saône-et-Loire), lieu d’initiation à l’agroécologie. Originaire du Nord bétonné des cités de Roubaix, le jeune bénévole Enzo, qui s’occupe des chevaux et veille avec douceur sur les potagers en terrasse, a trouvé dans cet îlot des Combes son « petit paradis » où il peut vivre en harmonie « avec la nature et le prophète ». Ancien moniteur d’activités aquatiques, de culture catholique lui aussi converti à l’islam, Joachim considère « la nature comme un Coran ouvert ».
Mais cette oasis où le savoir permaculturel est de haute volée n’est pas un lieu confessionnel, en dépit de la foi religieuse assumée de l’équipe dirigeante. Dans les stages, athées ou croyants, hommes et femmes de toutes obédiences s’y retrouvent pour suivre des formations en « forêt nourricière ». Le peintre Vassily Kandinsky disait qu’il y avait « du spirituel dans l’art ». Les oasis spiritualistes démontrent, par des rituels savamment bricolés comme des cabanes, qu’il y a peut-être également du spirituel dans l’arbre.
<https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/21/dans-les-ecolieux-on-reinvente-des-rituels-pour-se-retrouver_6049512_3451060.html>
Sur le même sujet :
> Entretien. « Ne laissons pas le réenchantement du monde aux mystiques », Le Monde, 21/08/20, 07h00
Propos recueillis par Nicolas Truong 
L’énergie que l’on est prêt à déployer pour défendre la faune et la flore est décuplée lorsque, à travers une sorte de cérémonie, on crée des liens avec elles, explique le dessinateur et chercheur en sciences cognitives Alessandro Pignocchi. 
Entretien. Alessandro Pignocchi, chercheur en sciences cognitives devenu bédéiste zadiste (puntish.blogspot.com), est l’auteur de La Recomposition des mondes (Seuil, 2019) et de trois tomes de la série Petit traité d’écologie sauvage (éditions Steinkis). A la ZAD, la « zone à défendre » de Notre-Dame-des-Landes, où les rituels ne sont pas absents, notamment lors des fêtes du solstice d’été, il anime une commission créée sur le sujet.
Pour quelles raisons avez-vous souhaité inventer des rituels sur la ZAD de Notre-Dame-Des-Landes ?
Nos motivations sont multiples, mais l’une d’elles considère les rituels comme un outil essentiel pour accomplir la transformation cosmologique que tant de gens appellent aujourd’hui de leurs vœux. Celle-ci consiste, en simplifiant beaucoup, à se déplacer d’un monde où les plantes, les animaux et les milieux de vie sont considérés comme des objets que l’on protège ou exploite, vers un monde où ceux-ci sont des sujets avec lesquels on entretient des relations qui relèvent du registre du social.
> Lire aussi  Dans les écolieux, on réinvente des rituels pour se retrouver
Passer du temps à inventer collectivement un rituel au cours duquel, par exemple, on personnifie certains arbres de la forêt de Rohanne (Loire-Atlantique) – la forêt de la ZAD – renforce son statut de sujet. Loin d’une simple ressource de bois, elle devient une amie, un membre à part entière du collectif, et l’énergie que l’on sera prêt à déployer pour la défendre s’en trouve décuplée.
Ces cérémonies relèvent-elles d’une forme d’animisme ?
A partir du moment où l’on considère, comme c’est le cas sur la ZAD, qu’une forêt, une mare et un groupe de tritons ont des intérêts qui leur sont propres et qu’on en tient compte, on est davantage dans l’animisme que dans le naturalisme occidental. Mais aucun d’entre nous n’est animiste au sens où un Jivaro peut l’être. Les Jivaros considèrent que les plantes et les animaux ont une vie sociale semblable à celle des humains, avec leurs rituels, leurs shamans, et qu’ils viennent en parler avec les humains lors des rêves et des transes hallucinatoires. Lorsqu’on intègre des éléments de ce type dans nos rituels, c’est bien sûr avec humour et second degré.
La mise à distance de la cérémonie par l’humour n’empêche-t-elle pas de la vivre pleinement ?
Absolument pas, c’est ça qui est étonnant. Selon les anthropologues, beaucoup de rituels sont d’ailleurs accomplis avec une forme de second degré. C’est flagrant chez les Jivaros. Lorsque je suis chez eux et que je leur demande s’ils croient à ce qu’ils sont en train de faire, par exemple lors d’un rituel shamanique, ça les fait rire. Lors d’une pratique rituelle, même sur des sujets graves, ils peuvent paraître très sérieux à un instant donné, et en rire aux éclats l’instant d’après. Il ne s’agit pas de mettre des garde-fous par le biais de l’humour, mais plutôt de ne pas laisser le terrain du réenchantement du monde aux mystiques. Il n’est pas nécessaire d’adhérer à une forme ou une autre d’obscurantisme pour tendre vers des relations aux plantes, aux animaux et aux milieux de vie qui se colorent de toutes les nuances de la vie sociale. Les rituels sont un outil de lutte, parmi de nombreux autres, pour s’attaquer à la suprématie de la sphère économique et au rapport utilitaire au monde qu’elle impose.
> Lire aussi  La ZAD de Notre-Dame-des-Landes en voie d’apaisement
<https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/21/ne-laissons-pas-le-reenchantement-du-monde-aux-mystiques_6049511_3451060.html>
---------------------------------------------------------------------
« La France des oasis », une série en six volets
• Voyage dans la France des utopistes <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/17/voyage-dans-la-france-des-utopistes_6049108_3451060.html> 
• Ecovillages, logements participatifs… Une autre manière d’habiter la Terre <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/18/ecovillages-logements-participatifs-une-autre-maniere-d-habiter-la-terre_6049180_3451060.html>
• De la Bretagne à la Drôme, s’autogouverner pour changer le monde <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/19/de-la-bretagne-a-la-drome-s-autogouverner-pour-changer-le-monde_6049304_3451060.html>
• « On doit changer la société » : rencontre avec des pionniers de la nouvelle économie du partage <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/19/on-doit-changer-la-societe-rencontre-avec-des-pionniers-de-la-nouvelle-economie-du-partage_6049386_3451060.html>
• Dans les écolieux, on réinvente des rituels pour se retrouver <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/21/dans-les-ecolieux-on-reinvente-des-rituels-pour-se-retrouver_6049512_3451060.html>
• « Ne laissons pas le réenchantement du monde aux mystiques » <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/21/ne-laissons-pas-le-reenchantement-du-monde-aux-mystiques_6049511_3451060.html>• Rob Hopkins : « Nous allons connaître les dix années de transformation écologique les plus remarquables de l’histoire » <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/22/nous-allons-connaitre-les-dix-annees-de-transformation-ecologique-les-plus-remarquables-de-l-histoire_6049616_3451060.html>
______________________________________________________________________________________________________________________
6- Entretien « La France des oasis » (6/6). « Nous allons connaître les dix années de transformation écologique les plus remarquables de l’histoire », Le Monde, 22/08/20, 07h00
Nicolas Truong 

« La France des oasis » (6/6). Pour l’écologiste britannique Rob Hopkins, initiateur du mouvement Villes en transition, la France peut être à l’avant-garde d’une « révolution de l’imagination » qui fabriquerait un monde plus « résilient », notamment porté par les jeunes générations.
Ancien professeur de permaculture, Rob Hopkins est, depuis 2005, l’initiateur du mouvement international Villes en transition et le cofondateur de Transition Town Totnes, à Totnes, en Angleterre, première ville en transition officielle où les potagers d’agriculture urbaine voisinent avec des coopératives de produits bio, mais où la monnaie locale – le Totnes Pound – s’est arrêtée en 2019. Alors qu’il publie Et si… on libérait notre imagination pour créer le futur que nous voulons ? (Actes Sud, 336 p., 23 euros) et qu’il est devenu l’un des militants écologiques anglo-saxons les plus sollicités à l’étranger, Rob Hopkins analyse l’essor du phénomène des écolieux et explique que « les dix années à venir doivent être pour la France des années de profond changement ».
Des écohameaux aux villes « en transition » : partout, des initiatives s’inventent et de nouveaux lieux se créent. De quelle façon ce mouvement s’est-il développé en France ?
Il ne faut pas sous-estimer, me semble-t-il, l’impact de Demain, le film de Cyril Dion et Mélanie Laurent (2015), qui a largement contribué à diffuser ces idées. Je rencontre beaucoup de gens dont les projets ont été clairement suscités par le film et les débats qui, très souvent, succèdent à ses projections. Son impact a été considérable et je dois dire que le Britannique que je suis en est quelque peu jaloux : nous n’avons jamais eu un film de ce genre chez nous ! C’est lui qui a fait connaître au très grand nombre l’idée de transition, et avec une efficacité ébouriffante.
> Lire aussi « Faire pousser et faire à manger nous reconnecte à notre humanité »
Le terme même de transition, je le relève, est d’ailleurs bien plus utilisé en France qu’au Royaume-Uni. En Grande-Bretagne, il renvoie le plus souvent au mouvement de transition lui-même, alors qu’en France il est utilisé de façon plus large, en référence à « toutes ces choses dont on parle dans Demain ». En France, les maires ont plus de pouvoir qu’au Royaume-Uni. Ils peuvent donc lancer des expériences très concrètes. Je me rends dans des villes dont les maires ne cachent pas leur excitation à l’idée de mettre en œuvre la transition et, ce faisant, de montrer l’exemple à l’échelle nationale.
L’expérience de la ville de Totnes, dans le Devon, dont vous êtes l’un des initiateurs, est devenue une référence de la transition écologique. Quels en sont les succès comme les échecs ?
Il ne faut pas mettre trop de pression sur Totnes. C’est un endroit merveilleux, mais ce n’est pas Shangri-La [lieu imaginaire et utopique situé au Tibet et cadre du roman Les Horizons perdus, de James Hilton, en 1933] ! Le mouvement de transition y a réalisé un travail proprement incroyable ces onze dernières années ; de nombreux projets importants y ont été lancés, qui ont inspiré beaucoup de gens, dans le monde entier. Mais il est impossible de déterminer quel sera l’impact du Covid-19…
Comment ces groupes locaux parviendront-ils de nouveau à organiser de grands rassemblements ? Quelles sont les dynamiques désormais à l’œuvre au quotidien ? Et l’impact de telles initiatives ne serait-il pas plus notable si les pouvoirs publics soutenaient cet activisme local comme ils soutiennent les grands groupes industriels ? Tous les groupes, quels qu’ils soient, traversent des phases de dynamisme et de fatigue, et je crois qu’à l’heure actuelle les groupes concernés à Totnes sont un peu fatigués. Ce qui n’est guère surprenant au regard de tout ce qui y a été réalisé au fil des années. Peut-être le temps est-il venu pour Totnes de souffler un peu et de passer le relais.
Comprenez-vous que, face à la dévastation planétaire, certains militants souhaitent défendre une « écologie sans transition », sans compromis ni compromission ?
Je le comprends parfaitement et je suis solidaire de nombre de ces mouvements. Nous devons absolument prononcer un grand et beau « non », un grand « non » intrépide faisant obstacle à un nouveau mode de développement totalement lié aux émissions carbone, qui détruit la biodiversité, discrimine des populations déjà défavorisées et sape les fondements de la démocratie. Nous avons absolument besoin de dire non à cela, et j’ai un profond respect pour tous ceux qui le font. Mon épouse est très impliquée dans le mouvement Extinction Rebellion et a déjà été arrêtée quatre fois pour avoir manifesté pacifiquement.
Mais nous avons absolument besoin, dans le même temps, d’un grand et beau « oui », d’un grand « oui » intrépide. Nous avons besoin de construire, sans en attendre la permission, une nouvelle économie. Je n’ai pas le sentiment qu’il y ait conflit entre ces deux attitudes.
> Lire aussi Extinction Rebellion, portrait du mouvement écologiste qui bloque des places et des ponts à travers le monde
Pour la militante et écrivaine américaine Joanna Macy, nous devons nous comporter à l’endroit du vieux paradigme comme des professionnels du soin travaillant dans un hospice, et à l’égard du nouveau comme des sages-femmes. J’aime assez cette idée. Et beaucoup de gens procèdent ainsi. J’en connais beaucoup qui militent aussi bien dans les rangs d’Extinction Rebellion qu’au sein du mouvement de transition. Les deux choses sont parfaitement complémentaires, me semble-t-il. Etre en permanence dans la confrontation ne va pas sans risques élevés de surmenage. Consacrer du temps à l’élaboration de nouveaux systèmes, de nouveaux projets agroalimentaires et de nouveaux réseaux, de nouvelles économies, etc., peut donc être de ce point de vue très régénérant !
Pourquoi les communautés et les villes « résilientes » seraient-elles bénéfiques pour la santé physique et mentale des individus ?
Les professionnels du secteur médical sont nombreux à le deviner, et dans des proportions fascinantes. Nous assistons à une épidémie de solitude, d’angoisse et de dépression. Nous vivons à une époque où la santé mentale est menacée à grande échelle.
Cela a été clairement démontré par des recherches : les villes qui disposent de plus d’espaces verts, de plus d’arbres, où l’air est plus sain, où les rues sont agencées de manière à éveiller la curiosité des passants créent les conditions d’une meilleure santé physique et mentale.
Pouvoir vivre dans des villes où il ne serait pas nécessaire d’avoir un véhicule, où les rues seraient aux piétons et non aux voitures, serait immensément bénéfique à la santé mentale de la population. Nous savons que les gens qui sont hospitalisés se remettent plus rapidement lorsque leur chambre donne sur des espaces verts ou sur des arbres. Et que tout ce qui suscite au quotidien l’admiration, l’émerveillement, comme peut le faire la nature, est bon pour la santé mentale. Nous savons aussi que moins une société est inégalitaire, meilleurs sont les indicateurs en matière de santé physique et mentale.
> Lire aussi Ecologie : une addition d’actions ne fait pas une ville en transition
L’ancien maire de Bogota, en Colombie, a dit un jour que le nombre des enfants jouant dans les rues d’une ville devrait être considéré comme l’un des indicateurs-clés du bien-être qui y règne, ou pas. De nombreux aspects de la vie moderne rendent tout simplement fou. Une ville à faibles émissions carbone est une ville à échelle plus humaine, où l’on nourrit le sentiment d’une existence vécue en commun, où les citoyens entretiennent entre eux des relations plus étroites et humaines. Affirmer qu’une telle ville serait forcément synonyme de régression, de retour en arrière, c’est soit (se) mentir, soit faire preuve d’une imagination indigente. Une telle ville pourrait être absolument fantastique. Et, de fait, je me rends dans suffisamment d’endroits qui, à maints égards, s’en rapprochent déjà nettement, pour savoir qu’il serait fantastique d’y vivre.
Est-il important de réinvestir les rituels ?
Les rituels partagés sont essentiels, et il est vital d’en créer de nouveaux, de maintenir vivaces les anciens, ou de les réinterpréter afin de les actualiser. En Angleterre, nous avons une fête traditionnelle – le Wassail –, lors de laquelle les gens se regroupent autour des pommiers et les honorent en chantant, dans l’espoir de s’assurer de bonnes récoltes l’année suivante. Dans le quartier de Willesden, à Londres, un groupe a réinventé cette tradition : une fois l’an, ses membres rendent visite aux commerçants indépendants du quartier et s’adressent à eux en chantant, en leur souhaitant le meilleur pour l’année à venir. Voilà une belle réinterprétation moderne d’une ancienne tradition.
Les élections municipales françaises ont marqué le basculement de grandes villes du côté de l’écologie. La transition est-elle en marche ?
Je tiens d’abord à préciser que je ne souscris à aucun parti politique, et que le mouvement de transition n’est pas non plus affilié à un parti. Cette configuration crée un espace pour des personnes de diverses sensibilités politiques désireuses de jouer un rôle en rendant leur lieu de vie plus résilient et plaisant. Mais oui, en effet, mon sentiment est que ces résultats électoraux témoignent d’une évolution en cours tout à fait excitante. Ils laissent entendre que les idées de la transition, que le travail de longue haleine des mouvements agroécologiques, des mouvements en faveur de la justice sociale et de l’énergie renouvelable gagnent véritablement en attrait.
> Lire aussi Municipales 2020 : avec EELV, une vague verte historique déferle sur les grandes villes françaises
Le temps est désormais venu des grandes idées, des grandes réflexions et des grandes initiatives. Nous avons besoin d’hommes et de femmes politiques maîtrisant aussi l’art de raconter, en mesure de faire comprendre aux gens à quel point leur cadre de vie serait merveilleux s’ils se confrontaient aux défis de la crise écologique.
Nous avons besoin d’hommes et de femmes politiques « ayant un rêve », capables de faire naître dans les cœurs et les âmes, à travers leurs mots et leurs actes, un désir profond d’un avenir plus viable.
> Lire aussi L’écologie, ce nouvel horizon politique
Les dix années à venir doivent être, pour la France, des années de profond changement – des années de décarbonisation, et à un rythme encore jamais vu. Ces années devront aussi être celles de très nets progrès en matière d’égalité, de réinvention du système éducatif, de transformation du système agroalimentaire, d’un transfert du pouvoir économique aux collectivités locales et économies régionales. Les résultats des récentes élections municipales rendent toutes ces évolutions plus probables encore. Si nous parvenons au fil des dix années à venir à réaliser tout ce qu’il nous faut mettre en œuvre, nous nous retournerons sur cette période avec le sentiment d’avoir vécu une véritable révolution de l’imagination. Les générations futures célébreront alors tout ce qui aura été mené à bien.
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Transition écologique, écovillages, autonomie solidaire… Où trouver les clefs pour en savoir plus
• Le bimestriel Kaizen, magazine « explorateur de solutions écologiques et sociales », fondé par Cyril Dion en 2012, est une référence en matière d’écolieux. Dans son hors série « Oasis, un nouveau mode de vie », coédité avec Colibris, il présente 100 oasis, réunies en partie chaque année au sein d’un festival organisé par la coopérative Oasis (cooperative-oasis.org), qui aura lieu du 28 septembre au 4 octobre au château de Jambville (Yvelines, et dont Grains & Sens, le Moulinage de Chirols, Tera, L’Arche de saint-Antoine et l’écohameau du Plessis sont membres. A noter également les formations en ligne sur le site de l’Université des colibris où l’on trouve des MOOC sur la gouvernance partagée ou sur la permaculture. colibris-universite.org/formations
• Actuellement dirigée par la philosophe Cécile Renouard et installé dans le domaine des Forges (Seine-et-Marne), le Campus de la transition est un lieu d’enseignement, de recherche et d’expérimentation créé en 2018 afin de promouvoir la transition écologique qui dispense de nombreuses formations. campus-transition.org/
• Créée en 2010, à Chambéry, l’Université du nous qui explore les nouvelles façons de « faire ensemble », un outil prisé par la galaxie des oasis pour l’holacratie, la sociocratie ou la gestion des conflits. universite-du-nous.org
• Les ressources du Global Ecovillage Network, association et site anglophone destinés à soutenir et encourager les initiatives durables à travers le monde sont des outils utiles. ecovillage.org A noter, un site sur les écovillages tenu par un Français qui en a répertorié 100 « vivant le plus possible en autosuffisance, de façon durable, écologique et solidaire », dans plus de 30 pays. eco-villages.eu
• Vivre autrement. Écovillages, communautés et cohabitats de Diana Leafe Christian, rédactrice en chef du magazine Communities et membre de l’écovillage Earthhaven en Caroline du Nord (Ecosociété, 2015), est une référence importante du mouvement des communautés intentionnelles. Tout comme Faire ensemble : outils participatifs pour les collectifs, de Robina Mc Curdy (Passerelle éco, 2013), Les clés de l’habitat participatif, de Audrey Gicquel (Editions Yves Michel, 248 p., 19 euros), ou Vingt ans d’autonomie solidaire, de Patrick Barronnet (La maison autonome, 256 p., 20 euros).
• Demain, le film de Cyril Dion et de Mélanie Laurent (2015), suivi de Après-demain (2018) tourné avec Laure Noualhat, tous deux déclinés sous forme d’ouvrages sur ce « nouveau monde en marche », sont une
• Ceux qui sont davantage attirés par les nouvelles formes de radicalités pourront lire et voir Les sentiers de l’utopie, d’Isabelle Frémeaux et John Jordan (La Découverte, 2012), enquête sur ceux qui ont décidé de vivre autrement ; Constellations. Trajectoires révolutionnaires du jeune 21e siècle, un portrait détaillé d’une génération politique par le collectif Mauvaise Troupe (Editions de l’Eclat, 2014), qui a également publié Contrées (L’Eclat, 2016) ou bien Saisons, des nouvelles de la ZAD (2017). Sans oublier Habiter en lutte. ZAD de Notre-Dame-Des-Landes par le Collectif Comm’un (Le Passager clandestin, 2019).
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
La transition est-elle en cours ? Vivons-nous un basculement majeur ? Je le crois. Bien sûr, ce n’est toujours qu’après coup qu’on réalise qu’il y a eu un point de bascule. Et il est certain que notre époque peut nous faire emprunter des chemins très différents, dont certains très funestes. Mais je constate – et ces résultats électoraux en témoignent – beaucoup d’engagements passionnés, particulièrement chez les jeunes, qui se concrétisent dans d’innombrables projets et initiatives de terrain. Ma conviction est que nous sommes sur le point de connaître les dix années de transformation les plus remarquables de l’histoire. Et j’ai hâte.
Traduit de l’anglais par Frédéric Joly
<https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/22/nous-allons-connaitre-les-dix-annees-de-transformation-ecologique-les-plus-remarquables-de-l-histoire_6049616_3451060.html>
---------------------------------------------------------------------
« La France des oasis », une série en six volets
• Voyage dans la France des utopistes <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/17/voyage-dans-la-france-des-utopistes_6049108_3451060.html> 
• Ecovillages, logements participatifs… Une autre manière d’habiter la Terre <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/18/ecovillages-logements-participatifs-une-autre-maniere-d-habiter-la-terre_6049180_3451060.html>
• De la Bretagne à la Drôme, s’autogouverner pour changer le monde <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/19/de-la-bretagne-a-la-drome-s-autogouverner-pour-changer-le-monde_6049304_3451060.html>
• « On doit changer la société » : rencontre avec des pionniers de la nouvelle économie du partage <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/19/on-doit-changer-la-societe-rencontre-avec-des-pionniers-de-la-nouvelle-economie-du-partage_6049386_3451060.html>
• Dans les écolieux, on réinvente des rituels pour se retrouver <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/21/dans-les-ecolieux-on-reinvente-des-rituels-pour-se-retrouver_6049512_3451060.html>
• « Ne laissons pas le réenchantement du monde aux mystiques » <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/21/ne-laissons-pas-le-reenchantement-du-monde-aux-mystiques_6049511_3451060.html>• Rob Hopkins : « Nous allons connaître les dix années de transformation écologique les plus remarquables de l’histoire » <https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/22/nous-allons-connaitre-les-dix-annees-de-transformation-ecologique-les-plus-remarquables-de-l-histoire_6049616_3451060.html>
______________________________________________________________________________________________________________________
À PROPOS DE LA PRÉSENTE REVUE DE PRESSE...
Cette revue de presse s’inscrit dans la mission éducative de notre Fondation, au statut apolitique et non confessionnelle, et vise à répondre aux souhaits d’information et de sensibilisation des abonnés.
Elle n’a pas de caractère exhaustif. Il s’agit d’une sélection pluraliste d’articles ou de dépêches, parfois antagonistes, ne faisant pas systématiquement la Une des journaux et regroupés en 6 thèmes, adressée par mail du lundi au vendredi, à raison d’un thème différent chaque jour.
Diffuser ces articles ne signifie pas automatiquement les approuver mais vise à vous surprendre, vous enrichir, vous donner envie d’en savoir plus, vous aider à relayer l’info, à passer à l’action, et même, à vous indigner ou à vous faire sourire ! Nous espérons qu’au moins un de ces articles répondra chaque jour à l’un de ces objectifs.
Si l’archivage récemment mis en place ne cous convient pas, pensez à conserver les articles qui vous concernent ou vous intéressent particulièrement.
Sur le fond et en complément de notre site Internet <http://www.fondation-nature-homme.org/>, Facebook <https://www.facebook.com/FondationNH/>, Twitter <https://twitter.com/fondationNH> & Instagram <https://www.instagram.com/fondationNH/>, il s’agit là d’une modeste contribution à une meilleure compréhension du monde par l’éducation à la complexité.
Quant à la forme, elle se veut sans prétention et n'y associe aucune pièce jointe pour éviter de saturer votre boîte mail.
Pour agrandir la taille des caractères
A l’aide du clavier : Maintenez la touche CTRL de votre clavier enfoncée et appuyez sur la touche + autant de fois que vous le souhaitez jusqu’à ce que vous soyez en mesure de lire correctement.
A l’aide de la souris : Maintenez la touche CTRL de votre clavier enfoncée et tournez la molette de votre souris vers le bas pour agrandir. Cela fonctionne avec la plupart des navigateurs.
Merci pour votre indulgence.
NB : – Si vous êtes équipé(e) d’un antispam, n’oubliez pas de le formater pour vous permettre de recevoir la présente revue de presse.
- En pied de page de chaque message vous trouverez une adresse url qui vous permettra :
• De vous abonner, de changer de mail ou de vous désabonner à votre gré ;
• D’accéder à un archivage.
- Pour entrer en liaison avec le gestionnaire de cette liste, adresser votre mail à : <f.demonclin(at)fnh.org <http://fnh.org/>>
- Economisez de l'énergie, du papier et de l'encre, n'imprimez ce message que si nécessaire.
_______________________________________________________________________________________________________________________
À PROPOS DE LA FONDATION POUR LA NATURE ET L'HOMME (FNH)...
NOS APPELS 
– Le temps est venu <https://letempsestvenu.org/> de poser les premières pierres d’un nouveau monde
– Let’s Bio ! Ensemble pour des cantines bios et locales <https://www.letsbio.org/> pour bien nourrir nos enfants.
– Pétition. TAFTA, CETA : des traités climaticides qui menacent nos démocraties. <http://fondation-nicolas-hulot.org/action/tafta-ceta-des-traites-climaticides-qui-menacent-nos-democraties/?_ga=1.254849352.1537587716.1214298697>
NOS CAMPAGNES 
– 30 gestes et astuces pour réduire sa conso d’énergie <https://www.lesgesteseclaires.com/> pour participer à l'émergence d'un modèle énergétique plus propre et durable
– Mon Restau’Responsable® <https://www.youtube.com/watch?list=PLh--7obE3XQ5hw0hyacAsOc7PLMneP7-N&v=Eo7AZvPE_MA> pour guider les professionnels de la restauration collective et valoriser leurs bonnes pratiques.
– J’agis pour la nature <http://www.jagispourlanature.org/> pour participer à des activités utiles et ludiques en pleine nature, près de chez vous.
NOS VIDÉOS PÉDAGOGIQUES 
– Sur notre chaîne You Tube <https://www.youtube.com/playlist?list=PLh--7obE3XQ4Ku7J6VzsvlsKayQqvJTq9>, retrouvez toutes nos vidéos.  
NOS PUBLICATIONS (les plus récentes) 
– Baromètre des mobilités du quotidien - Coût, manque d'alternatives : les Français prisonniers de la voiture <http://www.fondation-nature-homme.org/magazine/cout-manque-dalternativesles-francais-prisonniers-de-leur-mode-de-transport>, janvier 2020
– Oui, les alternatives techniques aux néonicotinoïdes existent <http://www.fondation-nicolas-hulot.org/magazine/oui-les-alternatives-techniques-aux-neonicotinoides-existent/?page=0&domaines1%5B%5D=32&domaines2%5B%5D=32&domaines3%5B%5D=32>, mai 2016
– Mettre la politique monétaire au service de l’avenir <http://www.fondation-nicolas-hulot.org/magazine/mettre-la-politique-monetaire-au-service-de-lavenir/?page=0&magazine_categorie%5B%5D=26>, mai 2016
– Rapport mobiliser les financements pour le climat <http://www.fondation-nicolas-hulot.org/magazine/rapport-mobiliser-les-financements-pour-le-climat/?page=0&magazine_categorie%5B%5D=26>, février 2016
– Alimentation et climat : enjeux et solutions à différentes échelles <http://www.fondation-nicolas-hulot.org/magazine/alimentation-et-climat-enjeux-et-solutions-differentes-echelles/?page=0&domaines1%5B%5D=32&domaines2%5B%5D=32&domaines3%5B%5D=32>, décembre 2015
– Solaire photovoltaïque : 25% de l'électricité mondiale bas carbone d'ici 2050 ! <http://www.fondation-nicolas-hulot.org/magazine/solaire-photovoltaique-25-de-lelectricite-mondiale-bas-carbone-dici-2050/?page=0&magazine_categorie%5B%5D=26>, novembre 2015
– Les révolutions invisibles, un livre pour comprendre le monde qui vient <http://www.fondation-nicolas-hulot.org/magazine/revolution-invisible-un-livre-pour-comprendre-le-monde-qui-vient>, août 2015
– Une revue consacrée aux liens entre environnement et inégalités sociales <http://www.fondation-nicolas-hulot.org/magazine/une-revue-consacree-aux-liens-entre-environnement-et-inegalites-sociales/?page=0&magazine_categorie%5B%5D=26>, juin 2015
– Démocratie participative : guide des outils pour agir <http://think-tank.fnh.org/sites/default/files/documents/publications/publication_etat_deslieaux_democratie_participative_0.pdf>, Etat des lieux & Analyses n°3, nouvelle édition, mars 2015
– Mobilité au quotidien - Comment lutter contre la précarité ? <http://think-tank.fnh.org/sites/default/files/documents/publications/etude-mobilite-precarite.pdf>, Etat des lieux & Analyses, septembre 2014
– Etude. Les solutions de mobilité soutenable en milieu rural et périurbain <http://think-tank.fnh.org/sites/default/files/documents/publications/etude-solution-mobilite-soutenable.pdf>, Fondation Nicolas Hulot & RAC France, juillet 2014
______________________________________________________________________________________________________________________


-------------- section suivante --------------
Une pièce jointe HTML a été nettoyée...
URL: <http://mailing.fondation-nature-homme.org/pipermail/revue-presse/attachments/20200831/102a798c/attachment.html>


Plus d'informations sur la liste de diffusion revue-presse