[revue-presse-FNH] Petite revue de presse centrée sur agriculture (dont OGM), alimentation, forêt, pêche, apiculture et jardinage (mercredi 15 décembre)

Florence de Monclin f.demonclin at fnh.org
Mer 15 Déc 08:34:23 CET 2021


Bonjour à tous,

Un petit tour d'horizon avec deux possibilités d'accès aux dépêches et articles suivants : 
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1- Pollution de l’eau : un plan de lutte contre les nitrates sans ambition <https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/12/05/pollution-de-l-eau-un-nouveau-plan-sans-ambition-de-lutte-contre-les-nitrates_6104767_3244.html>, Le Monde, 05/12/21, 16h49 
2- La fertilité des abeilles atteinte par les pesticides néonicotinoïdes <https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/12/06/la-fertilite-des-abeilles-atteinte-par-les-pesticides-neonicotinoides_6104899_3244.html>, Le Monde, 06/12/21, 11h56 
3- Des filets de pêche intelligents pour réduire les captures inutiles <https://www.france24.com/fr/vid%C3%A9o/20211202-france-des-filets-de-p%C3%AAche-intelligents-pour-r%C3%A9duire-les-captures-inutiles>, AFP, 06/12/21, 15:00
4- Reportage. « On veut continuer à vivre avec la forêt » : dans le Nord, un village contre l’ONF <https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/12/07/on-veut-continuer-a-vivre-avec-la-foret-dans-le-nord-un-village-contre-l-onf_6104956_3224.html>, Le Monde, 07/12/21, 04h56
5- Avec l'urgence climatique, le défi de planter des arbres en Angleterre <https://information.tv5monde.com/info/avec-l-urgence-climatique-le-defi-de-planter-des-arbres-en-angleterre-435795>, AFP, 09/12/21, 10:00
6- En Colombie, l'Amazonie victime insoupçonnée des accords de paix <https://information.tv5monde.com/info/en-colombie-l-amazonie-victime-insoupconnee-des-accords-de-paix-435826>, AFP, 09/12/21, 13:00
7- Grippe aviaire : un total de cinq élevages touchés en France, tous dans le Nord <https://information.tv5monde.com/info/grippe-aviaire-un-total-de-cinq-elevages-touches-en-france-tous-dans-le-nord-435907>, AFP, 09/12/21, 22:00
8- En dix ans, 100 000 exploitations agricoles ont disparu en France, d'après le recensement agricole décennal <https://www.francetvinfo.fr/economie/emploi/metiers/agriculture/en-dix-ans-100-000-exploitations-agricoles-ont-disparu-en-france-d-apres-le-recensement-agricole-decennal_4875477.html>, France info, 09/12/21, 23:21
9- Pollution, érosion, raréfaction : la FAO s’alarme de la dégradation des terres et des eaux <https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/12/09/pollution-erosion-rarefaction-la-fao-s-alarme-de-la-degradation-des-terres-et-des-eaux_6105334_3244.html>, Le Monde, maj le 10/12/21 à 05h21
10- Près d’un milliard d’euros gaspillés : enquête sur le fiasco du plan anti-pesticides <https://www.franceinter.fr/societe/pres-d-un-milliard-d-euros-gaspilles-enquete-sur-le-fiasco-du-plan-anti-pesticides>, France Inter, 10/12/21, 06h11
11- Quatre questions sur les MOAH, ces dérivés d'hydrocarbures qui ont contaminé des aliments, selon l'ONG Foodwatch <https://www.francetvinfo.fr/sante/environnement-et-sante/quatre-questions-sur-les-moah-ces-derives-d-hydrocarbures-qui-ont-contamine-des-aliments-selon-l-ong-foodwatch_4874941.html>, France info, 10/12/21, 06:57
12- Mode d’emploi pour manger du poisson sans (trop de) casse environnementale <https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/12/10/mode-d-emploi-pour-manger-du-poisson-sans-trop-de-casse-environnementale_6105413_3244.html>, Le Monde, 10/12/21, 06h58 
13- Les plastiques dans les sols menacent la sécurité alimentaire, la santé et l'environnement (FAO) <https://news.un.org/fr/story/2021/12/1110552>, ONU Info, 10/12/21
14- En Inde, les agriculteurs quittent New Delhi au terme d’un an de manifestations contre la réforme agraire de Narendra Modi <https://www.lemonde.fr/international/article/2021/12/11/en-inde-les-agriculteurs-quittent-new-delhi-au-terme-d-un-an-de-manifestations-contre-la-reforme-agraire-de-narendra-modi_6105682_3210.html>, Le Monde avec AFP, 11/12/21, 11h34
15- Chronique. "Aucun gouvernement n’a suivi ou devancé avec une telle constance les desiderata du productivisme agricole" <https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/12/11/aucun-gouvernement-n-a-suivi-ou-devance-avec-une-telle-constance-les-desiderata-du-productivisme-agricole_6105704_3232.html>, Le Monde, maj le 12/12/21 à 02h10 
16- Bretagne : La justice retoque un projet de poulailler géant prévoyant d'accueillir 120.000 volailles <https://www.20minutes.fr/planete/3195507-20211212-bretagne-justice-retoque-projet-poulailler-geant-prevoyant-120000-volailles>, 20 Minutes avec AFP, 12/12/21, 12h33
17- Environnement : un rapport dénonce l’impact toujours plus néfaste de grandes entreprises européennes de la viande et des produits laitiers <https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/12/13/environnement-un-rapport-denonce-l-impact-toujours-plus-nefaste-de-grandes-entreprises-europeennes-de-la-viande-et-des-produits-laitiers_6105796_3244.html>, Le Monde avec AFP, 13/12/21, 08h17
18- Le lait "C'est qui le patron" devient le plus vendu en France, une première pour un produit équitable <https://www.novethic.fr/actualite/social/consommation/isr-rse/le-lait-de-c-est-qui-le-patron-devient-le-plus-vendu-en-france-une-premiere-pour-un-produit-equitable-150399.html>, Novethic, 13/12/21
19-  <https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/12/14/l-appel-de-137-parlementaires-l-affichage-environnemental-prevu-par-la-loi-climat-est-l-occasion-de-faire-un-choix-de-societe_6105951_3232.html>Tribune. L’appel de 137 parlementaires :  <https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/12/14/l-appel-de-137-parlementaires-l-affichage-environnemental-prevu-par-la-loi-climat-est-l-occasion-de-faire-un-choix-de-societe_6105951_3232.html>"L’affichage environnemental prévu par la loi Climat est l’occasion de faire un choix de société" <https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/12/14/l-appel-de-137-parlementaires-l-affichage-environnemental-prevu-par-la-loi-climat-est-l-occasion-de-faire-un-choix-de-societe_6105951_3232.html>, Le Monde, 14/12/21, 06h15
20- Pesticides : 68 gardes à vue après une manifestation d'agriculteurs devant le Conseil d'Etat <https://information.tv5monde.com/info/pesticides-68-gardes-vue-apres-une-manifestation-d-agriculteurs-devant-le-conseil-d-etat-436496>, AFP, 14/12/21, 17:00
En audio
21- Podcast. La viande végétale à la conquête du monde <https://www.lemonde.fr/podcasts/article/2021/12/09/la-viande-vegetale-a-la-conquete-du-monde_6105263_5463015.html>, Le Monde, 09/12/21, 05h00 
En images
22- Infographie. Arsenic et mercure dans les sols : quelles sont les zones exposées en France ? <https://www.notre-environnement.gouv.fr/actualites/breves/article/arsenic-et-mercure-dans-les-sols-quelles-sont-les-zones-exposees-en-france>, Commissariat général au développement durable, 07/12/21

Bien à vous,
Florence

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ALARME DU JOUR : "Surexploitation, mauvais usage, dégradation, pollution et raréfaction croissante" : un tiers de nos sols est modérément à fortement dégradé, selon la FAO, dont la publication vient compléter un corpus déjà lourd de travaux et d’expertises sur l’état des terres et de l’eau. (cf. item 9, suite, 13, suite & 22)
FIASCO DU JOUR : 800 millions d’euros devaient permettre de réduire l’usage des pesticides en France de moitié en 10 ans. Résultat : il a augmenté de 15 %. L’argent est parti dans des projets inefficaces, lorsqu’il n’a pas été tout simplement détourné. (cf. item 10 & 20) 
INEFFICACITÉ DU JOUR : Non contraignant, le 7ème plan de lutte contre les nitrates d’origine agricole, présenté aux membres du Conseil national de l’eau, pourrait s’avérer aussi inefficace que les 6 précédents. (cf. item 1)
ÉTUDE & RAPPORT DU JOUR : — Selon les conclusions des deux chercheurs américains, un insecticide agricole d’usage courant pourrait avoir des effets délétères différés, au point d’amputer d’environ 20 % le taux de reproduction d’abeilles n’ayant été exposées que par le biais de leurs géniteurs. (cf. item 2 & suite)
— Malgré la crise climatique, les émissions de gaz à effet de serre de géants européens de l’industrie de la viande et des produits laitiers continuent d’augmenter. C’est la conclusion d’un rapport de l’Institute for Agriculture and Trade Policy (IATP). (cf. item 17)
TEST DU JOUR : Pour réduire la prise d'espèces non ciblées par la pêche, une équipe de l'Ifremer teste à Lorient (Morbihan) des chaluts intelligents permettant de trier le poisson avant même de le remonter à bord des bateaux, mais également de limiter l'impact sur l'écosystème marin. (cf. item 3 & suite)
REPORTAGE DU JOUR : Le maire et les habitants de Preux-au-Bois, petite commune du Nord, assistent, impuissants, à la fermeture des routes traversant l’immense forêt voisine. Ils soupçonnent l’ONF de favoriser les chasseurs et d’encourager la surexploitation forestière. (cf. item 4)
PISTES DU JOUR : — "Il y a quelques années nous faisions grandir 6.000 arbres par an, maintenant c'est 15.000 et nous voulons passer à 25.000", Adam Owen, directeur de Moor Trees. (cf. item 5)
— La moitié des stocks mondiaux est en limite maximale d’exploitation, et un quart en cours d’effondrement ou déjà épuisé. Avant les fêtes, des pistes pour faire les bons choix chez le poissonnier ou à l’hypermarché. (cf. item 12)
— Produit de niche il y a quelques années, la viande végétale conquiert de nouveaux consommateurs, soucieux de la planète et de leur santé. Comment cette imitation de viande se fait-elle peu à peu une place dans nos assiettes, et ce, malgré l’hostilité des lobbys de la viande ? (cf. item 21)
DÉSOLATION DU JOUR : Des arbres couchés, des troncs calcinés, de la fumée qui s'élève au loin, et, surtout, le bourdonnement strident des tronçonneuses... En Amazonie colombienne, la forêt recule inexorablement depuis le départ en 2016 de la guérilla qui y imposait sa loi. (cf. item 6)
CRAINTE DU JOUR : Cinq élevages français du nord de la France ont été infectés par la grippe aviaire en l'espace de deux semaines, réveillant le spectre de la crise qui a fait des ravages l'an dernier. (cf. item 7)
ENQUÊTE DU JOUR : Le nombre d’exploitations agricoles a diminué de 20% en dix ans et le bio a vu sa surface tripler sur la même période. (cf. item 8)
PRÉCAUTIONS DU JOUR : — La dangerosité des hydrocarbures aromatiques d'huile minérale ou MOAH est encore méconnue, mais les autorités sanitaires estiment qu'il faut lutter contre leur présence dans les aliments. (cf. item 11 & suite)
— Deux métaux lourds, l’arsenic et le mercure, polluent les sols de certains territoires français avec des effets possibles à la fois sur l’environnement et sur la santé humaine. Un suivi précis de la situation est indispensable. (cf. item 17)
VICTOIRES DU JOUR : — Au terme d’une année de mobilisation et de manifestations finalement victorieuses contre la politique agraire du gouvernement indien, des milliers d’agriculteurs empaquetaient leurs affaires et démontaient les villages de tentes, afin de rentrer chez eux. (cf. item 14)
— La marque des consommateurs "C'est qui le patron", qui rémunère au prix juste les producteurs pour leur dégager un revenu décent, poursuit son irrésistible ascension. Sa brique de lait vendue en pack de six devient la première référence de sa catégorie. (cf. item 18)
ONCTION DU JOUR : Au cours des dernières années, la porosité entre le pouvoir et l’agriculture productiviste a été telle qu’elle a rendu fugitivement envisageable l’absurde fusion de la FNSEA et du ministère de l’agriculture. (cf. item 15)
RETOQUAGE DU JOUR : Un poulailler géant à Langoëlan (Morbihan) prévoyant d'accueillir 120.000 volailles a été retoqué par la justice. (cf. item 16)
AFFICHAGE DU JOUR : Quand un simple problème de "méthode de calcul" pourrait venir ruiner l’ambition collective d’informer les citoyens sur l’empreinte environnementale réelle des produits qu’ils consomment. (cf. item 19)
NOTRE ACTU : A suivre sur notre site Internet <http://www.fondation-nature-homme.org/>, Facebook <https://www.facebook.com/FondationNH/>, Twitter <https://twitter.com/fondationNH> ou Instagram <https://www.instagram.com/fondationNH/>.
> Plan de relance, loi climat... Décryptage et propositions pour des avancées écologiques et sociales qui comptent <http://www.fondation-nature-homme.org/sites/default/files/presse/dp-plan-relance-fnh.pdf>
> Le temps est venu de poser les premières pierres d’un nouveau monde <https://www.fondation-nicolas-hulot.org/le-temps-est-venu-lappel-de-nicolas-hulot-pour-poser-les-premieres-pierres-dun-nouveau-monde/>
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> Baromètre des mobilités du quotidien - Coût, manque d'alternatives : les Français prisonniers de la voiture <http://www.fondation-nature-homme.org/magazine/cout-manque-dalternativesles-francais-prisonniers-de-leur-mode-de-transport>
> Guide en ligne. 7 propositions pour contribuer au grand débat national <http://www.fondation-nature-homme.org/magazine/7-propositions-pour-contribuer-au-grand-debat-national/>
> Pétition. L’Affaire du Siècle. Climat : stop à l’inaction, demandons justice ! <https://laffairedusiecle.net/>
> Let’sbio ! Le Bonus cantine Bio et Locale <https://www.letsbio.org/>
> 30 gestes et astuces pour réduire sa conso d’énergie <https://www.fondation-nicolas-hulot.org/economies-denergie-au-quotidien-trucs-et-astuces-pour-depenser-moins/>
> Groupe Facebook "Infos et astuces pour économiser l’énergie <https://www.facebook.com/groups/208132273169772/?utm_campaign=GE2018&utm_medium=E5&utm_source=GE2018E516>"
> Une collection de vidéos pour décrypter les enjeux écologiques et climatiques <https://www.youtube.com/playlist?list=PLh--7obE3XQ4Ku7J6VzsvlsKayQqvJTq9>
> Pétition. TAFTA, CETA : des traités climaticides qui menacent nos démocraties. <http://fondation-nicolas-hulot.org/action/tafta-ceta-des-traites-climaticides-qui-menacent-nos-democraties/?_ga=1.254849352.1537587716.1214298697>
> Crèches : arrêtons d’intoxiquer nos enfants <https://www.youtube.com/watch?v=FMjygtDmPSM>
> L'APPEL DES SOLIDARITÉS porté par plus de 80 ONG & associations de tous horizons <http://www.comite21.org/reseau-adherents/actualites.html?id=11056>
> 2nd édition de My Positive Impact : les 6 lauréats du public et les 3 lauréats du jury <https://www.fondation-nicolas-hulot.org/trophees-pour-le-climat-my-positive-impact/>
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1- Pollution de l’eau : un plan de lutte contre les nitrates sans ambition, Le Monde, 05/12/21, 16h49 
Martine Valo

Non contraignant, le septième plan de lutte contre les nitrates d’origine agricole, présenté vendredi aux membres du Conseil national de l’eau, pourrait s’avérer aussi inefficace que les six précédents. 
Mauvais pour la santé humaine, en particulier celle des nourrissons, nuisible pour les plans d’eau où il génère des cyanobactéries et pour les eaux côtières où il fait proliférer les marées d’algues vertes, l’excès de nitrates fait l’objet d’une lutte continue depuis des dizaines d’années. Ou du moins donne-t-il lieu à une succession de plans de réduction et de prévention de la pollution des eaux par cette forme oxydée de l’azote.
La France en est à son septième plan du genre depuis la directive européenne nitrates de 1991. Las, sans grand résultat.
Vendredi 3 décembre, les services du ministère de la transition écologique et ceux de l’agriculture ont présenté aux membres du Comité national de l’eau, une instance consultative, leur prochain programme d’actions national sur les nitrates d’origine agricole (ou PAN), dont les règles doivent entrer en application à l’été 2022. « Le sentiment que ce plan manque nettement d’ambition dominait l’assemblée qui a tout de même adopté un avis favorable assorti de nombreuses réserves sous forme de “recommandations” », témoigne Antoine Gatet, le vice-président de France Nature Environnement, qui s’est abstenu.
> Lire aussi La face cachée des engrais azotés
Car ce nouveau plan qui se présente sous la forme d’un dossier technique se limite à des révisions à la marge du précédent. C’est bien ce qui lui est reproché : pourquoi ne pas changer un programme qui ne marche pas ? L’Autorité environnementale, une instance indépendante relevant du ministère de la transition écologique, avance un début de réponse dans l’avis sévère qu’elle a rendu le 19 novembre :
« Les adaptations prévues du PAN visent moins à accroître son efficacité sur la réduction de la pollution par les nitrates qu’à en limiter les contraintes pour les agriculteurs au motif d’en favoriser l’appropriation. »
Autrement dit pas question de froisser un secteur à l’origine de l’essentiel du problème, puisque 88 % des nitrates sont dus à l’excès d’azote épandu dans les champs.
Vingt-cinq années d’engagements de l’Etat
Après avoir déjà été consultés en 2011 et 2016, les experts laissent poindre leur agacement au sujet de l’exercice quadriennal 2022-2026 : « L’évaluation des PAN précédents n’a pas permis de montrer leur efficacité. [Elle] ne démontre pas en quoi les nouvelles mesures amélioreront la situation, voire même en quoi elles ne la dégraderont pas. »
L’Autorité environnementale conclut en demandant d’informer le public « sur le coût environnemental, social et économique de la pollution par les nitrates et de l’eutrophisation [le manque d’oxygène] » des eaux.
Le Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) et le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux, deux services ministériels, ont déjà établi un diagnostic similaire. En novembre 2020, ils soulignaient que malgré vingt-cinq années d’engagements de l’Etat, « les résultats en termes de teneur en nitrates des eaux superficielles et souterraines restent très loin des objectifs et semblent ne plus s’améliorer ». Cette année-là, 66 % de la superficie des territoires de France métropolitaine présentaient des eaux polluées, altérées par l’eutrophisation ou susceptibles de l’être (58,5 % en surface, 51,9 % dans les nappes souterraines).
Les superficies agricoles concernées par le trop-plein d’azote n’ont cessé de s’étendre depuis les premiers programmes nationaux, non seulement dans une grande part nord-ouest du pays, mais aussi dans les zones de grandes cultures du Bassin parisien, en Alsace, Adour-Garonne… Sur le long terme, la situation s’est améliorée à l’Ouest, note le CGEDD, mais elle se dégrade en Picardie, dans le bassin Rhin-Meuse et empire globalement dans les nappes souterraines. Le réseau national de surveillance qui compte plusieurs milliers de stations recense presque autant de points de hausse que de baisse des concentrations en nitrates depuis les années 1990, avec de fortes disparités locales.
> Lire aussi Algues vertes : « On ne peut faire disparaître l’azote. Chassez-le par la porte, il revient par la fenêtre »
Un territoire dont les teneurs sont supérieures à 18 milligrammes par litre (mg/l) en surface et 40 mg/l dans les nappes souterraines est classé « zone vulnérable ». Cette appellation paradoxale signifie qu’il faut impérativement y modifier les pratiques agronomiques afin d’en réduire la contamination. Actuellement 19 millions d’hectares de superficie agricole utile et 62 % des exploitations sont dans ce cas.
Et lorsque dans un point de prélèvement la concentration de nitrates dépasse 50 mg/l – le seuil fixé par l’Organisation mondiale de la santé pour l’eau potable –, il faut interconnecter le réseau avec des sources plus lointaines et abandonner le captage, trop contaminé. La France a dû en fermer près de mille depuis les années 2000. La saga des nitrates pèse lourd sur la facture d’abonnement des consommateurs. L’alimentation au robinet de 11,4 % de la population a tout de même dépassé par moments 40 mg/l en 2018.
« Un modèle agricole qui nous emmène dans le mur »
Comme ses prédécesseurs, le septième programme décline une série de mesures censées inciter les exploitants à équilibrer leur recours à la fertilisation – qu’elle soit organique (les excrétions des cheptels français produisent plus de 1,7 million de tonnes d’azote selon les données de 2017) ou de synthèse.
La dose de trop que les plantes ne peuvent absorber va se transformer en concentration de nitrites et de nitrates dommageables pour la qualité de l’eau, mais aussi pour l’air. Car elle entraîne des émissions de protoxyde d’azote – un gaz doté d’un effet de serre très puissant –, et produit de l’ammoniac qui participe à la formation de particules fines.
Les mesures recommandées par le PAN portent sur les quantités maximales d’épandage (en principe pas plus de 170 kilogrammes par hectare et par an) et sur les calendriers d’interdiction, sur les modes de stockage des effluents d’élevage, sur les façons de les répartir par rapport aux cours d’eau ou sur des terrains en pente, gelés, inondés… Elles encadrent aussi la couverture des sols par des cultures intermédiaires entre deux moissons afin de réduire les fuites d’azote et les cahiers que les agriculteurs doivent tenir sur leurs recours à l’engrais.
Le problème, selon les rapporteurs, c’est que le PAN manque d’objectifs chiffrés. Il pâtit de l’absence de suivi et de contrôle, ne prévoit pas de base de données de référence qui recenserait incidents et anomalies, n’informe pas assez. Il tient aussi à la multiplication des dérogations que la profession agricole obtient auprès des préfets : 164 depuis 2012, dont 104 depuis 2016. Et le nouveau texte introduit des possibilités supplémentaires de dépasser les plafonds d’azote sur telles ou telles cultures. « Cette situation s’accompagne, pour les acteurs, d’une perte de sens manifeste de cette politique publique », concluent les experts.
« Il est quand même incroyable que le PAN ne cite à aucun moment l’agriculture biologique, alors qu’elle est la seule réponse à la dégradation de l’eau, estime Stéphane Rozé, paysan en Ille-et-Vilaine. Alors que seul un tiers des masses d’eau sont en bon état écologique, on continue de vouloir conforter un modèle agricole qui nous emmène dans le mur. On note les déjections sur un cahier, on bouge un peu le calendrier d’épandage, mais les quantités restent les mêmes. C’est incompréhensible ! »
Egalement représentant de la Fédération nationale de l’agriculture biologique au Comité national de l’eau, M. Rozé déplore ce PAN qui reste « flou et s’apparente à un catalogue de simples recommandations, plutôt qu’à un plan d’actions efficaces ». Mais il estime que la situation serait pire, « dramatique » même, sans ce cadre. Pour sa part, l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture doit livrer son point de vue mi-décembre.
> Lire aussi Pour réduire la prolifération des algues vertes, l’Etat va proposer des « contrats » aux agriculteurs
En Bretagne, classée tout entière en zone vulnérable, la justice aussi s’est prononcée. En juin, le tribunal administratif de Rennes a annulé la déclinaison régionale du PAN pour manque d’ambition vis-à-vis du problème récurrent des marées vertes. L’état des rivières de la région s’est certes amélioré sur le long terme, mais il ne progresse plus depuis 2014. En cette fin d’année dans les Côtes-d’Armor, des plages sont toujours fermées pour cause d’échouage de grosses couches d’algues.
<https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/12/05/pollution-de-l-eau-un-nouveau-plan-sans-ambition-de-lutte-contre-les-nitrates_6104767_3244.html>
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2- La fertilité des abeilles atteinte par les pesticides néonicotinoïdes, Le Monde, 06/12/21, 11h56 
Stéphane Foucart

Selon des travaux menés en plein champ, l’exposition à l’imidaclopride au stade larvaire ampute le taux de reproduction ultérieur. 
L’effondrement rapide des populations d’insectes, notamment pollinisateurs, est l’une des manifestations les plus inquiétantes de la crise actuelle de la biodiversité. L’usage des pesticides agricoles compte au nombre des causes majeures de cet armageddon des insectes, mais leur rôle est sans doute encore très sous-estimé.
C’est ce que suggèrent des travaux conduits par l’écologue Clara Stuligross et l’entomologiste Neal Williams (université de Californie à Davis) et publiés le 30 novembre dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences(PNAS). Selon les conclusions des deux chercheurs américains, un insecticide agricole d’usage courant pourrait avoir des effets délétères différés, au point d’amputer d’environ 20 % le taux de reproduction d’abeilles n’ayant été exposées que par le biais de leurs géniteurs.
> Lire aussi Le plan « pollinisateurs » du gouvernement suscite la colère des apiculteurs
« Des résultats d’une très grande portée », estime l’entomologiste et agronome Hervé Jactel, chercheur à l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae), qui n’a pas participé à ces travaux. « Cela indique que les abeilles pourraient avoir besoin de plusieurs générations pour se remettre d’une seule exposition à des pesticides, écrivent les auteurs. Ainsi, les “effets différés” doivent être pris en compte dans les évaluations du risque [de ces produits] et les politiques de conservation. » 
« Effets additifs »
« Ces résultats sont importants, car, trop souvent, les travaux expérimentaux sur les abeilles portent sur une seule saison d’exposition et ne vont pas au-delà, estime le biologiste Francisco Sanchez-Bayo (université de Sydney), auteur de nombreux travaux sur l’impact des néonicotinoïdes sur la biodiversité. Le fait que le taux de reproduction diminue longtemps après l’exposition est inquiétant, car cela signifie qu’il existe des effets cachés qui persistent du stade larvaire à l’âge adulte. »
Les chercheurs ont mené leur expérience sur deux années, dans des conditions les plus proches possibles des situations rencontrées dans les champs. Ils ont exposé des abeilles solitaires (Osmia lignaria) à des niveaux communément rencontrés dans les parcelles traitées avec un insecticide néonicotinoïde, l’imidaclopride (réautorisé en 2020 en France pour la culture des betteraves), tandis que d’autres abeilles n’étaient pas exposées. Ils ont ensuite recueilli la descendance de ces deux groupes et ont aléatoirement placé leurs rejetons, soit dans un environnement vierge de l’insecticide, soit un environnement traité.
> Lire aussi Abeilles : l’épandage de produits phytopharmaceutiques autorisé deux heures avant le coucher du soleil
Ils ont ainsi pu, in fine, étudier quatre populations distinctes d’abeilles adultes. Celles n’ayant jamais exposées à l’imidaclopride ; celles ayant été exposées à l’état larvaire mais pas au stade adulte ; celles n’ayant pas été exposées au premier, mais l’ayant été au second ; celles ayant été exposées à chaque stade de leur existence. Une démarche expérimentale jugée « astucieuse et rigoureuse », selon M. Jactel, qui permet d’isoler les effets différés, liés à une exposition ancienne (durant le stade larvaire), des effets provoqués par l’exposition directe des insectes.
Ces effets directs, désormais bien connus, sont de nouveau confirmés par cette nouvelle étude. « Le résultat majeur et original est ici de montrer pour la première fois et de façon expérimentale, non biaisée, que d’une part l’exposition des larves à l’imidaclopride a des conséquences négatives sur le comportement et les performances des mêmes individus devenus adultes, explique M. Jactel. Et d’autre part que les effets d’expositions successives sur les deux stades développement, larves puis adulte, sont additifs, renforçant donc leurs impacts négatifs. »
> Lire aussi Pesticides : des associations attaquent l’Etat pour n’avoir pas assez protégé la biodiversité
Chute considérable
Ainsi, l’exposition au cours du stade larvaire est, à elle seule, responsable d’une réduction de 20 % environ du taux de reproduction de l’individu devenu adulte. Et si ce dernier est également exposé, alors son taux de reproduction chute encore un peu plus. Au total, entre une osmie n’ayant jamais été exposée et une autre ayant été exposée aux deux stades de sa vie, la baisse du taux de reproduction est proche de 50 %.
En extrapolant, les auteurs calculent une chute considérable du taux de croissance des populations d’osmies dans les paysages traités : ce taux serait, selon leur estimation, divisé par quatre, par rapport à ce qu’il serait dans un environnement non traité. Ce calcul, partiellement fondé sur les résultats d’un autre travail expérimental, doit selon M. Jactel être considéré « avec précaution ». Ce dont, d’ailleurs, les auteurs conviennent, puisqu’ils appellent dans leur article à conduire des travaux pour mesurer directement la chute du taux d’accroissement des populations chroniquement soumises aux néonicotinoïdes.
« Comme le soulignent les auteurs, conclut Hervé Jactel, la combinaison d’une application répétée des néonicotinoïdes et/ou de l’accumulation de leurs résidus au cours du temps avec ces effets additifs transgénérationnels contribue, in fine, à accroître fortement le risque de déclin de la biodiversité des insectes pollinisateurs dans les paysages agricoles soumis à ces pratiques agricoles intensives. »
 >Lire aussi La justice saisie pour « faire barrage » au retour des néonicotinoïdes
<https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/12/06/la-fertilite-des-abeilles-atteinte-par-les-pesticides-neonicotinoides_6104899_3244.html>
En savoir plus :
> Past insecticide exposure reduces bee reproduction and population growth rate <https://www.pnas.org/content/118/48/e2109909118>, PNAS, November 30, 2021 
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3- Des filets de pêche intelligents pour réduire les captures inutiles, AFP, 06/12/21, 15:00
Sandra Ferrer

Pour réduire la prise d'espèces non ciblées par la pêche, une équipe de l'Ifremer teste à Lorient (Morbihan) des chaluts intelligents permettant de trier le poisson avant même de le remonter à bord des bateaux, mais également de limiter l'impact sur l'écosystème marin.
"Un chalut c'est comme une grande épuisette, on la remorque derrière le navire pendant plusieurs heures sans avoir connaissance de ce qui y entre en temps réel, à savoir est-ce que ce sont des espèces qui sont ciblées par le pêcheur ou non", illustre auprès de l'AFP Julien Simon, du Laboratoire de technologie et biologie halieutique de l'Ifremer.
Avec d'autres partenaires, dont l'université de Bretagne sud (UBS), la société Marport, spécialisée dans les capteurs de haute technologie, et le comité des pêches du Morbihan, l'institut public pilote ce projet de chalut intelligent baptisé Game of Trawls, jeu de mots avec la série à succès Game of Thrones et acronyme de Giving Artificial, Monitoring intElligence tO Fishing Trawls.
Chaque année, 20 millions de tonnes de poisson, soit environ le quart des captures marines totales, sont rejetées en mer ou ramenées à quai bien que non exploitées, selon l'organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO). 
Variable en fonction des espèces ciblées, le taux de rejet dans le cas de la pêche à la sardine est de 22%, quand il atteint 41% pour la pêche à la langoustine, selon des données de l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer.
Malgré des engins de pêche de plus en plus sélectifs, grâce à des tailles et des formes de mailles adaptées, leur efficacité dépend toujours de la volonté ou non des poissons de s'en extraire et non d'une décision des pêcheurs.
"Les poissons adoptent souvent un comportement d'évitement face aux mailles des filets qui fait que finalement ils restent à l'intérieur", explique Julien Simon, soulignant également "l'effet banc". 
Le chalut intelligent constitue "un outil d'aide à la décision pour les pêcheurs", assure l'ingénieur, dont le projet s'appuie sur les avancées technologiques récentes dans les domaines de l'intelligence artificielle et des réseaux de capteurs.
- "Bourré de technologie" -
Doté de caméras, de capteurs et de puissants logiciels d'analyse le dispositif permet ainsi d'informer le pêcheur en temps réel des espèces capturées, de leur taille et de leur abondance. 
"Cela ne m'intéresse pas d'avoir le poisson sur le pont et de le trier une fois qu'il est mort, je préfère le trier sur le fond", note Eric Guygniec, à la tête de l'armement breton Apak et partenaire du projet. Avec un tel dispositif "on sait à tout moment ce qui rentre dans le filet, la taille du poisson et l'espèce, et si l'espèce ne nous intéresse pas on peut ouvrir une trappe", détaille-t-il.
Outre ce dispositif innovant de filet pélagique, c'est-à-dire évoluant entre la surface et le fond sans entrer en contact avec celui-ci, un chalut de fond, également doté de caméras et de capteurs, est en test à Lorient. Mais cette fois le dispositif vise à préserver au mieux l'écosystème marin. 
"En fonction de la présence d'espèces ciblées ou non ciblées, le chalut va se mettre en mode pêche ou en mode vol afin d'éviter d'avoir un impact sur les fonds marins", explique Julien Simon, devant un prototype immergé dans ce bassin où un courant est généré afin de simuler l'avancée d'un bateau. 
Cependant, sur les quais, certains marins s'inquiètent du coût d'un tel dispositif. Même si, comme toute innovation vertueuse, il pourrait ouvrir droit à des aides lors de sa mise sur le marché d'ici 2025.
"Est-ce qu'on pourra acheter un chalut de ce type bourré de technologie ?" s'interroge un patron-pêcheur de Lorient qui n'a pas souhaité donner son nom. Il dit avoir récemment mis en vente son bateau du fait des contraintes "trop lourdes" qui pèsent sur la profession.
"C'est sûr que ça va avoir un coût", prévient également Soazig Palmer-Le Gall à la tête de l'armement Bigouden du Guilvinec (Finistère) et présidente de l'organisation de producteur (OP) Pêcheurs de Bretagne.
<https://www.france24.com/fr/vidéo/20211202-france-des-filets-de-pêche-intelligents-pour-réduire-les-captures-inutiles>
+ En vidéo : Des filets de pêche intelligents pour réduire les captures inutiles <https://www.youtube.com/watch?v=uOAKDMy0TEc>, Euronews, 01/12/21
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4- Reportage. « On veut continuer à vivre avec la forêt » : dans le Nord, un village contre l’ONF, Le Monde, 07/12/21, 04h56
Benoît Floc'h (Preux-au-Bois, Nord, envoyé spécial)

Le maire et les habitants de Preux-au-Bois, petite commune du Nord, assistent, impuissants, à la fermeture des routes traversant l’immense forêt voisine. Ils soupçonnent l’ONF de favoriser les chasseurs et d’encourager la surexploitation forestière.
Pour aller au restaurant, ce lundi d’automne, Bruno Lefevre, emprunte comme d’habitude la route de la forêt. C’est la plus directe. Arrivé au carrefour du Quesne-à-Maronnes, le maire de Preux-au-Bois (Nord) s’apprête à tourner à gauche lorsqu’il remarque un panneau de signalisation flambant neuf : sens interdit. L’élu s’agace. « Quoi ? encore un ! Il n’était pas là hier… » Tant pis, il s’engage. « On verra bien si l’on croise un garde forestier », dit-il en soupirant.
Le lendemain, Bruno Lefevre réalise une petite vidéo, qu’il poste sur Facebook. Il s’est filmé en voiture, sur la route forestière. « Pour la Toussaint, commente-t-il en voix off, l’ONF a fait un beau cadeau aux Preutains en organisant un cul-de-sac. » Le surlendemain, surprise, le panneau a disparu dans la nuit… Que s’est-il passé ? Mystère. « Je ne vois pas trop, hésite Eric Marquette, directeur de la branche Nord-Pas-de-Calais de l’Office national des forêts (ONF). Elle n’a pas à être fermée, cette route… »
Il se passe décidément de drôles de choses dans la majestueuse forêt de Mormal. Aussi vaste que Paris, elle abrite quelque 10 000 hectares de chênes, de hêtres ou de charmes. On dit même que le géant Gargantua, le célèbre personnage créé par Rabelais, y avait ses habitudes et qu’il fut enterré sur place. Une statue du colosse, taillée dans un vieux chêne, entretient cette légende, même si ce que l’on désigne comme sa tombe n’est en réalité qu’un tumulus vieux de 9 000 ans où aucun reste humain n’a été trouvé.
La guerre est déclarée
Mais ce n’est pas cela qui préoccupe les habitants. Preux-au-Bois, le bien nommé, a la particularité d’être littéralement collé à la forêt de Mormal. Les villageois s’y sont toujours rendus, qu’il s’agisse de s’aérer, de cueillir des champignons ou d’aller travailler. Car la vie économique – la gare ou des entreprises comme Vallourec – se trouve de l’autre côté de Mormal, à Aulnoye-Aymeries. Or, depuis quelques années, ils assistent, impuissants, à la fermeture des routes forestières. L’ONF, qui gère la forêt, barre des tronçons sans crier gare, dénonce le maire. Ce que l’ONF conteste. Il y a deux ans, l’office a même tenté de bloquer la rue du bois, celle qui traverse le village et donne directement dans la forêt. La mobilisation des élus a obligé l’établissement public à poser ses barrières un peu plus loin. Mais les Preutains s’inquiètent. Et si leur village devenait « Preux-sans-bois » ? Alors, comme les rabelaisiens Grandgousier contre Picrochole, la guerre est déclarée avec l’administration.
Fabien Barbu, 40 ans, travaille à Vallourec. La fermeture des routes allonge ses trajets, notamment lorsque en septembre, l’ONF bloque une voie supplémentaire pendant la période de brame du cerf. « Cela me fait faire un détour de 8 à 10 km… » Freddy Dupont, 55 ans, habite de l’autre côté de Mormal, mais sa famille est à Preux-au-Bois, où il est né. Il y vient très souvent. Et il a fait ses calculs : au rythme où ça va, ce n’est plus 27 km qu’il devra effectuer, mais 48 km. « Quand on voit le prix du carburant…, note-t-il. Et ça a un impact sur des centaines de personnes. L’ONF impose à ses bûcherons de mettre de l’huile écologique dans leurs tronçonneuses, mais il nous fait consommer de l’essence. »
Francis Dudziak fait le même trajet, mais en sens inverse. Le baryton, qui s’est produit sur de grandes scènes lyriques, habite à Preux-au-Bois dans l’ancienne maison de ses grands-parents. Il reçoit dans son salon, décoré avec goût autour d’un piano à queue où trône une statuette en porcelaine blanche de Mao Zedong. M. Dudziak prend le train à Aulnoye-Aymeries toutes les semaines pour se rendre à Paris, où il donne des cours d’art lyrique. Les routes coupées, cela fait « cinq kilomètres » en plus, dit-il. Et il craint que celle qu’il emprunte aujourd’hui, celle d’Hecq, ne finisse par être condamnée elle aussi. « Ce serait la punition totale : 11 km en plus. C’est totalement absurde », s’insurge le baryton de 62 ans. Il se souvient des sentiers de Mormal qu’il empruntait dans son enfance et qui ne sont « plus praticables » parce qu’ils ne sont plus entretenus. « On veut continuer à vivre avec la forêt, insiste-t-il. On vit ici avec des avantages et des inconvénients. Il faut nous laisser les avantages. »
« Il arrivera un jour où l’ONF nous fermera complètement la forêt, s’inquiète Fabien Barbu. On sera cloisonnés dans notre village. C’est cela dont on a peur. » Le maire, qui se bat pour redynamiser la vie de ce bourg « où il n’y a plus rien », plus de commerces, plus de bureau de poste, plus de bistrots, comprend très bien l’angoisse des habitants : « C’est leur forêt, justifie Bruno Lefevre. Cela participe du bien-être et de la survie de Preux-au-Bois. » L’activité du camping, par exemple, souffre de la situation. « On a moins d’activité à cause des fermetures, confie sa gérante, Marianne Fremineur. Et le chemin forestier pour venir chez nous n’est pas entretenu. » « J’avais dans l’idée de développer le camping, mais si on ne facilite pas l’accès au village, les gens ne viendront pas », déplore le maire.
M. Lefevre voudrait profiter de la force d’attraction de la commune voisine de Maroilles, misant sur « une continuité touristique entre villages ». De la bourgade au célèbre fromage, certains visiteurs poussent jusqu’à l’arboretum, un parc situé au centre de la forêt. Preux-au-Bois n’est plus qu’à quelques kilomètres. Sauf que la voie a été coupée, là aussi, et sur quelques centaines de mètres seulement. « Mise en sécurité », dit l’ONF. En arpentant le tronçon interdit, Bruno Lefevre ne cache pas sa perplexité, n’excluant pas une forme d’acharnement. « On me donnerait les raisons de toutes les fermetures, encore… Mais là, franchement, je ne vois pas. Je ne vois pas. »
L’incompréhension est manifestement totale avec les villageois qui reprochent à l’ONF de ne pas s’expliquer. Cela nourrit les rancœurs dans le bourg. « C’est le domaine privé de l’Etat, justifie Eric Marquette. Ce ne sont pas des routes publiques, mais des voies destinées à la gestion forestière. » Un plan de circulation a néanmoins été élaboré, dans la « concertation », assure le directeur régional de l’ONF. Son but est, « dans l’intérêt général », « de préserver au maximum ce milieu naturel remarquable de la circulation automobile ». L’objectif, poursuit-il, est de favoriser « la quiétude de la forêt et la sécurité des promeneurs et des cyclistes ».
Freddy Dupont a bien entendu parler des « zones de tranquillité pour les gens des villes », mais, relève-t-il, avec les sens uniques, les barrières et les routes coupées, « ils tournent en rond, se perdent, et ne viennent plus ». Par ailleurs, peste-t-il, « l’ONF est incapable de citer un seul accident » qui aurait été provoqué par les Preutains. Chacun y va donc de son explication. Et le maire tient pour acquise celle-ci : le passage des voitures endommagerait des routes forestières que l’ONF n’aurait plus les moyens d’entretenir. Il a mis la main sur une étude réalisée en 2004 par l’Ecole polytechnique de Lausanne sur la « modélisation des charges d’essieu ». Il en ressort, expose-t-il, que le passage d’un camion chargé de bois équivaut à celui de dix mille voitures. Il est d’ailleurs bien placé pour le savoir : en traversant son village, les grumiers détériorent le macadam. Il l’a dit au représentant de l’ONF, le menaçant de prendre un arrêté pour interdire leur passage. « Il m’a répondu : “Si vous faites ça, on vous coupe toutes les routes”. » Dissuasif.
300 euros la journée de chasse
« Leur but, c’est de fermer complètement la forêt et de la réserver aux chasseurs et aux exploitants, considère Freddy Dupont. Et nous, on ne pourra plus y aller. C’est fou. Tout le monde en souffre. » Mormal est fermée pour « arranger les chasseurs, déduit Philippe Bourbouze, enseignant de 61 ans. Je ne vois pas d’autre explication logique ». Des intérêts mutuels bien compris, « une parenté de couenne de lard », comme dirait Rabelais : l’ONF a besoin de revenus ; les chasseurs sont prêts à payer pour trouver des proies. Une journée de chasse à Mormal, c’est 300 euros. « C’est pas donné à tout le monde », reconnaît M. Marquette, lui-même rabatteur. Cela représente un revenu « relativement stable » de 600 000 euros par an.
Le conflit qui menace la quiétude de la forêt n’est pas dénué de considérations de classe. « Traverser pour aller travailler, c’est pas possible, s’agace Freddy Dupont. Mais eux viennent chasser avec leurs gros 4 × 4. Ces messieurs sont tranquilles, assis au bord de la route, voire au milieu, ils attendent le gibier poussé vers eux par des rabatteurs. » Bernard Parent, notaire à Walincourt, appartient à la Société de chasse militaire de Mormal. Il reconnaît ne pas très bien voir où se situe le problème.
> Lire aussi Les chasseurs, « premiers écologistes de France » ? Histoire d’une communication politique
« Je ne comprends pas pourquoi ça leur fait faire tant de kilomètres », s’étonne-t-il, en soulignant que toutes les routes ne sont pas fermées. « La forêt a besoin d’une quiétude », rappelle-t-il. Et des chasseurs, insiste M. Marquette : leur rôle est« primordial pour permettre un bon renouvellement de la forêt », explique le représentant de l’ONF. Car cerfs, chevreuils et autres sangliers, qui pullulent « en l’absence de grands prédateurs », compromettent la régénération des arbres en mangeant les fruits et les jeunes pousses.
Ce qui conduit à la deuxième piste : l’exploitation forestière. Car si les villageois craignent qu’on les empêche peu à peu d’aller dans leur forêt, ils redoutent encore plus qu’on ne la décime. Chacun a pu constater les « coupes rases » ou les « coupes à blanc » que les bûcherons laissent derrière eux. « C’est Bagdad dans la forêt, se désole Fabien Barbu. Ils cassent tout. Les grumiers, les camions Timberjack passent. Il faut voir le bazar… » Des arbres centenaires sont abattus, délestés de leurs branches et entassés sur des camions ou dans des conteneurs. « Certaines parcelles sont tellement éclaircies qu’elles sont devenues des savanes », alerte Benoît Tomsen, président de l’association Mormal Forêt Agir, qui a attaqué l’ONF en justice pour obtenir des chiffres.
Un climat pesant
La forêt est « largement » surexploitée, estime M. Tomsen : elle « produit » 54 000 m3 de bois par an, mais l’ONF a pris « jusqu’à 130 000 m3 » en 2018 et en 2019. L’office relativise : sur la période 2016-2020, ce sont 86 000 m3 qui ont été prélevés en moyenne, avec « un pic en 2016-2017 ». Mais, insiste M. Marquette, « dire que Mormal est surexploitée pour faire du fric, on a déjà expliqué en long, en large et en travers que ce n’était pas le cas ». « Il est vrai que l’on coupe davantage de bois aujourd’hui que par le passé du fait des changements climatiques », reconnaît-il. Avec les canicules et le manque d’eau, les arbres seraient en effet trop nombreux. Mais « cette exploitation est toujours organisée pour ne pas prélever à terme plus que ce que la forêt est en mesure de produire ».
Eric Marquette pointe « le ras-le-bol des forestiers qui travaillent dans un climat particulièrement pesant » : « campagne de dénigrement », « pneus crevés sur des voitures personnelles ou des engins forestiers », « dégradations »… L’ONF a déposé plusieurs plaintes. Pour tenter de sortir de ce climat de rumeurs, d’incompréhension et de tensions, une concertation a été lancée en mars, et un médiateur nommé. Elle doit aboutir début 2022. En remportant la guerre contre Picrochole, Gargantua a montré la supériorité de la sagesse sur la furie belliqueuse. Mais qui écoute encore le fantôme de Mormal ?
> Lire aussi Les forêts, grandes absentes du projet de loi climat et résilience
<https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/12/07/on-veut-continuer-a-vivre-avec-la-foret-dans-le-nord-un-village-contre-l-onf_6104956_3224.html>
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5- Avec l'urgence climatique, le défi de planter des arbres en Angleterre, AFP, 09/12/21, 10:00
Véronique Dupont

Concentrés, têtes baissées, trois employés de Moor Trees, une pépinière du sud-ouest de l'Angleterre, écossent des gousses de graines rouges et les jettent une à une dans un grand seau. D'abord mises en pot, celles qui auront germé seront transplantées dans le sol au bout de deux ans.
Avec l'urgence climatique, planter des arbres est à la mode et parfois vu comme une solution miraculeuse par les Etats ou les entreprises pour capter du CO2 ou embellir leur bilan carbone.
A raison ou à tort, car cela reste un processus long, compliqué et qui ne doit pas occulter la nécessaire coupe des émissions polluantes.
"Il y a quelques années nous faisions grandir 6.000 arbres par an, maintenant c'est 15.000 et nous voulons passer à 25.000", raconte Adam Owen, directeur de Moor Trees.
"Depuis trois ans, je n'ai pas eu à solliciter une seule personne pour savoir si nous pourrions planter des arbres pour eux. Ce sont les gens qui viennent nous chercher", ajoute-t-il, en passant dans des rangées bien alignées de plants de hêtres, protégés des rongeurs par des filets.
Les financements affluent de toutes parts: fonds gouvernementaux, donations d'entreprises ou de particuliers.
Chez Eden Project, autre ONG de reforestation, le budget est passé de "cinq millions de dollars en 2019 à 26 millions" cette année avec une expansion de leur activité dans huit pays, explique son directeur, Stephen Fitch. Ils espèrent lever 120 millions en 2023.
Le Royaume-Uni a beaucoup de retard à rattraper: seulement 13% du territoire britannique est couvert de bois et forêts contre 31 à 50% en moyenne en Europe.
Le gouvernement vise 30 millions d'arbres plantés par an à partir de 2025.
Mais cet objectif ambitieux risque d'être compliqué par la difficulté de trouver des terrains : beaucoup sont déjà construits, cultivés ou comportent des habitats à protéger, comme la tourbe ou les marais, autres puits de carbone naturels.
Les graines elles-mêmes manquent : il faut souvent en importer, notamment des Pays-Bas où l'horticulture est une industrie de premier plan - mais elles font alors courir le risque d'importer microbes ou bactéries.
Moor Trees milite ainsi pour la reforestation à partir de graines d'arbres locaux, adaptés au terroir britannique.
"Les arbres ont un rôle important à jouer pour retirer du carbone de l'atmosphère, il n'y a pas d'autre moyen" rapide de "séquestrer du carbone", souligne Luke Barley, consultant pour le National Trust, organisation publique de défense du patrimoine et des parcs naturels britanniques.
- "Dernière lubie" -
Mais il s'inquiète des risques de « greenwashing" : des pays ou des entreprises pourraient être tentés de planter des arbres pour soigner leur image tout en repoussant leurs efforts pour véritablement trancher dans leurs émissions de CO2.
"Il n'est pas acceptable pour une organisation de continuer à fonctionner comme si de rien n'était, en se contentant de compenser ses émissions à travers les plantations d'arbres", insiste-t-il.
En particulier, pendant que l'attention se porte sur les nouveaux arbres qui ne séquestreront des quantités significatives de carbone que dans 20 ans, la déforestation des forêts tropicales continue, dénonce-t-il, dans un entretien à l'AFP.
Adam Owen s'agace aussi de ce que les arbres soient devenus "la dernière lubie" sur laquelle les décideurs politiques se précipitent après avoir mis l'accent ces dernières décennies sur la production alimentaire agricole, puis les biocarburants.
Or, souligne-t-il, planter des arbres demande du temps, beaucoup d'argent, et donc une visibilité à long terme.
Les pépinières de petite échelle ne seront pas à même de relever seules le défi.
Certaines fermes se lancent dans cette activité, nouvelle source de revenus notamment pour les éleveurs à l'heure où la consommation de viande chute au Royaume-Uni.
Adam Owen fait cependant valoir que la vocation d'organisations à but non lucratif comme la sienne est également de créer du lien social.
Et Briony James, directrice des actions publiques chez Moor Trees, dit avoir vu "une augmentation notable des bénévoles ces dernières années", qui jouent "un rôle crucial, car planter des arbres prend beaucoup de temps".
Une fois qu'ils savent comment planter, ils peuvent le faire chez eux "et contribuer à la reforestation" de leur région, assure-t-elle.
<https://information.tv5monde.com/info/avec-l-urgence-climatique-le-defi-de-planter-des-arbres-en-angleterre-435795>
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6- En Colombie, l'Amazonie victime insoupçonnée des accords de paix, AFP, 09/12/21, 13:00
David Salazar

Des arbres couchés, des troncs calcinés, de la fumée qui s'élève au loin, et, surtout, le bourdonnement strident des tronçonneuses... En Amazonie colombienne, la forêt recule inexorablement depuis le départ en 2016 de la guérilla qui y imposait sa loi.
Vu du ciel, le tableau est encore plus désolant : au loin, où la forêt est censée être vierge, de larges étendues de terre, des clôtures, des champs de coca et des vaches...
Dans la jungle de Guaviare, dans le sud de la Colombie, les paysans défrichent à la tronçonneuse et en allumant des incendies. Ils expliquent à l'AFP appeler ces carrés de terre brûlée des "tombes".
"La jungle ne nous appartient pas, mais nous sommes obligés de la couper pour pouvoir acheter à manger", confie l'un des bûcherons, scie mécanique à la main, un foulard sur le visage pour ne pas être identifié.
Tout autour de lui, des arbres majestueux gisent sur le sol.
- "Sentier du bétail" -
La déforestation suit le "sentier du bétail", une route construite pendant la guerre par l'ancienne guérilla marxiste des FARC, au cœur du parc national de la Serrania de La Macarena, destinée à faciliter le déplacement des troupes et la production de la cocaïne. 
Après la signature des accords de paix en 2016 à Cuba, les guérilleros sont partis. 
Dans leur sillage sont arrivés, le long de cette même piste poussiéreuse d'une centaine de kilomètres, des accapareurs de terres que personne n'ose identifier.
L'Etat n'a jamais véritablement repris le contrôle de ces vastes contrées reculées. "La déforestation la plus grave ici se poursuit depuis cinq ans", déplore Luis Calle, un dirigeant communautaire.
L'exploitation forestière, s'empresse-t-il de préciser, "n'est pas le fait des paysans", mais "des gros négociants" venus d'autres régions.
Selon l'Institut d'hydrologie, de météorologie et d'études environnementales IDEAM, un organisme public, près de 925.000 hectares de forêt ont disparu en Colombie depuis 2016, une superficie équivalente à celle de Chypre.
Et 2017, l'année du désarmement des FARC, a été la pire du siècle avec 219.000 hectares déboisés, soit 76% de plus qu'en 2015. L'Amazonie est aujourd'hui la région la plus déboisée (63,7%) du pays.
- "Mini-armée" et "mafias"-
Les guérilleros ont protégé cette forêt, constatent les villageois. Ils y faisaient régner leur loi. Et contrôlaient les revenus de la coca, qui finançaient leur lutte armée.
Mais "après la paix, les riches sont venus tout anéantir", accuse Edilberto Lozada, agriculteur de 50 ans. Ils ont profité du fait que les habitants étaient "à court d'argent" pour acheter leurs terres à bas prix, ajoute Luis Calle.
Ils sont aussi venu "choisir" des terres inoccupées, comme on dit localement. Comprendre : défricher à volonté et à la machette de grandes étendues de forêts.
Des clôtures abondent maintenant un peu partout dans la zone. Un homme de 40 ans, s'exprimant sous couvert d'anonymat, estime qu'il a déboisé à lui seul quelque 200 hectares, avant d'abandonner sa tâche, par peur d'être arrêté.
"J'étais capable de défricher un hectare par jour", raconte cet ancien cultivateur de coca. Il se rappelle avoir formé une "mini-armée" d'une douzaine de bûcherons, payés par un "patron" qu'il n'a jamais rencontré.
"Ce sont des personnes qui viennent d'autres départements et, logiquement, leur identité est inconnue", explique Albeiro Pachon, responsable de l'environnement au gouvernorat de Guaviare.
Les personnes prises en train d'exploiter la forêt, de financer ou d'inciter à la déforestation sont passibles d'une peine de 15 ans de prison. "Le sujet de la déforestation est traité comme pour une mafia", assure M. Pachon.
Sur ces mêmes chemins et territoires qu'empruntaient les FARC, broutent aujourd'hui vaches et autres cheptels. 
"Pour qui veut s'emparer de la terre, que vous ayez des documents ou non, venir avec du bétail est le plus facile", observe Claudio Maretti, de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN).
La savane s'étend de part et d'autre de la piste, où l'on voit peu de maisons, quelques étables. 
Le défrichage, l'introduction de vaches destinées au marché de la viande et la plantation de semis sont des activités coûteuses que seuls des propriétaires fonciers aisés peuvent se permettre.
- "Enfants de la coca" -
Dans ce que l'on appelle "l'arc de déforestation amazonien", le cheptel bovin est passé de 1,08 million de têtes de bétail en 2016 à 1,74 millions en 2019 (+60%), selon la Fondation pour la conservation et le développement durable.
Après l'accord de paix, certains cultivateurs de coca se sont essayés à d'autres cultures, mais au final ont perdu en revenus. Le sol amazonien "n'est pas le lieu le plus favorable à l'agriculture", fait remarquer M. Maretti.
En ce jour de week-end, les paysans d'un petit village se retrouvent autour de la danse, de la bière, des tables de billard et des traditionnels combats de coqs.
Une chanson populaire mexicaine résonne dans la nuit. "On m'appelle le fils de la coca", reprend en coeur l'assistance. La culture de la feuille de coca, avouent-ils, est la seule chose rentable sur ces terres.
Au milieu de la fête, des histoires circulent sur ceux qui ont repris la collecte ou le "grattage de la coca", cette fois pour le compte des dissidents des FARC qui ont repris les armes après l'accord de 2016, et seraient près de 2.700 hommes dans cette zone.
"Nous défrichons la jungle (...) pour planter de la coca car c'est la seule chose qui nous fait vivre, faute de garanties de la part du gouvernement", justifie le défricheur au visage dissimulé.
Un cultivateur de coca gagne par mois près de 1.700 dollars, dans un pays où le salaire mensuel minimum est de 248 dollars.
Même si c'est dans une moindre mesure, la culture de la coca contribue aussi à la déforestation. Dans le Guaviare, 3.227 hectares y sont consacrées, selon l'ONU, pour plus de 124.000 dans tout le pays, premier producteur et exportateur mondial de cocaïne.
Depuis le début du XXème siècle, des familles venues de tout le pays ont colonisé et défriché la jungle amazonienne. Avant la coca, au début des années 1900, ce fut le boom du caoutchouc. Puis vinrent les déplacés des guerres.
Personne ne sait à qui appartient le terrain ici, répètent les paysans du coin.
La réforme agraire prévue par l'accord de 2016 est toujours en souffrance et les signataires affirment que c'est le point le moins avancé en cinq ans de mise en œuvre.
Dans le Guaviare, on prédit une paysannerie "en colère" : "avec la faim, il n'y a pas de paix", prévient Edilberto Lozada.
<https://information.tv5monde.com/info/en-colombie-l-amazonie-victime-insoupconnee-des-accords-de-paix-435826>
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7- Grippe aviaire : un total de cinq élevages touchés en France, tous dans le Nord, AFP, 09/12/21, 22:00
Myriam Lemetayer

Cinq élevages français du nord de la France ont été infectés par la grippe aviaire en l'espace de deux semaines, réveillant le spectre de la crise qui a fait des ravages l'an dernier.
La France comptait au 8 décembre cinq foyers d'influenza aviaire hautement pathogène (communément appelée grippe aviaire) en élevage, neuf cas en faune sauvage, trois cas en faune sauvage captive (oies ou cygnes ne migrant pas) et trois cas en basse-cours, liste le ministère de l'Agriculture sur son site internet.
La préfecture du Nord a pris jeudi de nouvelles mesures de protection sanitaire : dans une "zone de surveillance" de 10 km autour des foyers, des visites vétérinaires et des prélèvements seront réalisés et la chasse des gibiers d'eau et des gibiers à plumes est interdite, indiquent les autorités dans un communiqué.
Cette zone s'étend sur plus d'une trentaine de communes, dans la région la plus septentrionale du département du Nord.
La France compte autour de 20.000 élevages de volailles élevées pour la viande, les oeufs ou le foie gras. 
Le virus avait été identifié une première fois en élevage le 26 novembre au sein d'une exploitation de la commune de Warhem (Nord) où 160.000 poules pondeuses étaient élevées toute l'année en bâtiment.
Quatre autres cas ont depuis été confirmés dans ce même département. A chaque cas en élevage, les animaux sont abattus. 
"Il faut absolument trouver la cause de la contamination et essayer de contrôler très vite la situation", a réagi après de l'AFP Laurent Verhaeghe, président du syndicat agricole FDSEA du Nord. 
Il rappelle que "tant que la situation n'est pas assainie", les éleveurs ne pourront pas mettre en production d'autres animaux - "ce sont des manques à gagner incroyables parce que les charges fixes continuent sur les exploitations". 
Auparavant, remarque le responsable syndical, "c'était plutôt le sud [de la France] qui était concerné mais aujourd'hui ça arrive chez nous".
L'an dernier à la même époque, le virus commençait à se répandre dans les élevages de canards du Sud-Ouest. Cette crise - la troisième depuis 2015 - avait fini par être enrayée au prix de l'abattage, souvent préventif, de plus de 3,5 millions de volailles, essentiellement des palmipèdes.
- Fronde contre le confinement -
Récurrentes, les crises sanitaires dues à la grippe aviaire génèrent des coûts considérables pour les professionnels et l'Etat, ainsi que des pertes de marché à l'export.
Pour réduire les risques de contamination, les autorités sanitaires ont demandé début novembre à tous les producteurs plein air et bio de confiner leurs volailles afin d'éviter les contacts avec les oiseaux migrateurs potentiellement porteurs du virus. Mais les premiers cas ont été détectés dans des élevages conventionnels, en bâtiment, ravivant la colère des syndicats agricoles Confédération paysanne et Modef qui dénoncent l'obligation de claustration.
"Nous n'avons cessé de dire qu'enfermer les animaux des élevages plein air n'empêcherait pas l'épidémie, ce qui est bien le cas. Le risque de propagation du virus dans les élevages en bâtiment est avéré et su depuis longtemps. Rendre responsable et coupable l'élevage plein air ne sert que les intérêts de celles et ceux qui souhaitent industrialiser l'agriculture", affirment-ils jeudi dans un communiqué.
Avec six autres organisations, dont la Fédération nationale d'agriculture biologique, les syndicats ont déposé des recours devant le Conseil d'Etat et soutiennent les éleveurs réfractaires au confinement.
Dès le premier cas en élevage, la France avait perdu son statut "indemne" d'influenza aviaire qu'elle venait de retrouver le 2 septembre.
Des marchés se ferment alors automatiquement (Afrique du Sud, Chine, Corée, Cuba, Madagascar, Philippines...), entravant par exemple la commercialisation des poussins et canetons d'un jour - vendus pour être élevés sur place - ou des parties des animaux non consommées en France, comme les pattes et langues de canard ou les crêtes de coq.
<https://information.tv5monde.com/info/grippe-aviaire-un-total-de-cinq-elevages-touches-en-france-tous-dans-le-nord-435907>
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8- En dix ans, 100 000 exploitations agricoles ont disparu en France, d'après le recensement agricole décennal, France info, 09/12/21, 23:21

Cela représente une baisse d'environ 20% en dix ans d'après l'enquête. Une tendance depuis les années 1970.
Le ministère de l'Agriculture révèle vendredi 10 décembre les résultats de son recensement agricole décennal. Selon les informations de franceinfo, les résultats de cette enquête font état de la disparition de 100 000 exploitations à travers la France, ce qui représente une baisse d'environ 20% en dix ans. Cette tendance baissière est en marche depuis les années 1970.
Dans le même temps, la surface agricole utile est restée plutôt stable, et représente toujours 50% du territoire métropolitain contre 51% il y a dix ans. Cela signifie que la taille des exploitations a continué d'augmenter, elle atteint aujourd'hui 69 hectares en moyenne, soit 14 hectares de plus qu'il y a dix ans.
Les productions qui ont été les plus touchées par ces transformations sont les élevages ovins, de bovins, de porc, de volaille, la production de lait et la viticulture. L'horticulture et le maraîchage sont en légère augmentation (+1%).
>> Suite à lire à :
<https://www.francetvinfo.fr/economie/emploi/metiers/agriculture/en-dix-ans-100-000-exploitations-agricoles-ont-disparu-en-france-d-apres-le-recensement-agricole-decennal_4875477.html>
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9- Pollution, érosion, raréfaction : la FAO s’alarme de la dégradation des terres et des eaux, Le Monde, maj le 10/12/21 à 05h21
Mathilde Gérard

Un rapport de l’agence de l’ONU pour l’alimentation et l’agriculture dresse un constat accablant de l’état des sols et des eaux, soumis à un niveau de pression inédit pour nourrir la population. 
Comment nourrir une population mondiale croissante sans épuiser les ressources de la planète ? Pour nourrir la réflexion face à ce défi inextricable, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) publie, jeudi 9 décembre, un rapport sur l’état des ressources en terres et en eau. Son sous-titre, « Des systèmes au bord de la rupture », ne laisse pas de place au doute : il y a « urgence à agir », écrit l’agence, car « une pression sans précédent » s’exerce sur les ressources naturelles, « poussées à la limite de leurs capacités de production ».
Le constat que dresse la FAO est alarmant. « Surexploitation, mauvais usage, dégradation, pollution et raréfaction croissante » : un tiers de nos sols est modérément à fortement dégradé, selon l’agence onusienne, dont la publication vient compléter un corpus déjà lourd de travaux et d’expertises sur l’état des terres et de l’eau. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) avait notamment alerté en 2019 sur l’exploitation intensive des ressources, qui compromet notre capacité à faire face au réchauffement climatique, mais aussi à assurer nos conditions de vie et de subsistance.
Désertification de la mer d’Aral
Selon cette nouvelle étude de la FAO, l’Asie du Sud est la région la plus touchée par la dégradation des terres liées aux activités humaines, avec un peu plus de 41 % de sa superficie concernée (hors zones désertiques). Mais en regardant la répartition géographique en valeur absolue, l’Afrique subsaharienne abrite, à elle seule, un cinquième des terres dégradées, suivie par l’Amérique du Sud (17 % de ces terres).
Les ressources en eau ne se portent pas mieux : 10 % des capacités provenant des cours d’eau et des aquifères sont prélevées, dont plus des deux tiers le sont pour l’agriculture, principalement pour l’irrigation. « Les schémas actuels d’intensification de l’agriculture s’avèrent non durables », écrit la FAO.
Li Lifeng, directeur de la division des terres et des eaux de l’agence, détaille au Monde ces pressions : « Certaines pratiques agricoles, comme l’irrigation, provoquent de l’érosion et favorisent la salinisation des terres. Aujourd’hui, 10 % des terres arables sont menacées par l’accumulation des sels. L’usage intensif de plastiques, d’intrants chimiques et d’engrais entraîne aussi des effets pervers sur la qualité des sols », poursuit M. Li. Des effets qui se cumulent, et auxquels s’ajoute le réchauffement climatique.
> Lire aussi Pollution : la planète est devenue la première victime de l’industrie textile
Comme rappel de la sévérité de la menace, la FAO cite, entre autres exemples, l’assèchement de la mer d’Aral : jadis l’un des plus grands lacs du monde, situé entre six pays d’Asie centrale, notamment l’Ouzbékistan et le Kazakhstan, cette étendue a été victime de plans massifs de détournement d’eau dans les années 1960 pour irriguer des cultures de coton, jusqu’à devenir un quasi-désert. Salinisation et pollution par les pesticides ont achevé de décimer les espèces de poissons présentes dans les cours d’eau en amont, mettant fin aux activités de pêche dont dépendait une partie de la population, contrainte à l’exil.
Inégalités planétaires
« Par rapport à notre précédente évaluation d’il y a dix ans, les défis auxquels nous faisons face se sont aggravés », souligne Li Lifeng. Et les populations les plus vulnérables économiquement se retrouvent les plus affectées.
La FAO insiste sur les inégalités planétaires dans l’accès aux ressources : dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, 77 % des petites exploitations se trouvent dans des régions où l’eau est rare, et moins d’un tiers d’entre elles a accès à l’irrigation. Si l’Europe connaît un faible niveau de stress hydrique, de 8,3 %, celui-ci oscille entre 45 % et 70 % en Asie de l’Est et en Asie de l’Ouest. Et l’évolution dans le temps n’incite pas à l’optimisme : en Afrique subsaharienne par exemple, les disponibilités en eau par habitant ont diminué de 40 % au cours de la dernière décennie et la superficie agricole est passée de 0,80 hectare à 0,64 hectare par habitant entre 2000 et 2017.
Un sombre bilan, alors que la FAO estime que le niveau de production alimentaire devra progresser de près de 50 % d’ici à 2050 pour répondre à la demande mondiale d’une population estimée à 9,7 milliards d’habitants à cet horizon. Selon l’agence, « l’Asie du Sud et l’Afrique subsaharienne devront plus que doubler leur production agricole pour répondre aux besoins estimés en calories. Le reste du monde devra augmenter sa production d’au moins 30 % ». 
> Lire aussi Dégradation massive des terres à l’échelle planétaire
Or, les possibilités d’étendre les surfaces cultivées sont très limitées, voire nulles, d’autant que l’urbanisation rapide (55 % de la population mondiale vivait en milieu urbain en 2018, et cette part grimperait aux deux tiers de la population en 2050) empiète sur les terres agricoles les plus fertiles. « Il n’y a plus de nouvelles terres disponibles », met en garde Li Lifeng, qui rappelle que, depuis 2010, les surfaces agricoles ont déjà perdu 128 millions d’hectares, principalement des terres qui étaient dédiées au pâturage.
« Un chiffre retient mon attention, note Caroline Lejars, directrice ajointe pour le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad) de l’unité mixte de recherche G-eau (gestion de l’eau). Depuis vingt ans, la demande en eau augmente deux fois plus vite que la population mondiale. » Une discordance qui s’explique par l’urbanisation et les changements de régime alimentaire dans une grande partie du monde, où la consommation de viande est en forte croissance. Si le Cirad n’est pas signataire du rapport de la FAO, l’institution de recherche a néanmoins envoyé des travaux contributifs à l’agence de l’ONU.
> Lire aussi L’impact de la pollution de l’eau est sous-estimé, selon la Banque mondiale
« On constate que l’accès à l’eau a permis à un grand nombre de petits agriculteurs de sortir de la pauvreté, poursuit Mme Lejars. Mais les politiques d’investissement de ces dix dernières années ont non seulement renforcé la pression sur les ressources, mais aussi accru les inégalités. »
« Déséquilibres extrêmes » sur les terres agricoles
La FAO insiste ainsi sur la nécessité d’affecter de façon plus équitable les terres agricoles, constatant que celles-ci sont soumises à des « déséquilibres extrêmes »et que les grosses exploitations commerciales « se taillent la part du lion ». Plus de la moitié de la superficie agricole est en effet occupée par des exploitations de plus de 500 hectares, tandis que les petites structures (inférieures à deux hectares) représentent 84 % des exploitations, mais seulement 12 % de la surface agricole mondiale.
L’accès inéquitable au foncier pose aussi la question des inégalités de genre : les femmes constituent plus de 37 % de la main-d’œuvre agricole rurale au niveau mondial, et même 48 % dans les pays à faible revenu, mais elles sont moins de 15 % à être propriétaires de terres agricoles.
> Lire aussi l’archive (2019) : Le changement climatique affecterait l’alimentation de 90 % de la population mondiale d’ici 2100
Malgré ce bilan inquiétant, les tendances peuvent être inversées et « la dégradation des sols est réversible », estime la FAO, qui juge urgent de recourir à des pratiques agricoles plus durables et mieux coordonnées, tenant compte de l’ensemble des besoins des populations (alimentation, énergie…). L’agence encourage par exemple les « infrastructures vertes », comme les plaines d’inondation, par rapport à la construction de digues, car elles permettent d’écouler l’eau lors de fortes crues, en favorisant la biodiversité et la qualité de l’eau.
Même la mer d’Aral, qui semblait condamnée à mort dans les années 1990, bénéficie depuis quelques années d’efforts de restauration qui lui ont permis de regrignoter une petite superficie, et favorisent le retour de certaines espèces aquatiques. Un équilibre fragile, mais qui ouvre la voie à une possible renaissance.
<https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/12/09/pollution-erosion-rarefaction-la-fao-s-alarme-de-la-degradation-des-terres-et-des-eaux_6105334_3244.html>
Sur le même sujet : 
> Insécurité alimentaire : des systèmes "au bord de la rupture" alerte l'ONU <https://www.novethic.fr/actualite/environnement/agriculture/isr-rse/insecurite-alimentaire-150390.html>, Novethic, 10/12/21
En savoir plus :
> Rapport. L’État des ressources en terres et en eau pour l’alimentation et l’agriculture dans le monde : Des systèmes au bord de la rupture <https://www.fao.org/land-water/solaw2021/fr/>, FAO, 2021
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10- Près d’un milliard d’euros gaspillés : enquête sur le fiasco du plan anti-pesticides, France Inter, 10/12/21, 06h11
Anne-Laure Barral, Cellule investigation de Radio France

800 millions d’euros devaient permettre de réduire l’usage des pesticides en France de moitié en 10 ans. Résultat : il a augmenté de 15 %. L’argent est parti dans des projets inefficaces, lorsqu’il n’a pas été tout simplement détourné.
En 2007, Jean-Louis Borloo, alors ministre de l’Environnement, lançait un grand projet : réduire de 50 % l’usage des pesticides, en 10 ans si possible, à travers un grand programme de subventions baptisé plan “Écophyto 2018”. En conclusion du Grenelle de l’environnement, Nicolas Sarkozy s’en félicite devant les représentants des organisations agricoles. Aujourd’hui pourtant, le député socialiste de Meurthe-et-Moselle Dominique Potier fulmine : “C’est une incurie. Il y a une telle dispersion de moyens que l’on s’y perd.” Dès 2014, alors à la tête d’une mission parlementaire, il constate que 361 millions d’euros ont été engloutis sans résultat.
Malgré ce constat d’échec, les financements augmentent. En 2019, la cour des comptes tire à son tour la sonnette d’alarme. Selon elle, non seulement ce plan de réduction des pesticides va mobiliser 800 millions d’euros entre 2009 et 2021, mais 400 millions d’euros de fonds publics dépensés pour les mêmes raisons par an, se sont rajoutés à cette somme. La France aurait donc dépensé plusieurs milliards pour réduire les usages de phytosanitaires en dix ans, sans tenir cette promesse, puisqu’au contraire, leur usage a augmenté en moyenne de près de 15 %.
>> Suite à lire à :
<https://www.franceinter.fr/societe/pres-d-un-milliard-d-euros-gaspilles-enquete-sur-le-fiasco-du-plan-anti-pesticides>
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11- Quatre questions sur les MOAH, ces dérivés d'hydrocarbures qui ont contaminé des aliments, selon l'ONG Foodwatch, France info, 10/12/21, 06:57

Leur dangerosité est encore méconnue, mais les autorités sanitaires estiment qu'il faut lutter contre leur présence dans les aliments. L'association de consommateurs Foodwatch a lancé, jeudi 9 décembre, une pétition pour demander à l'Union européenne de durcir la législation sur les hydrocarbures aromatiques d'huile minérale, ou MOAH. 
Présents notamment dans des encres utilisées sur les emballages, ou dans des nettoyants industriels, ils peuvent migrer dans certains produits alimentaires et sont considérés comme potentiellement cancérigènes. Une campagne de tests menée par l'ONG, la troisième en six ans, a permis d'en détecter des traces dans 19 produits vendus dans cinq pays, dont des bouillons cubes et de la margarine en France. Franceinfo vous résume ce que l'on sait de ces substances et du risque qu'elles représentent.
>> Suite à lire à :
<https://www.francetvinfo.fr/sante/environnement-et-sante/quatre-questions-sur-les-moah-ces-derives-d-hydrocarbures-qui-ont-contamine-des-aliments-selon-l-ong-foodwatch_4874941.html>
En savoir plus :
> Contamination des aliments par les huiles minérales : résultat des tests foodwatch <https://www.foodwatch.org/fr/actualites/2021/contamination-des-aliments-par-les-huiles-minerales-resultat-des-tests-foodwatch/>, 09/12/21
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12- Mode d’emploi pour manger du poisson sans (trop de) casse environnementale, Le Monde, 10/12/21, 06h58 
Pascale Krémer

La moitié des stocks mondiaux est en limite maximale d’exploitation, et un quart en cours d’effondrement ou déjà épuisé. Avant les fêtes, nous vous aiguillons pour faire les bons choix chez le poissonnier ou à l’hypermarché. 
La liste de la matinale
Huîtres, langoustines, saumon fumé ou poêlée de coquilles Saint-Jacques, cette année ? Immanquablement, la question se posera, au moment d’élaborer les menus de fêtes. Une autre interrogation émergera moins volontiers : peut-on encore consommer poissons, coquillages et crustacés en toute bonne conscience écologique ?
Nombre de Français ont stoppé, ou largement réduit, leurs achats de viande, sans jamais envisager de renoncer aux produits de la mer. Tout au contraire ! Naturel, doté d’indéniables qualités nutritionnelles, bon pourvoyeur de protéines pour peu de lipides (s’il est choisi maigre), donc star des régimes, et officiellement prescrit par les autorités sanitaires nationales, à raison de deux doses hebdomadaires, le poisson remplit toujours plus d’assiettes. En soixante ans, la consommation (moyenne, par personne) de produits issus de la mer a quasiment doublé en France (passant de 18 kg par an en 1960 à 34 kg) comme dans le monde (passant de 9 kg à 19 kg). La demande monte, les océans se vident.
La pêche, toujours plus intensive, industrialisée, affecte la biodiversité et les écosystèmes marins, par ailleurs soumis aux stress du changement climatique, de la pollution, de l’acidification. Preuve de l’épuisement de la ressource halieutique : malgré la puissance et la technicité croissante de l’armada mondiale de pêche, les tonnages prélevés (quelque 90 millions l’an) ne progressent plus depuis la fin des années 1980. Selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation, la moitié des stocks mondiaux est en limite maximale d’exploitation ; un quart en cours d’effondrement ou déjà épuisé. Comment, chez le poissonnier ou à l’hypermarché, limiter la casse environnementale ?
• Ce qu’il faudrait savoir (pour bien faire)
« La pêche est une activité de cueillette qui s’exerce sur un stock sauvage », rappelle Stéphan Beaucher, consultant indépendant en politique de gestion des pêches. Pour en réduire l’impact, les Français, gros consommateurs de produits de la mer (4e rang européen), devraient théoriquement orienter leurs achats en fonction de trois critères :
La méthode de pêche employée. Le chalutage, surtout lorsqu’il s’agit de chalutage de fonds, est une catastrophe pour les fonds marins. Il est par ailleurs non-sélectif dans ses prises. Les pêches à la ligne, au casier ou à la palangre (câble équipé de centaine d’hameçons) n’ont pas autant d’impact sur les écosystèmes.
L’état des stocks. La quantité de poissons d’une même espèce présents à un endroit donné est extrêmement fluctuante dans le temps et selon les zones géographiques de capture. Une chose est sûre, pour l’ONG internationale Oceana : « La Méditerranée est la mer la plus surpêchée du monde. 90 % des stocks y sont pêchés au-dessus des niveaux durables. »
La période de reproduction. Pour ne pas compromettre le renouvellement de la ressource, l’association Greenpeace recommande, par exemple, de ne consommer le bar de ligne que de mi-mars à fin septembre.
• Où se renseigner (mais on est peu aidés)
Evidemment, hormis les spécialistes de la ressource halieutique, personne ne choisit son poisson au marché en croisant ces trois critères de durabilité. D’autres indicateurs existent, de fiabilité variable :
Un étiquetage souvent incomplet et incompréhensible. La réglementation impose que la zone de pêche (ou le pays d’élevage) et la catégorie de l’engin de pêche soient indiquées sur l’étiquette du produit non transformé de la pêche – ou sur panonceau, chez le poissonnier. Mais ces étiquettes sont le plus souvent imprécises et absconses, bardées de codes. Et toute information précise disparaît dès qu’il s’agit d’un plat préparé. L’UFC-Que choisir suggère de bannir les achats de poissons dont la méthode de pêche n’est pas spécifiée, le silence cachant souvent le chalut. Pour les boîtes de thon, cette omission est l’indice d’une pêche non sélective, à la palangre ou à la senne avec dispositif de concentration de poissons.
Des labels critiqués. MSC, le plus répandu d’entre eux (né en 1997 d’un travail mené par le WWF et Unilever), est jugé trop complaisant vis-à-vis des pêcheries industrielles par des associations comme Greenpeace, Bloom, l’UFC-Que choisir et même le WWF désormais. Le « Pavillon France » n’est pas un label environnemental, il certifie que le poisson a été pêché par un bateau français. Le Label rouge ne concerne que la qualité du produit lui-même. L’écolabel public « Pêche durable », lancé en 2017, n’est encore que très marginal.
Vive les applications ! Mr. Goodfish, programme européen initié par trois grands aquariums (dont Nausicaa, à Boulogne-sur-Mer), en partenariat avec l’Ifremer et l’Union internationale pour la conservation de la nature, labellise certains produits (pêche et élevage) et propose une appli gratuite relativement fiable puisque le niveau des stocks de poissons y est régulièrement mis à jour. Mr. Goodfish guide vers des consommations durables et de saison. Tout comme l’appli de « cuisine durable et collaborative » Etiquetable, adossée au guide des espèces à l’usage des professionnels (actualisé chaque année) de l’association Ethic Ocean.
• Changez de cap (consommez autrement)
« Le poisson doit devenir comme le gigot, un plat d’exception », résume le consultant Stéphan Beaucher. Déguster avec grande modération des poissons d’espèces plus variées, pêchés ou élevés durablement : telle est, en effet, l’urgente consigne donnée par les associations de préservation de la nature.
Réduire et diversifier l’apport en protéines animales provenant de ressources sauvages fragiles. Les recommandations de l’Organisation mondiale de la santé sont de 11,7 kg de poisson par personne et par an – ce qui accessoirement limite l’ingestion de mercure, d’autres polluants marins, ou d’antibiotiques lorsqu’on déguste certains poissons issus de la pisciculture. Saumon d’élevage, cabillaud, thon et crevettes tropicales représentent à eux seuls plus des trois quarts de la consommation française de produits aquatiques. Diversifier le contenu de son assiette réduit la pression exercée sur cette poignée d’espèces. Il est temps de réhabiliter des poissons plus petits, plus moches ou méconnus, mais souvent bons et peu chers : la vieille, le mulet, le chinchard, le congre, le tacaud, le merlan bleu, l’anchois, le lieu noir…
Jouer la proximité. Côté bilan carbone, le « bon » poisson ne peut venir du bout du monde. Or, sur les 34 kg de poisson consommés en moyenne annuellement par chaque Français, 24 kg sont importés, selon le WWF. Le site Internet du Comité national des pêches renseigne sur les élevages et pêches françaises – attention néanmoins au type de bateaux employés. Greenpeace recommande les poissons issus de la pêche française artisanale vertueuse (travaillant avec des engins dormants plutôt que traînants) : bar de ligne, thon germon des canneurs et ligneurs du Pays basque, cabillaud de mer d’Iroise des pêcheries normandes et bretonnes… Pour qui habite loin des littoraux, des plates-formes (comme Poiscaille) proposent désormais la livraison en circuits courts des produits d’une pêche durable.
L’aquaculture oui, mais bio et française (ou européenne). On est alors bien loin de la pisciculture marine conventionnelle, intensive, d’espèces carnivores (saumon de Norvège, d’Ecosse ou du Chili, crevettes des tropiques, daurade, bar…), particulièrement problématique, selon Stéphan Beaucher : « Comme le poisson mange du poisson, une pression certaine s’exerce sur les stocks sauvages, transformés en farines animales. Par ailleurs, ces élevages intensifs sont polluants. Et intègrent des antibiotiques à l’alimentation des poissons. » Sans compter les nombreux poissons évadés, « vecteurs de contamination du milieu sauvage. » 
S’il ne dit rien de l’impact environnemental de l’élevage, le label bio (AB) garantit au moins une densité raisonnable dans les cages ainsi qu’une alimentation des poissons issue d’une pêche soumise à quotas, complétée de végétaux bio, sans OGM ni pesticides ni stimulants de croissance, et limitant les antibiotiques. Encore relativement confidentielle en France, la pisciculture bio concerne le bar, la daurade, le maigre et la truite.
• Le pense-bête : à bannir, à privilégier…
Eviter les espèces les plus menacées, et celles dont la pêche ou l’élevage ont le plus d’impact : l’espadon (surtout de Méditerranée), tous les poissons des grands fonds (flétan, grenadier de roche, empereur, sabre noir, hoki, sébaste, lingue bleue…), les espèces pêchées essentiellement au chalut (cabillaud, merlan, églefin, bar et langoustines) ainsi que le saumon d’élevage conventionnel. Pour le cabillaud (morue), une exception est possible s’il vient de l’Atlantique Nord (et non de mer d’Irlande ou de mer celtique). En Méditerranée, merlu, rouget, sole et turbot sont surexploités. Pour le thon en boîte, privilégier le thon Listao dont les stocks sont moins préoccupants que ceux du thon Albacore, et une marque précisant qu’il a été pêché à la canne, à la ligne de traîne ou à la senne sans dispositif de concentration de poissons.
Préférer les espèces dont les stocks sont plus fournis : merlan, hareng, anchois, maquereau, lieu noir, chinchard, mulet noir, poisson lapin, merlu… Sans oublier tourteaux (pêchés en casiers), coquilles Saint-Jacques, moules et huîtres. La conchyliculture présente l’énorme avantage de ne nécessiter aucun intrant (ni farines ni huiles animales) puisque les coquillages se nourrissent eux-mêmes. La France en est le premier pays producteur d’Europe.
> Lire aussi A Saint-Quay-Portrieux, la saint-jacques sort de sa coquille
§ Nos idées pour les fêtes : tourteaux et huîtres, homard breton pour les plus fortunés, truite fumée provenant d’un élevage bio, quelques coquilles Saint-Jacques et du lieu noir.
<https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/12/10/mode-d-emploi-pour-manger-du-poisson-sans-trop-de-casse-environnementale_6105413_3244.html>
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13- Les plastiques dans les sols menacent la sécurité alimentaire, la santé et l'environnement (FAO), ONU Info, 10/12/21

La pollution plastique est devenue omniprésente dans les sols agricoles, menaçant la sécurité alimentaire, la santé des populations et l'environnement, selon un nouveau rapport publié par la FAO, l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture.
Alors que les déchets plastiques qui jonchent les plages et les océans attirent l'attention, le rapport de la FAO intitulé Évaluation des plastiques agricoles et de leur durabilité : un appel à l'action suggère que les terres que nous utilisons pour cultiver nos aliments sont contaminées par des quantités encore plus importantes de polluants plastiques.
« Les sols sont l'un des principaux récepteurs des plastiques agricoles et on sait qu'ils contiennent des quantités de microplastiques plus importantes que les océans », a déclaré Maria Helena Semedo, Directrice générale adjointe de la FAO.
Des chiffres surprenants
« Chaque année nous avons 12,5 millions de tonnes de produits plastiques qui sont utilisés dans la production végétale et animale », a expliqué le Directeur adjoint du Bureau du changement climatique, de la biodiversité et de l'environnement à la FAO, Zitouni Ould-Dada, au micro d’ONU Info.
« Et c’est une quantité presque équivalente aux 11 millions de tonnes qui sont rejetés sous forme de déchets marins. Et à cela s'ajoute aussi à près de 37 millions de tonnes utilisés dans les emballages alimentaires », a-t-il ajouté. « Les plus grands utilisateurs de produits plastiques sont les secteurs de l'agriculture et de l’élevage qui consomment environ 10 millions de tonnes par an et c'est un chiffre important parce que c'est à peu près 3% de la production mondiale de plastique ».
La pêche et l’aquaculture sont aussi responsables pour 2 millions de tonnes et la sylviculture est responsable pour 0,2 million de tonnes de produits plastiques.
Le rapport indique que l'Asie est le plus grand utilisateur de plastiques dans la production agricole, représentant près de la moitié de l'utilisation mondiale. En outre, en l'absence d'alternatives viables, la demande de plastique dans l'agriculture ne peut qu'augmenter.
Alors que la demande de plastique agricole continue d'augmenter, Mme Semedo a souligné la nécessité de mieux surveiller les quantités qui « fuient dans l'environnement à partir de l'agriculture ».
>> Suite à lire à :
<https://news.un.org/fr/story/2021/12/1110552>
En savoir plus :
> Rapport. L’État des ressources en terres et en eau pour l’alimentation et l’agriculture dans le monde : Des systèmes au bord de la rupture <https://www.fao.org/land-water/solaw2021/fr/>, FAO, 2021
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14- En Inde, les agriculteurs quittent New Delhi au terme d’un an de manifestations contre la réforme agraire de Narendra Modi, Le Monde avec AFP, 11/12/21, 11h34 

Des centaines de manifestants dansaient et célébraient leur « victoire », samedi 11 décembre, au moment de lever les barrages routiers et de démanteler leurs abris de fortune sur de grandes autoroutes. 
Après une année de mobilisations et une lutte finalement victorieuse, ils retournent dans leurs champs. Des milliers d’agriculteurs indiens empaquetaient leurs affaires et démontaient les villages de tentes, samedi 11 décembre, à la périphérie de New Delhi, afin de rentrer chez eux au terme d’une année de manifestations contre la politique agraire du gouvernement. Des centaines d’entre eux dansaient et célébraient leur « victoire », samedi matin, au moment de lever les barrages routiers et de démanteler leurs abris de fortune sur de grandes autoroutes.
Le premier ministre, Narendra Modi, avait fait voter par le Parlement le mois dernier l’abrogation des trois réformes agraires qui, selon les manifestants, permettraient aux entreprises privées de contrôler le secteur agricole du pays. Cependant, les protestataires avaient d’abord refusé de quitter leurs campements, mettant en avant d’autres revendications, comme une garantie de prix minimaux fixes sur leurs produits agricoles.
Le gouvernement a promis la constitution d’une commission sur le sujet et s’est engagé à l’arrêt des poursuites contre les agriculteurs qui brûlent les chaumes des cultures, accusés de polluer l’air de New Delhi chaque hiver.
> Lire aussi Inde : en renonçant à sa réforme agricole, Narendra Modi cède pour la première fois lors d’un conflit social
Plus grande crise pour le gouvernement de Narendra Modi
Les autorités ont aussi accepté le versement de compensations aux familles des centaines d’agriculteurs qui, selon eux, sont morts pendant les manifestations ainsi que l’arrêt des procédures criminelles contre les manifestants.
Ce mouvement des agriculteurs, la plus grande crise pour le gouvernement de M. Modi depuis son arrivée au pouvoir, souligne à la fois la crise structurelle traversée par l’agriculture paysanne et le manque d’empathie et de dialogue de la part du premier ministre, qui avait pourtant promis, lors de son élection en 2014, de doubler leurs revenus d’ici à 2022.
Les agriculteurs représentent près de la moitié de la population – 650 millions d’Indiens, mais seulement 14 % du produit intérieur brut (PIB). Ils détiennent des parcelles de plus en plus petites et sont de plus en plus endettés sous la pression d’un mode de production intensif issu de la « révolution verte » des années 1960.
> Lire aussi Dans le Bihar, Etat le plus pauvre de l’Inde, les paysans livrés à la loi du marché
Les lois agricoles voulues par M. Modi avaient été votées en septembre 2020 pour autoriser les agriculteurs à vendre leur production aux acheteurs de leur choix, plutôt que de se tourner exclusivement vers les marchés contrôlés par l’Etat leur assurant un prix de soutien minimal (PSM) pour certaines denrées. Nombre de petits exploitants agricoles y étaient opposés, s’estimant menacés par cette libéralisation qui, disaient-ils, risquait de les obliger à brader leurs marchandises aux grandes entreprises.
Après des manifestations dans le Pendjab et le Haryana, dans le nord du pays, des dizaines de milliers d’agriculteurs s’étaient dirigés vers la capitale, où ils avaient été violemment repoussés par la police, marquant le début d’une impasse entre les deux parties qui a duré un an.
Depuis sa réélection, en mai 2019, M. Modi joue une stratégie de tensions, exacerbe les antagonismes pour discréditer les opposants à ses réformes. En décembre 2019, une loi attribuant la nationalité indienne aux réfugiés, sauf s’ils sont musulmans, avait suscité un mouvement de protestation d’une ampleur inédite dans tout le pays. Durant des mois, des Indiens étaient descendus dans la rue et la contestation n’avait pris fin qu’en raison de l’arrivée de l’épidémie de Covid-19 et le confinement général ordonné par le premier ministre.
> Lire aussi La colère des paysans indiens prend un tour politique
<https://www.lemonde.fr/international/article/2021/12/11/en-inde-les-agriculteurs-quittent-new-delhi-au-terme-d-un-an-de-manifestations-contre-la-reforme-agraire-de-narendra-modi_6105682_3210.html>
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15- Chronique. « Aucun gouvernement n’a suivi ou devancé avec une telle constance les desiderata du productivisme agricole », Le Monde, maj le 12/12/21 à 02h10 
Stéphane Foucart

Un canular orchestré par Extinction Rebellion annonçait, fin novembre, la fusion de la FNSEA et du ministère de l’agriculture. Une farce pas si absurde, relève Stéphane Foucart, journaliste au « Monde », dans sa chronique.
Inutile de le nier, ce fut un choc. La rédaction du Monde a reçu, samedi 20 novembre, un bref communiqué conjoint de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) et du ministère de l’agriculture et de l’alimentation. Les deux organisations annonçaient une mesure historique : leur fusion au sein d’une même structure. « Mme Christi[a]ne Lambert, présidente de la FNSEA, et M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation, sont heureux de vous annoncer le rapprochement de leurs équipes au sein d’une même administration », lisait-on dans le texte. Ce rapprochement devait aboutir dans le courant du second semestre 2022.
C’était bien sûr un canular, orchestré par l’association Extinction Rebellion, qui avait poussé la farce jusqu’à ouvrir un site Web brocardant celui du syndicat agricole. Mais, avant d’en rire, certains destinataires sont passés par un bref moment de sidération : la fusion de la FNSEA et du ministère était-elle vraiment engagée ? Quelques fractions de seconde d’hésitation peuvent en dire bien plus que de longues analyses ; au cours des dernières années, la porosité entre le pouvoir et l’agriculture productiviste a été telle qu’elle a rendu l’absurde fugitivement envisageable.
Une cécité enthousiaste
Dans le passé récent, aucun gouvernement n’avait, avec une telle ardeur, une telle constance et une si enthousiaste cécité, suivi ou devancé les desiderata et les commandements du productivisme agricole. Mise de la gendarmerie nationale à la disposition de la FNSEA, avec la création de la cellule Demeter (chargée de surveiller les critiques de l’agriculture industrielle), démantèlement des aides au maintien de l’agriculture biologique et projet d’attribuer des subventions « vertes » à l’agriculture conventionnelle, abandon de facto de la lutte contre les nitrates issus de l’élevage intensif, soutien actif à la construction de méga-bassines pour l’irrigation, recul sur la sortie du glyphosate, remise en selle des néonicotinoïdes, volonté de déréguler les « nouveaux OGM »… La liste est ouverte.
Le 7 décembre, les associations participant au suivi du quatrième plan national santé-environnement (PNSE4) sont, elles aussi, passées par un moment de sidération. Au cours de la réunion de leur groupe de travail leur était présenté un Livre blanc proposant « 36 actions à mettre en place pour une politique française ambitieuse. “Une seule santé” » (l’approche « Une seule santé », One Health en anglais, vise à intégrer dans un même cadre la santé des humains, des animaux et des écosystèmes).
> Lire aussi « Il n’y a ni contenu ni chiffre. C’est vide » : le projet de plan national santé environnement du gouvernement fortement critiqué
Le Livre blanc en question affichait, entre autres, les logos de la FNSEA, de l’Union des industries de la protection des plantes (UIPP) ou du Syndicat de l’industrie du médicament vétérinaire (SIMV). Le document était une commande, passée par une firme pharmaceutique (MSD Santé Animale) à un cabinet de conseil en lobbying (RPP Group), et a été coordonné par Jean-Luc Angot, coprésident du groupe de travail « Une seule santé », chargé du suivi du PNSE4 et… inspecteur général au ministère de l’agriculture.
Des actions étrangement orientées
Un mélange des genres si troublant que plusieurs membres du groupe de travail se sont demandé si ce fameux Livre blanc avait un caractère officiel. Interrogé, M. Angot dément. « Ce n’est qu’une contribution parmi d’autres », dit-il, précisant avoir œuvré bénévolement. « J’ai travaillé librement, sans pression, de même que la vingtaine de personnalités qui ont participé à ce document », poursuit-il.
Interrogé, le cabinet RPP Group précise avoir coopté ces personnalités – peut-être n’était-il pas nécessaire de vouloir, en plus, leur tenir la plume. Parmi elles, des vétérinaires, un écologue, deux infectiologues, mais aussi un président de chambre d’agriculture, un représentant de la FNSEA, la directrice générale de l’UIPP, deux responsables du SIMV…
Aussi, certaines des « 36 actions » prônées par le document semblent-elles parfois étrangement orientées. La troisième proposition invite par exemple à lancer une initiative qui « devra s’intéresser à la durabilité des outils de biocontrôle et des biopesticides, ainsi qu’aux idées reçues contre les produits phytosanitaires, et la manière d’y faire face ». Pourquoi diable s’intéresser à la durabilité des produits de biocontrôle (utilisés en agriculture bio) et non aux risques sanitaires et environnementaux des pesticides de synthèse, bien plus problématiques ? Et ces « idées reçues » à l’encontre de ces derniers, auxquelles il faudrait « faire face », quelles sont-elles ?
> Lire aussi Après une année de baisse, un important rebond des ventes de pesticides en 2020
La sixième proposition consiste en une étude qui répondrait entre autres à la question : « Est-il justifié de réduire la densité des élevages par crainte d’une épizootie ? » Outre que le sujet est aussi, et peut-être d’abord, de nature éthique, c’est surtout la contamination de la ressource en eau par les nitrates issus des élevages intensifs et la prolifération d’algues vertes qui posent de la manière la plus aiguë la question de la concentration des animaux. Mais, sans surprise, le mot « nitrates » n’apparaît qu’une seule fois dans les 44 pages du document. Et ne fait l’objet d’aucune proposition.
« Je n’ai pas le sentiment d’avoir participé à un document de lobbying, j’ai essayé de mettre tout le monde autour de la table », dit M. Angot. L’idée qu’un cabinet de lobbying mandaté par une entreprise pourrait produire autre chose que du lobbying ne vient pas de nulle part. Pour comprendre, il faut revenir au sommet One Health, organisé fin septembre 2020 par la même société, MSD Santé Animale, colloque dont le fameux Livre blanc est la continuité. L’allocution introductive de l’événement, lui donnant l’onction de l’intérêt général, était assurée par le ministre de l’agriculture en personne, Julien Denormandie. Ce n’est pas un canular.
<https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/12/11/aucun-gouvernement-n-a-suivi-ou-devance-avec-une-telle-constance-les-desiderata-du-productivisme-agricole_6105704_3232.html>
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16- Bretagne : La justice retoque un projet de poulailler géant prévoyant d'accueillir 120.000 volailles, 20 Minutes avec AFP, 12/12/21, 12h33
C.A. avec AFP

Agriculture. Le tribunal administratif de Rennes (Ille-et-Vilaine) a annulé l’autorisation environnementale accordée aux porteurs du projet
C’est un jugement « qui fera jurisprudence », selon la Confédération Paysanne. Vendredi, le syndicat agricole a appris la décision du tribunal administratif de Rennes d’annuler l’arrêté préfectoral qui autorisait la construction d’un poulailler géant à Langoëlan, dans le Morbihan. « Une victoire marquante », selon le syndicat, qui avait saisi la justice avec l’appui de l’association Eau et Rivières de Bretagne. L’arrêté préfectoral attaqué concernait l’autorisation environnementale accordée à un élevage qui prévoyait 120.000 volailles au sein de l’EARL de Kermaria. Deux poulaillers de 2.200 m² étaient envisagés pour accueillir ces poules pendant quarante-cinq jours.
Mobilisées contre ce poulailler géant, les opposants dénonçaient notamment des insuffisances dans les études d’impact environnemental du projet. Dans ses conclusions d’annulation, le tribunal administratif relève que l’étude d’impact ne mentionne pas « les effets éventuels de retombées d’ammoniac » alors que « des habitations sont situées à moins de 400 mètres des poulaillers et de l’aire de compostage ».
« Inexactitudes, omissions et insuffisances »
Dans cette petite commune située à la frontière du Morbihan et des Côtes d’Armor, à proximité d’une zone Natura 2000, la population aurait été potentiellement exposée et surtout mal informée, selon la justice. Le tribunal pointe « les inexactitudes, omissions et insuffisances de l’étude d’impact ».
Le 20 novembre, environ 200 personnes s’étaient rassemblées à Langoëlan, commune de 400 habitants, pour dénoncer ce projet de poulailler géant « jamais vu en France », selon le Collectif contre les fermes usines.
<https://www.20minutes.fr/planete/3195507-20211212-bretagne-justice-retoque-projet-poulailler-geant-prevoyant-120000-volailles>
Sur le même sujet : 
> Tarn : les habitants luttent contre une ferme usine de 200 000 poules, Mr Mondialisation, 12/12/21
Depuis des mois, la ferme usine de Lescout, dans le Tarn, est au cœur d’un soulèvement citoyen : odeurs insoutenables, présence d’ammoniac dans l’air, émissions de poussières, non-respect des règlements d’urbanisme, rapports inquiétants,… Des procédures judiciaires ont été lancées contre cet élevage de près de 200 000 poules pondeuses – l’un des plus grands de France – qui produit 60 millions d’œufs industriels chaque année. Toutefois, contre l’avis du maire et d’une grande partie de la population locale, la Préfecture a récemment autorisé que la ferme industrielle démarre un nouveau chantier d’agrandissement… On fait le point sur cette lutte locale aux enjeux sanitaires, écologiques et animalistes. 
>> Suite à lire à :
<https://mrmondialisation.org/tarn-les-habitants-luttent-contre-une-ferme-usine-de-200-000-poules/>
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17- Environnement : un rapport dénonce l’impact toujours plus néfaste de grandes entreprises européennes de la viande et des produits laitiers, Le Monde avec AFP, 13/12/21, 08h17

Selon l’Institute for Agriculture and Trade Policy, trente-cinq des plus grandes sociétés de ces secteurs ont été responsables, en 2018, de 7 % des émissions de l’Union européenne. L’ONG appelle les gouvernements à « réglementer l’agrobusiness ». 
Malgré la crise climatique, les émissions de gaz à effet de serre de géants européens de l’industrie de la viande et des produits laitiers continuent d’augmenter. C’est la conclusion d’un rapport publié, lundi 13 décembre, par l’Institute for Agriculture and Trade Policy (IATP).
Cette ONG basée à Minneapolis, aux Etats-Unis, mais ayant également un bureau à Berlin, en Allemagne, passe en revue trente-cinq des plus grandes entreprises du secteur ayant leur siège dans l’Union européenne (UE), au Royaume-Uni et en Suisse, et examine leurs éventuels plans climat et les émissions englobant l’ensemble de leur chaîne d’approvisionnement, en particulier l’élevage, gros émetteur de gaz à effet de serre.
D’après les résultats des analyses, ces entreprises ont été responsables en 2018 de 7 % des émissions de l’UE et les émissions des vingt premières d’entre elles dépassent celles des Pays-Bas.
> Lire aussi Les grands groupes laitiers épinglés pour leur impact sur le climat
Le rapport se concentre particulièrement sur dix grandes entreprises ayant des objectifs climat plus ou moins précis. Pour sept d’entre elles, sur deux ans, les émissions absolues ont augmenté. Par exemple, côté transformation de viande, entre 2016 et 2018, de + 45 % pour l’irlandais ABP et + 30 % pour l’allemand Tönnies ; et côté lait, entre 2015 et 2017, respectivement de + 15 % et + 30 % pour les français Danone et Lactalis.
Astuces comptables et « greenwashing »
« L’empreinte carbone des géants européens du lait et de la viande concurrence celle des géants des énergies fossiles, mais ils continuent à agir en toute impunité », a dénoncé Shefali Sharma, directrice Europe de l’IATP dans un communiqué.
Et « la poignée d’entreprises qui ont des plans climat se repose sur des astuces comptables, le greenwashing et les effets douteux des compensations pour distraire l’attention des changements fondamentaux nécessaires pour réduire les émissions, tout en reportant une grande partie des coûts et des risques sur les paysans » qui les fournissent, a-t-elle ajouté.
> Lire aussi Laurence Tubiana : « Le “greenwashing” est aujourd’hui le nouveau déni climatique »
Le rapport, qui appelle les gouvernements à « réglementer l’agrobusiness », dénonce notamment l’utilisation par ces entreprises du concept d’intensité carbone, c’est-à-dire les émissions par litre de lait ou kilogramme de viande, qui peuvent diminuer sans pour autant réduire les émissions absolues car dans le même temps la production et le nombre de têtes de bétail augmentent.
Sur les vingt entreprises analysées, seules quatre (Arla, Danone, FrieslandCampina et Nestlé) déclarent les émissions totales de leur chaîne d’approvisionnement et seules trois (Nestlé, FrieslandCampina et ABP) ont annoncé leur intention de réduire leurs émissions absolues en incluant leur chaîne d’approvisionnement, selon le texte. Mais « aucune preuve publique n’indique que l’une de ces entreprises envisage de modifier en profondeur son modèle de production et de transformation du bétail à grande échelle ».
L’IATP dénonce également la tentative de ces grandes entreprises de dévier la responsabilité à la fois sur les éleveurs et sur les consommateurs européens. Même si ces derniers consommaient moins de viande et de lait, cela aurait des « effets limités » pour réduire les émissions de l’élevage européen en raison de la part importante des exportations, note le rapport.
> Écouter aussi  La viande végétale à la conquête du monde
<https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/12/13/environnement-un-rapport-denonce-l-impact-toujours-plus-nefaste-de-grandes-entreprises-europeennes-de-la-viande-et-des-produits-laitiers_6105796_3244.html>
En savoir plus :
> How Europe’s Big Meat and Dairy are heating up the planet <https://www.iatp.org/emissions-impossible-europe>, Institute for Agriculture & Trade Policy (IATP), 13/12/21
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18- Le lait "C'est qui le patron" devient le plus vendu en France, une première pour un produit équitable, Novethic, 13/12/21
Marina Fabre Soundron

La marque des consommateurs "C'est qui le patron", qui rémunère au prix juste les producteurs pour leur dégager un revenu décent, poursuit son irrésistible ascension. Sa brique de lait vendue en pack de six devient la première référence de sa catégorie. Un plafond qu'aucun produit équitable n'avait réussi à franchir jusqu'ici.
C’est un signe que le monde change. "Pour la première fois dans l’histoire du monde agroalimentaire, un produit équitable devient le produit le plus vendu de sa catégorie", explique C’est qui le patron. Depuis 2016, la marque connaît en effet un succès sans faille. Sans publicité, sans commerciaux, elle a réussi à conquérir les consommateurs avec un modèle remettant en cause le concept du "prix le plus bas", établi par la grande distribution. Ici, le prix est construit à partir du coût des producteurs, en leur permettant de vivre dignement. La bouteille de lait est ainsi vendue quelques centimes de plus que ses concurrents, permettant de dégager de meilleurs revenus pour les éleveurs éleveurs alors que le monde agricole traverse une crise exceptionnelle. 
>> Suite à lire à :
<https://www.novethic.fr/actualite/social/consommation/isr-rse/le-lait-de-c-est-qui-le-patron-devient-le-plus-vendu-en-france-une-premiere-pour-un-produit-equitable-150399.html>
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19- Tribune. L’appel de 137 parlementaires : « L’affichage environnemental prévu par la loi Climat est l’occasion de faire un choix de société », Le Monde, 14/12/21, 06h15
Par Collectif

En se contentant de mettre en rapport les émissions de gaz à effet de serre avec les kilos de viandes produites sans tenir compte du type de l’élevage, l’indice aidant les consommateurs à choisir les produits alimentaires les plus « durables » favorise les élevages intensifs, dénoncent 137 élus de diverses forces politiques dans une tribune au « Monde ».
Tribune. De belles idées peuvent donner de mauvais résultats. Cela pourrait se confirmer en ce qui concerne l’affichage environnemental. Et c’est un simple problème de « méthode de calcul » qui pourrait venir ruiner notre ambition collective d’informer les citoyens sur l’empreinte environnementale réelle des produits qu’ils consomment. Une ambition que nous avons pourtant clairement affirmée, à travers la loi Climat et résilience.
Nous, députés et sénateurs, avons voté en faveur de la généralisation d’un affichage environnemental à l’issue d’une expérimentation de cinq ans, avec une volonté très claire : donner aux consommateurs toutes les clés pour faire des choix alimentaires éclairés. Plus précisément, leur offrir une meilleure compréhension du niveau de durabilité globale des aliments qu’ils achètent. Un niveau de durabilité basé, principalement, sur le modèle de production dont ils sont issus.
Prenons l’exemple de la viande bovine. Quel modèle d’élevage répond le mieux à l’enjeu de durabilité globale ? Notre modèle français basé sur des exploitations familiales, comptant 60 vaches nourries principalement à l’herbe, sur 60 hectares en moyenne ? Ou le modèle du feedlot américain, ces centres d’engraissement industriel comptant 20 000, 30 000, 40 000, parfois plus de 100 000 bovins entassés et dopés aux antibiotiques et autres activateurs de croissance ?
> Lire aussi La production de bœufs peut-elle être durable aux Etats-Unis ?
La réponse nous paraît évidente, en tant que législateurs français. Les Etats généraux de l’alimentation puis la convention citoyenne pour le climat ont été l’occasion de le rappeler : un élevage durable est un élevage herbager, à taille humaine, qui dépend peu de l’achat d’intrants et où la quasi-totalité de l’alimentation du troupeau provient de l’exploitation. Un élevage qui offre aux animaux des conditions conformes à leur bien-être. Qui ne leur administre aucune substance chimique pour stimuler leur prise de poids.
Un modèle absurde et grotesque
Pourtant, selon la méthode de calcul de l’analyse du cycle de vie (ACV), dominante aujourd’hui dans les travaux relatifs à l’affichage environnemental, ce sont les viandes des feedlots américains qui pourraient être présentées aux consommateurs comme les plus durables, celles vers lesquelles se tourner en priorité.
C’est absurde, grotesque, incohérent, mais cela s’explique techniquement. En reposant très majoritairement sur le seul enjeu des émissions de gaz à effet de serre sans tenir compte du stockage de carbone dans le sol des prairies permis par les systèmes d’élevage herbagers, en faisant fi des autres externalités environnementales de l’élevage, telles que la préservation de la biodiversité, en ne s’intéressant pas au modèle d’élevage, en se contentant de mettre en rapport des émissions de gaz à effet de serre avec des kilos de viandes produites, cette méthode favorise logiquement les systèmes les plus industriels et intensifs.
> Lire aussi « L’évolution de l’assiette vers le “moins et mieux” de produits d’origine animale est essentielle pour soutenir les filières de qualité »
Alors, nous pensons qu’il est urgent de remettre du bon sens dans ce débat technique ! L’expérimentation de l’affichage environnemental, telle que prévue par la loi Climat et résilience, est l’occasion de faire un choix de société. Celui de la définition que nous voulons donner au terme de « durabilité ». Celui du modèle agricole que nous voulons prôner. Se soumettre à un affichage environnemental basé uniquement sur l’ACV, c’est inciter nos éleveurs à transformer leur modèle d’élevage herbager en un modèle à l’américaine, ultra-industrialisé.
L’expérimentation de l’affichage environnemental doit donc permettre la mise au point d’indicateurs complémentaires, scientifiquement robustes, reposant sur la durabilité des systèmes agricoles dans leur globalité. Parce que nous croyons en notre modèle français, un modèle durable et responsable, c’est cette voie que nous demandons au gouvernement d’emprunter.
Premiers signataires : Julien Dive, député de l’Aisne (Les Républicains) ; Guillaume Gontard, sénateur de l’Isère, président du Groupe écologiste, solidarité et territoires ; Antoine Herth, député du Bas-Rhin (AGIR) ; Anne-Catherine Loisier, sénatrice de la Côte-d’Or et rapporteuse de la loi Climat et résilience (Union centriste) ; Sophie Primas, sénatrice des Yvelines, présidente de la commission des affaires économiques (Les Républicains) ; Olivier Rietmann, sénateur de la Haute-Saône (Les Républicains) ; Richard Ramos, député du Loiret (MoDem) ; Fabien Roussel, député du Nord (Gauche démocrate et républicaine).
Liste complète : Liste complète des signataires de la tribune sur l'affichage environnemental by LeMonde.fr on Scribd <https://www.scribd.com/document/546619232/Liste-complete-des-signataires-de-la-tribune-sur-l-affichage-environnemental#from_embed>
<https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/12/14/l-appel-de-137-parlementaires-l-affichage-environnemental-prevu-par-la-loi-climat-est-l-occasion-de-faire-un-choix-de-societe_6105951_3232.html>
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20- Pesticides : 68 gardes à vue après une manifestation d'agriculteurs devant le Conseil d'Etat, AFP, 14/12/21, 17:00

Feu de palettes et grosse colère : une centaine d'agriculteurs ont manifesté mardi matin devant le Conseil d'Etat pour protester contre la demande faite au gouvernement de renforcer les règles encadrant les distances d'épandages des pesticides, et presque autant ont été interpellés.
Sur les 73 personnes interpellées, dont deux organisateurs de la manifestation, 68 ont été placées en garde à vue, a-t-on appris de source proche du dossier.
Dénonçant une "République des juges", les agriculteurs étaient venus du grand bassin parisien. Avant l'aube, ils ont fait flamber des palettes de bois devant les grilles de la plus haute juridiction administrative avant d'être délogés par les forces de l'ordre.
"On connaissait le gouvernement et les lois. On connaît maintenant le Conseil d'Etat qui, finalement pour nous, devient le deuxième gouvernement de la France puisqu'il sanctionne systématiquement un certain nombre de textes depuis quelques mois", a déclaré à l'AFP Damien Greffin, président de la FNSEA pour le Grand Bassin parisien.
Fin juillet, le Conseil d'Etat a demandé au gouvernement de renforcer sous six mois la réglementation encadrant l'épandage des pesticides "pour mieux protéger la population".
Après plusieurs mois de polémiques, le gouvernement avait fixé en décembre 2019 les distances minimales à respecter entre les zones d'épandage de produits phytosanitaires et les habitations: cinq mètres pour les cultures dites basses comme les légumes et céréales, et dix mètres pour les cultures hautes, fruitiers ou vignes.
Le décret prévoyait également des dérogations ramenant ces distances à trois mètres pour les cultures hautes et cinq pour les basses, dans le cadre de "chartes d'engagement départementales" proposées par les utilisateurs de produits phytosanitaires et validées par les préfets après avoir été soumises à concertation publique. 
Ce sont ces distances minimales qui ont été contestées par des associations, communes ou agriculteurs bio. Le Conseil d'Etat a estimé que les distances minimales d'épandage fixées à cinq mètres pour des produits dont la toxicité n’est que suspectée étaient "insuffisantes" et a donné jusqu'à fin janvier au gouvernement pour revoir sa copie.
Alors que l'échéance approche, les agriculteurs sont de plus en plus inquiets, redoutant d'importantes pertes de production si les distances sont allongées. Ils questionnent aussi la mise en oeuvre de ces dispositions.
- "Tentative de pression" -
"Quand on prend son tracteur pour aller travailler son champ, on va devoir aller prévenir ses riverains, ses voisins. (...) On ne peut pas demander à un agriculteur de téléphoner à 200 personnes pour leur dire +Attention, je sors mon tracteur pour aller dans les champs !+. On en est rendu là. C'est risible", s'est emporté Damien Greffin.
Joint par l'AFP, le secrétaire général de la FNSEA, Jérôme Despey, a appelé à "retrouver l'apaisement", indiquant que le syndicat travaillait avec le gouvernement, et il a demandé la libération des agriculteurs interpellés.
De son côté, l'association Générations Futures a condamné dans un communiqué une "tentative de pression sur la justice et le gouvernement" de la part de la FNSEA.
Sur Twitter, la porte-parole du candidat écologiste à la présentielle Yannick Jadot, Delphine Batho, a fustigé "une +opération coup de poing+ contre la plus haute juridiction administrative pour dénoncer la +République des juges+ et le principe de précaution".
<https://information.tv5monde.com/info/pesticides-68-gardes-vue-apres-une-manifestation-d-agriculteurs-devant-le-conseil-d-etat-436496>
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En audio
21- Podcast. La viande végétale à la conquête du monde, Le Monde, 09/12/21, 05h00 
Cyrielle Bedu

Produit de niche il y a quelques années, elle conquiert de nouveaux consommateurs, soucieux de la planète et de leur santé. Comment cette imitation de viande se fait-elle peu à peu une place dans nos assiettes, et ce, malgré l’hostilité des lobbys de la viande ? Explications en podcast avec Lucas Minisini, journaliste au « Monde ». 
Le 3 novembre était lancé dans huit enseignes McDonald’s aux Etats-Unis un nouveau burger, inédit pour la chaîne de restauration rapide : le « McPlant ». Fruit d’un partenariat exclusif avec Beyond Meat, le leader américain de la viande végétale, ce burger, qui contient un « steak » conçu à base de plantes, marque une nouvelle étape dans la démocratisation de « la viande sans viande ».
Aujourd’hui porté par de redoutables multinationales, le marché des substituts de viande, encore confidentiel il y a une dizaine d’années, est aujourd’hui très prometteur en Occident. Lucas Minisini, journaliste à « M Le magazine du Monde », nous explique, dans cet épisode du podcast « L’Heure du Monde », comment la viande végétale réussit à se faire une place dans nos assiettes.
> Podcast produit par Cyrielle Bedu, réalisé par Amandine Robillard et présenté par Morgane Tual à écouter à :
<https://www.lemonde.fr/podcasts/article/2021/12/09/la-viande-vegetale-a-la-conquete-du-monde_6105263_5463015.html>
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En images
22- Infographie. Arsenic et mercure dans les sols : quelles sont les zones exposées en France ?, Commissariat général au développement durable, 07/12/21

Deux métaux lourds, l’arsenic et le mercure, polluent les sols de certains territoires français avec des effets possibles à la fois sur l’environnement et sur la santé humaine. Un suivi précis de la situation constitue un enjeu important.
Les contaminations des sols par les métaux lourds peuvent être d’origine naturelle (altération des roches), ou liées aux rejets de certaines activités humaines : industrie, ménages, transports et agriculture.
Une contamination diffuse des sols à l’arsenic et au mercure
Les mesures de concentration dans les sols sont réalisées entre 0 et 30 cm de profondeur et exprimées en mg/kg de terre fine.
• La teneur médiane d’arsenic atteint 12 mg/kg dans les sols métropolitains. Elle est trois fois moins élevée en outre-mer (hors Guyane). La valeur ordinaire (25 mg/kg) est dépassée dans 20 % des territoires de métropole (hors Corse), avec les concentrations les plus élevées en Lorraine et dans le nord-ouest du Massif central.
• Pour le mercure, la médiane est de 0,04 mg/kg en métropole et trois fois plus en outre-mer hors Guyane. Les teneurs en mercure dépassent les valeurs ordinaires sur 13 % du territoire métropolitain (hors Corse).
Une pollution ponctuelle observée autour des sites industriels
Les pollutions localisées résultent de rejets de polluants non maîtrisés. En 2021, la France recense 9 527 sites et sols pollués ou potentiellement pollués par une activité actuelle ou ancienne. Parmi eux, 10 % sont pollués par l’arsenic et 5 % par le mercure.
Dans un rayon de 3 km autour de ces sites où la pollution est avérée, on observe une contamination diffuse dans les sols, au-delà des valeurs ordinaires dans 45 % des cas pour les sites pollués au mercure et 14 % pour ceux pollués à l’arsenic.
> Infographie à voir à :
<https://www.notre-environnement.gouv.fr/actualites/breves/article/arsenic-et-mercure-dans-les-sols-quelles-sont-les-zones-exposees-en-france>
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