[revue-presse-FNH] Petite revue de presse centrée sur économie, écologie, gouvernance, démographie, sociologie, éducation, recherche, droit, UE & international (jeudi 28 avril)

Florence de Monclin f.demonclin at fnh.org
Jeu 28 Avr 07:55:30 CEST 2022


Bonjour à tous,

Un petit tour d'horizon avec deux possibilités d'accès aux dépêches et articles suivants : 
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1- Entre Macron et Le Pen, des convergences sur le nucléaire, des divergences sur les énergies renouvelables <https://www.lemonde.fr/election-presidentielle-2022/article/2022/04/15/entre-macron-et-le-pen-des-convergences-sur-le-nucleaire-des-divergences-sur-les-energies-renouvelables_6122322_6059010.html>, Le Monde, 15/04/22, 12h30 
2- Emmanuel Macron défend sa vision de l’écologie en fustigeant le « climatoscepticisme » de Marine Le Pen <https://www.lemonde.fr/election-presidentielle-2022/article/2022/04/15/presidentielle-2022-au-havre-macron-defend-sa-vision-de-l-ecologie-en-fustigeant-le-climatoscepticisme-de-le-pen_6122240_6059010.html>, Le Monde, 15/04/22, 14h17
3- Election présidentielle 2022 : un second tour éloigné des enjeux climatiques <https://www.lemonde.fr/politique/article/2022/04/15/election-presidentielle-2022-un-second-tour-eloigne-des-enjeux-climatiques_6122313_823448.html>, Le Monde, 15/04/22, 14h45 
4- Marine Le Pen oppose son « écologie nationale » à « l’écologie punitive » d’Emmanuel Macron <https://www.lemonde.fr/politique/article/2022/04/15/marine-le-pen-oppose-son-ecologie-nationale-a-l-ecologie-punitive-d-emmanuel-macron_6122325_823448.html>, Le Monde, 15/04/22, 15h27 
5- À Sciences Po, les étudiants bousculent l’institution sur l’écologie <https://www.novethic.fr/actualite/economie/isr-rse/a-sciences-po-les-etudiants-bousculent-l-institution-sur-l-ecologie-150722.html>, Novethic, 15/04/22
6- Réindustrialisation : un mouvement qui avance lentement mais sûrement <https://www.novethic.fr/actualite/environnement/economie-circulaire/isr-rse/reindustrialisation-un-mouvement-qui-avance-lentement-mais-surement-150718.html>, Novethic, 15/04/22
7- Quels sont les châteaux français les plus écolo ? <https://www.linfodurable.fr/environnement/quels-sont-les-chateau-francais-les-plus-ecolo-31768>, L’Info Durable, 17/04/22
8- Tribune. Edgar Morin : « Soyons conscients du risque historique pour la France » <https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/04/20/edgar-morin-soyons-conscients-du-risque-historique-pour-la-france_6122956_3232.html>, Le Monde, 20/04/22, 14h38  
9- Caillou dans la chaussure des multinationales, l’activisme actionnarial se développe <https://vert.eco/articles/caillou-dans-la-chaussure-des-multinationales-lactivisme-actionnarial-se-developpe>, Vert.eco, 20/04/22
10- Reportage. « On n’a pas d’autre choix que de transgresser la légalité, car cette ­dernière est écocidaire » : la tentation radicale des militants écologistes <https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2022/04/21/on-n-a-pas-d-autre-choix-que-de-transgresser-la-legalite-car-cette-derniere-est-ecocidaire-la-tentation-radicale-des-militants-ecologistes_6123023_4500055.html>, Le Monde, 21/04/22, 01h34
11- Pendant l’entre-deux tours, le gouvernement continue le passage en force à Stocamine <https://www.rue89strasbourg.com/entre-deux-tours-gouvernement-force-stocamine-232747>, Rue89 Strasbourg, 22/04/22, 16h31
12- Chronique. Jean Pisani-Ferry : « Il n’y aura de transition écologique réussie que si les citoyens se reconnaissent dans un projet collectif » <https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/04/22/jean-pisani-ferry-il-n-y-aura-de-transition-ecologique-reussie-que-si-les-citoyens-se-reconnaissent-dans-un-projet-collectif_6123328_3232.html>, Le Monde, 22/04/22, 22h00 
13- L'UE achève une réforme historique contre la jungle numérique <https://information.tv5monde.com/info/l-ue-acheve-une-reforme-historique-contre-la-jungle-numerique-453825>, AFP, 23/04/22, 05:00
14- Exclusif. Thierry Breton, commissaire européen : « Les géants d’Internet devront s’adapter aux règles de l’UE » <https://www.lejdd.fr/Economie/exclusif-thierry-breton-commissaire-europeen-les-geants-dinternet-devront-sadapter-aux-regles-de-lue-4107380>, Le JDD, 23/04/22, 20h45
15- Entretien. Catherine Dauriac, Fashion Révolution : "Notre civilisation est addict à la mode, encore plus qu'au sucre" <https://www.novethic.fr/actualite/social/droits-humains/isr-rse/catherine-dauriac-presidente-de-fashion-revolution-notre-civilisation-a-une-addiction-a-la-mode-pire-encore-que-celle-du-sucre-150736.html>, Novethic, 23/04/22
16- Jean-Louis Etienne, l’aimant des pôles <https://www.lemonde.fr/sciences/article/2022/04/23/jean-louis-etienne-l-aimant-des-poles_6123394_1650684.html>, Le Monde, maj le 24/04/22 à 03h55 
17- Partout en France, des militants écologistes veulent « résister » aux projets « injustes et polluants » <https://www.lemonde.fr/planete/article/2022/04/26/partout-en-france-des-militants-ecologistes-veulent-resister-aux-projets-injustes-et-polluants_6123789_3244.html>, Le Monde, maj le 27/04/22 à 11h18
18- Tribune. « La Suède offre un cas particulièrement intéressant de planification écologique » <https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/04/27/la-suede-offre-un-cas-particulierement-interessant-de-planification-ecologique_6123895_3232.html>, Le Monde, 27/04/22, 13h00
19- Entretien. « Il n’y aura pas d’effondrement global mais des effondrements sociaux et localisés » <https://usbeketrica.com/fr/article/il-n-y-aura-pas-d-effondrement-global-mais-des-effondrements-sociaux-et-localises>, Usbek & Rica, 27/04/22
20- 33% <https://www.actu-environnement.com/dit-aujourdhui/1105.html>, Actu-environnement, Le chiffre du 27/04/22
21- Elon Musk fait de nouveau scandale en critiquant publiquement des cadres de Twitter <https://information.tv5monde.com/info/elon-musk-fait-de-nouveau-scandale-en-critiquant-publiquement-des-cadres-de-twitter-454559>, AFP, 28/04/22, 04:00
En images
22- 50 œuvres street art à travers le monde qui rendent hommage à l’Ukraine <https://creapills.com/oeuvres-street-art-soutien-ukraine-20220315>, Creapills, 15/04/22
23- Le don des invendus se démocratise doucement <https://www.actu-environnement.com/ae/news/loi-agec-dons-invendus-lited-39509.php4>, Actu-environnement, 22/04/22

Bien à vous,
Florence

NB : Pour mémoire, le 6 mai cette liste de diffusion prendra fin définitivement. Pour éviter toute rupture d’information, n’oubliez pas de vous abonner au fil d’actu proposé par les sites qui vous intéressent et pour garder un lien avec la FNH, je vous invite à vous inscrire à sa newsletter mensuelle <https://www.fnh.org/newsletter-fnh/>. 

FLASH-BACK : Présidentielle : l’écologie, sujet clivant, enjeu tardif. (cf. item 1, 2, 3 & 4)
ACTIVISMES DU JOUR : — Des étudiants se mobilisent dans plusieurs écoles et universités pour manifester leur déception face aux résultats des élections. Ils revendiquent de mettre plus en avant la question climatique. (cf. item 5)
— De plus en plus de militant·es en cols blancs s’immiscent dans l’actionnariat des entreprises pour les inciter à de meilleures pratiques. Ces six derniers mois, le phénomène a atteint son plus haut niveau. (cf. item 9)
— Depuis les résultats du premier tour à la présidentielle, les associations écologistes ont vu leurs rangs grossir de façon spectaculaire. La plupart d’entre elles estiment que seule la désobéissance civile pourrait faire bouger les lignes. (cf. item 10)
— A l’appel d’une centaine de collectifs locaux et d’une quinzaine d’organisations nationales, des milliers de militants ont organisé, mardi, une trentaine d’actions partout en France contre des projets de routes, d’autoroutes, d’extension d’aéroports, de centres commerciaux, d’entrepôts… (cf. item 17)
POSITIVITÉ DU JOUR : La pandémie, la guerre en Ukraine et surtout la crise environnementale poussent les entreprises à relocaliser leur chaîne d’approvisionnement. (cf. item 6)
QUESTIONNEMENTS DU JOUR : — Les châteaux de France sont réputés pour leur charme et leur histoire. Mais que font-ils pour se mettre au vert ? (cf. item 7)
— Le rachat de Twitter par Elon Musk est-il une bonne ou une mauvaise nouvelle pour la liberté de la presse ? (cf. item 20 & suite)
TRIBUNES & CHRONIQUE DU JOUR : — Le sociologue Edgar Morin demande à Emmanuel Macron d’amorcer un virage en faveur d’une voie nouvelle, qui place l’écologie en son cœur contre l’hégémonie du profit. (cf. item 8)
— Selon l’économiste Jean Pisani-Ferry, dans une économie où les choix de chacun pèsent sur tous, il faut repenser le rôle de la puissance publique et donc, planifier. La question est de savoir comment. (cf. item 12)
— Le sociologue et économiste Wojtek Kalinowski rappelle que la Suède est particulièrement à la pointe de la planification écologique, ce qui lui permet d’avoir l’un des meilleurs bilans en Europe en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre. (cf. item 18)
SUR-MESURE DU JOUR : Barabra Pompili a signé un décret qui dispense les installations classées de constituer des garanties financières si elles ont une garantie de l’État. Un texte sur-mesure pour la société des Mines de Potasse d’Alsace (MDPA) qui exploite l’activité de stockage dans l’ancienne mine de Wittelsheim, près de Mulhouse. (cf. item 11)
RÉFORME DU JOUR : Mieux lutter contre les appels au meurtre, les images pédophiles, les campagnes de désinformation ou les produits contrefaits... L'UE a conclu une nouvelle législation "historique" pour ramener l'ordre dans le Far West de l'Internet. (cf. item 13 & 14)
PUBLICATION DU JOUR : Comment nous libérer de notre addiction à la mode qui fait tant de ravages, autant humains qu'écologiques ? Dans son dernier ouvrage, la spécialiste Catherine Dauriac donne à voir l'ampleur des dégâts et propose des pistes d'actions pour sortir de ce système mortifère. Chaque jour, plus de 410 millions de vêtements sont confectionnés alors qu'on a aujourd’hui produit assez de vêtements pour habiller la planète jusqu’en 2100 ! (cf. item 15)
PORTRAIT DU JOUR : L’explorateur Jean-Louis Etienne poursuit depuis plus de dix ans son projet Polar Pod de dérive autour de l’Antarctique. (cf. item 16)
ENTRETIEN DU JOUR : Cinquante ans après sa publication, le rapport Meadows sur les limites à la croissance démontre chaque jour son actualité. Entretien avec l’un de ses co-auteurs, Jørgen Randers, aujourd’hui âgé de 76 ans. (cf. item 19)
CHIFFRE DU JOUR : 33%, c’est la part des investissements financés par les plans de relance des pays membres de l’OCDE qui ont un impact positif sur l’environnement, selon les calculs de l’organisation. (cf. item 20)
HOMMAGE DU JOUR : Des street artistes venant des 4 coins du globe témoignent leur soutien au peuple ukrainien avec des fresques créatives aux couleurs du pays. (cf. item 22)
MUTATION DU JOUR : Entrée en vigueur en début d'année 2022, la loi Antigaspillage interdit la destruction des produits non alimentaires invendus. Une nouveauté qui pousse au don et fait le bonheur des associations. (cf. item 23)
NOTRE ACTU : A suivre sur notre site Internet <http://www.fondation-nature-homme.org/>, Facebook <https://www.facebook.com/FondationNH/>, Twitter <https://twitter.com/fondationNH> ou Instagram <https://www.instagram.com/fondationNH/>.
> Plan de relance, loi climat... Décryptage et propositions pour des avancées écologiques et sociales qui comptent <http://www.fondation-nature-homme.org/sites/default/files/presse/dp-plan-relance-fnh.pdf>
> Le temps est venu de poser les premières pierres d’un nouveau monde <https://www.fondation-nicolas-hulot.org/le-temps-est-venu-lappel-de-nicolas-hulot-pour-poser-les-premieres-pierres-dun-nouveau-monde/>
> 10 mesures pour juger de la pertinence des programmes des candidats aux élections municipales <http://www.fondation-nature-homme.org/magazine/ecolos-et-sociales-les-prochaines-municipales>
> Baromètre des mobilités du quotidien - Coût, manque d'alternatives : les Français prisonniers de la voiture <http://www.fondation-nature-homme.org/magazine/cout-manque-dalternativesles-francais-prisonniers-de-leur-mode-de-transport>
> Guide en ligne. 7 propositions pour contribuer au grand débat national <http://www.fondation-nature-homme.org/magazine/7-propositions-pour-contribuer-au-grand-debat-national/>
> Pétition. L’Affaire du Siècle. Climat : stop à l’inaction, demandons justice ! <https://laffairedusiecle.net/>
> Let’sbio ! Le Bonus cantine Bio et Locale <https://www.letsbio.org/>
> 30 gestes et astuces pour réduire sa conso d’énergie <https://www.fondation-nicolas-hulot.org/economies-denergie-au-quotidien-trucs-et-astuces-pour-depenser-moins/>
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> Une collection de vidéos pour décrypter les enjeux écologiques et climatiques <https://www.youtube.com/playlist?list=PLh--7obE3XQ4Ku7J6VzsvlsKayQqvJTq9>
> Pétition. TAFTA, CETA : des traités climaticides qui menacent nos démocraties. <http://fondation-nicolas-hulot.org/action/tafta-ceta-des-traites-climaticides-qui-menacent-nos-democraties/?_ga=1.254849352.1537587716.1214298697>
> Crèches : arrêtons d’intoxiquer nos enfants <https://www.youtube.com/watch?v=FMjygtDmPSM>
> L'APPEL DES SOLIDARITÉS porté par plus de 80 ONG & associations de tous horizons <http://www.comite21.org/reseau-adherents/actualites.html?id=11056>
> 2nd édition de My Positive Impact : les 6 lauréats du public et les 3 lauréats du jury <https://www.fondation-nicolas-hulot.org/trophees-pour-le-climat-my-positive-impact/>
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1- Entre Macron et Le Pen, des convergences sur le nucléaire, des divergences sur les énergies renouvelables, Le Monde, 15/04/22, 12h30 
Adrien Pécout

Le président sortant veut développer, s’il est est réélu, le solaire et l’éolien quand la candidate du Rassemblement national promet de démanteler toutes les éoliennes terrestres. 
Voilà un point de convergence notable entre les candidats en lice pour le second tour de l’élection présidentielle : tous deux veulent relancer le nucléaire. La principale source d’électricité du pays – à hauteur de près de 70 % – émet très peu de gaz à effet de serre, responsable du réchauffement climatique, et se pilote aisément, défendent les « pro-atome ». Elle pose la question des déchets radioactifs et celle de la sûreté des centrales, répliquent les détracteurs.
> Lire le reportage : Emmanuel Macron défend sa vision de l’écologie en fustigeant le « climatoscepticisme » de Marine Le Pen
Installer de nouveaux réacteurs nucléaires, Emmanuel Macron et Marine Le Pen votent pour. Mais pas dans les mêmes proportions, ni surtout dans le cadre du même mix électrique. Alors que la France accuse encore un retard en ce domaine, le président candidat promet de « bâtir une filière française de production des énergies renouvelables ». Il projette la « multiplication par dix » de la puissance solaire et l’« implantation » d’une cinquantaine de premiers parcs éoliens en mer, d’ici à 2050 ; d’où son déplacement au Havre (Seine-Maritime), jeudi 14 avril.
A l’inverse, la candidate d’extrême droite veut en finir avec les quelque 8 000 éoliennes terrestres déjà en place dans le pays. Elle réclame « un démantèlement progressif des sites en commençant par ceux qui arrivent en fin de vie », ainsi que la cessation des subventions. Elle promeut également un moratoire pour toute nouvelle installation éolienne, comme dans son programme de 2017 – ainsi que pour le solaire, avec peut-être quelques exceptions « dans le sud de la France » ou « en outre-mer », a précisé Mme Le Pen, le 12 avril, sur France Inter.
Le Pen, « hors cadre »
M. Macron a critiqué « une aberration complète », jeudi, sur le réseau de radios France Bleu. « Un moratoire sur les énergies renouvelables rend impossible la réindustrialisation et le respect des trajectoires climatiques à compter de la décennie 2030 », avertissait, en février, RTE (le gestionnaire national du réseau de transport d’électricité), après deux ans de travaux de modélisation. « Emmanuel Macron reste dans le cadre de l’expertise de RTE, alors que Marine Le Pen, dans son programme, se trouve complètement hors de ce cadre », constate François-Marie Bréon, chercheur au Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement.
> Lire aussi : Election présidentielle 2022 : un second tour éloigné des enjeux climatiques
La députée du Pas-de-Calais, dans les Hauts-de-France, première région éolienne du pays, reprend les arguments classiques : l’espace pris par ces mâts dans le paysage, « une chimère dangereuse », mais aussi leur production intermittente au gré de la météo. Selon Anna Creti, directrice de la chaire Economie du climat à l’université Paris-Dauphine, il s’agit d’« une posture » électorale pour aller dans le sens de certains habitants. Notamment ceux développant le « syndrome NIMBY » (« Not In My Back Yard ») : des éoliennes, d’accord, mais pas à côté de chez moi. Ces critiques ont d’ailleurs poussé Emmanuel Macron à modérer, lui aussi, ses objectifs pour l’éolien terrestre. En février, le chef de l’Etat annonçait sa volonté de doubler la capacité existante au sol d’ici à 2050, et non plus à l’horizon 2030. A l’heure du bilan de son quinquennat, l’ONG environnementale Greenpeace lui reproche « un manque de courage pour organiser et accélérer la sortie des énergies fossiles », celles les plus émettrices de gaz à effet de serre. En 2021, le pétrole et le gaz représentaient encore un peu plus de 60 % de la consommation finale d’énergie en France, la part de l’électricité n’étant, pour l’instant, que de 25 %.
Même sur le nucléaire, à bien y regarder, l’approche des deux finalistes de la présidentielle diffère sur la feuille de route. Face au vieillissement des cinquante-six réacteurs existants, Emmanuel Macron prévoit au moins six nouvelles unités de troisième génération, d’ici à 2050. Avec, à l’étude, la possibilité d’en installer huit autres par la suite – la fourchette haute des scénarios de RTE. Surenchère de Marine Le Pen : elle en annonce vingt et baptise ce plan du nom d’une immigrée prise à partie de son vivant par l’extrême droite, la scientifique Marie Curie (1867-1934).
Le symbole de Fessenheim
Telle que l’envisage M. Macron, après avoir donné l’impression de tergiverser sur le sujet, la relance de l’atome passerait par une première mise en service au plus tôt en 2035. Dans le plan de Mme Le Pen, la livraison interviendrait à partir de 2031 pour dix réacteurs, et à partir de 2036 pour dix autres ; donc sur un rythme bien plus rapide que les projections les plus optimistes de l’Etat. Un pari d’autant plus hasardeux que la filière doit refaire ses preuves, après les années de retard et de surcoût du chantier toujours en cours de Flamanville (Manche). « Pour de nombreux candidats, le sujet du nucléaire relève plus du marqueur politique que de la rationalité technique. Sur ce point, la position de Marine Le Pen ne fait pas exception à la règle », juge le cercle de réflexion de sensibilité sociale-démocrate Terra Nova.
> Lire aussi  L’EPR de Flamanville accuse un nouveau retard
La candidate du RN se fait fort aussi de rouvrir les deux réacteurs de la centrale de Fessenheim (Haut-Rhin). Un symbole. Emmanuel Macron l’a fermée en 2020 sur décision politique, à la suite d’un précédent accord entre socialistes et écologistes. Deux ans plus tard, le chef d’Etat affiche son souhait « qu’aucun réacteur nucléaire en état de produire ne soit fermé à l’avenir, compte tenu de la hausse très importante de nos besoins électriques ». L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) écarte l’hypothèse d’une remise en service du site alsacien. Cette promesse de Mme Le Pen « ne paraît pas raisonnablement envisageable », rappelle, depuis plusieurs mois, l’entité administrative indépendante. Notamment parce que le site n’a pas suivi le même programme de réexamen approfondi que les autres centrales quadragénaires.
> Lire notre décryptage : Marine Le Pen oppose son « écologie nationale » à « l’écologie punitive » d’Emmanuel Macron
Là encore, Marine Le Pen s’exonère de l’avis des experts de l’atome, en s’engageant à prolonger jusqu’à soixante ans la durée de vie du parc existant. A ce stade, « les éléments (…) ne permettent pas de conclure que la poursuite de fonctionnement de certains de ces réacteurs est acquise au-delà de cinquante ans », prévenait Bernard Doroszczuk, le président de l’ASN, en janvier.
<https://www.lemonde.fr/election-presidentielle-2022/article/2022/04/15/entre-macron-et-le-pen-des-convergences-sur-le-nucleaire-des-divergences-sur-les-energies-renouvelables_6122322_6059010.html>
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2- Emmanuel Macron défend sa vision de l’écologie en fustigeant le « climatoscepticisme » de Marine Le Pen, Le Monde, 15/04/22, 14h17
Claire Gatinois (Le Havre (Seine-Maritime), envoyée spéciale)

Au Havre, terres d’Edouard Philippe qui ont néanmoins porté Jean-Luc Mélenchon en tête au premier tour, le président candidat a défendu une « stratégie qui soit à la fois la sobriété énergétique, le développement massif du renouvelable et le nucléaire ». 
Au-dessus de lui, une nacelle de quelque 300 tonnes. Un peu plus loin, d’immenses pales qui auront vocation à rejoindre l’océan pour intégrer, s’il devait être réélu, l’un des cinquante parcs d’éoliennes en mer, que le candidat entend construire d’ici à 2050. L’industrie mariée à l’écologie ; des milliers d’emplois créés, mais moins de CO₂ dispersé. Depuis l’usine Siemens Gamesa d’éoliennes en mer, au Havre (Seine-Maritime), Emmanuel Macron a poursuivi, jeudi 14 avril, son entreprise de séduction des électeurs et son travail de démolition de l’argumentaire de son adversaire, Marine Le Pen, représentante de l’extrême droite. Pour, espère-t-il, remporter le second tour de l’élection présidentielle, le 24 avril.
Ce site de production d’éoliennes en mer résume « la stratégie qui est la nôtre », explique le chef de l’Etat. La vision d’une « écologie de progrès », à rebours de celle des apôtres de la décroissance, qui entend lutter contre le réchauffement en développant les énergies renouvelables comme le nucléaire. « Il faut une stratégie qui soit à la fois la sobriété énergétique, le développement massif du renouvelable et le nucléaire, les trois ensemble. Mais le projet de l’extrême droite, aujourd’hui, c’est un projet de fermeture nette du renouvelable, et c’est un projet de démantèlement des éoliennes qui existent », signale Emmanuel Macron. Une stratégie « totalement folle » qui, au-delà de ne pas répondre aux enjeux climatiques, gaspillerait l’argent du contribuable, pense-t-il.
Principal sujet de préoccupation des Français, mais grande oubliée de la campagne, la question de l’écologie était au cœur de cette journée normande et ensoleillée. Aux côtés de son ancien premier ministre, le très « loyal » et très « libre » Edouard Philippe, maire de la ville portuaire, le chef de l’Etat avait, pour son troisième déplacement de campagne d’entre-deux-tours, choisi une fois de plus une terre dite hostile. A savoir plutôt « mélenchoniste » que « macroniste ». Ici, le leader de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, est arrivé en tête du scrutin avec 30 % des suffrages au premier tour, soit nettement plus que la moyenne nationale.
Convaincre « un à un » ces indécis
Dans l’ancienne ville communiste, ces résultats « animent les discussions », titre la presse locale. Les voix de Jean-Luc Mélenchon, troisième homme du scrutin au niveau national, avec 21,95 %, derrière Emmanuel Macron (27,85 %) et Marine Le Pen (23,15 % ), sont convoitées par ses deux adversaires. Et, si l’« insoumis » a martelé au soir du premier tour qu’« aucune » voix ne devait aller à Marine Le Pen, ses électeurs hésitent. Que faire ? S’abstenir ? Voter Emmanuel Macron par dépit plus que par conviction ? Ou choisir Marine Le Pen par rébellion ?
> Lire aussi : Emmanuel Macron contraint au grand écart en vue du second tour de l’élection présidentielle 2022
Le chef de l’Etat entend convaincre « un à un » ces indécis, dit-il. Il veut le démontrer au fil des bains de foule, en s’adressant à ceux qui, parfois, ne l’aiment pas et le font savoir haut et fort. La tâche n’est pas aisée. Dès son arrivée au Musée d’art moderne du Havre, derrière les hourras de sympathisants, bruissent les cris de mécontents. « Le barrage à l’extrême droite, on l’a déjà fait. Le fascisme, on n’en veut pas non plus ! Mais voter Macron, jamais ! Il se moque de nous », s’emporte notamment Myriam Richard, autoentrepreneuse. Que le chef de l’Etat ait fait lundi un geste, en promettant de réexaminer son projet de réforme des retraites, n’y change rien. « Poudre de perlimpinpin », lance l’amie de Mme Richard, avant que celle-ci ne soit évacuée par le service de sécurité en gardant le poing levé.
> Lire aussi : Pour des soutiens de Jean-Luc Mélenchon, l’impossibilité du vote pour Emmanuel Macron
Emmanuel Macron, pourtant, « ne lâche rien ». Il sait qu’une partie de l’électorat de Jean-Luc Mélenchon est composée d’une gauche relativement modérée et d’une jeunesse qui a vu, dans le programme du candidat « insoumis », quelques-unes des réponses à ses angoisses climatiques. « Quand il y a cette angoisse, elle peut se retrouver davantage dans des colères (…). A moi de donner une vision plus claire et plus forte de ce qu’on a fait et de ce qu’on veut faire, et d’enrichir le projet », pense-t-il. Au soir du premier tour, déjà, le président sortant s’était dit « prêt à inventer quelque chose de nouveau pour rassembler les convictions et les sensibilités diverses ». Et, à une jeune femme qui l’interpelle sur le climat d’un « vous ne faites rien ! », il répond jeudi : « Je vais en parler. »
« Il n’y a pas de pureté »
Des annonces liées à l’écologie pourraient être faites lors du meeting de Marseille, samedi 16 avril, empruntant des idées de M. Mélenchon pour la préservation de l’eau ou sur l’économie circulaire. Mais il ne s’agira pas de renverser les tables. Emmanuel Macron entend séduire sans « se travestir », explique son entourage. « La démocratie, c’est comme ça. Vous choisissez plusieurs projets et vous en choisissez deux pour aller en finale. Ensuite, vous éliminez celui qui vous plaît le moins. Il n’y a pas de pureté. Je ne vais pas demain proposer le projet de Jean-Luc Mélenchon ou le projet de Yannick Jadot [candidat écologiste], c’est évident », a-t-il expliqué.
Aussi, avant d’étoffer son programme, il s’adresse à ceux qui l’accusent d’avoir été le président de « l’inaction climatique », en les invitant à regarder le projet de Marine Le Pen. Une candidate qu’il accuse d’être « climatosceptique ». « Elle l’assume totalement sur le plan international, puisqu’elle assume de ne pas respecter les accords de Paris, de contester la neutralité carbone 2050 et de sortir du Green Deal européen. Et elle a très clairement dit que, pour elle, les énergies renouvelables étaient une nuisance pour les paysages et nos vies, et qu’elle démonterait les éoliennes. C’est à la fois climatosceptique et budgétairement sceptique, car ça va coûter très, très cher », détaille le candidat.
> Lire aussi : Marine Le Pen oppose son « écologie nationale » à « l’écologie punitive » d’Emmanuel Macron
Dans son programme, la représentante du Rassemblement national propose de « libérer les Français » des « engagements irraisonnés ». « Nous suivrons la voie française pour atteindre les objectifs de l’accord de Paris. Nous sortirons du Green Deal, et de l’enfer administratif qu’il impose aux petites entreprises », y écrit-elle. « Quelqu’un qui est écologiste et qui vote pour Mme Le Pen, il faut qu’on me le présente ! », conclut, sarcastique, le chef de l’Etat. Et à un jeune qui s’inquiète tout de même du retraitement des déchets nucléaires, il répond : « On les enterre. »
<https://www.lemonde.fr/election-presidentielle-2022/article/2022/04/15/presidentielle-2022-au-havre-macron-defend-sa-vision-de-l-ecologie-en-fustigeant-le-climatoscepticisme-de-le-pen_6122240_6059010.html>
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3- Election présidentielle 2022 : un second tour éloigné des enjeux climatiques, Le Monde, 15/04/22, 14h45 
Audrey Garric

L’arrivée de Marine Le Pen au pouvoir marquerait un recul « dangereux », selon les ONG et les think tanks, qui critiquent aussi le programme « incomplet » d’Emmanuel Macron. 
Dans le combat contre le changement climatique, le prochain quinquennat s’apparente au dernier round. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) n’a en effet laissé aucun doute dans son dernier rapport : maintenir un « monde vivable » implique de réduire drastiquement les émissions de gaz à effet de serre au cours de cette décennie. Or, aucun des deux finalistes de l’élection présidentielle n’est actuellement en mesure de relever ce défi, concluent les ONG et les think tanks qui ont analysé les programmes. Ni Emmanuel Macron ni Marine Le Pen ne proposent des mesures suffisantes à même de mettre la France sur la bonne trajectoire pour respecter ses objectifs climatiques.
« Aucun des candidats n’est à la hauteur, mais on ne peut pas les mettre sur le même plan, prévient toutefois Morgane Créach, directrice du Réseau Action Climat, qui rassemble 36 associations. Le programme d’Emmanuel Macron, imprécis et incomplet, nous fait stagner tandis que celui de Marine Le Pen, vide et dangereux, nous fait reculer. » Une analyse partagée par Clément Sénéchal, le porte-parole climat de Greenpeace France, qui se dit « inquiet » pour les cinq prochaines années : « On a le choix entre un climatocynique, qui fait semblant de prendre en charge la crise climatique mais en occulte les causes réelles, à savoir l’économie néolibérale, et une climatosceptique, qui en dissimule l’ampleur et la nature. Donc entre mauvais et pire. »
> Lire aussi : Marine Le Pen oppose son « écologie nationale » à « l’écologie punitive » d’Emmanuel Macron
Sous la prochaine mandature, la France va plancher sur la première loi de programmation quinquennale sur l’énergie et le climat. Il y a urgence à redresser la barre : malgré des progrès, la France n’est pas dans les clous, selon le Haut Conseil pour le climat, pour atteindre la neutralité carbone en 2050, comme elle s’y est engagée au titre de l’accord de Paris. Elle s’est vue enjoindre par la justice de prendre des mesures supplémentaires. Il lui faudra d’autant plus accélérer que l’Union européenne a relevé son ambition à l’horizon 2030.
« Consommer mieux et moins »
S’il juge que « jamais autant n’a été fait pour l’environnement » – un bilan que récusent les observateurs –, Emmanuel Macron reconnaît que « les choses ne vont pas assez loin ». Pour « aller plus vite », il propose de mettre en place une« planification écologique », une idée empruntée à Jean-Luc Mélenchon (La France insoumise), dont le programme climatique était jugé le plus ambitieux avec celui de l’écologiste Yannick Jadot. Afin de sortir des énergies fossiles, le président candidat défend la construction de 14 EPR, mais aussi le déploiement du solaire et de l’éolien en mer. Il souhaite également décarboner l’industrie grâce au plan France 2030, et mise sur l’hydrogène ou le captage et stockage du CO2.
> Lire aussi : Emmanuel Macron défend sa vision de l’écologie en fustigeant le « climatoscepticisme » de Marine Le Pen
Dans les transports, premier secteur émetteur en France, le locataire de l’Elysée veut accélérer le développement des véhicules électriques et les rendre « accessibles à tous », notamment grâce à une offre de leasing à moins de 100 euros par mois. Le candidat ambitionne aussi de poursuivre le développement du vélo et du train (rénover 7 000 km de petites lignes d’ici à 2030, avoir dix trains de nuit avant 2027, développer le TGV). « Rien n’est dit sur l’accélération de la fin des véhicules thermiques en 2035, comme le souhaitent une partie des pays européens », note Morgane Créach.
Pour les bâtiments, Emmanuel Macron se fixe l’objectif de rénover 700 000 logements par an (contre un objectif de 500 000 aujourd’hui), « en accélérant les rénovations globales et grâce au guichet unique », selon son équipe de campagne. Dans l’agriculture, il désire accélérer la transition vers une agriculture plus durable, tout en voulant produire plus, un « enjeu de souveraineté » avec la guerre en Ukraine. Il n’annonce en revanche rien sur l’élevage, pourtant le principal émetteur de gaz à effet de serre du secteur.
> Lire aussi :  Election présidentielle : à la Sorbonne, l’ENS et Sciences Po, des centaines d’étudiants contre le « faux choix » du second tour
Le candidat, qui a « entendu le message du premier tour », évoque désormais davantage la question de la sobriété. Il assume de « consommer mieux mais aussi moins », mais continue d’agiter l’épouvantail de la décroissance. « Il n’a pas compris qu’il faut revoir le logiciel, et ne pas tout sacrifier à l’autel de la croissance », tance Géraud Guibert, le président du think tank La Fabrique écologique.
Pour financer la transition écologique, Emmanuel Macron promet une enveloppe « supplémentaire » de 10 milliards d’euros par an, mais ne compte « pas ou très peu » sur les mesures fiscales et réglementaires pour inciter les ménages et les entreprises à investir pour le climat, note l’Institut de l’économie pour le climat. Face à lui, Marine Le Pen n’a pas chiffré les investissements publics nécessaires.
« Révolution hydrogène »
A l’inverse de son adversaire, la candidate du Rassemblement national rejette la trajectoire de réduction d’émissions prévue dans la politique climatique de la France. Si elle assure respecter l’accord de Paris et viser la neutralité carbone en 2050, elle affirme dans son programme que « la France [y] répondra par les moyens qu’elle aura choisis, au rythme et selon les étapes dont elle aura décidé ».
> Lire aussi : Le désastreux projet de Marine Le Pen pour faire baisser les prix de l’électricité
Une partie des mesures qu’elle propose contreviennent à une trajectoire de décarbonation. La candidate d’extrême droite, qui se prononce en faveur de la construction de 20 EPR, souhaite un moratoire sur l’éolien et le solaire et le démantèlement des éoliennes déjà existantes – alors que tous les scénarios de neutralité carbone passent par les énergies renouvelables. Elle entend « ralentir la substitution de la voiture thermique par le tout électrique » et désire revenir sur l’interdiction de location des passoires thermiques prévue à partir de 2025. Celle qui veut réindustrialiser la France, au moyen notamment d’une « révolution hydrogène » et de la chaleur renouvelable, récuse la nécessité de moins consommer d’énergie ou de matière, note le think tank Shift Project. Enfin, elle annonce, au nom du pouvoir d’achat, une baisse de la TVA de 20 % à 5,5 % sur les produits énergétiques, donc sur les énergies fossiles.
> Lire aussi : Entre Macron et Le Pen, des convergences sur le nucléaire, des divergences sur les énergies renouvelables
Plus largement, là où Emmanuel Macron affiche son engagement sur la scène internationale, Marine Le Pen défend un « repli national incompatible » avec la lutte contre le changement climatique, qui est mondiale, rappelle Clément Sénéchal. Une crise qu’elle n’hésite pas à minorer, si ce n’est la nier. « Un travers, asphyxiant pour l’outil diplomatique français, est de le concentrer sur de prétendus grands enjeux globaux, définis par telle ou telle agence de l’ONU ou, par exemple, par le GIEC », a-t-elle déclaré lors d’une conférence de presse, le 13 avril, dénonçant un « catastrophisme climatique ».
Critiquant la « sacro-sainte COP21 » et son « gourou » Laurent Fabius, la candidate d’extrême droite a indiqué qu’elle renoncerait à doubler la contribution française au Fonds vert pour le climat – un mécanisme onusien qui permet d’aider les pays les plus vulnérables – comme l’avait annoncé Emmanuel Macron, même si elle dit vouloir soutenir les petits Etats insulaires. Dans son programme, Marine Le Pen avait déjà annoncé vouloir sortir du Green Deal, le vaste plan pour atteindre les objectifs climatiques européens. Tout cela ferait perdre à la France « toute légitimité » dans l’accord de Paris, et « décrédibiliserait l’accord lui-même », prévient l’Institut du développement durable et des relations internationales.
> Lire aussi : Election présidentielle 2022 : le climat, une préoccupation majeure largement absente des débats
<https://www.lemonde.fr/politique/article/2022/04/15/election-presidentielle-2022-un-second-tour-eloigne-des-enjeux-climatiques_6122313_823448.html <https://www.lemonde.fr/politique/article/2022/04/15/election-presidentielle-2022-un-second-tour-eloigne-des-enjeux-climatiques_6122313_823448.html>>
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4- Marine Le Pen oppose son « écologie nationale » à « l’écologie punitive » d’Emmanuel Macron, Le Monde, 15/04/22, 15h27 
Stéphane Mandard

Si les programmes des deux finalistes de l’élection présidentielle sont jugés largement insuffisants pour juguler les crises environnementales, le projet de la candidate d’extrême droite fait « craindre le pire » aux ONG. 
Les programmes des deux finalistes à l’élection présidentielle ont été passés à la moulinette par les principales organisations environnementales et think tanks spécialisés. Et comme pour le climat, leurs réponses à la crise écologique (pollutions, effondrement de la biodiversité…) sont jugées largement insuffisantes. « Ni le programme d’Emmanuel Macron ni celui de Marine Le Pen ne brillent par leurs mesures en faveur de l’environnement », juge Jean-François Julliard, le directeur général de Greenpeace France. Le président candidat a promis d’« enrichir » son programme. « Difficile de croire à de nouvelles promesses après un quinquennat de renoncements », commente le patron de l’ONG, qui énumère la sortie avortée du glyphosate, la réautorisation des néonicotinoïdes « tueurs d’abeilles » ou encore l’abandon de la plupart des propositions de la convention citoyenne sur le climat.
> Lire aussi : Election présidentielle 2022 : le climat, une préoccupation majeure largement absente des débats
Si les mesures en faveur de l’environnement tiennent sur deux pages dans le programme d’Emmanuel Macron (avec des propositions pour dépolluer les anciennes décharges, réduire les exportations de déchets ou afficher l’impact environnemental des produits courants), la candidate du Rassemblement national y consacre un « livret thématique » au même titre qu’à l’agriculture ou à la protection des animaux, sujet particulièrement cher à celle qui n’a cessé de se mettre en scène avec ses chats pendant la campagne. Une opération de « greenwashing », selon M. Julliard, qui « craint le pire avec Marine Le Pen ».
Sur une quinzaine de pages, Marine Le Pen développe sa vision de l’écologie : une « écologie nationale » basée sur le « localisme » et la « préférence pour les produits français » dont elle veut, par exemple, porter la proportion à 80 % dans les cantines. Son projet propose de « tourner la page de l’écologie punitive et de la mauvaise conscience ». « La France figure dans les cinq pays où l’environnement est le moins dégradé », assène la candidate du Rassemblement national. Une preuve de cette assertion ? « Aucune ville française ne figure dans les 500 villes les plus polluées au monde ! », selon le classement de la société suisse IQ Air. Dès lors, « pourquoi punir les Français ? Ce n’est pas aux Français de payer pour les autres ! »
Dans son programme, il est beaucoup question de « protéger », mais à la différence de son rival, pas un mot sur la sobriété. Pas question de toucher au mode de vie des Français : « Les Français pourront continuer à sortir leur famille en voiture, à prendre des bains chauds, à apprécier le feu de bois dans la cheminée et à fêter Noël ! » – allusion aux polémiques relatives au sapin ou au foie gras écartés dans des villes dirigées par des élus Europe Ecologie-Les Verts.
> Lire aussi : Entre Macron et Le Pen, des convergences sur le nucléaire, des divergences sur les énergies renouvelables
Symbole de cette « qualité de vie » que menacerait « l’écologisme » : la voiture. Marine Le Pen défend cet « extraordinaire moyen de liberté et d’émancipation ». Aussi, elle entend détricoter des mesures instaurées pendant le quinquennat Macron : baisser la TVA sur les carburants à 5,5 % (au lieu de 20 %), renationaliser les autoroutes pour baisser le prix des péages, restaurer les 90 km/h sur toutes les routes nationales et en finir avec les « zones 30 » en ville. Elle promet également de supprimer les zones à faibles émissions – taxées de « zones de non-droit » –introduites par l’exécutif pour lutter contre la pollution de l’air dans les agglomérations.
La défense de cette « belle France » passe aussi par celle de la ruralité, et notamment de la chasse. Pour la candidate d’extrême droite, « il est tout à fait inenvisageable d’interdire la chasse ». Même si la protection animale (accorder une reconnaissance constitutionnelle au statut juridique des animaux, renforcer les peines sanctionnant la cruauté animale) occupe une place importante dans son programme, Marine Le Pen estime que la chasse est nécessaire pour « la régulation des populations d’animaux ».
> Lire aussi : Le désastreux projet de Marine Le Pen pour faire baisser les prix de l’électricité
Les deux candidats trouvent là un point de convergence. Emmanuel Macron choie en effet le million de chasseurs : il a divisé par deux le prix du permis de chasse et réautorisé la chasse traditionnelle de certaines espèces d’oiseaux. « A chaque fois qu’on a eu un problème à régler avec un ministre de l’écologie, il est intervenu », s’est félicité, juste avant le premier tour, le président de la Fédération nationale des chasseurs, Willy Schraen.
Un point commun : l’agriculture intensive
Autre vision qui rapproche les deux finalistes, celle d’une agriculture intensive. Au nom de la « souveraineté alimentaire », Marine Le Pen promet de « combattre »la stratégie européenne dite « de la ferme à la fourchette », qui vise, à l’horizon 2030, à réduire de moitié l’usage des pesticides, de 20 % celui des engrais et d’atteindre 25 % de surfaces agricoles utiles cultivées en bio. « Une folle stratégie »qui mène l’agriculture française au « désastre », pour Mme Le Pen. M. Macron a, lui, indiqué que la guerre en Ukraine obligeait à revoir ses objectifs à la baisse et qu’il n’était désormais plus question de produire moins.
> Lire aussi : Election présidentielle 2022 : un second tour éloigné des enjeux climatiques
Dans l’équipe de campagne d’Emmanuel Macron, on rappelle cependant que la surface cultivée en bio a été doublée pendant le mandat et que l’installation de nouveaux agriculteurs sera soutenue par une loi d’orientation.
Au chapitre de la protection du vivant, Marine Le Pen promet ni plus ni moins de « restaurer la biodiversité » et de « faire renaître la vie ». Comment ? En conditionnant notamment l’autorisation des pesticides et engrais en fonction de l’évolution annuelle d’espèces témoin (abeilles, oiseaux ou chauve-souris). « Une proposition inquiétante, juge Mathilde Boitias, directrice du think tank la Fabrique écologique. La protection de la biodiversité nécessite une approche globale et pas seulement par espèce. »
Emmanuel Macron promet, de son côté, de planter 140 millions d’arbres d’ici à la fin de la décennie, de « protéger toujours mieux nos littoraux, montagnes, forêts et espaces naturels ». Un peu court pour France Nature Environnement, qui lui a attribué le bonnet d’âne (ex aequo avec Fabien Roussel) dans son décryptage des programmes des candidats. L’entourage du chef de l’Etat martèle que le mandat a été marqué par plusieurs avancées qui demandent à être amplifiées : en matière de lutte contre l’artificialisation des sols avec l’arrêt du méga-projet de centre commercial EuropaCity ou contre la pollution plastique avec la loi antigaspillage pour une économie circulaire, qui programme la fin du plastique à usage unique à l’horizon 2040. Bien au-delà du prochain quinquennat.
<https://www.lemonde.fr/politique/article/2022/04/15/marine-le-pen-oppose-son-ecologie-nationale-a-l-ecologie-punitive-d-emmanuel-macron_6122325_823448.html>
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5- À Sciences Po, les étudiants bousculent l’institution sur l’écologie, Novethic, 15/04/22
Fanny Breuneval

Des étudiants se mobilisent dans plusieurs écoles et universités pour manifester leur déception face aux résultats des élections. Ils revendiquent de mettre plus en avant la question climatique. À Sciences Po, des étudiants rêvent d’un sursaut écologique de l’établissement. La fin du partenariat avec TotalEnergies est une avancée, mais ils demandent un véritable engagement contre les énergies fossiles.
Les manifestations dans les universités s’enchaînent ces derniers jours suite aux résultats des élections. À la Sorbonne, Normale Sup ou encore Sciences Po, des étudiants ont occupé les locaux pour exprimer leur colère. Ils revendiquent notamment un sursaut écologique de la part des candidats. Ces manifestions s’inscrivent dans un contexte déjà tendu dans certaines écoles. Les étudiants de Sciences Po s’inquiètent depuis plusieurs annéesdu faible engagement de leur établissement dans la transition écologique. 
Récemment, ils estimaient pourtant avoir emporté une "victoire historique", selon l’Unef, le syndicat étudiant. Le partenariat entre Sciences Po et TotalEnergies a en effet pris fin, après plus de 15 ans de renouvellements successifs. La fondation Total versait un montant de 200 000 euros par an en moyenne, finançant des programmes d’égalité des chances. L’établissement rue Saint-Guillaume annonce développer de nouveaux partenariats avec de grandes entreprises et fondations, ce qui représente en moyenne 15 millions d’euros par an.
>> Suite à lire à :
<https://www.novethic.fr/actualite/economie/isr-rse/a-sciences-po-les-etudiants-bousculent-l-institution-sur-l-ecologie-150722.html>
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6- Réindustrialisation : un mouvement qui avance lentement mais sûrement, Novethic, 15/04/22
Mathilde Golla

2021 a été une année "record" en France avec un solde positif de 120 usines créées sur le territoire, selon Trendeo. La pandémie, la guerre en Ukraine et surtout la crise environnementale poussent les entreprises à relocaliser leur chaîne d’approvisionnement. L'enjeu est de réinventer des modèles économiques basés sur les circuits courts en limitant les hausses de prix. 
Le mouvement de réindustrialisation esquissé avant la pandémie s’accélère. Pénalisées par des ruptures d’approvisionnement pendant le confinement ou la guerre en Ukraine mais aussi poussées par une volonté de préserver l’environnement, les entreprises se mobilisent pour rapatrier tout ou partie de leur outil industriel. Après des décennies de disparition de l’appareil productif en France avec une industrie manufacturière passée de 14 % du PIB à 10 % en dix ans, les créations d'usines repartent à la hausse sur le territoire. L'indice spécialisé Trendeo décompte ainsi un solde positif de 120 usines créées (176 créations et 56 fermetures).
L'an dernier, les relocalisations d'entreprises, c'est-à-dire les rapatriements de production que des entreprises françaises faisaient elles-mêmes ou sous-traitent à l'étranger, ont "fortement augmenté" passant de 30 en 2020 à 87, indique par ailleurs la société de données économiques. Elle qualifie ainsi 2021 d’année "record" en France pour l'industrie.
>> Suite à lire à :
<https://www.novethic.fr/actualite/environnement/economie-circulaire/isr-rse/reindustrialisation-un-mouvement-qui-avance-lentement-mais-surement-150718.html>
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7- Quels sont les châteaux français les plus écolo ?, L’Info Durable, 17/04/22
Hannah Brami

Les châteaux de France sont réputés pour leur charme et leur histoire. Mais que font-ils pour se mettre au vert ? ID met à l’honneur ces demeures françaises qui s’engagent.
Chambord, Hautefort, Forges… Quels sont les châteaux à visiter cet été ? Faire le tour des palais français est avantageux. Ces lieux foisonnent d’activités et ne sont jamais bien loin, réduisant l’empreinte carbone liée au transport. Après avoir abordé les destinations les  plus insolites dans son magazine “Idée Pratique : Vacances écolo : mode d’emploi”, ID fait le point des châteaux français, leurs jardins et leurs initiatives écolo. 
Les châteaux de la Loire à bicyclette
Pour réduire au maximum le coût environnemental des transports, il est possible en empruntant la “Loire à vélo" de faire le tour des châteaux de cette région. Cet itinéraire “cyclotouristique” qui traverse six départements de la vallée de la Loire (Cher, Loiret, Loir-et-Cher, Indre-et-Loire, Maine-et-Loire, Loire-Atlantique), est parfait pour découvrir les environs des châteaux, au plus proche de la nature. Il est alors possible de pédaler du Château des Ducs de Bretagne à Nantes au château de Chambord en passant par le domaine de Chaumont-sur-Loire ou encore le Clos Lucé d’Amboise. 
>> Suite à lire à :
<https://www.linfodurable.fr/environnement/quels-sont-les-chateau-francais-les-plus-ecolo-31768>
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8- Tribune. Edgar Morin : « Soyons conscients du risque historique pour la France », Le Monde, 20/04/22, 14h38   
Par Edgar Morin, Sociologue et philosophe

Dans une tribune au « Monde », le sociologue dit nécessaire de soutenir Emmanuel Macron au second tour de l’élection présidentielle, mais il demande au candidat président d’amorcer un virage en faveur d’une voie nouvelle, qui place l’écologie en son cœur contre l’hégémonie du profit.
Tribune. Quelle terrible coïncidence ! Simultanément : une élection présidentielle, où se joue le sort de la France humaniste et républicaine, et une guerre de plus en plus sanglante en Ukraine, cause d’énormes bouleversements géopolitiques et économiques avec le risque d’un conflit mondialisé où l’Europe naufragerait.
Deux menaces sont liées : celle d’une régression en France qui conduirait à un Etat autoritaire et à une société de soumission, celle du retour massif du monde à la barbarie.
Il aurait suffi que…
Le tragique est qu’en France, comme dans le monde, prévoyance et lucidité auraient pu modifier le cours des événements. En France, il aurait suffi que Fabien Roussel, Yannick Jadot, Anne Hidalgo se désistent en faveur de Jean-Luc Mélenchon, et Marine le Pen aurait été absente au second tour.
La gravité du problème français est que de crises en crises, d’angoisses en angoisses, se sont fortifiés les replis identitaires, le suprématisme raciste, la désignation en bouc émissaire des immigrés, des musulmans ou à nouveau des juifs. Le nationalisme aveugle gagne sur la réalité historique intégrative une et diverse de la France réelle.
> Lire aussi : Nonna Mayer : «  Le front républicain, ce sont des gens de camps opposés qui s’allient dans un même combat pour défendre la République menacée »
Autrement dit, nous devons craindre la victoire de cette deuxième France réactionnaire qui n’a pu s’imposer dans l’histoire de la IIIe République qu’à la faveur du désastre national de 1940. Aujourd’hui, paradoxalement, sans nulle occupation étrangère, cette France réactionnaire croit subir une occupation mythique (« le grand remplacement »).
Les Français fidèles à l’humanisme républicain craignent à juste titre Marine Le Pen dont ils pensent que le sourire aimable est de façade et que son programme n’est adouci qu’en surface.
Un attrait nihiliste du gouffre
Ses propos populistes, et ici le mot est juste, trouvent un écho dans les aspirations et les craintes des milieux populaires pour leur vie quotidienne. Le présent semble effacer le passé, surtout pour les générations qui n’ont pas connu l’extrémisme Jean-Marie Le Pénien. Il y a même une curiosité chez bien des dépolitisés : « Voyons ce qu’elle va faire ». Il y a même chez certains un attrait nihiliste du gouffre.
Rappelons que ce qui menace la France est la régression historique qui envahit le monde et l’Europe : crise des démocraties, hégémonie du profit, régimes néo-autoritaires.
La France réactionnaire pourrait arriver légalement au pouvoir et pourrait aussitôt le monopoliser. Emmanuel Macron ne peut être certain de l’emporter car il doit surmonter divers handicaps. Au cours de son quinquennat, le champion du renouveau est devenu le mainteneur de l’ordre néolibéral établi.
> Lire aussi la tribune : « Une présidence avec Marine Le Pen serait une catastrophe économique, sociale et environnementale »
Son « quoi qu’il en coûte » durant la pandémie à rompu pour un temps avec son héritage économico-financier, mais l’affaire des cabinets de conseil a été le symbole d’une politique de privatisation des services public. Il subit la colère de l’ensemble des stigmatisés comme les antivaccins. Il subit à nouveau le discrédit à gauche d’être vu comme le président des riches. Il subit le retour de la controverse sur la réforme des retraites alors que celles-ci auraient pu être modulées selon la pénibilité du travail et soumises à examen de santé après un certain âge.
Un élan régénérateur
Enfin, ce qui pèse de plus en plus sur la candidature Macron est le retour de l’inflation qui met au premier plan des préoccupations populaires sur le pouvoir d’achat. Cette hausse des prix occulte d’autres problèmes fondamentaux dont certains, du reste, lui sont liés (approvisionnement en blé, en gaz, en métaux rares) auxquels il s’agit de faire face.
Cela dit, il faut mettre au crédit d’Emmanuel Macron ses efforts méritoires pour maintenir le dialogue avec le président russe Vladimir Poutine et chercher à éviter une escalade conduisant à une généralisation de la guerre aux conséquences incalculables. Ne sous-estimons pas l’importance de la guerre russe en Ukraine pour nos élections. Le président doit continuer à faire tout son possible pour que s’arrête la tragique escalade qui continue de plus en plus dangereusement.
> Lire aussi : Election présidentielle 2022 : « La “tectonique des plaques” des partis politiques n’est pas encore apaisée »
Certes, le président candidat bénéficie de l’apport de personnalités de droite et de gauche, mais on ne sait s’ils « s’entrecomplètent » plus qu’ils « s’entre-annulent ». Etre un rempart, faire barrage à un adversaire dédiabolisé pour une partie croissante de l’opinion, est-ce suffisant pour l’emporter ? Je pense que c’est de toute façon insuffisant pour la renaissance d’une France humaniste. Emmanuel Macron a besoin, non tant de retrouver l’élan novateur perdu, mais de trouver un nouvel élan régénérateur.
Sa jeunesse, son intelligence, son sens des complexités le rendent capable, comme il l’a déclaré lui-même, de se remettre en question et de se réinventer. Il est donc capable de changer de voie et de se faire promoteur du vrai New Deal qui s’impose en France, une politique de salut public. Il est capable d’une pensée et d’une orientation politique nouvelles.
Renouveau des solidarités
La voie nouvelle demande l’intégration de l’écologie dans l’activité économique, sociale civilisationnelle. C’est la nécessité écologique qui doit produire des sources d’énergie propre, qui doit dépolluer nos villes et nos campagnes, développer l’agriculture fermière et agroécologique et faire régresser l’agriculture industrielle polluante et stérilisante des sols, réformer la consommation pour des aliments sains et des produits de véritable utilité ainsi que de qualité esthétique et culturelle.
Il faut écarter l’alternative croissance/décroissance pour une croissance de ce qui est essentiel et indispensable, et la décroissance, ce qui est malsain et futile. Cette nouvelle économie écologisée apporterait sa contribution au mieux-vivre.
> Lire aussi : Présidentielle 2022 : à Marseille, Emmanuel Macron projette la France en « grande nation écologique » pour séduire l’électorat de gauche
La voie nouvelle demande aussi le reflux de l’hégémonie du profit, la débureaucratisation de l’Etat, le renouveau des solidarités. La France n’est pas tant en déclin que devenue une puissance moyenne. Mais notre nation moyenne a des moyens qui dépassent ses limites matérielles. Elle est capable de se faire entendre dans le monde, comme l’avait montré le général de Gaulle.
Il est important que la France retrouve sa fierté. Sa grandeur militaire n’eut qu’un temps, sa grandeur historique est d’être la patrie de l’humanisme, des idées universelles, de Montaigne à Camus, de la déclaration des droits humains de 1789 et de l’abolition des privilèges. Sa nouvelle fierté serait de proposer au monde la nouvelle voie, qui permettrait non seulement de résister à la régression généralisée qui déferle sur la planète, mais d’envisager enfin un progrès humain sur les barbaries.
Transcender droite et gauche
Le salut public, comme ce fut le cas pour la résistance à l’Occupation, doit aujourd’hui transcender droite et gauche sans pour autant les dissoudre. Car si la gauche des partis est morte, la gauche des esprits est vivante.
Toutes les motivations pour s’abstenir de voter comme pour éliminer Macron sont aujourd’hui pro-Le Pen. Colères, fureurs, indignations ne doivent pas occulter la pensée lucide et la stratégie efficace.
> Lire aussi : Election présidentielle 2022 : « Le Frexit caché de Marine Le Pen est un projet de rupture délétère pour la France et pour l’Europe »
Il peut être juste parfois de s’abstenir, mais non quand s’impose un choix contre un désastre historique qui nous amènerait un Vichy sans invasion.
Nous allons voter dans un monde en convulsion, avec risque de guerre, probabilités de crises, de pénuries, de barbaries. Le pilote au gouvernail devra se montrer à la hauteur. Soyons conscients du risque historique pour la France. Soyons acteurs d’une chance historique pour la France.
§ Edgar Morin est notamment l’auteur de « Réveillons-nous » (Denoël, 80 pages, 12 euros).
<https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/04/20/edgar-morin-soyons-conscients-du-risque-historique-pour-la-france_6122956_3232.html>
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9- Caillou dans la chaussure des multinationales, l’activisme actionnarial se développe, Vert.eco, 20/04/22
Anne-Claire Poirier

La Bourse ou la vie. De plus en plus de militant·es en cols blancs s’immiscent dans l’actionnariat des entreprises pour les inciter à de meilleures pratiques. Ces six derniers mois, le phénomène a atteint son plus haut niveau, selon un rapport de la banque Lazard.
L’activisme actionnarial est une branche de l’investissement durable qui consiste à influencer de l’intérieur les pratiques de certaines sociétés. En devenant actionnaire, il est en effet possible d’interpeller les dirigeant·es en soumettant des déclarations ou des résolutions à l’ordre du jour des assemblées générales, en faisant usage de son droit de vote ou encore en dialoguant avec les instances de direction. Certes, l’influence est proportionnelle au nombre d’actions détenues et les fonds « responsables » sont, la plupart du temps, très minoritaires. Mais la banque Lazard a tout de même relevé quelques réussites notables dans son rapport annuel.
Elle mentionne par exemple la campagne acharnée de l’homme d’affaires américain Carl Icahn à l’encontre de la chaîne de fast-food McDonald’s pour que celle-ci se fournisse auprès d’entreprises plus respectueuses de la condition animale. En février dernier, le multimilliardaire est parvenu à faire nommer deux des siens au conseil d’administration de l’entreprise. En France, note la banque, le fonds d’investissement Mirova a demandé un changement de gouvernance à la tête d’Orpea après les révélations de maltraitance des pensionnaires dans les maisons de retraite du groupe.
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<https://vert.eco/articles/caillou-dans-la-chaussure-des-multinationales-lactivisme-actionnarial-se-developpe>
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10- Reportage. « On n’a pas d’autre choix que de transgresser la légalité, car cette ­dernière est écocidaire » : la tentation radicale des militants écologistes, Le Monde, 21/04/22, 01h34
Sevin Rey-Sahin

Depuis les résultats du premier tour à la présidentielle, les associations écologistes ont vu leurs rangs grossir de façon spectaculaire. La plupart d’entre elles estiment que le temps des simples marches, trop peu suivies d’effets, est révolu. Seule la désobéissance civile pourrait, pensent-elles, faire bouger les lignes.
Etendu sur le bitume, lunettes noires sur le nez, un bras enfoncé dans un tuyau en métal, Jérémy (la plupart des militants n’ont pas souhaité donner leur nom), 20 ans, interpelle une femme debout près de lui.« Pardon, médiatrice, que fait-on si la police nous charge ? », lui demande-t-il. Elle ne sait pas. C’est sa toute première action de désobéissance civile à elle aussi. Elle part se renseigner auprès d’anciens « rebelles ».
Au côté de Jérémy, d’autres corps allongés, d’autres bras reliés entre eux par ces tuyaux. Un peu plus loin, sur le boulevard de Bonne-Nouvelle, méditants assis sur des tapis de yoga face à un bloc de CRS, chaînes humaines, pianos auxquels s’attachent des activistes, structures en bambou et bottes de foin bloquent cet axe principal de Paris.
Le samedi 16 avril, dans l’entre-deux-tours de la présidentielle, plus de 1 500 militants du mouvement écologiste Extinction Rebellion (XR) ont investi les abords de la porte Saint-Denis pendant trois jours pour dénoncer l’« inaction climatique » du pouvoir – ce « feu qui dévore notre avenir » – et « imaginer une autre démocratie que celle que l’on nous impose », résume Malal, membre du collectif.
Des électeurs de Jean-Luc Mélenchon
Parmi la foule, de nouveaux visages, tous électeurs de Jean-Luc Mélenchon pour son programme écologique et tous déçus par le résultat du premier tour, ont rejoint les activistes de la première heure. « Ni Le Pen ni Macron ne prennent au sérieux les questions environnementales, je suis venu ici pour agir et être cohérent avec moi-même », affirme Jérémy.
Pablo ne s’est pas attaché, il préfère distribuer des tracts. « J’ai fondu en larmes lorsque j’ai vu le résultat du premier tour. J’étais en colère contre moi-même de ne pas en avoir fait assez pour qu’un candidat de gauche soit présent au second tour », lance-t-il. L’étudiant parisien de 19 ans est convaincu que l’activisme s’impose désormais comme seule alternative lorsque les politiques n’agissent pas.
> Lire aussi : « Voter ne suffit plus. » A Paris, Extinction Rebellion se lance dans une action massive de désobéissance civile
Au soir du 10 avril, l’activiste Camille Etienne, suivie par près de 130 000 personnes sur Instagram, est contactée par des dizaines d’internautes « en colère ». « Tous demandaient comment ils pouvaient agir concrètement », résume-t-elle. L’étudiante en sciences politiques crée alors un groupe de discussion sur la plate-forme Discord pour les mettre en contact avec des ONG écologistes. Près de 3 700 personnes s’inscrivent en à peine trois jours.
Chez XR, l’action du 16 avril, intitulée « L’Inévitable Rébellion » et prévue depuis ­plusieurs mois, connaît une explosion du nombre d’inscrits la semaine suivant le vote. Le mouvement de la militante Greta Thunberg, Youth for Climate, voit arriver des dizaines de demandes d’engagement dans ses réseaux locaux alors que, jusque-là, le collectif en recevait une ou deux par semaine.
Rhétorique de la résistance
Face à cette nouvelle vague, Extinction Rebellion et d’autres organisations, comme Les Amis de la Terre ou encore Alternatiba, se posent la question de la stratégie à adopter pour « absorber » ce public et, surtout, se ­montrer plus efficace après la désillusion du quinquennat d’Emmanuel Macron.
Non-respect des engagements de limiter les émissions de CO2, promesse de sortie du glyphosate non tenue, loi climat peu ambitieuse… les écologistes accusent le coup d’un bilan mitigé alors que jamais l’engouement pour le sujet n’a été aussi fort avec, entre autres, des marches réunissant des centaines de milliers de personnes.
> Écouter aussi Emmanuel Macron : un bilan écologique insatisfaisant 
« Le mouvement climat est épuisé, on a l’impression d’avoir atteint le plafond de verre. Cette présidentielle va clore le cycle des marches initié en 2018, après la démission de Nicolas Hulot. Aujourd’hui, on entend une forte rhétorique de la résistance », observe Théo Rougier, porte-parole au sein du réseau d’activisme Maintenant ou jamais.
 Que faire, alors, lorsque marcher ne suffit pas ? Jean-François Julliard, directeur général de Greenpeace France, affirme réfléchir aux différentes stratégies. « En cas d’élection de Marine Le Pen, on se mettra en mode résistance pour défendre nos libertés fondamentales. Sous Emmanuel Macron, on devra probablement attendre moins des politiques et se tourner davantage vers d’autres communautés d’­acteurs, car on n’a pas réussi à convaincre sous le précédent quinquennat », confie-t-il, avant d’ajouter que « la désobéissance civile a plus que jamais sa place dans la situation actuelle ».
Pour que « le système se sente menacé »
Ce besoin d’action directe est partagé par toutes les associations. Extinction Rebellion souhaite aller plus loin dans le rapport de force pour que « le système se sente menacé », juge Malal, sous l’arche de la porte Saint-Denis. Après la victoire de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes (Loire-Atlantique), où le projet d’aéroport a été abandonné à la suite de plusieurs années d’occupation et de confrontation avec les forces de l’ordre, la radicalité apparaît pour certains incontournable.
> Lire aussi : La mue écologiste d’Emmanuel Macron
« Aujourd’hui, on n’a pas d’autre choix que de nous opposer sur le terrain, de transgresser la légalité, car cette ­dernière est écocidaire. On l’a vu avec les “gilets jaunes”, pour être entendu, il faut être en capacité de bloquer économiquement ce pouvoir sourd à nos demandes », résume Benoît, zadiste et membre des Soulèvements de la Terre.
En janvier 2021, c’est sur ce même bocage de Notre-Dame-des-Landes qu’est né ce collectif réunissant et coordonnant divers organismes tels le syndicat agricole Confédération paysanne, XR et des mouvements de lutte locaux.
Depuis, les Soulèvements de la Terre ont coordonné plusieurs actions de désobéissance civile, comme l’occupation d’une usine Lafarge, celle du siège de Monsanto, à Lyon, ou le débâchage de bassines agricoles afin de dénoncer l’accaparement de l’eau par une minorité d’agriculteurs. Benoît refuse de parler de violence ou de non-violence mais préfère parler de légitimité face à « une violence d’Etat qui rend la planète encore plus inhabitable ».
Se radicaliser en restant attirant
A la différence d’Extinction Rebellion, qui bloque les grandes capitales, investit des aéroports, asperge de sang le siège du Medef, ou de Greenpeace, qui occupe, entre autres, des centrales nucléaires, le mouvement promeut un mode d’action plus locale avec un effet direct et brutal sur les projets jugés « écocides ». Chez Greenpeace, on admet que ce type de résistance « avec un objectif et des victoires plus atteignables peuvent concrétiser et ancrer
l’action climatique ».
> Lire aussi : Stroud, le berceau anglais des activistes écologistes
Plutôt que de marcher ou de signer une pétition pour le concept flou et lointain de dérèglement climatique, les Soulèvements de la Terre imaginent convaincre davantage d’acteurs en les invitant à défendre un lieu auquel ils sont attachés. « Mais, face à une urgence climatique globale, les seules luttes locales ne peuvent suffire », tempère Jean-François Julliard.
Le mouvement climat entre dans ce que Théo Rougier appelle « une zone d’expérimentation » dans laquelle les marches seront juste la porte d’entrée de l’engagement. « Personne ne va aller s’enchaîner à des grilles pour sa première fois en tant qu’activiste », pointe Théo Rougier. Se radicaliser, oui, mais en restant accessible, attirant et efficace.
Ce soir du 16 avril, tandis que les CRS quittent les lieux, les tentes d’Extinction Rebellion s’installent pour la nuit. Des « gilets jaunes » et de jeunes antifascistes arrivent. « C’est naze comme occupation, c’est pas stratégique », critique Magalie, « gilet jaune » depuis les débuts. Les antifascistes, eux, lancent des fumigènes jaunes, un autre groupe part pour une manifestation sauvage dans les rues alentour. Un feu se déclenche, les sirènes se rapprochent. Un jeune membre de XR regarde la scène avec crainte. « Il ne faudrait pas que tout ceci fasse peur aux nouveaux à qui on a promis la non-violence. »
<https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2022/04/21/on-n-a-pas-d-autre-choix-que-de-transgresser-la-legalite-car-cette-derniere-est-ecocidaire-la-tentation-radicale-des-militants-ecologistes_6123023_4500055.html>
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11- Pendant l’entre-deux tours, le gouvernement continue le passage en force à Stocamine, Rue89 Strasbourg, 22/04/22, 16h31
Jean-François Gérard

Juste avant les élections, la ministre de l’Écologie Barbara Pompili a signé un nouveau décret pour démarrer le confinement définitif des déchets toxiques à Stocamine. Ces déchets pollueront la nappe phréatique d’Alsace d’autant qu’une enquête judiciaire est en cours pour vérifier quels ont été les produits entreposés.
Tous les cinq ans, les derniers jours du mandat présidentielFrédéric Bierry (LR), le président de la Collectivité d’Alsace (CeA).
La ministre de la transition écologique Barabra Pompili a signé le 15 avril un décret qui dispense les installations classées de constituer des garanties financières si elles ont une garantie de l’État. Un texte sur-mesure pour la société des Mines de Potasse d’Alsace (MDPA) qui exploite l’activité de stockage dans l’ancienne mine de Wittelsheim, près de Mulhouse. 
En novembre, le gouvernement avait déjà préparé le terrain en faisant voter en catimini un amendement pour que l’État se porte garant de la société, sans en préciser la raison. Ces manœuvres font suite à une décision de la cour administrative d’appel de Nancy qui avait empêché le confinement des déchets dans les galeries à cause de l’absence de ces garanties financières.
>> Suite à lire à :
<https://www.rue89strasbourg.com/entre-deux-tours-gouvernement-force-stocamine-232747>
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12- Chronique. Jean Pisani-Ferry : « Il n’y aura de transition écologique réussie que si les citoyens se reconnaissent dans un projet collectif », Le Monde, 22/04/22, 22h00 
Jean Pisani-Ferry, Economiste

Dans une économie où les choix de chacun pèsent sur tous, il faut repenser le rôle de la puissance publique. Et donc oui, planifier. La question est de savoir comment, considère l’économiste dans sa chronique.
Chronique. A défaut d’accéder au second tour, Jean-Luc Mélenchon a réussi à imposer son thème-phare, la planification écologique, qu’Emmanuel Macron a repris à son compte en annonçant qu’il en chargerait directement le premier ministre.
> Lire la chronique de Françoise Fressoz : Présidentielle 2022 : « La transition écologique est devenue l’ultime bouée de sauvetage d’Emmanuel Macron pour embarquer la nation »
L’expression surprend : le dernier plan français a pris fin en 1992. Mais, surtout, on a longtemps dit que la transition écologique reposerait sur le marché. Les économistes répétaient que le rôle des gouvernements n’était pas de jouer les chefs d’orchestre, mais de donner un prix au carbone. Le reste – choix des technologies, spécialisation sectorielle, consommation, modes de vie – serait du ressort des agents privés. L’Etat fixerait l’ampleur et le rythme de la transformation, le marché en déterminerait les modalités.
Cette belle architecture s’est défaite. En France, la hausse de la fiscalité carbone est suspendue depuis fin 2018 ; aux Etats-Unis, Joe Biden a renoncé à cet instrument ; dans le reste du monde, les recettes correspondantes sont neuf fois inférieures aux subventions aux énergies fossiles, selon les calculs de l’Institut d’économie pour le climat. Certes, le marché européen des quotas fonctionne, et l’UE envisage de l’étendre. Mais ce ne sera, au mieux, qu’un instrument partiel.
La raison première de cet échec est une hostilité sociale profonde à la tarification du carbone. Celle-ci n’est pas sans fondement : en France, en 2019, un quart seulement du produit des nouvelles taxes devait être redistribué aux ménages. Mais même une restitution intégrale, pour un montant égalitaire, est perçue comme injuste. Pour celles et ceux que le prix des combustibles contraint à se restreindre, l’équité commande d’obliger les plus aisés à renoncer à leurs week-ends à Rome. Pas d’en augmenter le prix.
Modèles de jadis
Il y a pire. Si l’on veut qu’entreprises et ménages investissent pour réduire leurs émissions, il ne suffit pas de fixer le prix du carbone pour aujourd’hui, il faut aussi le programmer pour dans vingt ans. Or, les gouvernants ne peuvent pas lier les mains de leurs successeurs. Et quand ils le font, cela n’empêche pas l’Etat de se dédire : en 2013, l’abandon de l’écotaxe poids lourds lui a coûté 1 milliard d’euros en indemnités. Ce manque de crédibilité affaiblit grandement l’instrument.
Toujours nécessaire, le prix du carbone ne sera donc plus la pierre angulaire de la stratégie climat. L’Etat va agir davantage par la réglementation, la subvention, l’investissement, et assumer la responsabilité de choix technologiques, territoriaux ou sociaux. C’est, au fond, normal : entre nucléaire et renouvelables, entre mobilité électrique et hydrogène, entre métropolisation et renaissance des villes moyennes, la décision appartient à la société. Dans une économie où les choix de chacun pèsent sur tous, il faut repenser le rôle de la puissance publique. Et donc, oui, planifier. La question est comment.
> Lire aussi En Allemagne, le gouvernement dévoile son programme d’urgence « ultra-ambitieux » pour le climat
En Allemagne, la nouvelle coalition a créé un ministère de l’économie et du climat, confié au dirigeant vert Robert Habeck. C’est une bonne solution dans un pays fédéral où chaque département ministériel est une grande féodalité. Mais, en France, l’économie sans les finances est aussi faible que l’écologie. Les rapprocher ne permettrait ni de convertir un monde agricole majoritairement crispé sur les modèles de jadis, ni d’organiser la difficile transition entre les emplois d’hier et ceux de demain, ni de décider si les investissements climatiques doivent être financés par l’impôt ou par la dette. Mieux vaut, comme le projette Emmanuel Macron, traiter le sujet au niveau interministériel et, pour deux ans, donner au premier ministre la tâche prioritaire de mettre la transition sur de bons rails.
Clivage écologique
Mais cela ne suffira pas à fixer les choix sociaux. En France, il n’y a plus guère de climatosceptiques, mais nombreux sont ceux auxquels la transformation à venir donne le vertige. C’est à eux que Marine Le Pen s’est adressée en appelant à « ralentir la transition ». Le clivage écologique recouvre et amplifie les clivages générationnels, éducationnels et territoriaux qui fracturent le pays. Et même si le choix est tranché par l’élection, restera à y associer les Français, aussi largement et de manière aussi décentralisée que possible. Il n’y aura de transition réussie que si les citoyens se reconnaissent dans un projet collectif, y voient la possibilité d’un avenir désirable et en deviennent les acteurs.
> Lire l’entretien : « La transition énergétique n’a réellement démarré qu’en Europe »
Vient enfin la programmation économique. La méthode reste à construire. D’abord pour assurer la cohérence et faire en sorte que d’un décret à l’autre, le coût de la tonne de carbone évitée ne varie pas du simple au triple. Ensuite pour mobiliser l’innovation : la bataille pour la planète n’oppose pas planification et marché, mais plutôt capitalisme brun et capitalisme vert. Sur ce plan, l’Europe est paradoxalement en retard sur les Etats-Unis. Enfin, pour prendre la pleine mesure de l’impact économique de la transition. Aujourd’hui, légitime, l’optimisme sur son aboutissement ne justifie pas qu’on se berce de contes de fées. Le changement de modèle économique va dévaloriser des équipements, renverser des positions établies, bouleverser les modes de vie. Il va demander d’investir plus et donc d’épargner plus pour produire différemment à peu près la même quantité. C’est seulement si elle regarde cette réalité en face que la France réussira une mutation analogue par son ampleur à la modernisation de l’après-seconde seconde mondiale.
Planifier, c’est nécessaire. Mettre le premier ministre en responsabilité, c’est bien. Mais, pour réussir, il faudra beaucoup d’écoute, beaucoup de réalisme et beaucoup de persévérance.
§ Jean Pisani-Ferry est professeur ­d’économie à Sciences Po et ­à l’Institut ­universitaire européen ­de Florence, et chercheur à l’Institut Bruegel.
<https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/04/22/jean-pisani-ferry-il-n-y-aura-de-transition-ecologique-reussie-que-si-les-citoyens-se-reconnaissent-dans-un-projet-collectif_6123328_3232.html>
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13- L'UE achève une réforme historique contre la jungle numérique, AFP, 23/04/22, 05:00
Daniel Aronssohn

Mieux lutter contre les appels au meurtre, les images pédophiles, les campagnes de désinformation ou les produits contrefaits... L'UE a conclu samedi une nouvelle législation "historique" pour ramener l'ordre dans le Far West de l'Internet.
Le texte, discuté depuis près d'un an et demi, doit responsabiliser les très grandes plateformes du numérique, comme Facebook (Meta) ou Amazon, en les contraignant à supprimer les contenus illégaux et à coopérer avec les autorités.
"Cet accord est historique", s'est félicitée la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen sur Twitter, "nos nouvelles règles vont protéger les utilisateurs en ligne, assurer la liberté d'expression et des opportunités pour les entreprises".
Le règlement sur les services numériques ("Digital Services Act", DSA) constitue l'un des deux volets d'un plan d'envergure présenté en décembre 2020 par la commissaire à la Concurrence, Margrethe Vestager, et son homologue au Marché intérieur, Thierry Breton.
Le premier volet, le règlement sur les marchés numériques ("Digital Markets Act", DMA), qui s'attaque aux pratiques anticoncurrentielles, a été conclu fin mars.
Le DSA, lui, met à jour la directive e-commerce, née il y a 20 ans quand les plateformes géantes étaient encore embryonnaires. Objectif : mettre fin aux zones de non-droit et aux abus sur internet.
Les dérives des réseaux sociaux ont souvent défrayé la chronique. Assassinat du professeur d'histoire Samuel Paty en France, après une campagne de haine en octobre 2020, assaut de manifestants sur le Capitole aux Etats-Unis en janvier 2021, en partie planifié grâce à Facebook et Twitter...
La face sombre d'internet concerne aussi les plateformes de vente envahies de produits contrefaits ou défectueux, qui peuvent s'avérer dangereux à l'instar des jouets d'enfants ne respectant pas les normes de sécurité.
Le nouveau règlement stipule l'obligation de retirer "promptement" tout contenu illicite (selon les lois nationales et européennes) dès qu'une plateforme en a connaissance. Il contraint les réseaux sociaux à suspendre les utilisateurs violant "fréquemment" la loi.
Le DSA obligera les sites de vente en ligne à contrôler l'identité de leurs fournisseurs avant de proposer leurs produits.
Il interdit les interfaces trompeuses ("dark pattern") qui poussent les internautes vers certains paramétrages de compte ou certains services payants.
- "Avant qu'il ne soit trop tard" -
Au cœur du projet, de nouvelles obligations imposées aux "très grandes plateformes", celles comptant "plus de 45 millions d'utilisateurs actifs" dans l'UE, soit autour d'une vingtaine d'entreprises, dont la liste reste à déterminer mais qui incluront les Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft), ainsi que Twitter, et peut-être TikTok ou Booking.
Ces acteurs devront évaluer eux-mêmes les risques liés à l'utilisation de leurs services et mettre en place les moyens appropriés pour retirer des contenus problématiques. Ils se verront imposer une transparence accrue sur leurs données et algorithmes de recommandation.
Ils seront audités une fois par an par des organismes indépendants et placés sous la surveillance de la Commission européenne qui pourra infliger des amendes atteignant 6% de leurs ventes annuelles en cas d'infractions répétées.
Le DSA interdit notamment l'utilisation des données sur les opinions politiques à des fins de ciblage publicitaire.
Ce texte "est une première mondiale en matière de régulation du numérique", a souligné le Conseil de l'UE, qui représente les 27 Etats membres, dans un communiqué. Il "vient consacrer le principe que ce qui est illégal hors ligne doit également être illégal en ligne".
L'ancienne secrétaire d'Etat américaine, Hillary Clinton, avait demandé jeudi soir à l'UE d'adopter cette nouvelle législation pour "soutenir la démocratie mondiale avant qu'il ne soit trop tard". "Pendant trop longtemps, les plateformes technologiques ont amplifié la désinformation et l'extrémisme sans avoir à rendre de comptes", avait-elle souligné.
La lanceuse d'alerte américaine Frances Haugen, qui a dénoncé la passivité de Facebook face aux nuisances de ses réseaux sociaux, avait salué en novembre le "potentiel énorme" du DSA qui pourrait devenir une "référence" pour d'autres pays, y compris les Etats-Unis.
Dans le contexte de la guerre en Ukraine et des campagnes de désinformation qu'elle favorise, les législateurs ont ajouté "un mécanisme de réaction en cas de crise", a indiqué le Conseil européen. Activé sur décision de la Commission, il permettra de prendre des mesures "proportionnées et efficaces" à l'égard des très grandes plateformes qui contribueraient à répandre de fausses nouvelles.
<https://information.tv5monde.com/info/l-ue-acheve-une-reforme-historique-contre-la-jungle-numerique-453825>
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14- Exclusif. Thierry Breton, commissaire européen : « Les géants d’Internet devront s’adapter aux règles de l’UE », Le JDD, 23/04/22, 20h45
Marie-Pierre Gröndahl

Avec le Digital Services Act, l’Union européenne se dote d’une législation sur la régulation numérique. Le commissaire au Marché intérieur, Thierry Breton, décrypte les enjeux de ce texte adopté hier par le Parlement.
Le Digital Services Act adopté samedi veut mettre fin aux dérives des réseaux sociaux. L’ensemble des fournisseurs de services numériques dans l’UE auront l’obligation de désigner un représentant légal dans l’un des 27 États membres. Ces derniers publieront une fois par an un rapport détaillant les actions entreprises pour modérer les contenus. Les places de marché et les réseaux sociaux devront se doter d’un système gratuit de réclamations, facilitant la contestation des décisions de retrait d’information, de suspension ou de résiliation de compte. Les plateformes auront aussi l’obligation d’informer « promptement » les autorités judiciaires quand elles soupçonnent une « infraction pénale grave » menaçant « la vie ou la sécurité des personnes », et devront suspendre les utilisateurs fournissant régulièrement des contenus illégaux, comme des discours de haine ou des annonces frauduleuses.
Que représente ce Digital Services Act [DSA], le règlement sur les services numériques, voté par le Parlement européen il y a deux jours ?​
C’est un texte majeur pour l’organisation de l’espace « informationnel », cet espace en ligne où nous passons tous environ 40 % de notre temps, pour travailler, apprendre, nous divertir ou socialiser. Nous avons tous pu vérifier pendant la pandémie à quel point cet espace était au cœur de nos vies. Et nous ne pouvons que constater, depuis le début de la guerre en Ukraine, les conséquences dévastatrices de la désinformation. J’y travaille depuis le premier jour de mon arrivée à Bruxelles en tant que commissaire européen. C’est aussi l’une des régulations les plus importantes que la Commission ait proposées depuis plusieurs années car le dernier texte sur le commerce en ligne date de plus de vingt ans. Le DSA est également une première mondiale, rendue possible par un travail considérable des équipes face à de multiples obstacles. Dans ce dossier, la présidence française a joué un rôle déterminant.
S’agit-il de réguler Internet ?
Tout ce qui est interdit « off line », c’est-à-dire dans la vie de tous les jours, doit l’être aussi « on line », c’est-à-dire en ligne. Les actes délictueux doivent être prohibés dans le monde virtuel tout comme dans le monde réel. L’architecture de ce texte, son ADN, réside dans ce principe : le transfert des obligations et des interdictions de la vie physique à la vie virtuelle. Cet enjeu est essentiel pour l’avenir de nos démocraties. Nous avons mis collectivement des siècles à bâtir les règles de notre vie en commun. Aujourd’hui, l’Europe se dote des outils nécessaires pour poursuivre les actes délictueux en ligne : appels à la haine, harcèlement en meute, incitation au terrorisme, pédopornographie, fausses nouvelles, contrefaçon… Je précise que le DSA est un instrument horizontal, qui pourra – et c’est fondamental – être enrichi au fur et à mesure, en fonction des besoins ultérieurs et des usages futurs. C’est ce qui, en s’adaptant aux innovations technologiques à venir, lui permettra de demeurer pertinent dans le temps.
> Lire aussi - Qu'est-ce que le « Digital Services Act », voté au Parlement européen ?
Qui vise-t-il ? Les géants – les Gafam – d’Internet ?
Tous les acteurs de la vie en ligne, à commencer par les grandes plateformes. Elles devront même respecter certaines contraintes ex ante, autrement dit avant d’offrir leurs services sur le territoire européen.
L’Europe est-elle de taille à pouvoir réguler des groupes de cette envergure ?
L’Union européenne compte environ 120 millions d’habitants de plus que les États-Unis. Son poids est considérable, d’autant plus quand elle agit au nom de tous les États membres. Plusieurs législations nationales distinctes n’auraient pas eu une telle efficacité. Grâce à ce texte, une plateforme ne pourra pas jouer un pays contre un autre.
Les lobbies n’ont-ils pas tenté de s’opposer au vote ?
Si, bien sûr. Ils ont même tout tenté pour que cette législation ne soit pas adoptée. Sans succès. Le texte a été voté dans son intégralité car il participe de l’intérêt général de tous nos concitoyens et de leur protection. Aux États-Unis, l’assaut contre le Capitole, en janvier 2021, a démontré l’ampleur des risques causés par des manipulations en ligne.
Elon Musk, le fondateur entre autres de Tesla, souhaite racheter Twitter. La concentration dans ce secteur est-elle inquiétante ?
Qu’un fonds de pension ou une personne physique contrôle une plateforme reste secondaire. L’important, c’est le rôle des plateformes. Dans le domaine de la diffusion de fausses nouvelles, leur responsabilité a été maintes fois établie – qu’il s’agisse du Brexit, de l’élection présidentielle de 2017 en France, ou de la guerre en Ukraine. Or certaines plateformes persistent à se décrire comme de simples hébergeurs. C’est faux.
> Lire aussi - Le « métavers » sera-t-il le nouvel eldorado des géants du web ?
Qu’est-ce que cette législation va changer ?
Les plateformes devront se soumettre à des obligations graduées, en fonction de leur importance. Y compris les plus puissantes d’entre elles, qui comptent plus de 45 millions d’utilisateurs. Plus l’audience d’une plateforme est élevée, plus ses capacités de contrôle devront être importantes, à commencer par ses effectifs de modération. Chacune devra également nommer un représentant légal en Europe. En d’autres termes, les plateformes devront s’adapter à nos règles et non l’inverse. Ces obligations seront identiques partout : ce sera la condition à remplir pour bénéficier d’un accès à l’un des plus grands marchés du monde. Les sanctions seront très significatives puisqu’elles pourront atteindre 6 % du chiffre d’affaires mondial et aller jusqu’à l’interdiction d’opérer sur le territoire européen. Chaque État membre disposera d’un régulateur. Les grands acteurs d’Internet ont compris notre détermination. C’est un changement de paradigme.
Aurez-vous les capacités de contrôle suffisantes ?
Oui. Il est crucial de pouvoir agir en temps réel et de définir les règles de fonctionnement avant toute mise en ligne. Je suis en train de recruter une équipe de 150 spécialistes, experts entre autres des algorithmes et des données. Nous recevons énormément de candidatures. Beaucoup de jeunes, contrairement à des mythes entretenus ici et là, ont le sens de l’intérêt général, la volonté de servir les autres et la capacité d’être à la pointe de ces sujets scientifiques et technologiques. Je coordonnerai l’ensemble du dispositif avec tous les régulateurs nationaux et des correspondants au sein de chaque État membre.
Quand ce texte entrera-t-il en vigueur ?
Dans six mois à un an.
<https://www.lejdd.fr/Economie/exclusif-thierry-breton-commissaire-europeen-les-geants-dinternet-devront-sadapter-aux-regles-de-lue-4107380>
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15- Entretien. Catherine Dauriac, Fashion Révolution : "Notre civilisation est addict à la mode, encore plus qu'au sucre", Novethic, 23/04/22
Propos recueillis par Marina Fabre Soundron

Comment nous libérer de notre addiction à la mode qui fait tant de ravages, autant humains qu'écologiques ? Dans son dernier ouvrage*, la spécialiste Catherine Dauriac donne à voir l'ampleur des dégâts et propose des pistes d'actions pour sortir de ce système mortifère neuf ans après l'effondrement du Rana Plaza au Bangladesh. Le "pire du pire de la mode" avec SheIn, les millions de barils de pétrole utilisés, les réflexes à adopter... Entretien. 
Il y a neuf ans, le Rana Plaza s’effondrait, jetant une lumière crue sur l’industrie de la mode. Près d’une décennie plus tard, constatez-vous une progression des droits humains et environnementaux dans l’habillement ?
Le Rana Plaza est la plus grande catastrophe de l’industrie textile depuis deux siècles. Plus de 1 100 ouvrières sont mortes alors qu’elles travaillaient pour de grandes marques de mode. Cela a été un véritable électrochoc pour la communauté internationale. D’un point de vue réglementaire, la situation a évolué. On a eu l’accord Bangladesh ou encore le devoir de vigilance, qui oblige les multinationales à prévenir les risques sociaux et environnementaux sur toute leur chaîne de valeur. Plus récemment, la France a adopté la loi AGEC, interdisant la destruction de toutes les denrées non alimentaires, dont les vêtements. C’est une avancée considérable alors que les marques brûlaient jusqu’ici leurs invendus, même si la loi est limitée à la France.
Reste qu’à l’autre bout de la chaîne, les travailleurs et travailleuses sont toujours sous-payés. En Asie, les ouvrières du textile gagnent en moyenne cinq dollars pour une journée de travail de 12 heures. Leurs conditions progressent très peu et les consommateurs, eux, continuent d'acheter des vêtements à bas coût. Chaque jour, plus de 410 millions de vêtements sont produits alors qu'on a aujourd’hui produit assez de vêtements pour habiller la planète jusqu’en 2100 !
>> Suite à lire à :
<https://www.novethic.fr/actualite/social/droits-humains/isr-rse/catherine-dauriac-presidente-de-fashion-revolution-notre-civilisation-a-une-addiction-a-la-mode-pire-encore-que-celle-du-sucre-150736.html>
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16- Jean-Louis Etienne, l’aimant des pôles, Le Monde, maj le 24/04/22 à 03h55 
Sandrine Cabut

L’explorateur poursuit depuis plus de dix ans son projet Polar Pod de dérive autour de l’Antarctique. Mais, malgré sa riche carrière, la recherche de financements reste un combat. Rencontre. 
« Pour faire le portrait d’un oiseau, peindre d’abord une cage avec une porte ouverte », écrivait Jacques Prévert. Pour faire celui d’un explorateur, commençons par esquisser un bureau, avec une porte ou plutôt une fenêtre sur le port de Concarneau, dans le Finistère.
Ce 28 mars, Jean-Louis Etienne est dans les locaux du constructeur naval Piriou pour une réunion de conception de Persévérance. Cette goélette de 42 mètres, dessinée par les architectes navals de VPLP et Olivier Petit, sera le bateau avitailleur du Polar Pod, sa prochaine expédition. Sa « cathédrale », comme il a surnommé ce projet de navire vertical, qui l’occupe depuis plus de dix ans. A partir de 2024, le Polar Pod doit accomplir deux tours du monde sur trois ans en dérivant autour de l’Antarctique, au service d’une ambitieuse mission scientifique.
> Lire aussi  En image : le Polar Pod, l’immense bateau vertical de Jean-Louis Etienne, sort de la table à dessin
Autour de la table – et, pour quelques-uns, en visio –, la discussion est hypertechnique, portant sur les voiles, escaliers… de Persévérance. L’aventurier et médecin de 75 ans prend régulièrement la parole pour préciser ses besoins, poser des questions concrètes, donner son avis. A quelques mètres de là, sa femme, Elsa Pény-Etienne, accompagnatrice de ses projets depuis vingt-cinq ans et impliquée dans l’architecture intérieure du voilier, est plongée dans des nuanciers, pour choisir les aménagements intérieurs.
Entre deux ravitaillements du Polar Pod en hommes et en matériel, tous les deux mois, Persévérance accueillera des passagers passionnés par cette exploration océanique. Une ressource financière bienvenue, en complément des partenaires, pour amortir les coûts du navire, propriété de Septième Continent, la société d’armateurs de Jean-Louis Etienne (la construction du Polar Pod est, elle, financée par l’Etat, avec l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer, l’Ifremer, comme maître d’ouvrage).
CAP de tourneur fraiseur
Pour qui comme lui a sillonné mers, terres et même airs, selon les époques, une telle réunion de chantier pourrait paraître un brin austère. « J’aime ces moments de technologie, ça structure et j’y trouve ma place », détrompe-t-il, lors d’une deuxième rencontre dans un lieu plus personnel : son « bureau refuge » parisien, en étage élevé, où il travaille jusqu’à douze heures par jour, et reste souvent pour dormir. Il y a là une myriade de photos et d’objets souvenirs de ses expéditions et autres tranches de vie, un clavier sur lequel il joue du blues en autodidacte, la guitare qu’il avait fabriquée à l’âge de 15 ans…
La massive table en orme est aussi une réalisation de ce bricoleur invétéré, qui, bien avant de faire médecine et un internat en chirurgie, se serait bien vu menuisier. Faute de place dans la section, il a fait un CAP de tourneur fraiseur.
Et puis il y a ses bibliothèques, dans lesquelles l’ancien « dyslexique dysorthographique », qui assure avoir beaucoup de mal à lire un livre d’une traite, ne cesse d’aller picorer ses auteurs favoris : l’écrivain voyageur Nicolas Bouvier, Christian Bobin, ou encore le naturaliste Jean-Henri Fabre, son « écrivain pédagogue », qui lui a enseigné « à regarder le minuscule ». Avec eux, il apprend à ciseler les mots et les messages, comme il aime à le faire dans ses propres ouvrages (une vingtaine), ses conférences, ses interviews…
Trente-six ans après avoir été le premier à atteindre le pôle Nord en solitaire (le 14 mai 1986, après avoir tiré son traîneau pendant soixante-trois jours), et après bien d’autres aventures polaires (dont l’expédition internationale Transantarctica en 1989-1990, la plus longue traversée de l’Antarctique, 6 300 kilomètres en sept mois avec des chiens de traîneau), cet infatigable défenseur de la planète et d’une écologie de solutions est toujours attiré comme un aimant par les pôles.
« Pédagogue de terrain »
Avec le Polar Pod, futur navire vertical « zéro émission » de 100 mètres de haut (dont 80 mètres immergés), « conçu pour rester stable dans les cinquantièmes hurlants », insiste-t-il, les scientifiques vont enfin acquérir de précieuses données en continu sur les échanges atmosphère-océan, notamment en matière de CO2. Principal puits de carbone océanographique de la planète, l’océan Austral joue en effet un rôle important dans la régulation du climat.
Plate-forme silencieuse, le Polar Pod permettra aussi des enregistrements acoustiques de la faune sous-marine, pour en dresser l’inventaire. « C’est en lisant entre les lignes des articles et des publications sur l’océan Austral que l’idée de cette expédition m’est venue. Tous se terminent par une attente : la nécessité de mesures in situ de longue durée », écrit Jean-Louis Etienne, dans Explorateur d’océans (octobre 2021, Paulsen).
Vingt ans après l’aventure Antarctica (son premier voilier polaire, mis à l’eau en 1989 et devenu aujourd’hui Tara), il commence alors à réfléchir à un vaisseau pour relever ce défi. En 2010, il part même s’installer deux ans à San Diego, en Californie, avec sa femme et leurs deux fils, pour bénéficier de l’expérience de l’équipe du Flip, un navire vertical construit par la marine américaine au début des années 1960.
S’il n’intervient pas dans le programme scientifique du Polar Pod, auquel participent quarante-trois institutions et universités de douze pays, sous l’égide d’un comité scientifique (CNRS, Ifremer et Centre national d’études spatiales), Jean-Louis Etienne joue « les pédagogues de terrain ». Il lui incombe aussi de réunir les fonds auprès d’entreprises et de mécènes pour financer l’expédition. Un défi, malgré sa notoriété d’explorateur et son talent de communicant. C’est la partie ingrate de cette aventure, concède-t-il.
La « jeunesse d’un start-upeur »
Pour bâtir sa « cathédrale », il a même contracté un emprunt conséquent. Dans les années 1980, déjà, il s’était endetté à hauteur de 5 millions de francs pour son bateau Antarctica, au nom de son association. « C’est mon père, tailleur à Vielmur-sur-Agout [le village familial], dans le Tarn, qui en était le président », s’amuse-t-il. Un président dormant, qui avait dit à son fils : « Il vaut mieux que ce soit moi qui aille en taule que toi. »
« Jean-Louis a la jeunesse d’un start-upeur, mais ce n’est pas une tête brûlée. Comme tous les aventuriers qui réussissent, il est très pointilleux sur la préparation », estime l’architecte naval Laurent Mermier, directeur général du bureau d’études Ship-ST, qui a dessiné le Polar Pod.
A leur première rencontre, en octobre 2010, « le cœur de l’idée était déjà là et, en un an, on avait le concept », poursuit-il. Depuis, le programme a avancé par à-coups, pris des années de retard, du fait des recherches de fonds, de lourdeurs administratives et réglementaires… « Ce que je retiens, c’est la capacité d’un seul homme à faire tomber les murs qui ont pu se dresser devant nous. Il ne contourne pas. Il analyse, argumente pour comprendre, trouve la solution… Et, à un moment, le mur tombe », décrit l’architecte naval.
Persévérer, résister à la tentation de l’abandon, inventer sa vie, oser l’autonomie… Les mots-clés de Jean-Louis Etienne, dont certains sont les titres de ses livres, correspondent bien à ses valeurs. « Même dans l’adversité, il reste toujours positif. En expédition, où il y a toujours des moments difficiles, de doute, il a le don de mettre de la sérénité », assure le photographe Francis Latreille, qui le considère comme son parrain polaire. Le guide de haute montagne Bernard Prud’homme, qui l’a lui aussi accompagné à de multiples reprises depuis un voyage dans les montagnes de Patagonie en 1983 – époque où le docteur Etienne était médecin d’expédition –, reste frappé par « son calme et sa prise de recul sur les événements ». « Aujourd’hui, l’écriture lui apporte beaucoup, on sent qu’il évolue dans cet exercice, et il est dans une recherche permanente », poursuit ce vieux compagnon de route.
Ecrire sur ses voyages, c’est continuer à explorer. « Je travaille sur des instants profondément enfouis en moi, pour les faire revivre en trouvant les mots justes, et l’émotion peut être plus forte encore qu’au moment initial », raconte Jean-Louis Etienne. Il est capable de pleurer en évoquant la rencontre avec son premier iceberg, tout autant que de décrire avec lyrisme le pommier en fleurs sur lequel il s’est arrêté la veille. « Il y a deux choses qui me font du bien : penser à la magie du vivant, et me rappeler qu’on est un epsilon d’epsilon dans un univers dont on ne connaît même pas les limites », s’enthousiasme-t-il.
A quelques milliers de kilomètres de son bureau parisien, la construction de Persévance a commencé dans le chantier vietnamien de Piriou. L’aventurier espère y aller à l’automne, puis, en 2024, faire les deux premières rotations du Polar Pod. Et après ?
« Est-ce que j’aurai la sagesse de rester là ?, interroge-t-il, en désignant une photo de la cabane dans les bois qu’il a construite dans le Tarn. Là, il y a tout, c’est mon port autonome, je suis souverain. » L’endroit idéal pour poser enfin son sac de grand voyageur, ou juste faire une escale ?
<https://www.lemonde.fr/sciences/article/2022/04/23/jean-louis-etienne-l-aimant-des-poles_6123394_1650684.html>
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17- Partout en France, des militants écologistes veulent « résister » aux projets « injustes et polluants », Le Monde, maj le 27/04/22 à 11h18
Audrey Garric

A l’appel d’une centaine de collectifs locaux et d’une quinzaine d’organisations nationales, des milliers de militants ont organisé, mardi, une trentaine d’actions partout en France contre des projets de routes, d’autoroutes, d’extension d’aéroports, de centres commerciaux, d’entrepôts… 
« Marche funèbre » à Saclay (Essonne) pour dénoncer la bétonisation de terres agricoles en Ile-de-France, blocage du chantier d’extension d’un poulailler industriel de près de 200 000 volailles à Lescout (Tarn)…
A l’appel d’une centaine de collectifs locaux et d’une quinzaine d’organisations nationales, des milliers de militants ont organisé, mardi 26 avril, une trentaine d’actions partout en France contre des projets de routes, d’autoroutes, d’extension d’aéroports, de centres commerciaux ou encore d’entrepôts d’e-commerce. La journée, baptisée « Retour sur terres », visait à dénoncer des projets « injustes et polluants soutenus pendant le quinquennat » qui s’achève.
> Lire aussi La loi climat, « insuffisante » pour les uns, « transformation écologique profonde » pour les autres
Au surlendemain de l’élection présidentielle, les manifestants appellent à mener la lutte écologiste et à « intensifier le rapport de force » au niveau local. « On ne peut plus croire aux promesses du gouvernement, comme on l’a fait lors de la convention citoyenne pour le climat ou sur la loi Climat et résilience, prévient Chloé Gerbier, cofondatrice de Terre de luttes, une association créée en juillet 2021 pour appuyer les luttes locales. Nous devons agir nous-mêmes sur nos territoires pour empêcher la moindre infrastructure toxique. »
Ministère de la transition écologique visé
Les activistes ont aussi ciblé le ministère de la transition écologique, à Paris, en érigeant devant son entrée un mur de parpaings. « On ne peut pas d’un côté lancer des grandes promesses de neutralité carbone et de zéro artificialisation des terres, et de l’autre autoriser et financer ces projets polluants par centaines », avance Victor Vauquois, cofondateur de Terres de luttes. La juriste Chloé Gerbier dénonce, en outre, un amoindrissement du droit de l’environnement et un allégement des procédures d’information et de participation du public sur les projets d’aménagement lors du dernier quinquennat.
Regrettant « la méthode employée », le ministère de la transition écologique assure que « le gouvernement s’est pleinement engagé dans la lutte contre l’artificialisation des sols », en inscrivant notamment cette obligation dans la loi Climat et résilience et en abandonnant des projets « jugés contraires à nos objectifs écologiques », comme Europacity dans le Val-d’Oise, l’aéroport Notre-Dame-des-Landes (Loire-Atlantique), la vente du site d’AgroParisTech à Grignon, le terminal T4 de Roissy, ou la mine Montagne d’Or en Guyane. Les militants, eux, arguent de la poursuite, voire de la multiplication, des projets routiers, d’entrepôts d’e-commerce ou de fermes usines.
> Lire aussi : « On n’a pas d’autre choix que de transgresser la légalité, car cette dernière est écocidaire » : la tentation radicale des militants écologistes
En réaction, le mouvement de « résistance aux projets destructeurs » ne cesse de se renforcer. Il compte désormais plus de 400 collectifs locaux répartis sur l’ensemble du territoire – contre environ 200 en 2019, et une quarantaine en 2015 – regroupant des dizaines de milliers d’opposants, selon Terres de luttes. « On est face à un mouvement social décentralisé qui commence à s’assumer en tant que tel », estime Léa Sébastien, maîtresse de conférences en géographie à l’université Toulouse-II et chercheuse sur les conflits d’aménagement.
Au-delà du changement d’ampleur, elle note une évolution de la nature de ces mouvements, avec une « alliance presque systématique entre des habitants qui veulent défendre un territoire et des militants qui veulent défendre une idée ». Les riverains opposés à un projet, qui n’avaient souvent jamais manifesté auparavant, sont rejoints par des activistes écologistes, notamment d’Extinction Rebellion ou de Youth for Climate, des paysans, des naturalistes ou des syndicalistes, rassemblés pour des raisons différentes – le climat, la pollution, les nuisances, la destruction d’espaces naturels, la biodiversité ou la remise en cause du capitalisme. De quoi donner aux collectifs une hétérogénéité sociale, politique et d’âge qui fait défaut au mouvement climat.
« Agir sur le terrain »
« Beaucoup de militants se lassent des marches climat, qui permettent de sensibiliser et de recruter, mais peuvent être parfois hors sol. Plutôt que de seulement appeler à agir dans la rue, on veut agir véritablement sur le terrain », témoigne Léna Lazare, membre de Youth for Climate. D’autant que les luttes locales « rendent le sujet du dérèglement climatique vraiment concret », comme la sécheresse « qui empire tous les ans dans le Marais poitevin », là où des militants s’opposent aux projets de mégabassines.
> Lire aussi : Dans les Deux-Sèvres, les mégabassines agricoles font déborder le vase
Si les luttes locales séduisent toujours davantage, c’est aussi parce que « c’est là où l’on peut gagner des victoires », alors que l’échelon national apparaît « bloqué »après la loi Climat, juge Chloé Gerbier. Les militants recensent une quarantaine de projets abandonnés depuis trois ans à la suite de la mobilisation des habitants. Loin d’être uniquement des enjeux locaux, ces luttes ont aussi « le pouvoir de remettre en cause les politiques nationales », avertit Victor Vauquois.
« Les deux se nourrissent, s’articulent », abonde Etienne Coubard, chargé de campagne surproduction aux Amis de la Terre. Les collectifs contre les grands entrepôts d’e-commerce, dont il anime la coalition, « ont conscience que l’enjeu n’est pas l’implantation sur tel ou tel territoire, mais de stopper l’hémorragie de ces plates-formes qui artificialisent les sols, détruisent les emplois et augmentent la production », explique-t-il. La coalition demande un moratoire sur ces implantations – rejeté lors de la loi Climat – car malgré des victoires, « on arrive juste à ralentir Amazon et les autres, on ne les stoppe pas ». « Cela demande beaucoup d’énergie, d’argent, c’est éprouvant », confie Etienne Coubard, qui se félicite toutefois d’avoir « fait progresser la bataille culturelle » sur le sujet.
Coalitions thématiques et entraide
Face au risque de découragement, les collectifs se structurent et s’entraident. Ils se sont regroupés en une quinzaine de coalitions thématiques (sur les routes, aéroports ou jardins populaires) ou géographiques, qui leur permettent de s’échanger des conseils, des contacts ou des formations. « Si on n’avait pas eu notre réseau, on n’aurait pas osé se lancer dans un recours juridique contre la première phase de l’extension de l’aéroport de Marseille », reconnaît Charlène Fleury, porte-parole d’Alternatiba, et coanimatrice du réseau de luttes pour la réduction du trafic aérien, qui fédère une quarantaine de collectifs.
> Lire aussi Les aéroports, nouvelles destinations des marches pour le climat
« On cherche à mutualiser un savoir militant pour faire masse et que les nouveaux collectifs puissent bloquer plus vite encore les projets », ajoute Anna Tubiana, membre fondatrice du collectif SOS Oulala, opposé à la dernière section de la Liaison intercommunale d’évitement Nord de Montpellier, et membre de la toute nouvelle coalition contre les projets routiers et autoroutiers.
Cette volonté de structurer les luttes n’est pas nouvelle. Elle poursuit la dynamique lancée par le collectif Agir contre la réintoxication du monde, en juin 2020, puis par les Soulèvements de la Terre, un mouvement d’activistes et de paysans « contre l’agro-industrie et l’accaparement des terres », amorcé en février 2021, qui mène une action par mois contre un projet. « Les projets d’aménagement sont devenus des vecteurs de politisation sur les enjeux écologistes, note Léa Sébastien. Il est dommage que les autorités ne se saisissent pas de la vitalité démocratique de ces collectifs, qui font des contre-propositions pertinentes, plutôt que de les réprimer. »
<https://www.lemonde.fr/planete/article/2022/04/26/partout-en-france-des-militants-ecologistes-veulent-resister-aux-projets-injustes-et-polluants_6123789_3244.html>
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18- Tribune. « La Suède offre un cas particulièrement intéressant de planification écologique », Le Monde, 27/04/22, 13h00
Par Wojtek Kalinowski, Codirecteur de l’Institut Veblen pour les réformes économiques

Emmanuel Macron a récemment pris position en faveur de la planification écologique. Dans une tribune au « Monde », le sociologue et économiste Wojtek Kalinowski rappelle que la Suède est particulièrement à la pointe sur ce sujet, ce qui lui permet d’avoir l’un des meilleurs bilans en Europe en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Tribune. Emmanuel Macron a fini par reprendre à son compte la grande idée de la planification écologique en annonçant, entre les deux tours de l’élection présidentielle, qu’il confierait la tâche à son prochain chef de gouvernement. L’initiative est salutaire et le président en campagne a pointé en creux un problème central de la gouvernance française : son incapacité à garantir une politique cohérente, visible sur le plan climatique comme sur d’autres. La situation semble presque plus alarmante encore en matière de protection de la biodiversité, où l’Etat français agit comme s’il ne voulait surtout pas poursuivre les objectifs qu’il s’est lui-même fixés, selon le grand spécialiste de la question, Harold Levrel.
Désormais réélu, Emmanuel Macron saura-t-il sortir de cette impasse et à quoi pourrait ressembler concrètement cette planification écologique ? Le débat français puise tout naturellement dans les références historiques au « Plan » des décennies d’après-guerre, mais la planification écologique devient aujourd’hui une tendance plus générale en Europe et la France pourrait utilement s’inspirer des exemples récents venus des Pays-Bas ou des pays scandinaves.
La Suède offre, à cet égard, un cas particulièrement intéressant. Fort d’un bilan parmi les meilleurs en Europe en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre territoriales, le pays s’apprête actuellement à adopter une loi climatique plus complète que la précédente. Elle couvrira non seulement les émissions territoriales mais aussi l’empreinte climatique globale des Suédois, en y incluant l’impact des importations.
> Lire aussi la tribune : « Il n’est jamais trop tard pour agir en faveur du climat »
Soutenue par une large majorité transpartisane au Parlement, la proposition de loi va bien plus loin sur certains points, en retenant des objectifs de réduction ambitieux pour le trafic aérien par exemple. Elle demande au passage à l’agence statistique nationale de produire et rendre publiques les données sur les impacts de la consommation et des exportations. Plus controversé, le choix de tenir compte de « l’utilité climatique des exportations » mériterait sans doute un vrai débat. Grand pays exportateur, la Suède prétend que ses produits contribuent à décarboner de nombreux procédés industriels et des infrastructures des pays acheteurs – à l’instar de l’acier suédois, produit désormais sans énergie fossile, une première mondiale.
Vision d’ensemble
La nouvelle loi suédoise fait ainsi un pas de plus vers la cohérence des politiques publiques. En parallèle, le pays s’apprête à consolider son architecture institutionnelle de la planification. Depuis 2015 déjà, le Conseil des objectifs environnementaux (« Miljömålsrådet ») suédois assure le suivi et l’évaluation des politiques publiques, veillant notamment à traiter les conflits qui peuvent émerger entre des objectifs contradictoires, cherchant à rétablir la cohérence et défendant une vision d’ensemble contre les intérêts sectoriels.
Aujourd’hui la Suède veut aller plus loin en mettant en place un « conseil de planification » (« Råd för samhällsplanering ») pour mieux « interpréter, expliciter et coordonner » les objectifs nationaux. Il s’agit notamment de renforcer la capacité de l’Etat à analyser les conséquences physiques et spatiales des différents arbitrages politiques, à coordonner les investissements, à créer un forum de dialogue permanent entre tous les acteurs publics et privés concernés par la planification.
> Lire aussi la tribune : Changement climatique : « En 2027, y aura-t-il chez le président Macron quelque chose comme un remords ? »
Si la Suède n’a pas connu le Plan « à la française », elle a toujours mélangé l’ouverture économique avec la planification dans de nombreux domaines. L’extraordinaire modernisation de l’industrie suédoise à l’époque des « trente glorieuses » n’aura été possible que grâce à la planification des besoins de formation et de requalification menée localement par des agences d’emploi déployées sur le terrain et dotées d’une très grande autonomie financière et de gestion. Un autre exemple souvent évoqué concerne l’offre dans les domaines de la santé publique et des soins aux personnes âgées, où les agences régionales et les municipalités ont toujours planifié elles-mêmes les besoins et décidaient combien de médecins ou d’établissements il leur fallait sur leur territoire.
Décentralisation
On le voit, la planification à la suédoise a souvent été une affaire décentralisée, le rôle de l’Etat central se limitant à définir les obligations de résultat et à offrir des financements appropriés. Ce fut également le cas de la décarbonation massive du chauffage urbain qui, couplé avec la rénovation thermique menée elle aussi de front depuis les années 1980, a fait quasiment disparaître le chauffage au fioul, au GPL et au gaz. La différence avec la France ne se situe pas tant au niveau des ressources ; la France possède elle aussi de nombreux gisements d’économies d’énergie et un grand potentiel de sources alternatives. Simplement, en Suède, la puissance publique met en œuvre elle-même la planification là où l’Etat français s’appuie sur des politiques incitatives peu efficaces, comme le crédit d’impôt ou le chèque énergie.
> Lire aussi la tribune : Réchauffement climatique : « Pour le prix du carbone, la guerre en Ukraine est un enterrement qui ne dit pas son nom »
A l’échelle macroéconomique, la Suède a prouvé qu’une taxe carbone pouvait faire l’objet d’une acceptation sociale et contribuer à la performance économique. Introduite à un niveau bas en 1991 (25 euros), cette taxe a été progressivement relevée pour atteindre le niveau le plus élevé du monde (120 euros actuellement), en poussant très tôt les entreprises suédoises à anticiper le changement. A elle seule, l’histoire de la taxe carbone suédoise illustre la capacité de l’Etat à choisir un cap et à s’y tenir, sans comparaison avec la politique erratique française.
Cette différence d’approche n’est pas le résultat d’une donnée culturelle innée, mais plutôt de nos modèles démocratiques respectifs. Moins écrasée par le poids de l’exécutif, la démocratie suédoise donne plus de place au Parlement et aux compromis transpartisans. Si elle a besoin de plus de temps pour négocier les réformes en amont, elle finit par avancer plus vite et plus loin.
§ Wojtek Kalinowski est sociologue et économiste. Il est codirecteur de l’Institut Veblen pour les réformes économiques, un think tank consacré aux politiques publiques et aux innovations sociales de la transition écologique. Il a codirigé avec Mathilde Dupré, Jézabel Couppey-Soubeyran et Dominique Méda « 2030, c’est demain ! Un programme de transformation sociale-écologique » (Institut Veblen/Les Petits Matins, 256 pages, 18 euros, à paraître le 19 mai).
<https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/04/27/la-suede-offre-un-cas-particulierement-interessant-de-planification-ecologique_6123895_3232.html>
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19- Entretien. « Il n’y aura pas d’effondrement global mais des effondrements sociaux et localisés », Usbek & Rica, 27/04/22
Propos recueillis par Pablo Maillé

Cinquante ans après sa publication, le rapport Meadows sur les limites à la croissance démontre chaque jour son actualité. Entretien avec l’un de ses co-auteurs, Jørgen Randers, aujourd’hui âgé de 76 ans.
Chez les spécialistes chevronnés comme chez les néo-convertis, l’ouvrage fait figure de référence. Cinquante ans après sa publication, le rapport sur les limites à la croissance commandé au trio de chercheurs Dennis Meadows, Donella Meadows et Jørgen Randers par le Club de Rome continue de faire parler de lui. Que ce soit dans la bouche de politiques, d’artistes ou d’activistes, qui s’empressent désormais de le citer à chaque fois qu’ils le peuvent pour alerter sur la saturation des limites planétaires. Et pour cause : en 1972, The Limits to Growth établissait pour la toute première fois les conséquences dramatiques d’une croissance exponentielle dans un monde fini. Épuisement des ressources, crise pétrolière, pénuries en série… Un demi-siècle plus tard, c’est peu de dire que le sujet ne manque pas d’actualité. À l’occasion de la publication récente d’une nouvelle version de ce best-seller aux éditions Rue de l’Echiquier, nous avons pu discuter longuement avec l’un de ses co-auteurs, Jørgen Randers, aujourd’hui âgé de 76 ans et professeur de stratégie climatique au sein de la BI Norwegian Business School d’Oslo, en Norvège. Entretien.
>> Suite à lire à :
<https://usbeketrica.com/fr/article/il-n-y-aura-pas-d-effondrement-global-mais-des-effondrements-sociaux-et-localises>
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20- 33%, Actu-environnement, Le chiffre du 27/04/22

33%, c’est la part des investissements financés par les plans de relance des pays membres de l’OCDE qui ont un impact positif sur l’environnement, selon les calculs de l’organisation. Ce taux était de 21 % en juillet 2021. Ces dépenses consacrées aux mesures de relance post-Covid-19 sont passées de 677 milliards de dollars, fin juillet 2021, à 1 090 milliards, fin décembre 2021, dans 44 pays à travers l'OCDE, l'UE et certaines grandes économies. 
Plus de la moitié des dépenses identifiées comme positives pour l'environnement (611 milliards) sont destinées aux secteurs de l'énergie et des transports, tous deux essentiels aux stratégies de zéro émission nette et de sécurité énergétique. 
Mais la part des dépenses de relance identifiées comme ayant des impacts « mitigés » ou « négatifs » a également augmenté – passant de 10 à 14 % –, tandis que les 52 % restants se sont avérés n'avoir aucun impact environnemental direct.
<https://www.actu-environnement.com/dit-aujourdhui/1105.html>
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21- Elon Musk fait de nouveau scandale en critiquant publiquement des cadres de Twitter, AFP, 28/04/22, 04:00
Julie Jammot

Elon Musk, qui vient de passer un accord pour racheter Twitter, a critiqué et s'est moqué publiquement de cadres de l'entreprise californienne, suscitant la colère alors que de nombreux salariés semblent déjà inquiets à l'idée d'être dirigés par le patron de Tesla.
Après avoir appuyé un tweet désobligeant sur Vijaya Gadde, la juriste du réseau social chargée des règlements et de la sécurité, le multimilliardaire s'est en outre fendu mercredi d'un meme (image parodique) pour se moquer des règles de la plateforme en matière de modération des contenus et de la responsable.
"Le harcèlement, ce n'est pas du management", a réagi Dick Costolo, qui a dirigé Twitter de 2010 à 2015.
Elon Musk a décidé d'acquérir Twitter notamment parce qu'il estime que le réseau ne respecte pas suffisamment la liberté d'expression. Mais sa vision absolutiste inquiète les défenseurs des libertés de chacun sur internet, qui prônent des échanges sans haine ni désinformation.
D'après le site d'informations Politico, Vijaya Gadde a fondu en larmes lors d'une réunion en ligne avec ses équipes, rassemblées pour parler du changement de propriétaire.
"Elle a fait part en détail de sa fierté pour le travail de ses collègues et a encouragé les employés à continuer leur bon travail", précise l'article.
- Harcèlement -
Le tweet initial à son sujet évoquait la décision de Twitter de bloquer le partage d'un article du New York Post, un quotidien américain conservateur, pendant la campagne présidentielle, parce qu'il enfreignait son règlement. L'affaire avait suscité la colère d'élus républicains et la plateforme avait relaxé la sanction.
"Suspendre le compte Twitter d'une organisation de presse majeure, pour avoir publié un article véridique, était, évidemment, incroyablement inapproprié", a déclaré Elon Musk en commentaire de ce message.
"Créer des memes ciblant des cadres comme Vijaya Gadde, qui a une longue carrière passée à chercher le bon équilibre entre sécurité et liberté d'expression (...), est complètement inacceptable", s'est indigné Alex Stamos, de la prestigieuse université de Stanford, et ancien responsable de la sécurité chez Facebook.
"Les responsables des autres sociétés d'Elon doivent lui dire qu'il dépasse les bornes."
UltraViolet, une ONG de défenses des droits des femmes, a appelé le conseil d'administration du groupe californien à faire machine arrière sur l'accord passé avec l'homme le plus riche au monde.
"Le harcèlement d'Elon Musk à l'égard de Vijaya Gadde est la preuve claire et nette que sa gouvernance va ouvrir grand les portes au harcèlement et aux abus, spécifiquement contre les femmes et personnes de couleurs", a déclaré Bridget Todd, directrice de la communication, dans un communiqué.
L'accord de rachat signé par Elon Musk l'autorise expressément à tweeter sur l'opération, mais avec cette restriction: "à condition que les tweets en questions ne dénigrent pas l'entreprise ou ses représentants".
Le patron de Tesla (voitures électriques), SpaceX (exploration spatiale) et Neuralink (implants cérébraux), entre autres, a gagné plusieurs millions d'abonnés ces derniers jours, portant son total à plus de 86 millions.
- "Anticorps" -
Avant l'annonce du rachat, il avait assuré espérer que "même" ses pires critiques resteraient sur Twitter, parce que "c'est ce que signifie la liberté d'expression".
Mardi, face au déluge de réactions inquiètes, il a ajouté : "la sécrétion d'anticorps de la part de ceux qui ont peur de la liberté d'expression veut tout dire".
Parag Agrawal, l'actuel dirigeant de Twitter, a exprimé mercredi son soutien aux employés du groupe de San Francisco.
"Je suis fier des gens qui continuent à faire le travail de façon concentrée et déterminée malgré le bruit tout autour", a-t-il tweeté.
Plusieurs journaux américains ont relayé les inquiétudes exprimées en interne par de nombreux salariés à l'idée que l'homme le plus riche du monde, coutumier des provocations, dirigeant d'entreprises où la syndicalisation est découragée, ne prenne le contrôle.
Selon l'agence Bloomberg, depuis lundi, Twitter empêche les employés de faire des modifications au code informatique de la plateforme sans l'accord d'un vice-président, pour éviter tout sabotage.
Certains craignent notamment qu'Elon Musk ne défasse leur travail en termes de modération des contenus pour protéger les utilisateurs des abus et violences.
Car le patron de Tesla a plusieurs fois insulté dans le passé des personnes qui n'étaient pas d'accord avec lui, tandis que ses nombreux fans n'hésitent pas à en rajouter.
Et ses nouvelles responsabilités ne semblent pas l'arrêter.
Mardi, il a aussi tweeté "ça ne dit rien de bon" en commentaire d'un message accusant un avocat de Twitter, Jim Baker, d'avoir facilité une fraude.
<https://information.tv5monde.com/info/elon-musk-fait-de-nouveau-scandale-en-critiquant-publiquement-des-cadres-de-twitter-454559>
Sur le même sujet :
> Le rachat de Twitter par Elon Musk, une mauvaise nouvelle pour la liberté de la presse selon la Fédération internationale des journalistes <https://information.tv5monde.com/info/le-rachat-de-twitter-par-elon-musk-une-mauvaise-nouvelle-pour-la-liberte-de-la-presse-selon-la>, TV5Monde, 26/04/22, 21:06
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En images
22- 50 œuvres street art à travers le monde qui rendent hommage à l’Ukraine, Creapills, 15/04/22
Justine Mellado

Depuis trois semaines, les combats menés par l’offensive russe s’intensifient en Ukraine. Fortement médiatisé, notamment sur les réseaux sociaux, le conflit laisse également la parole à de nombreux artistes qui témoignent leur soutien au peuple ukrainien avec des fresques créatives aux couleurs du pays.
Au lendemain du début de la guerre ce 24 février, les premières œuvres voyaient déjà le jour sur les réseaux sociaux, comme nous vous le présentions dans cet article. Cette fois, ce sont des street artistes venant des 4 coins du globe qui dévoilent de saisissantes œuvres à la fois touchantes pour certaines et satiriques pour d’autres.
>> Suite à voir à :
<https://creapills.com/oeuvres-street-art-soutien-ukraine-20220315>
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23- Le don des invendus se démocratise doucement, Actu-environnement, 22/04/22
Baptiste Clarke 

Entrée en vigueur en début d'année 2022, la loi Antigaspillage interdit la destruction des produits non alimentaires invendus. Une nouveauté qui pousse au don et fait le bonheur des associations. Reportage vidéo en Occitanie.
La loi Antigaspillage pour une économie circulaire (Agec) a été adoptée en février 2020. Elle vise la fin du plastique jetable, une meilleure information du consommateur, la lutte contre le gaspillage, le réemploi solidaire, la lutte contre l'obsolescence programmée et une production plus cohérente. Un calendrier de mesures a été établi jusqu'en 2040.
Depuis deux ans, un certain nombre d'entre elles sont entrées en application, comme l'interdiction de fabriquer et d'importer des sacs en plastique à usage unique, l'interdiction des pailles, couverts jetables ou autres confettis en plastique, l'obligation pour les grossistes de donner leurs produits alimentaires invendus aux associations, la possibilité pour le consommateur de connaitre l'indice de réparabilité pour tous les équipements électriques et électroniques, etc.
>> Suite à lire et reportage vidéo à voir :
<https://www.actu-environnement.com/ae/news/loi-agec-dons-invendus-lited-39509.php4>
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