[revue-presse-FNH] Petite revue de presse centrée sur agriculture (dont OGM), alimentation, forêt, pêche, apiculture et jardinage (mardi 4 janvier)

Florence de Monclin f.demonclin at fnh.org
Mar 4 Jan 08:00:06 CET 2022


Bonjour à tous,

Un petit tour d'horizon avec deux possibilités d'accès aux dépêches et articles suivants : 
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1- La loi contre l’accaparement des terres agricoles adoptée <https://reporterre.net/La-loi-contre-l-accaparement-des-terres-agricoles-adoptee>, Reporterre, 15/12/21, 09h46
2- Fort rebond attendu de la valeur de la production agricole française en 2021 <https://www.lemonde.fr/economie/article/2021/12/15/fort-rebond-attendu-de-la-valeur-de-la-production-agricole-francaise-en-2021_6106156_3234.html>, Le Monde, 15/12/21, 12h00 
3- Opinion. Affichage environnemental dans nos assiettes : oui à la biodiversité, non aux pesticides <https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/affichage-environnemental-dans-nos-assiettes-oui-a-la-biodiversite-non-aux-pesticides-898644.html>, La Tribune, 16/12/21, 14:45
4- « Cette année, on a planté de l’absinthe près des tomates et des aubergines, et on n’a pas eu de pucerons » <https://www.lemonde.fr/m-gastronomie/article/2021/12/16/cette-annee-on-a-plante-de-l-absinthe-pres-des-tomates-et-des-aubergines-et-on-n-a-pas-eu-de-pucerons_6106330_4497540.html>, Le Monde, 16/12/21, 17h30 
5- Déforestation : le bœuf brésilien mis au ban par des supermarchés européens <https://www.liberation.fr/environnement/alimentation/deforestation-le-boeuf-bresilien-mis-au-ban-dans-des-supermarches-europeens-20211217_OTMJVNFJYNGOLGNFWI3BLH2DXA/>, AFP, 17/12/21, 05:00
6- La grippe aviaire réapparaît dans un élevage de canards du Sud-Ouest <https://www.lemonde.fr/economie/article/2021/12/17/la-grippe-aviaire-reapparait-dans-un-elevage-de-canards-du-sud-ouest_6106515_3234.html>, Le Monde, 17/12/21, 16h17
7- Loire-Atlantique : 400 veaux tués dans l’incendie d’un bâtiment agricole <https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/12/18/loire-atlantique-400-veaux-tues-dans-l-incendie-d-un-batiment-agricole_6106576_3224.html>, Le Monde avec AFP, 18/12/21, 08h01
8- Chronique. Animaliste » dans « Le Monde », de « l’abbé des bêtes » au « welfarisme » <https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2021/12/18/animaliste-dans-le-monde-de-l-abbe-des-betes-au-welfarisme_6106609_4500055.html>, M le mag, 18/12/21, 10h00 
9- Chronique. Matière première : « Le sucre scintille sur le sapin de Noël » <https://www.lemonde.fr/economie/article/2021/12/18/matiere-premiere-le-sucre-scintille-sur-le-sapin-de-noel_6106629_3234.html>, Le Monde, 18/12/21, 14h00 
10- Auchan, Lidl, Carrefour : des supermarchés européens boycottent des produits brésiliens pour lutter contre la déforestation <https://www.novethic.fr/actualite/environnement/agriculture/isr-rse/auchan-lidl-carrefour-pourquoi-des-supermarches-europeens-s-engagent-a-boycotter-des-produits-bresiliens-150420.html>, Novethic, 19/12/21
11- Des étudiants en agronomie interpellent Emmanuel Macron sur sa politique agricole <https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/12/22/des-etudiants-en-agronomie-interpellent-emmanuel-macron-sur-sa-politique-agricole_6106955_3244.html>, Le Monde, 22/12/21, 02h12
12- Reportage. A la ferme collective du Jointout, en Saône-et-Loire, « être à plusieurs est un énorme atout » <https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/12/22/a-la-ferme-collective-du-jointout-en-saone-et-loire-etre-a-plusieurs-est-un-enorme-atout_6106960_3244.html>, Le Monde, 22/12/21, 03h29
13- Tribune. Vers un cacao sans déforestation <https://reporterre.net/Vers-un-cacao-sans-deforestation>, Reporterre, 22/12/21, 14h30
14- Un an de plus pour les néonicotinoïdes « tueurs d’abeilles » <https://reporterre.net/Un-an-de-plus-pour-les-neonicotinoides-tueurs-d-abeilles>, Reporterre, 22/12/21, 15h21
15- Rapport : voici ce que cache la publicité pour la viande <https://mrmondialisation.org/rapport-voici-ce-que-cache-la-publicite-pour-la-viande/>, Mr Mondialisation, 22/12/21
16- 500 millions d'euros <https://www.actu-environnement.com/dit-aujourdhui/1057.html>, Actu-environnement, Le chiffre du 23/12/21
17- Enquête. La puissance politique du sucre, entre délices et dominations <https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/12/24/la-puissance-politique-du-sucre-entre-delices-et-dominations_6107186_3232.html>, Le Monde, 24/12/21, 05h00
18- Guadeloupe : de l'usage important de pesticides malgré le traumatisme du chlordécone <https://www.lexpress.fr/actualites/1/societe/guadeloupe-de-l-usage-important-de-pesticides-malgre-le-traumatisme-du-chlordecone_2164962.html>, AFP, 24/12/21, 13:00
19- Avec la société Epiterre, les agriculteurs développent des prestations de service environnemental <https://www.actu-environnement.com/ae/news/societe-epiterre-prestation-service-environnental-38797.php4>, Actu-environnement, 24/12/21
20- Reportage. Dans les vignes de Fontbonau, un enjeu de taille <https://www.lemonde.fr/le-monde-passe-a-table/article/2021/12/25/dans-les-vignes-de-fontbonau-un-enjeu-de-taille_6107296_6082232.html>, Le Monde, 25/12/21, 17h00 

Bien à vous,
Florence

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ADOPTION DU JOUR : Une proposition de loi visant à mieux réguler l’accès aux terres agricoles a été adoptée par l’Assemblée nationale. Objectif : empêcher les sociétés d’investissement à l’appétit dévorant de grignoter les exploitations familiales. (cf. item 1)
REBOND DU JOUR : L’envolée des cours du blé, du maïs, de l’orge, du sucre ou de la pomme de terre va faire le miel de nombre d’agriculteurs français en 2021, en tout cas, des céréaliers et des exploitants de grande culture. (cf. item 2 & 9)
TRIBUNE DU JOUR : Les consommateurs plébiscitent les produits "bio", autrement dit cultivés sans pesticides. Qu'attend-t-on pour les bannir afin de préserver la biodiversité ? (cf. item 3)
BOYCOTT DU JOUR : La lutte contre la déforestation illégale prend forme dans les rayons des supermarchés. Sous la pression d’ONG et de journalistes, plusieurs enseignes de grande distribution vont stopper la vente de produits issus de trois géants brésiliens de la viande. (cf. item 5 & 10)
DÉTECTION DU JOUR : Huit cas de grippe aviaire détectés dans des élevages du Sud-Ouest. (cf. item 6 & suite)
INTERPELLATION DU JOUR : Un feu nourri de critiques cible le plan stratégique de la France, déclinaison nationale de la prochaine Politique agricole commune. (cf. item 11)
CHIFFRES DU JOUR : — 500 millions d’euros, c’est la somme que la France va verser au secteur forestier pour prévenir et réparer les dommages causés par des organismes nuisibles ou des maladies végétales aux forêts en lien avec des phénomènes climatiques extrêmes. (cf. item 16)
— Entre le début du confinement et la fin du mois de mai 2020, les ventes de sucre ont bondi de 30 % en France, avec une prime au sucre en poudre (+ 56 %) et plus encore au sucre à confiture (+ 80 %). (cf. item 17)
PERSISTANCES DU JOUR : — Interdits depuis 2018, les néonicotinoïdes ou insecticides toxiques qui permettent aux betteraviers de lutter contre la jaunisse ont pourtant été réintroduits dès mars 2021. Ce retour, censé être temporaire, a été à nouveau validé pour l’année 2022. (cf. item 14)
— L’industrie carnée use de tous les artifices du marketing pour influencer les mentalités, notamment celles de cibles les plus vulnérables tels que les enfants. (cf. item 15)
— En Guadeloupe, malgré le scandale du chlordécone qui traumatise la population, l'utilisation d'autres pesticides reste importante, y compris dans les jardins, selon plusieurs études. (cf. item 18)
ALTERNATIVES DU JOUR : — Aux confins des départements du Jura et de la Saône-et-Loire, la ferme collective du Jointout conjugue agriculture biologique, activités d’élevage et maraîchage de légumes. Pourtant, aucun des associés de ce GAEC ne vient du milieu agricole. (cf. item 12)
— La France vient de lancer une plateforme public-privé en faveur du cacao durable. Communément appelée Frisco (pour French Initiative on Sustainable Cocoa), elle vise à promouvoir un cacao « zéro déforestation », sans recours au travail des enfants et s’engage à améliorer les revenus des cacaoculteurs. (cf. item 13)
— Encouragés à changer leurs pratiques, mais bien souvent freinés par les pertes de rendement et donc de revenus que cela engendre, les agriculteurs cherchent de nouveaux revenus via le principe des paiements pour services environnementaux. (cf. item 19)
— Dans les vignes de Fontbonau, domaine drômois, on a appris que savoir tailler est vital pour prévenir les maladies et résister aux aléas climatiques qui touchent les ceps. (cf. item 20)
NOTRE ACTU : A suivre sur notre site Internet <http://www.fondation-nature-homme.org/>, Facebook <https://www.facebook.com/FondationNH/>, Twitter <https://twitter.com/fondationNH> ou Instagram <https://www.instagram.com/fondationNH/>.
> Plan de relance, loi climat... Décryptage et propositions pour des avancées écologiques et sociales qui comptent <http://www.fondation-nature-homme.org/sites/default/files/presse/dp-plan-relance-fnh.pdf>
> Le temps est venu de poser les premières pierres d’un nouveau monde <https://www.fondation-nicolas-hulot.org/le-temps-est-venu-lappel-de-nicolas-hulot-pour-poser-les-premieres-pierres-dun-nouveau-monde/>
> 10 mesures pour juger de la pertinence des programmes des candidats aux élections municipales <http://www.fondation-nature-homme.org/magazine/ecolos-et-sociales-les-prochaines-municipales>
> Baromètre des mobilités du quotidien - Coût, manque d'alternatives : les Français prisonniers de la voiture <http://www.fondation-nature-homme.org/magazine/cout-manque-dalternativesles-francais-prisonniers-de-leur-mode-de-transport>
> Guide en ligne. 7 propositions pour contribuer au grand débat national <http://www.fondation-nature-homme.org/magazine/7-propositions-pour-contribuer-au-grand-debat-national/>
> Pétition. L’Affaire du Siècle. Climat : stop à l’inaction, demandons justice ! <https://laffairedusiecle.net/>
> Let’sbio ! Le Bonus cantine Bio et Locale <https://www.letsbio.org/>
> 30 gestes et astuces pour réduire sa conso d’énergie <https://www.fondation-nicolas-hulot.org/economies-denergie-au-quotidien-trucs-et-astuces-pour-depenser-moins/>
> Groupe Facebook "Infos et astuces pour économiser l’énergie <https://www.facebook.com/groups/208132273169772/?utm_campaign=GE2018&utm_medium=E5&utm_source=GE2018E516>"
> Une collection de vidéos pour décrypter les enjeux écologiques et climatiques <https://www.youtube.com/playlist?list=PLh--7obE3XQ4Ku7J6VzsvlsKayQqvJTq9>
> Pétition. TAFTA, CETA : des traités climaticides qui menacent nos démocraties. <http://fondation-nicolas-hulot.org/action/tafta-ceta-des-traites-climaticides-qui-menacent-nos-democraties/?_ga=1.254849352.1537587716.1214298697>
> Crèches : arrêtons d’intoxiquer nos enfants <https://www.youtube.com/watch?v=FMjygtDmPSM>
> L'APPEL DES SOLIDARITÉS porté par plus de 80 ONG & associations de tous horizons <http://www.comite21.org/reseau-adherents/actualites.html?id=11056>
> 2nd édition de My Positive Impact : les 6 lauréats du public et les 3 lauréats du jury <https://www.fondation-nicolas-hulot.org/trophees-pour-le-climat-my-positive-impact/>
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1- La loi contre l’accaparement des terres agricoles adoptée, Reporterre, 15/12/21, 09h46

Dans la nuit du 13 au 14 décembre, une proposition de loi visant à mieux réguler l’accès aux terres agricoles a été adoptée par l’Assemblée nationale. Objectif : empêcher les sociétés d’investissement à l’appétit dévorant de grignoter les exploitations familiales. Si le nombre de paysans n’a de cesse de décroître depuis quelques années, la taille des exploitations augmente à vitesse grand V. Aujourd’hui, ces sociétés posséderaient près de deux tiers de la surface agricole utile en France.
Cet accaparement des terres échappait jusqu’ici au contrôle des pouvoirs publics ; ces derniers ne pouvant empêcher un investisseur de s’emparer d’une exploitation agricole. Désormais, les cessions de titres sociaux au profit de ces sociétés devront être soumises à une autorisation administrative, délivrée par les préfets.
>> Suite à lire à : 
<https://reporterre.net/La-loi-contre-l-accaparement-des-terres-agricoles-adoptee>
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2- Fort rebond attendu de la valeur de la production agricole française en 2021, Le Monde, 15/12/21, 12h00 
Laurence Girard

Les céréaliers sont les premiers bénéficiaires de la hausse des cours des matières premières. 
L’envolée des cours du blé, du maïs, de l’orge, du sucre ou de la pomme de terre va faire le miel de nombre d’agriculteurs français en 2021. En tout cas, des céréaliers et des exploitants de grande culture. La bonne fortune de ces filières explique en grande partie le fort rebond de la valeur de la production agricole française attendue cette année. Elle devrait progresser de 7,5 % pour atteindre 81,2 milliards d’euros, selon les estimations publiées par l’Insee, mercredi 15 décembre.
Fièvre acheteuse chinoise, aléas dans les récoltes mondiales, appétit renouvelé des spéculateurs pour les matières premières agricoles, le cocktail détonnant a fait s’enflammer les prix des céréales et des oléoprotéagineux. Au point qu’en novembre le blé s’est négocié à son plus haut historique sur la place de marché européenne Euronext, dépassant la cote des 300 euros la tonne. Le maïs lui emboîtait le pas vers les sommets. Le colza a, lui aussi, battu son record avec une cotation à plus de 700 euros la tonne. En parallèle, les moissons ont été correctes, voire généreuses. Résultat, l’Insee table sur une progression de près de moitié de la valeur de la production céréalière à 14,6 milliards d’euros. La hausse est quasi similaire pour les oléagineux, pour un total de 3,6 milliards.
> Lire aussi La France a encore perdu 100 000 agriculteurs en dix ans
Cette performance fait plus que compenser le trou d’air de la viticulture. Le gel de printemps a ratiboisé les espoirs de vendanges de nombre de vignerons. La perte de volume, historique, est proche des 20 %, et même si les prix sont orientés à la hausse, la filière viticole devrait encaisser un repli de 13 % de son activité, à 10,3 milliards d’euros. Les arboriculteurs ont, eux aussi, été touchés par le froid polaire du printemps, mais la hausse des tarifs a limité le retrait à 2,1 %.
Pas d’embellie pour l’élevage
Dans ce tableau dressé par l’Insee, l’élevage ne bénéficie pas de réelle embellie. La filière laitière affiche un bilan quasi stable, à 10,8 milliards d’euros. La croissance de la production de bovins, caprins, ovins et porcins se limite à 1,8 % sur un total de 11,2 milliards d’euros. Quant à la volaille, elle profite d’une revalorisation des tarifs pour progresser de 3,5 %, à 4,7 milliards d’euros. Au global, l’Insee estime le poids de l’élevage en France à 26,8 milliards d’euros, quand la production végétale représente presque le double, à 49,4 milliards d’euros.
> Lire aussi Suicides chez les agriculteurs : le gouvernement lance une « mobilisation collective »
Le rebond de l’activité agricole française en 2021 intervient, il est vrai, après deux années de repli. En 2020, elle avait bien résisté, malgré la crise due au coronavirus, mais elle avait tout de même terminé en recul de 1,9 %. Le ministère de l’agriculture s’est penché sur la situation financière des exploitations agricoles sur cette période. Un exercice qui s’effectue sur un échantillon représentatif de fermes en excluant les plus petites. Il en ressort que le revenu moyen des agriculteurs, défini comme le résultat courant avant impôt par actif non salarié, s’établit à 26 791 euros, en retrait de 10 %, sur l’ensemble de l’année 2020.
Fortes disparités
Les plus chanceux ont été les maraîchers et horticulteurs, qui arrivent en tête de classement, avec un revenu moyen de 42 436 euros, suivis des éleveurs porcins (40 551 euros) et des viticulteurs (39 497 euros), même si ces deux dernières catégories ont pâti d’un recul de leur résultat. Les producteurs de fruits ont bénéficié des fortes hausses tarifaires et progressent dans le classement, avec 33 923 euros. En bas du tableau, restent les éleveurs bovins avec 14 100 euros. Les céréaliers ont aussi fait grise mine avec une petite récolte (19 813 euros). Ils ont pu toutefois compenser un peu le coup de frein de l’activité, s’ils étaient aussi producteurs de betteraves et de pommes de terre (37 462 euros). Quant aux producteurs laitiers, leur revenu moyen a régressé à 26 052 euros.
> Lire aussi Le retour de la grippe aviaire accentue les tensions dans la filière de la volaille
Le revenu moyen des agriculteurs devrait, en toute logique, globalement s’améliorer en 2021, même si les disparités vont rester fortes. L’Insee qui scrute, pour sa part, la valeur ajoutée brute de la branche agricole par actif en termes réels, table sur un redressement de cet indicateur de 11,7 % en 2021.
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« Carrefour nous a demandé de baisser le prix de nos carottes bio de 20 % »
« Nous traversons une période compliquée », témoigne Diane de Pierrepont, agricultrice à Lessay, dans la Manche. Même si elle se dit prête à assumer la succession de son père, désireux de prendre sa retraite, sa détermination se teinte d’inquiétude. Le coup de semonce est tombé fin septembre. « Carrefour nous a demandé de baisser le prix de nos carottes bio de 20 % », raconte-t-elle. Or cette enseigne a justement accompagné son père lorsqu’il a négocié sa conversion vers l’agriculture biologique en 1995, devenant ainsi son premier fournisseur de carottes. Progressivement, l’ensemble de la production légumière de l’exploitation, soit 80 hectares, est passé en bio. Mais en parallèle, les conversions de maraîchers se sont multipliées, poussées par les grands metteurs en marché et les enseignes de distribution attirés par l’eldorado de cette filière. Les volumes de carottes bio ont progressé. Trop ? « Il faut que la consommation suive et que les supermarchés ne se gavent pas sur les marges », réagit Mme de Pierrepont. Elle raconte le changement de ton chez Carrefour. « Il y a deux ans, le prix était fixé à l’année avec quelques périodes de promotion. Maintenant on doit négocier toutes les semaines. La carotte bio est considérée comme un produit mature. »
Prairies temporaires
Ces procédés ramènent le bio aux mêmes aléas économiques que le conventionnel alors que les coûts de production sont plus élevés. Sans oublier l’impact environnemental et social. A l’exemple de l’exploitation de Mme de Pierrepont, qui mise sur la diversité. Même si la carotte tient une place centrale, elle est accompagnée de poireaux, pommes de terre, radis, navets et céleris-raves. Il faut encore ajouter les céréales et des prairies temporaires nécessaires à la rotation des cultures. Des produits que l’on retrouve chez Carrefour, mais aussi chez Naturalia, comme aux marchés de gros de Rungis ou de Nantes, en passant par les détaillants locaux. « Il faut se structurer, encadrer la production pour éviter cette guerre des prix. Sinon, en trois ans, des gens vont piétiner un système vertueux », conclut l’agricultrice.
<https://www.lemonde.fr/economie/article/2021/12/15/fort-rebond-attendu-de-la-valeur-de-la-production-agricole-francaise-en-2021_6106156_3234.html>
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3- Opinion. Affichage environnemental dans nos assiettes : oui à la biodiversité, non aux pesticides, La Tribune, 16/12/21, 14:45
Christophe Barnouin

Les consommateurs plébiscitent les produits "bio", autrement dit cultivés sans pesticides. Qu'attend-t-on pour les bannir afin de préserver la biodiversité ? Par Christophe Barnouin, Président d'Écotone.
Aujourd'hui, un seul affichage garantit un produit bon pour l'environnement et respectueux de la biodiversité : le label « Bio » ou « AB ». Un cahier des charges conséquent que l'on pourrait tenter de résumer en ces trois mots qui font toute la différence : « aucun pesticide chimique ».
Car tel est bien le combat contemporain : bannir tout intrant de synthèse qui pollue nos sols et intoxique les organismes vivants, qu'ils soient animaux, végétaux, ou humains.
>> Suite à lire ou article à écouter à :
<https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/affichage-environnemental-dans-nos-assiettes-oui-a-la-biodiversite-non-aux-pesticides-898644.html>
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4- « Cette année, on a planté de l’absinthe près des tomates et des aubergines, et on n’a pas eu de pucerons », Le Monde, 16/12/21, 17h30 
Camille Labro

Fils, petit-fils et arrière-petit-fils de maraîchers, Sébastien Argentain produit, en Seine-Maritime, des herbes aromatiques qu’il utilise notamment pour parfumer des huiles irriguant toute sa cuisine. 
« Je suis maraîcher par descendance, et je n’ai jamais rien eu envie de faire d’autre que ce métier. J’ai d’abord aidé mon père et, lorsqu’il a pris sa retraite, il y a trois ans, j’ai repris la production. Nous étions entrés au Collège culinaire de France trois ans auparavant, et j’ai eu envie de donner encore plus de valeur et de sens à ce que nous faisions. Nous produisions déjà quantité de légumes variés, mais je me suis aperçu qu’il y avait un vrai manque du côté des herbes aromatiques, et j’ai décidé de mettre l’accent là-dessus.
Ce que je recherche, c’est à la fois la régularité et la diversité : j’essaie de faire pousser de nombreuses herbes différentes entre mai et novembre, et même en hiver pour certaines variétés, et d’en proposer tout au long de l’année. Nous travaillons en serre froide, et nous appliquons les principes de la permaculture, en installant les herbes aromatiques à côté des légumes par exemple, pour repousser naturellement les insectes parasites. Cette année, on a planté de l’absinthe près des tomates et des aubergines, et on n’a pas eu de pucerons.
> Lire aussi « Au lieu d’attendre que le monde change, on pouvait déjà changer de monde » : la permaculture ou le nouveau retour à la terre
Ce sont des choses qui s’apprennent au fil du temps, souvent de manière empirique, car on doit s’adapter au climat, au type de sol, à l’altitude. Notre ferme, à Octeville-sur-Mer, au nord du Havre, est à 500 mètres de la mer à vol d’oiseau. Nos terres sont sableuses, venteuses, chargées d’embruns. C’est à force de travailler et grâce à l’expérience des générations qui nous ont précédés qu’on arrive à tester, analyser et trouver les bonnes solutions. Pour la menthe, par exemple, nous avons essayé 169 variétés avant de trouver celle qui nous plaisait et qui se plaisait chez nous.
Cela prend trois à quatre ans d’implanter une culture, qu’il faut ensuite parfois modifier et adapter. Avec les changements climatiques de ces dernières années, la marjolaine qui était dans les serres n’a pas survécu : il faut qu’on lui trouve un autre emplacement… On doit sans cesse s’adapter. On m’a dit qu’au XVIIe siècle les notaires définissaient la profession de maraîcher comme “nourrisseur de terre”. Aujourd’hui, l’agriculture ne nourrit parfois plus ni l’homme ni la terre. Mais c’est ce que j’essaie de faire…
A la ferme, nous avons 12 hectares, dont la moitié est cultivée (pendant que l’autre est en jachère, pour que la terre se repose), et 800 mètres carrés sont consacrés aux herbes aromatiques. Cela suffit pour une production en continu d’une cinquantaine d’espèces d’herbes à l’année.
> Lire aussi L’huile aromatisée aux herbes : la recette de Sébastien Argentain
J’adore cuisiner et mettre des herbes partout, forcément. L’un de mes usages favoris, ce sont les huiles infusées (ou macérées) aux herbes, comme ce mélange que j’ai créé avec différentes herbes puissantes : tagète, sauge ananas, armoise, ache (ou livèche), ciboule thaïe et ciboulette. Cela complète délicieusement un poisson ou une viande grillée. Il n’y a parfois même plus besoin de sel et de poivre. Et l’huile est une façon de porter, de diffuser et de faire perdurer l’essence des aromates. »
instagram.com/maisonargentain 
pourdebon.com/maison-argentain-s448
> Enquête : Du producteur au consommateur, le circuit court revient dans la course
<https://www.lemonde.fr/m-gastronomie/article/2021/12/16/cette-annee-on-a-plante-de-l-absinthe-pres-des-tomates-et-des-aubergines-et-on-n-a-pas-eu-de-pucerons_6106330_4497540.html>
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5- Déforestation : le bœuf brésilien mis au ban par des supermarchés européens, AFP, 17/12/21, 05:00

Plusieurs groupes de grande distribution, dont Auchan ou Carrefour, se sont engagés à retirer certains produits à base de bœuf soupçonnés d'être liés à la déforestation de l'Amazonie, même si les industriels brésiliens assurent qu'ils préservent l'environnement.
Cette annonce a été faite jeudi par l'ONG Mighty Earth, après la publication d'une enquête du collectif de journalistes Reporter Brasil mettant en cause des groupes comme JBS, Marfrig et Minerva, tous spécialisés dans la viande.
Cette ONG les accuse de participer à la déforestation dans certaines régions du pays et soutient que certains produits liés à la déforestation se retrouvent dans les supermarchés européens, sous la forme de bœuf séché, de corned-beef ou de viande fraîche.
"Le partage par Mighty Earth des résultats de l'enquête, en amont de sa publication, avec les entreprises directement concernées, ont donné lieu aux déclarations d'aujourd'hui" de la part des distributeurs, a dit dans un communiqué l'organisation américaine.
Carrefour a retiré de ses magasins en Belgique une référence de la marque Jack Link's, qui fabrique une partie de son bœuf séché au Brésil avec JBS, après le signalement de Mighty Earth.
"On regarde quelle est l'origine des produits qu'on aurait dans d'autres pays – si on en trouve – pour prendre la décision analogue si le cas se présente", a confirmé à l'AFP Agathe Grossmith, directrice des projets RSE de Carrefour.
De son côté, Auchan a dit à l'AFP avoir engagé une procédure de retrait d'un produit Jack Link's en France et être en train d'enquêter sur son origine. Le groupe rappelle par ailleurs qu'il ne s'approvisionne pas en bœuf brésilien pour ses marques distributeurs.
D'après Mighty Earth, la chaîne de supermarchés belge Delhaize s'est quant à elle engagée "à retirer tous les produits Jack Link's de ses rayons".
L'ONG relève aussi les initiatives de plusieurs autres chaînes de grande distribution comme Lidl et Albert Heijn aux Pays-Bas ainsi que Sainsbury's et Princes au Royaume-Uni pour éviter de vendre du bœuf brésilien dont les producteurs seraient liés à des actions de déforestation.
Un porte-parole de Sainsbury's a confirmé à l'AFP avoir engagé un processus pour se fournir ailleurs qu'au Brésil en bœuf pour ses produits de "corned beef".
De même qu'Albert Heijn, qui dit à l'AFP : "(Nous) avons maintenant pris la décision d'éliminer progressivement la viande bovine brésilienne, et nous recherchons des alternatives provenant d'autres pays d'origine." 
– Les fournisseurs indirects en question –
"Ces mesures commerciales, ainsi que la nouvelle législation européenne destinée à lutter contre la déforestation importée, montrent que l'étau se resserre sur les destructeurs de forêts", s'est réjoui Nico Muzi, directeur de Mighty Earth Europe, cité dans le communiqué.
Mais les groupes brésiliens rejettent avec véhémence ces accusations.
JBS, numéro un mondial de la viande, a assuré dans un communiqué qu'il pratiquait une politique de tolérance zéro "pour la déforestation illégale".
L'industriel a expliqué avoir mis en place il y a dix ans un système de "contrôle par satellite de ses fournisseurs" et avoir ainsi déjà exclu "plus de 14.000 fermes" qui ne respectaient pas son cahier des charges.
Selon JBS, il n'est pas possible à ce jour de "contrôler de la même façon les fournisseurs des fournisseurs", mais le groupe dit avoir investi dans une nouvelle "plateforme verte" pour obtenir d'ici 2025 "une chaîne d'approvisionnement sans la moindre trace de déforestation illégale".
Marfrig a pour sa part affirmé dans un communiqué "être engagé dans le combat de la déforestation illégale depuis 2009 (...), suivant un protocole strict" que ses fournisseurs sont tenus de suivre.
Plusieurs grands groupes brésiliens ont été accusés récemment de "blanchiment de bétail".
Cette pratique consiste à transférer des bovins d'une ferme dont la viande ne peut être exportée en raison de la déforestation illégale sur ses terres, vers une autre "propre", non frappée par ces interdits.
La déforestation a fortement augmenté depuis l'arrivée au pouvoir en janvier 2019 du président d'extrême droite Jair Bolsonaro, favorable à l'exploitation minière ou agricole de zones protégées et de territoires réservés aux indigènes.
<https://www.liberation.fr/environnement/alimentation/deforestation-le-boeuf-bresilien-mis-au-ban-dans-des-supermarches-europeens-20211217_OTMJVNFJYNGOLGNFWI3BLH2DXA/>
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6- La grippe aviaire réapparaît dans un élevage de canards du Sud-Ouest, Le Monde, 17/12/21, 16h17
Laurence Girard

La région est une nouvelle fois touchée par cette épizootie, après avoir été durement affectée à l’hiver 2020. 
La France compte désormais huit cas de grippe aviaire, dont un détecté au sein d’un élevage du Gers, dans la commune de Manciet, selon les données publiées par le ministère de l’agriculture, vendredi 17 décembre. Le Sud-Ouest, avec sa forte densité d’élevages de canards, est donc une nouvelle fois touché par cette épizootie, après avoir été durement affecté à l’hiver 2020.
> Lire aussi Le retour de la grippe aviaire accentue les tensions dans la filière de la volaille
La nouvelle alerte à la grippe aviaire avait été lancée par le ministère le 27 novembre, avec la première découverte d’un foyer d’infection au virus hautement pathogène H5N1 dans un élevage professionnel. L’exploitation avicole concernée, située dans la commune de Warhem (Nord), près de la frontière belge, regroupait 160 000 poules pondeuses. Sachant que la plupart des pays européens ont été contaminés par le virus et que la France avait déjà déclaré 11 cas d’influenza aviaire en faune sauvage et 3 en basse-cour depuis la fin de l’été. Le gouvernement affirme que le virus circule activement par l’intermédiaire des oiseaux migrateurs.
Après ce premier cas dans le Nord, d’autres exploitations agricoles ont été touchées au cœur de ce même département. Au total, les services sanitaires en recensent désormais sept, parmi lesquelles un élevage de 24 000 dindes et des élevages de 30 000 à 40 000 poulets.
Confinement plus strict des volailles
A présent, le Sud-Ouest est aussi concerné. Or, cette région, épicentre de la production de foie gras, avait été ravagée par la précédente épizootie. Entre décembre 2020 et mai 2021, près de 500 élevages avaient été contaminés et environ 3,5 millions de volatiles, en priorité des canards, avaient dû être éliminés.
Lors de cette crise sanitaire, le couperet était tombé sur les élevages en plein air, avec l’obligation de parquer les animaux dans des bâtiments. Cependant, des dérogations étaient de mise. Cette fois, dès le 5 novembre, face à la progression de l’épizootie dans les pays limitrophes, le ministère de l’agriculture avait fixé à « élevé » le risque de grippe aviaire. Un seuil qui contraint dorénavant tous les agriculteurs à confiner leurs volailles de manière plus stricte.
Deux syndicats agricoles, la Confédération paysanne et le Mouvement de défense des exploitants familiaux, ainsi que six associations ont demandé la suspension des arrêtés grippe aviaire, craignant la mise en péril de l’élevage plein air de volailles en France. L’audience en référé s’est déroulée devant le Conseil d’Etat, vendredi 17 décembre.
<https://www.lemonde.fr/economie/article/2021/12/17/la-grippe-aviaire-reapparait-dans-un-elevage-de-canards-du-sud-ouest_6106515_3234.html>
Sur le même sujet : 
> Huit cas de grippe aviaire détectés dans des élevages du Sud-Ouest, Le Monde, maj le 23/12/21 à 06h54 
Laurence Girard
Le virus H5N1 s’étend sur le territoire depuis la découverte d’un premier foyer dans le Nord fin novembre. Le ministère de l’agriculture va contraindre les éleveurs à confiner leurs volailles de manière plus stricte. 
« Nous sommes en alerte rouge », déclare Marie-Pierre Pé, présidente du Comité interprofessionnel des palmipèdes à foie gras (Cifog). En cette veille de Noël, où le foie gras est à la fête sur les tables françaises, les éleveurs de canards du Sud-Ouest sont sous tension. Déjà huit foyers de grippe aviaire ont été détectés dans la région. En ajoutant les huit dénombrés dans le département du Nord, le compteur affiche donc désormais 16 cas dans des élevages professionnels sur le territoire français.
> Lire aussi La grippe aviaire réapparaît dans un élevage de canards du Sud-Ouest
Le ministère de l’agriculture a officialisé l’arrivée du virus H5N1 dans cette zone névralgique de production de foie gras, vendredi 17 décembre. La première commune concernée était celle de Manciet, dans le Gers. « Puis deux élevages appartenant au même propriétaire, contaminés par le personnel, ont été identifiés », explique Mme Pé. Pour l’instant, cinq foyers ont été détectés dans ce département.
Le virus, hautement pathogène, a aussi fait son apparition pendant le week-end au sein d’un élevage installé à Hastingues, dans les Landes, ainsi que dans la commune limitrophe de Came, située, elle, dans les Pyrénées-Atlantique, où deux cas ont été détectés. L’épizootie d’influenza aviaire s’étend donc, sachant que la plupart des pays européens ont été contaminés par le virus et que la France avait déjà déclaré 12 cas en faune sauvage et trois en basse-cour depuis l’été. Le gouvernement affirme que le virus circule activement par l’intermédiaire des oiseaux migrateurs.
Forte densité d’élevages
Le ministère de l’agriculture avait tiré la sonnette d’alarme, le 27 novembre, après la première découverte d’un foyer d’infection au virus H5N1 dans un élevage professionnel. L’exploitation avicole concernée, située dans la commune de Warhem (Nord), près de la frontière belge, regroupait 160 000 poules pondeuses. D’autres exploitations agricoles avaient ensuite été touchées dans ce département. Au total, les services vétérinaires en recensent huit, parmi lesquelles un élevage de 24 000 dindes et des élevages de 30 000 à 40 000 poulets.
> Lire aussi : En 2020, avec la grippe aviaire, la filière foie gras n’était pas à la fête
A présent, le Sud-Ouest est aussi concerné. Or, cette région, avec sa forte densité d’élevages de canards, a subi trois épisodes d’épizootie depuis 2015, dont l’un très dévastateur, l’hiver dernier. Entre décembre 2020 et mai 2021, près de 500 élevages avaient été contaminés et environ 3,5 millions de volatiles, en priorité des canards, avaient dû être éliminés.
Lors de cette crise sanitaire, le couperet était tombé sur les élevages en plein air, avec l’obligation de parquer les animaux dans des bâtiments. Cependant, des dérogations étaient de mise. Cette fois, dès le 5 novembre, face à la progression de l’épizootie dans les pays limitrophes, le ministère de l’agriculture avait fixé à « élevé » le risque de grippe aviaire. Un seuil qui contraint dorénavant tous les agriculteurs à confiner leurs volailles de manière plus stricte.
Climat tendu
La mesure a soulevé des contestations sur le terrain. Deux syndicats agricoles, la Confédération paysanne et le Mouvement de défense des exploitants familiaux (Modef), ainsi que six associations, ont demandé devant le Conseil d’Etat la suspension des arrêtés grippe aviaire, craignant la mise en péril de l’élevage en plein air en France. Dans ce climat tendu, les éleveurs du Sud-Ouest s’inquiètent.
Le coût de la mise à l’abri des animaux, avec une obligation de paillage des bâtiments et une réduction de fait du cheptel, s’ajoutant à la hausse du prix de l’énergie et à la flambée des cours des céréales, pèse sur l’équation économique. Autre motif de préoccupation : « Nous craignons une délocalisation de la production de foie gras vers l’ouest, la Vendée. Les grandes coopératives s’y sont implantées, que se soit Maïsadour, Delpeyrat ou Euralis. Or, le cahier des charges des élevages dans cette région est beaucoup moins contraignant que celui du Sud-Ouest », explique Serge Mora, président du Modef des Landes.
> Lire aussi Le retour de la grippe aviaire accentue les tensions dans la filière de la volaille
« En 2021, la production de foie gras devrait baisser de 22 %, à 12 000 tonnes. Le recul est surtout marqué dans le Sud-Ouest, qui représentait 75 % du volume total », reconnaît Mme Pé. Avec la fermeture des restaurants liée à la crise due au Covid-19 et la baisse des exportations, la consommation est aussi en repli, même si le Cifog compte sur le temps fort de Noël pour rebondir. « Je croise les doigts, j’espère que l’alerte de l’influenza aviaire passera très vite à l’orange puis au vert », conclut Mme Pé.
<https://www.lemonde.fr/economie/article/2021/12/22/sept-cas-de-grippe-aviaire-detectes-dans-des-elevages-du-sud-ouest_6107062_3234.html>
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7- Loire-Atlantique : 400 veaux tués dans l’incendie d’un bâtiment agricole, Le Monde avec AFP, 18/12/21, 08h01

Le feu s’est déclaré dans une exploitation de Guéméné-Penfao, vendredi en fin de journée. Deux personnes ont été légèrement incommodées par les fumées. 
Quatre cents veaux sont morts, vendredi 17 décembre en fin de journée, dans l’incendie d’un bâtiment agricole en Loire-Atlantique et deux personnes ont été transportées à l’hôpital mais leur état semblait sans gravité. Les causes de l’incendie n’étaient pas connues, vendredi soir.
Les secours ont été appelés peu avant 17 heures en raison d’un incendie qui s’était déclaré dans un bâtiment agricole de 1 300 mètres carrés à Guéméné-Penfao, a rapporté le service départemental d’incendie et de secours dans un communiqué. Le bâtiment, « qui stockait un cheptel de quatre cents veaux », était « totalement embrasé » à l’arrivée des pompiers et « aucun bovin n’a pu être évacué du bâtiment ».
Deux personnes, une femme de 29 ans et son petit garçon de 4 ans, « légèrement incommodées par les fumées », selon les pompiers, ont été transportées au CHU de Nantes. Les installations techniques de l’exploitation agricole, comprenant deux silos de stockage de poudre de lait, un silo de stockage de céréales et une citerne de gaz, ont pu être préservées, de même que, dans le bâtiment sinistré, 80 litres d’acide nitrochloré, produit utilisé pour le nettoyage des stabulations, précise le communiqué.
> Lire aussi La France a encore perdu 100 000 agriculteurs en dix ans
<https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/12/18/loire-atlantique-400-veaux-tues-dans-l-incendie-d-un-batiment-agricole_6106576_3224.html>
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8- Chronique. Animaliste » dans « Le Monde », de « l’abbé des bêtes » au « welfarisme », M le mag, 18/12/21, 10h00 
Stéphanie Marteau

A l’approche des fêtes de fin d’année, plusieurs villes écologistes ont décidé de bannir le foie gras de leurs réceptions. La mesure illustre l’inflexion animaliste de la société, observée dès le 7 juillet 1990 par le quotidien.
C’est une actualité récurrente avant les fêtes et 2021 n’échappe pas à la règle : « Malgré les réticences, plusieurs villes écologistes bannissent le foie gras de leurs réceptions », annonçait Le Monde le 8 décembre, déclenchant l’ire de 56 édiles de communes du Périgord. Si Noël réveille la sensibilité à la cause animale, Le Monde se fait depuis longtemps l’écho du tournant animaliste de l’éthique contemporaine.
La première fois que le journal écrit le mot « animaliste », c’est sous la plume de son correspondant à Rome, Patrice Claude, le 7 juillet 1990. Il chronique alors « un pensum gros comme la Bible », écrit par Don Mario Canciani, un « curé animaliste » de la Ville éternelle, surnommé « l’abbé des bêtes ». « [Il] en est absolument convaincu, écrit le journaliste : Jésus de Nazareth était végétarien et les apôtres aussi. » « C’est à la suite de l’usurpation du pouvoir de l’Eglise par les riches propriétaires terriens que le rite aurait été dévoyé, jusqu’à prôner le sacrifice de l’agneau pascal. »
A l’époque, on parle de l’« âme » des animaux, mais entre guillemets. Les années suivantes, Le Monde ne fait plus qu’évoquer, de-ci de-là, des actions anti-fourrure spectaculaires revendiquées par le courant animaliste. Jusqu’au 4 octobre 2008. Dans Le Monde 2, JP Géné prend, dans la rubrique « Goût », une position radicale : « Manger du lapin serait cruel et condamnable. Et condamné s’il ne tenait qu’aux militants “animalistes”. Une bonne gibelotte démontre que nul n’est obligé de les écouter. » Il déplore, ironique, « le développement du concept de bien-être animal » et sort la sulfateuse : « J’adore les légumes, mais je hais les dictateurs, et notamment ceux qui dictent ce qu’il faut manger au nom de préceptes religieux, moralisateurs ou hygiénistes. » 
Le tournant politique
Il était urgent de rééquilibrer la ligne éditoriale… Le 12 novembre 2009, sous forme d’un abécédaire, la philosophe Elisabeth de Fontenay livre « sa philosophie des relations entre l’homme et l’animal ». Dès la lettre A, sa position est claire : « Ame : un animal c’est un être animé et être animé, c’est avoir une âme. Une âme, c’est-à-dire le principe vital qui fait qu’un individu peut se mouvoir et s’émouvoir. » On voit germer sous sa plume deux courants de pensée, désormais structurés et antagonistes, quand elle arrive à la lettre S, comme « Spéciste : c’est le mot par lequel les “animalistes” qualifient les “humanistes”. Construit sur le modèle de “racisme” et de “sexisme”, il permettrait de condamner l’humanité, cette espèce parmi les espèces qui se considère abusivement comme différente et jouissant d’un droit sans limite sur les animaux “non humains”. »
La société change et le courant animaliste prend politiquement corps. Le 10 novembre 2014, Catherine Vincent salue, dans le supplément « Des animaux et des hommes », le fait que l’Assemblée nationale vient de reconnaître aux animaux « le statut d’êtres vivants doués de sensibilité ».« Ethologues, psychologues et philosophes sont aujourd’hui nombreux à tenter de faire œuvre de réparation auprès de ces êtres dominés par l’homme tout au long de l’histoire de l’Occident. Sous la pression de ces intellectuels, sous celle, aussi, des militants de la cause animale, le politique se voit contraint de réagir. »
Le 26 novembre 2016, dans les pages « Idées », la journaliste décrit la création d’un parti animaliste en France. Sous sa plume, on assiste, hors des cercles savants, à « l’émergence de l’antispécisme » dans la société, un courant assez radical dont les membres seront désormais aux avant-postes d’une guerre entre humanistes et animalistes. La journaliste annonce la publication, en 2017, de ce qui deviendra l’une des bibles de ces derniers : Manifeste animaliste. Politiser la cause animale (Alma), de la philosophe Corine Pelluchon. Et cite l’un de ses principaux adversaires, le philosophe Francis Wolff, professeur émérite à l’ENS, très opposé à la création d’un secrétariat d’Etat pour améliorer la protection des animaux. Il note qu’au regard des « quelques milliers de réfugiés » que nous peinons à accueillir « on est parfois mieux défendu chez nous lorsqu’on est un animal d’une autre espèce que lorsqu’on est un être humain d’une autre culture ». 
> Lire aussi cet entretien de mars 2019 : « Entre personne et animal, il y a une barrière absolue »
« Terreur carnivore » et dérive antispéciste
Le 3 mars 2017, Le Monde publie un dossier intitulé « Penser la terreur carnivore ». Nicolas Weill se demande s’il n’est pas urgent de devenir végétarien, voir végan, et s’appuie sur le tout nouvel ouvrage de la très radicale philosophe Florence Burgat, L’Humanité carnivore (Seuil), qui compare l’homme et l’animal, « au point de mettre ici en équivalence l’anthropophagie avec la “zoophagie”, la consommation de viande », résume Weill.
> Entretien avec Florence Burgat : « Manger de la viande sépare l’humanité du règne animal »
Le 18 avril 2017, Audrey Garric souligne que, pour la première fois, « la condition animale s’invite dans la présidentielle. Sept candidats sur onze se sont prononcés sur l’interdiction des cages, du gavage ou encore de la corrida ». Benoît Hamon est le plus en pointe sur le sujet. « Dans un sondage IFOP publié en mars, 39 % des personnes interrogées affirment que les propositions des candidats en matière de protection animale pourraient influencer leur vote le 23 avril, soit un bond de dix points par rapport à la présidentielle de 2012 », explique la journaliste.
Le Parti animaliste sera à nouveau en lice pour les législatives, les sénatoriales, les européennes. Mais le 30 mars 2019, après des actes de vandalisme commis sur des commerces de viande, Catherine Vincent s’alarme dans les pages « Idées » : « Les antispécistes vont-ils trop loin ? » La journaliste présente un nouveau courant d’idées, plus modéré : le « welfarisme », soit « un mouvement réformiste qui ne vise pas à abolir l’exploitation animale, mais à limiter la souffrance qu’elle génère ». 
> Lire aussi Hélène Thouy, l’avocate qui veut porter la cause animale à l’Elysée
Dans une ambiance qui se tend, Hélène Thouy, tête de liste du Parti animaliste, annonce sa candidature à la présidentielle de 2022. Pour les politiques, la cause est désormais entendue, assure Mathilde Gérard dans les pages « Horizons », le 30 novembre 2021 : « Avril 2014. L’Assemblée nationale vote, sous les moqueries (…)un amendement du député socialiste Jean Glavany pour inscrire dans le code civil la reconnaissance du caractère sensible de l’animal. Novembre 2021, dans une quasi-unanimité, l’Assemblée, puis le Sénat adoptent définitivement la proposition de loi (…) visant à renforcer la lutte contre la maltraitance animale. En sept ans, le vent a tourné. »
<https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2021/12/18/animaliste-dans-le-monde-de-l-abbe-des-betes-au-welfarisme_6106609_4500055.html>
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9- Chronique. Matière première : « Le sucre scintille sur le sapin de Noël », Le Monde, 18/12/21, 14h00 
Laurence Girard

La filière semble retrouver le moral après plusieurs années de morosité. La tonne de sucre blanc se négocie, sur le marché mondial, à 510 dollars contre 340 dollars il y a un an, note dans sa chronique Laurence Girard, journaliste au « Monde ».
Etes-vous plutôt petits gâteaux alsaciens, pompe à l’huile d’olive provençale, entremets glacés ou tout simplement adepte de la traditionnelle bûche roulée dans son épaisse robe crémeuse ? Qu’importe vos préférences, les becs sucrés ne savent plus où donner de la tête en cette période festive. D’autant que marrons glacés, papillotes et autres confiseries chocolatées s’ajoutent à la guirlande des douceurs de Noël. Le sucre scintille sur le sapin.
De quoi saupoudrer un peu d’espoir sur la filière, qui semble retrouver le moral après plusieurs années de morosité. Déjà, la récolte française de betteraves s’annonce juteuse en 2021. Elle devrait avoisiner 35 millions de tonnes, à comparer aux maigres 27,4 millions de tonnes collectées lors de la précédente campagne. Et ce malgré le gel d’avril qui a contraint certains agriculteurs à ressemer leur culture décimée par le froid, et l’utilisation d’un pesticide non conforme obligeant à détruire 7 000 hectares. Sans oublier les attaques de charançons. Des épisodes au goût amer pour les planteurs de betteraves sucrières.
> Lire aussi « Secouée depuis deux ou trois ans, l’industrie sucrière espère retrouver son allant »
Autre motif d’espoir, le cours mondial du sucre bénéficie d’une soudaine montée de glycémie. « La tonne de sucre blanc se négocie, sur le marché mondial, à 510 dollars contre 340 dollars il y a un an. Soit une progression de 50 % », estime François Thaury, du cabinet Agritel. Il tempère quelque peu cet enthousiasme, en soulignant la progression limitée à 11 % en Europe. Le prix du sucre a toutefois repassé les 400 euros la tonne. « Avec les futurs contrats négociés entre fabricants et industriels de l’agroalimentaire, il pourrait atteindre 430 euros », pronostique l’expert.
Tereos et Cristal Union toujours sur les dents
Les aléas météorologiques au Brésil, premier producteur mondial, se traduisent par une troisième saison déficitaire sur le marché du sucre. Que les plus accros se rassurent, les stocks de poudre blanche sont encore bien replets. Il n’empêche, ce bilan a alimenté la hausse des cours. Autre point saillant : la flambée du cours de l’or noir et de l’énergie en général a propulsé celui de l’éthanol vers des sommets.« Sur le marché de Rotterdam [aux Pays-Bas], le prix du mètre cube d’éthanol est passé de 760 dollars [670 euros] à un plus haut de 1 740 dollars. Actuellement, il se négocie autour de 1 400 dollars », souligne M. Thaury.
Des prix qui font saliver les producteurs. En particulier au Brésil, où ils appuient sur la touche éthanol ou sucre selon le meilleur profit à tirer de leur jus de canne. Quant au gouvernement indien, il souhaite encourager le développement de l’éthanol à la pompe. A la clé, un moindre risque de voir le marché mondial englouti par des montagnes de poudre blanche.
> Lire aussi Le sucre, ce poison si désirable
Pour autant, les coopératives sucrières Tereos et Cristal Union sont toujours sur les dents. Une question les taraude : combien d’hectares de betteraves seront plantés en 2022, quand les surfaces ont encore baissé en 2021, à 403 000 hectares ? Pour appâter les planteurs, Cristal Union affiche un tarif en hausse, à 29 euros la tonne. Néanmoins, certains agriculteurs préfèrent se sucrer avec du blé…
<https://www.lemonde.fr/economie/article/2021/12/18/matiere-premiere-le-sucre-scintille-sur-le-sapin-de-noel_6106629_3234.html>
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10- Auchan, Lidl, Carrefour : des supermarchés européens boycottent des produits brésiliens pour lutter contre la déforestation, Novethic, 19/12/21
Mathilde Golla

La lutte contre la déforestation illégale prend forme dans les rayons des supermarchés. Sous la pression d’ONG et de journalistes, plusieurs enseignes de grande distribution vont stopper la vente de produits issus de trois géants brésiliens de la viande. Les industriels sont accusés d’organiser un système dit de "blanchiment de bétail", conçu pour masquer des conditions d’élevages litigieuses. 
"C’est Noël avant l’heure pour les forêts d’Amazonie, les savanes du Cerrado brésilien et les zones humides du Pantanal", se réjouit Nico Muzi, directeur de l’ONG Mighty Earth Europe. Le militant a de quoi exulter car son association a contribué à obtenir une victoire importante contre la déforestation illégale. De grandes chaînes de distribution européennes ont accepté de boycotter des produits de trois géants brésiliens de la viande : JBS, Marfrig et Minerva. Ils sont accusés de participer à la déforestation illégale du pays.
Ces décisions sont directement liées aux révélations du collectif de journalistes Reporter Brasil, obtenues en partenariat avec l'ONG Mighty Earth. L’enquête accablante pour les industriels met en lumière tout un système dit de "blanchiment de bétail" qui vise à tromper sur l’origine des bœufs. En clair, officiellement, la viande de ces industriels provient d’abattoirs éloignés des zones de déforestations illégales. Mais dans les faits, les animaux sont transportés sur de longues distances pour être abattus à des milliers de kilomètres de leur élevage d'origine, qui sont potentiellement des producteurs sanctionnées et frappées d’embargo. D’autres animaux traversent aussi le pays mais cette fois pour être vendus à d'autres exploitations, qui procèdent à l'engraissement final des animaux avant d'être cédé aux industries exportatrices. L’enquête décrit un système impliquant des "fournisseurs indirects" où "même la viande vendue par des abattoirs éloignés des principales frontières agricoles peut être liée à des crimes socio-environnementaux non seulement en Amazonie, mais également dans le Pantanal et le Cerrado brésiliens", écrivent les journalistes.
En toute opacité sur ces pratiques, cette viande se retrouve ensuite dans les supermarchés européens, sous la forme de bœuf séché, de corned-beef ou de viande fraîche. Ces révélations ont incité des distributeurs à prendre les devants. "Il ne s’agit pas de vagues engagements ou de déclarations pour faire bonne impression dans un communiqué de presse. Ce sont des mesures commerciales concrètes prises par certains des plus grands supermarchés d’Europe pour cesser d’acheter et de vendre de la viande de bœuf provenant d’une entreprise et d’un pays qui ont beaucoup promis et qui ont obtenu si peu de résultats", indique l'ONG Mighty Earth.
>> Suite à lire à :
<https://www.novethic.fr/actualite/environnement/agriculture/isr-rse/auchan-lidl-carrefour-pourquoi-des-supermarches-europeens-s-engagent-a-boycotter-des-produits-bresiliens-150420.html>
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11- Des étudiants en agronomie interpellent Emmanuel Macron sur sa politique agricole, Le Monde, 22/12/21, 02h12
Stéphane Foucart

Un feu nourri de critiques cible le plan stratégique de la France, déclinaison nationale de la prochaine Politique agricole commune. Paris doit remettre mercredi sa copie à la Commission européenne. 
Tout est parti de quelques enseignants-chercheurs, attachés à une demi-douzaine d’écoles d’agronomie, de sciences politiques ou d’économie, et désireux de donner à leurs étudiants de master un sujet d’étude « concernant » et d’actualité : la mise en œuvre par la France de la prochaine Politique agricole commune (PAC), qui doit s’appliquer entre 2023 et 2027. Le résultat est une lettre commune, adressée lundi 20 décembre au président de la République, protestant contre le plan stratégique national (PSN) français – l’ensemble de mesures chargées de transcrire au niveau de chaque Etat membre de l’Union européenne (UE) la nouvelle PAC –, qui n’est « clairement pas à la hauteur des enjeux économiques, sociaux et environnementaux » de l’évolution du modèle agricole dominant. Celui-ci est largement structuré par la PAC, le plus gros programme de subventions publiques au monde.
La quarantaine d’étudiants, futurs agronomes ou agronomistes ayant planché sur le sujet disent « ne pas pouvoir souscrire silencieusement aux propositions retenues dans le PSN français » et choisissent ainsi, quelques jours avant la présidence française de l’UE, d’interpeller directement le chef de l’Etat. Cette adresse intervient alors que la France doit soumettre, mercredi 22 décembre, son PSN à la Commission européenne. Elle s’inscrit en droite ligne d’une série de critiques sévères, portées par les avis et expertises d’instances consultatives officielles et par les communautés scientifiques compétentes.
> Lire aussi Union européenne : les Vingt-Sept s’accordent sur un verdissement minimum de la future politique agricole commune
« La politique agricole commune étant un sujet très technique, nous nous sommes réparti le travail, chaque groupe étant chargé d’analyser un domaine précis du plan national stratégique », raconte Gilles Collombet-Gourdon (AgroParisTech), l’un des auteurs. Les étudiants des masters concernés de six établissements – Montpellier SupAgro, AgroCampus Ouest, AgroSup Dijon, AgroParisTech, Sciences Po Lille et Sciences Po Paris – ont ainsi travaillé ensemble, avant de rassembler leurs contributions et de rendre public le résultat, sous la forme d’une longue lettre d’objections argumentées, adressée à l’Elysée.
Ils y concluent que le PSN « incarne davantage l’immobilisme qu’une volonté de changement ». « Leur démarche est tout à fait fondée, estime l’économiste Jean-Christophe Bureau, professeur à AgroParisTech et l’un des spécialistes les plus réputés des politiques agricoles. C’est une génération qui a, vis-à-vis de la question environnementale, un fort sentiment d’urgence : ils se disent qu’il est déjà trop tard pour attendre encore sept ans pour agir. A mon avis, ils ont raison, tant le plan présenté est en contradiction avec les objectifs environnementaux affichés. »
Première source d’étonnement : le hiatus entre les avis exprimés au cours de différentes consultations et les mesures finalement prévues par le PSN. Dans leur missive, les étudiants rappellent que l’Autorité environnementale a rendu un avis sévère sur le PSN, et que France Stratégie (institution dépendant de Matignon) ainsi que le Conseil économique social et environnemental (CESE) ont tous deux insisté dans leurs avis respectifs sur la nécessité d’une transition agricole. « De manière d’autant plus préoccupante, rappellent-ils, le PSN ne prend pas en compte la consultation citoyenne ImPACtons, soit 1 083 recommandations ayant mobilisé 12 656 citoyen(ne)s. »
Fuite en avant délétère
Sont notamment reprochés les aides à l’hectare, qui maintiennent l’avantage aux grandes exploitations, en particulier céréalières, par rapport à la filière fruits et légumes, qui occupent moins de surfaces. Le maintien d’aides à l’hectare non plafonnées et non dégressives, ajoutent les auteurs, « est aussi le moteur d’une course à l’agrandissement des exploitations ». Une fuite en avant délétère, argumentent-ils, « l’augmentation continue de la taille, et donc du poids financier des structures, rend[ant] l’installation et la transmission en agriculture de plus en plus complexe avec des exploitations qui ne trouvent plus de repreneur(euse)s ». L’effet est déjà massif et ne sera pas entravé par le PSN. D’après le dernier recensement agricole, plus de 100 000 exploitations ont disparu sur le territoire national au cours des dix dernières années, soit 21 % de l’ensemble des fermes françaises.
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Autre exemple, écrivent les jeunes scientifiques, « en l’état actuel, 81 % des exploitations agricoles françaises pourront bénéficier de l’éco-régime sans opérer de changement dans leurs pratiques. » Les éco-régimes, censés rémunérer les pratiques vertueuses pour l’environnement, ne pourront jouer leur « rôle de transformation des pratiques agricoles. »
Leurs aînés ne disent d’ailleurs pas autre chose. En mai, dans les colonnes du Monde, plus de 700 scientifiques des organismes de recherche publics et des universités – économistes, agronomes, écologues, biologistes de la conservation, etc. – avaient également appelé le gouvernement « à définir un plan stratégique national ambitieux, qui soit un réel outil pour la transition agroécologique, et à rendre des arbitrages justes, qui reposent sur les bénéfices sanitaires, sociaux et environnementaux des pratiques, et non sur le seul poids des parties prenantes dans les négociations ».
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Les jeunes agronomes et futurs spécialistes des systèmes alimentaires constatent que ces différentes prises de positions, préalables à la leur, n’ont eu aucun écho dans le PSN français. Au point que celui-ci ne permettra pas, selon eux, de participer à la réalisation des objectifs de la stratégie européenne « De la Ferme à la fourchette » – volet agricole du Pacte vert de la Commission européenne. Ceux-ci sont notoirement ambitieux : réduction de 50 % de l’usage des pesticides, des antibiotiques et des engrais minéraux d’ici à 2030, 25 % de surfaces agricoles cultivées en agriculture biologique d’ici à 2030, et la neutralité carbone d’ici à 2050. Contacté, l’Elysée n’a pas répondu à nos sollicitations.
<https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/12/22/des-etudiants-en-agronomie-interpellent-emmanuel-macron-sur-sa-politique-agricole_6106955_3244.html>
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12- Reportage. A la ferme collective du Jointout, en Saône-et-Loire, « être à plusieurs est un énorme atout », Le Monde, 22/12/21, 03h29
Anne Guillard 

Aux confins des départements du Jura et de la Saône-et-Loire, l’exploitation conjugue agriculture biologique, activités d’élevage et maraîchage de légumes. Pourtant, aucun des associés ne vient du milieu agricole.
En cette fin d’automne, la trentaine de chèvres poitevines – plus frileuses que la centaine de brebis laitières qui pâturent encore – ne sortent plus de la bergerie de la ferme du Jointout, en Saône-et-Loire. Comme tous les lundis à midi, les membres associés du groupement agricole d’exploitation en commun (GAEC) sont réunis autour d’un déjeuner. Il y a là Adele et Thomas Trueblood, les maraîchers, Mathieu Bidault, le chevrier installé en 2018, et Raphaël Jacquemond, le berger, qui les rejoindra en tant qu’associé dès janvier.
Ce 21 novembre, Raphaël a oublié de préparer le repas. « Ça a ses avantages et ses inconvénients, les collectifs », s’amuse Mathieu, 44 ans, tandis qu’une omelette aux pleurotes s’improvise. « Dans mes échanges, je devrais être plus explicite ! », lance énergiquement Adele après ce loupé, lors d’un premier tour de table qui fait office de « météo des humeurs ». Les propos roulent ensuite sur les problématiques en cours : que faire de la vieille remorque ? Où installer les silos pour le grain des animaux ? Qui le prend en charge ?
Aux confins des départements du Jura et de la Saône-et-Loire, l’exploitation de 45 hectares conjugue agriculture biologique, activités d’élevage de races rustiques et de transformation du lait et maraîchage de légumes. Aucun des associés ne vient du milieu agricole. Raphaël, 51 ans, ancien graphiste et styliste dans la mode, est en reconversion professionnelle. Il est berger sur la ferme depuis un an. Il réalise son « rêve d’enfance : travailler dans l’agriculture ». Mathieu est certes chevrier de formation, mais a collectionné les expériences : il s’est notamment occupé d’enfants autistes et a été auxiliaire de vie.
Originaire de Chicago et naturalisée française en 2020, Adele, 40 ans, ex-étudiante en histoire et en français, a vécu dans « des fermes à plusieurs » depuis qu’elle a 18 ans, notamment au Royaume-Uni où elle a rencontré son mari, Thomas. Cet Allemand de 49 ans a milité dans sa jeunesse « dans des mouvements environnementalistes et écologistes radicaux », et a depuis travaillé dans l’agriculture.
Parents de deux enfants, Adele et Thomas, curieux de connaître le fonctionnement d’autres collectifs à travers la planète, ont notamment visité un écovillage quasi autonome, à Findhorn, en Ecosse, et visité un kibboutz en Israël. Thomas a « toujours souhaité consommer moins, mutualiser tours de cuisine, atelier de bricolage, sciage de bûches pour le chauffage, etc. ». Il tient cependant à nuancer l’ambition purement autarcique souvent rencontrée dans ce type de démarche. Lui veut vivre de son activité. « Je cherche à participer à la société d’une façon commerciale », « pas [à] être marginal », sourit-il derrière ses lunettes cerclées.
« A plusieurs, c’est difficile, mais tout seul c’est impossible »
Le couple est installé depuis 2009 au Jointout, sur la commune de Torpes, en Bresse bourguignonne. L’écolieu voisin du Portail, qui expérimente la gestion collective d’un lieu de vie et d’activités en milieu rural, cherchait à soutenir des paysans en bio. Adele et Thomas foncent dans le projet avec Alix et son mari, Yan Lagouge, un ancien salarié dans la pharmacochimie reconverti en berger et avec lequel ils ont passé leur brevet professionnel responsable d’entreprise agricole, le sésame pour s’installer.
La ferme a bénéficié du réseau de l’écolieu et du cédant, Gabriel Rebouillat, alias Gaby. Sans descendance directe, cet éleveur de vaches laitières, mort le 6 décembre à 71 ans, a favorisé l’installation d’un collectif de jeunes repreneurs sur ses terres héritées de ses parents et rachetées par Terre de liens, un mouvement citoyen qui acquiert des fermes avec de l’épargne solidaire et les loue à des agriculteurs en bio ou en production paysanne.
Le GAEC commercialise sa production en vente directe à l’écolieu, sur des marchés de plein air hebdomadaires à Beaune, Nuits-Saint-Georges, Lons-le-Saunier, et dans des magasins de producteurs et biologiques (Biocoop, etc.). « La tomme et les yaourts de brebis ont été médaillés d’or en 2019 » lors du concours régional des fromages de Bourgogne, se réjouit Mathieu, qui « adore nourrir les gens ». Les agneaux de lait élevés sous la mère font les délices de plusieurs restaurateurs de Beaune, dont le restaurant gastronomique Loiseau des Vignes.
Chaque associé perçoit, pour quarante à quarante-cinq heures de travail par semaine en moyenne, une rémunération d’un smic, et le résultat en fin d’année est partagé lorsqu’il est positif. Chacun a droit à trois semaines de congés payés. « Etre à plusieurs est un énorme atout. C’est difficile, mais tout seul c’est impossible », affirme Adele. Elle estime que Gaby, à 71 ans, « en paraissait 90, bousillé par le travail ». « Nous, les néoruraux, on ne veut pas bosser comme des fous. Le choix des petits ruminants et du maraîchage permet de nous dégager du temps. » Sur les marchés, ils peuvent se relayer en cas de problème, et sont de garde auprès des animaux un week-end sur trois.
« Entre une agriculture de firme, financiarisée, branchée sur les grands marchés mondiaux, et un modèle familial menacé, on observe le développement de ce type d’organisation collective, avec de nouveaux entrants qui ont un capital culturel élevé. Ils ont bourlingué et défendent un modèle qui intègre l’environnement et la santé, mettent en place des circuits courts. Il y a une véritable convergence entre ces nouvelles agricultures et les relocalisations de programmes alimentaires », explique au Monde Bertrand Hervieu, sociologue spécialiste des questions rurales et agricoles.
« Ce type d’agriculture mène une réflexion sur la complexité. Les gens qui s’y engagent ne le font pas forcément pour la vie et développent des approches innovantes en termes de partage de la charge mentale, cherchant à concilier les choses. »
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« Vivre selon une cohérence écologique »
Ecolieu et ferme collective, situés à quelque 150 mètres l’un de l’autre, sont deux entités qui s’irriguent l’une l’autre depuis douze ans, portés par la même exigence de « vivre selon une cohérence écologique », comme le résume André Regler, 70 ans, inscrit dans le projet quasiment depuis le départ avec sa compagne, Françoise Bergère, 67 ans.
Pour ces militants d’Attac, promoteurs des premières associations pour le maintien d’une agriculture paysanne dans le Jura, « être en collectif, c’est choisir ses voisins ». Un permis de construire a été déposé pour un habitat groupé, basse consommation, qui serait jouxté à une salle de coworking, un bureau, un atelier, une salle associative, une cuisine collective et un cabinet d’ostéopathie, abrités dans un nouveau bâtiment associatif professionnel, l’ancien ayant brûlé en 2018. Une yourte fait office de lieu de réunion, en attendant.
La municipalité de Torpes soutient le projet et verrait d’un bon œil la venue de « quatre ou cinq familles supplémentaires » dans sa commune de 380 âmes. Le maire, Dominique Huguenot, considère comme « un réel atout » les activités des collectifs, comme la vente, tous les vendredis en fin d’après-midi sur l’écolieu, de la production du groupement agricole couplée à une offre élargie d’autres producteurs (farine, beurre, lait, champignons, légumineuses, etc.) avec le groupement d’achat coopératif Alter’conso. « Ça amène du monde », assure l’élu.
Une complémentarité dont Orianne Guillou, venue faire un point le 22 novembre à la ferme, se fait également l’écho. La coordinatrice de Terre de liens pour la région Bourgogne-Franche-Comté se félicite « du dynamisme du GAEC et du soutien citoyen autour », même si l’épidémie de Covid-19 a mis un sérieux coup de frein à certaines animations, comme les ateliers cuisine, les soirées débats, les soirées jeux, ou les cafés citoyens. « Le but est d’ancrer la ferme dans son territoire, rappelle-t-elle.Avec les marchés, la vente directe, l’accueil d’apprentis et de “woofers”, la dynamique est bien présente. » « Sur une exploitation qui faisait vivre une personne, on a un collectif qui recrée du lien entre le citoyen et les agriculteurs », s’enthousiasme-t-elle, citant souvent la ferme en exemple comme « un modèle agricole qui est l’avenir ».
Les projets et les associations fourmillent pour travailler l’impact sur le paysage, améliorer la captation du carbone par les haies, la biodiversité animale, etc. « On essaye de réfléchir les choses ensemble, comment on a envie de vivre, comment on voit l’avenir de l’agriculture », précise Adele, par ailleurs engagée à la Confédération paysanne.
« Passer de la motivation à l’engagement »
La vie d’un collectif n’est pas un long fleuve tranquille. Après un conflit violent qui a opposé certains de ses membres à un boulanger installé sur le fournil associatif de l’écolieu jusqu’en 2018, le groupe a fait appel à un médiateur extérieur, Dominique Lataste, un psychosociologue du cabinet Autrement dit, un organisme de formation qui accompagne des collectifs agricoles. Il « nous a aidés à changer les relations », en « définissant les responsabilités », relate Adele.
« Toutes ces périodes de conflit m’ont beaucoup appris sur moi-même »,observe Yan Lagouge, 47 ans, aujourd’hui conseiller municipal du village voisin, Chapelle-Voland, et qui se vit désormais « plus comme facilitateur ». Musicien, il a quitté le GAEC en tant qu’associé pour mener à bien des projets personnels, comme celui de bâtir une petite salle de méditation, mais il y travaille toujours en CDI intermittent, trois cents heures par an environ. Des « réunions de régulation » ont été mises en place. « Un espace où on peut se dire les choses, ce qu’on a apprécié et l’inverse », précise Thomas Trueblood. « Le volet humain est très important dans un collectif », observe Orianne Guillou, voyant dans l’accompagnement du GAEC sa pérennité.
Selon Brigitte Chizelle, sociologue et formatrice au sein du cabinet Autrement dit, « une des caractéristiques des collectifs du monde agricole est leur souhait de constituer un groupe non hiérarchique, horizontal, où tout le monde participe aux décisions ». Un fonctionnement évident sur le papier, mais plus ardu dans la pratique. « Il va falloir passer de la motivation à l’engagement, ce qui peut provoquer des tensions. Si chacun défend son idéal, ça coince », assure-t-elle. Il va s’agir de mettre en place des outils pour « créer du consensus, savoir ce qui est acceptable pour le groupe et le bien collectif ».
Si la vie de ces collectifs n’est pas simple, jalonnée de crises existentielles, affectives, « cette approche agroécologique qui concilie respect des sols et prise en compte du changement climatique » pourrait constituer une des réponses pour « nourrir la planète autrement », estime, de son côté, Bertrand Hervieu.
Au Jointout, il est l’heure de désherber la phythoépuration, de ramasser les derniers légumes avant l’hiver, de repiquer la mâche, de préparer le marché de Noël communal. Marie, la compagne de Mathieu, pourrait devenir la cinquième associée du GAEC. Elle travaille sur un projet de boulangerie paysanne.
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Les candidats à l’installation, en quelques chiffres
Plus de 60 % des candidats à l’installation ne sont pas issus du milieu agricole, selon des statistiques des chambres d’agriculture. Sans réseaux et avec peu de capitaux pour accéder au foncier, ils recherchent des petites à moyennes surfaces et plus de 20 % souhaitent s’installer en bio.
Les questions de la transmission et de la reprise des exploitations en France se posent de façon abrupte. En près de quarante ans, alors que la taille des exploitations a augmenté, la part des exploitants agricoles dans l’emploi a fortement diminué, passant de 7,1 % en 1982 à 1,5 % en 2019, et la profession compte de plus en plus d’hommes vieillissants, comme le révélait une note « Focus » de l’Insee en 2020. D’ici à 2030, la moitié des exploitants agricoles partira à la retraite.
Même si la surface agricole est restée quasi stable, la France métropolitaine a perdu quelque 100 000 exploitations agricoles en dix ans, ce qui représente une chute de 21 %. Désormais, le pays n’en compte plus que 389 000, selon les premières données révélées le 10 novembre dans le cadre du recensement agricole 2020.
<https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/12/22/a-la-ferme-collective-du-jointout-en-saone-et-loire-etre-a-plusieurs-est-un-enorme-atout_6106960_3244.html>
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13- Tribune. Vers un cacao sans déforestation, Reporterre, 22/12/21, 14h30
Par Frédéric Amiel et Etelle Higonnet

L’industrie du chocolat et le gouvernement français ont signé une charte pour un cacao durable. Une initiative ambitieuse, écrivent les auteurs de cette tribune, qui comporte toutefois d’importants manques.
• Frédéric Amiel est coordinateur général des Amis de la Terre France. En octobre dernier, il a publié Petite Histoire de la mondialisation à l’usage des amateurs de chocolat, aux éditions de l’Atelier.
• Après avoir travaillé pour Mighty Earth, Greenpeace, Amnesty International et Human Rights Watch, Etelle Higonnet est désormais conseillère senior auprès de la National Wildlife Federation. Elle a été nommée Chevalier de l’Ordre national du mérite en France pour son travail de protection de l’environnement, contre la déforestation dans les industries du cacao, de l’huile de palme, du caoutchouc, du soja et du bœuf.
Tribune. C’est une bonne nouvelle pour les amateurs de chocolat, la France vient de lancer une plateforme public-privé en faveur du cacao durable. Communément appelée Frisco (pour French Initiative on Sustainable Cocoa), elle vise à promouvoir un cacao « zéro déforestation », sans recours au travail des enfants et s’engage à améliorer les revenus des cacaoculteurs. Une charte, élaborée conjointement par le gouvernement français, une poignée d’ONG, des organismes de certification et la majeure partie de l’industrie française, vise désormais à garantir que seul du cacao éthique répondant à ces critères soit importé en France d’ici à 2025. Cette initiative fait écho à la Stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée (SNDI), adoptée par le gouvernement en 2018 pour mettre fin à l’importation de produits contribuant à la déforestation d’ici à 2030. Pour autant, tout est-il parfait dans cette charte et pouvons-nous espérer déguster bientôt des pains au chocolat et des bûches de Noël éthiques et écolos ?
>> Suite à lire à :
<https://reporterre.net/Vers-un-cacao-sans-deforestation>
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14- Un an de plus pour les néonicotinoïdes « tueurs d’abeilles », Reporterre, 22/12/21, 15h21

Les betteraves n’en ont pas fini avec les néonicotinoïdes. Interdits depuis 2018, ces insecticides toxiques qui permettent aux betteraviers de lutter contre la jaunisse ont pourtant été réintroduits dès mars 2021. Ce retour, censé être temporaire, a été à nouveau validé pour l’année 2022 par le conseil de surveillance des néonicotinoïdes, mardi 21 décembre. Le gouvernement peut ne pas suivre cette préconisation, mais l’espoir est mince. Tout comme les leviers de lutte : le recours en urgence déposé par des ONG écologistes l’an dernier avait été rejeté.
Cette année de sursis supplémentaire n’est pourtant pas justifiée, aux yeux de l’agronome Jacques Caplat. Membre du conseil et secrétaire général de l’association Agir pour l’environnement, il affirme dans un communiqué que les risques de pertes pour la saison 2022 sont faibles. Et que le seul but de cette nouvelle dérogation est de soutenir une filière moins protégée qu’avant au niveau européen [1] : « Il serait plus économique et écologique d’organiser une indemnisation des agriculteurs réellement touchés et un plan de sauvegarde de la filière, plutôt que de déverser des produits toxiques », a-t-il indiqué.
> Lire aussi : Néonicotinoïdes : « Les preuves scientifiques de la catastrophe n’ont cessé de s’accumuler »
De nombreuses études scientifiques ont démontré, ces dernières années, la haute toxicité de ces produits chimiques. Ils seraient à l’origine de la disparition des trois quarts des insectes volants ces trente dernières années car ils attaquent leur système nerveux. De nombreux chercheurs et de nombreux apiculteurs leurs attribuent également la responsabilité du syndrome d’effondrement des colonies d’abeilles.
<https://reporterre.net/Un-an-de-plus-pour-les-neonicotinoides-tueurs-d-abeilles>
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15- Rapport : voici ce que cache la publicité pour la viande, Mr Mondialisation, 22/12/21

Fin novembre, Greenpeace dévoilait son nouveau rapport sur les stratégies de communication douteuses employées par le secteur de la viande à travers l’Europe. Pour ce faire, l’organisation de protection de l’environnement a sollicité sept sémioticiens professionnels, spécialistes de l’étude des signes, des symboles et de leur signification, pour décoder les messages publicitaires de pas moins de 51 marques ou organisations professionnelles de la viande. Leur constat est clair : l’industrie carnée use de tous les artifices du marketing pour influencer les mentalités, notamment celles de cibles les plus vulnérables tels que les enfants. Alors même que chaque Européen dévore en moyenne 82 kg de viande par an, le secteur développe différents stratagèmes pour encore augmenter la dose, au grand détriment de la santé du consommateur et de celle de la planète.
C’est le 29 novembre dernier que Greenpeace dévoilait son tout nouveau rapport au nom très évocateur : « Haché menu : ce que cache la publicité pour la viande ».
Basé sur l’étude des stratégies de communication de 51 marques de viande, les résultats de cette recherche menée dans six pays européens (France, Allemagne, Danemark, Suisse, Espagne et Pologne) sont sans appel : derrière le fantasme soigneusement construit que l’industrie de la viande nous vend se cache une réalité bien moins appétissante.
>> Suite à lire à :
<https://mrmondialisation.org/rapport-voici-ce-que-cache-la-publicite-pour-la-viande/>
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16- 500 millions d'euros, Actu-environnement, Le chiffre du 23/12/21

C’est la somme que la France va verser au secteur forestier pour prévenir et réparer les dommages causés par des organismes nuisibles ou des maladies végétales aux forêts en lien avec des phénomènes climatiques extrêmes. Le dispositif se concentrera, en particulier, sur la reconstitution des forêts à la suite des attaques de scolytes (des insectes ravageurs qui provoquent le dépérissement des arbres), résultant d'événements climatiques exceptionnels, tels que la sécheresse de 2018, couplée à des températures anormalement élevées sur une longue période durant l'été 2019. Le régime d’aide sera en place jusqu'au 31 décembre 2027. Il a été validé par la Commission européenne.
<https://www.actu-environnement.com/dit-aujourdhui/1057.html>
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17- Enquête. La puissance politique du sucre, entre délices et dominations, Le Monde, 24/12/21, 05h00
Claire Legros 

L’histoire de cet ingrédient devenu central dans notre alimentation, roi des fêtes et des desserts, raconte la part intime des désirs humains, mais aussi la violence des empires et la naissance d’une mondialisation dont il est un acteur majeur.
C’est l’un des effets collatéraux de l’épidémie de Covid-19. Entre le début du confinement et la fin du mois de mai 2020, les ventes de sucre ont bondi de 30 % en France, avec une prime au sucre en poudre (+ 56 %) et plus encore au sucre à confiture (+ 80 %). La peur de la pénurie a sans nul doute joué un rôle dans cette ruée. Mais une enquête menée par le Centre des sciences du goût et de l’alimentation, à Dijon, montre aussi que la période a favorisé, notamment chez l’enfant, ce que les auteurs de l’étude appellent le « manger émotionnel ». Dans le huis clos de nos vies confinées, nous avons été nombreux à noyer nos angoisses de fin du monde dans la douceur réconfortante de desserts faits maison.
Valeur refuge au cœur des crises, ingrédient incontournable des fêtes ou plaisir solitaire et parfois coupable, le sucre raconte, à sa façon, la part intime de l’histoire des hommes et des femmes, de leurs joies et de leurs détresses, de leurs peurs et de leurs espoirs. Il est aussi, aux côtés des céréales, l’un des produits qui, à travers les siècles, décrit le mieux l’histoire des peuples, la violence des empires et la naissance d’une mondialisation dont il est un acteur central.
Car cet ingrédient capable d’activer dans nos cerveaux les circuits de la récompense n’est pas seulement source de plaisir. Longtemps marqueur de distinction sociale et de richesse, réservé aux élites, avant de devenir omniprésent dans nos placards, le sucre est un objet hautement politique, une affaire de pouvoir. « Il est étrange qu’un produit qui charme l’enfance et adoucit la vieillesse ait été à l’origine de tant de catastrophes politiques », notait, à la fin du XIXe siècle, le premier ministre de la reine Victoria Benjamin Disraeli. L’affirmation reste valable. Cette passion gustative a partie liée avec les pires fléaux de notre histoire, et en premier lieu l’esclavage, qui a conduit des millions d’Africains à la déportation et au travail forcé dans les plantations américaines. Elle est aussi responsable, un siècle et demi plus tard, de catastrophes environnementales et d’épidémies de maladies longues, douloureuses, et largement évitables, dont la principale, l’obésité, se retrouve en première ligne dans la crise due au Covid-19.
> Lire aussi Matière première : « Le sucre scintille sur le sapin de Noël »
Depuis quarante ans, la recherche en sciences sociales tente d’éclaircir ce paradoxe : comment expliquer que cet ingrédient jugé non essentiel aux besoins alimentaires cristallise autant les passions, au point de modeler les paysages et de peser sur les politiques publiques ? De quelle façon cette denrée, hier précieuse et rare, privilège des puissants, s’est-elle transformée en arme de consommation massive, qui hypothèque des vies et pèse sur les finances des assurances-santé ? Retracer l’histoire politique du sucre aide à mieux comprendre l’ambivalence de nos comportements à son égard et éclaire l’origine des rapports de force dont il fait aujourd’hui l’objet.
Point commun avec les grands singes
Si le mot « sucre » est apparu au XIIe siècle en France, hérité du sanskrit« çarkara » (le « grain ») – qui désigne la canne à sucre en Inde –, en passant par l’arabe « soukkar » et le grec « sakkaron », « il serait dommage de faire naître l’histoire du sucre avec la découverte de la canne par les Européens, car la place du goût sucré est centrale dans la préhistoire où l’on peut déjà parler de politique alimentaire », défend le politiste Paul Ariès, auteur d’Une histoire politique de l’alimentation (Max Milo, 2016). Nos plus lointains ancêtres étaient de grands amateurs du goût sucré – une appétence universelle que nous partageons avec les grands singes –, sans doute parce qu’il leur indiquait la présence de glucides, et donc d’énergie.
Les peuples du paléolithique en connaissaient d’ailleurs de multiples sources : le miel, la sève d’arbres comme le bouleau, l’acacia et l’érable, ou les sucres de fleurs et de fruits. Ces savoirs vont peu à peu se perdre au seul profit du miel, dont « la captation par les plus riches est sans doute liée à sa rareté », observe Paul Ariès. Source de plaisir, le goût sucré devient donc très tôt, dans la plupart des sociétés anciennes, un marqueur social de pouvoir et un enjeu politico-religieux.
Pendant l’Antiquité, les divisions sociales et politiques sont signifiées par l’art culinaire : les plus riches se démarquent par leur consommation de miel, qui « renvoie à la gourmandise, mais à travers une médiation religieuse », poursuit le politiste. Dans les premières cités-Etats de Sumer et de Babylone, on offre des gâteaux aux dieux. Le miel tient aussi une place incontournable dans la médecine et la pharmacopée de la Chine ancienne, de l’Inde, de la Grèce antique et de l’Egypte, où son usage médical est attesté par un papyrus dès le XVIe siècle avant notre ère. Pas moins de 500 onguents, emplâtres ou décoctions à base de miel y sont listés, qui soignent tout ou presque, des problèmes de sexualité aux maux de gorge, en passant par les blessures ou les maladies des yeux.
Au Moyen Age occidental, la christianisation renforce encore ces enjeux de pouvoir. Un système strict de protection des abeilles se met en place afin d’approvisionner les églises en cire, indispensable à la confection des bougies. Le péché de « gula » (« gourmandise ») condamne tous les excès alimentaires, et pas seulement le sucre.
Il faut attendre les croisades pour que les Européens découvrent la « canne à miel » (cannamelis) du Moyen-Orient. A partir des XIIe et XIIIe siècles, des ouvrages médicaux et culinaires commencent à mentionner en Europe le sucre de canne, « qui n’est alors pas considéré comme une nourriture, mais vendu en très petite quantité par les apothicaires », explique l’économiste Pierre Dockès, auteur du Sucre et les larmes. Bref essai d’histoire et de mondialisation (Descartes et Cie, 2009). Il est utilisé jusqu’à la Renaissance comme médicament et épice précieuse dans les demeures aisées, où il est très prisé car il relève la saveur des boissons et des plats de viandes parfois très faisandées ». En 1505, l’un des premiers traités de cuisine et de diététique, Le Platine en françois, affirme que « jamais sucre ne gâta la viande », son auteur en vantant les bienfaits digestifs et respiratoires.
Mais déjà naissent les premières inquiétudes sur les risques d’un usage excessif. Jean Bruyérin-Champier, médecin de François Ier, appelle à s’en méfier, en 1560 : « Nos mœurs sont telles maintenant que l’on saupoudre de sucre tout ce que l’on peut manger pour agrémenter la vie humaine. Je constate que c’est une grave erreur. Certes, je ne nie pas que le sucre ajoute de l’agrément et de la salubrité à beaucoup de mets » mais, « sur le plan strictement médical, nous déclarons que nous faisons un usage excessif du sucre sur nos tables ».
Le roi Louis XIV, un siècle plus tard, y perdra ses dents avant l’âge de 40 ans. Entre plaisirs des sens et risques des excès, le sucre garde une place à part dans l’alimentation, où la morale n’est jamais loin. Au moment où se diffusent sur les tables aisées les confiseries venues d’Italie – ces « raffinements de gueule » très à la mode aux XVIIe et XVIIIe siècles –, il change de statut pour devenir un aliment à part entière, mais se voit aussi relégué, avec la fin du « service à la française », en terminaison de repas, suivant une chronologie salé-sucré qui perdure encore aujourd’hui en France, du moins pour les deux repas principaux.
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Cette nouvelle passion des aristocrates a un prix. A partir du XVIe siècle, l’engouement des riches européens pour les plaisirs sucrés encourage le développement de l’esclavage, « associé directement et de façon déterminée à la production de sucre », souligne l’historienne Catherine Coquery-Vidrovitch, autrice des Routes de l’esclavage (Albin Michel, 2018). D’abord testée par les Portugais sur l’île de Sao Tomé, l’économie de plantation s’exporte au Brésil, dans les petites puis les grandes Antilles (Saint-Domingue en particulier), et plus tard en Louisiane. « La production de sucre et l’esclavage vont s’appuyer l’une sur l’autre pour conduire à un modèle économique inédit, un nouveau paradigme productif », note Pierre Dockès. « C’est le début d’une tragédie dont les Amériques, et notamment la Martinique, la Guadeloupe, la Guyane et Haïti, ne sont pas tout à fait sorties, estime l’historien Jean-Pierre Le Glaunec, professeur à l’université de Sherbrooke, au Québec. L’alliance infernale du sucre avec l’émergence du capitalisme et la construction du concept de race peuvent expliquer en bonne partie l’évolution de nombre de sociétés américaines pendant la période moderne. »
Un goût de sang
Le commerce triangulaire transforme les esclaves africains en « machines à sucre » qui ne survivent dans les plantations des Amériques que sept ans en moyenne, rapporte l’essayiste Elizabeth Abbott (Le Sucre. Une histoire douce-amère, Fides, 2008). La traite atlantique est mise au service de l’extractivisme et de la monoculture sucrière dans des plantations conçues pour une production massive au goût de sang. « Quand nous travaillons aux sucreries et que la meule nous attrape le doigt, on nous coupe la main ; quand nous voulons nous enfuir, on nous coupe la jambe ; je me suis trouvé dans les deux cas. C’est à ce prix que vous mangez du sucre en Europe », répond l’esclave du Surinam à Candide, le personnage éponyme du conte philosophique de Voltaire (1694-1778).
L’anthropologue américain Sidney Mintz a montré en 1985, dans La Douceur et le pouvoir (Université de Bruxelles, 2014), comment le sucre a joué un rôle central dans la naissance du capitalisme et le passage aux temps modernes. « Bien sûr, le riz, le tabac, l’indigo, le coton sont très importants pour définir l’émergence de la modernité, mais le sucre l’est encore plus, explique Jean-Pierre Le Glaunec. Une sucrerie nécessite un investissement de départ important : des machines, des hangars, l’expertise des maîtres sucriers, et surtout beaucoup d’esclaves car la culture de la canne nécessite un travail physique extrêmement dur, bien plus que le café ou le coton. Une plantation sucrière à Saint-Domingue ou en Jamaïque, c’est 200 à 300 esclaves, contre 5 à 10 pour une plantation de café et une vingtaine pour une plantation de coton. Le sucre suppose d’engager des capitaux comme on ne l’a jamais vu auparavant en Europe. Mais le retour sur investissement est phénoménal. »
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Le modèle se révèle « incroyablement rentable pour ceux qui le mettent en œuvre, les maîtres de domaines mais aussi ceux qui, dans les métropoles européennes, financent ces activités et sont souvent plus riches que les producteurs », explique Pierre Dockès. La canne ne tarde pas à supplanter les autres productions. Voltaire n’est pourtant pas le seul à dénoncer le lien direct entre les atrocités esclavagistes et les douceurs consommées outre-Atlantique. Dans l’Angleterre de la fin du XVIIIe siècle, des mouvements abolitionnistes en appellent au boycottage. Plus de 300 000 Anglais renoncent ainsi à s’approvisionner en sucre des Caraïbes dans les années 1790.
Les consommateurs français semblent, de leur côté, moins regardants. Si, avant la Révolution, la production profite « essentiellement aux riches », note Catherine Coquery-Vidrovitch, le sucre devient au cours du XVIIIe siècle un produit de consommation courante, d’abord bourgeois puis populaire, souvent associé au thé, au cacao et au café, ces boissons tropicales devenues furieusement à la mode. « Il est difficile d’imaginer l’invention du petit déjeuner en Europe sans la plantation esclavagiste, souligne le géohistorien Christian Grataloup, auteur du Monde dans nos tasses (Armand Colin, 2017). Non seulement le sucre est indispensable pour ce mélange qu’est le chocolat, mais les Européens avaient appris dans le monde ottoman à boire le café sucré. Dans la foulée, ils ont également sucré le thé. »
Quand, en 1791, la révolte des esclaves et des affranchis éclate dans la colonie française de Saint-Domingue, au nom de l’égalité des droits avec les citoyens blancs, « tout est fait pour en étouffer l’écho afin d’éviter la contagion dans d’autres colonies », constate Catherine Coquery-Vidrovitch. Elle conduira à l’affranchissement des rebelles, puis à l’indépendance d’Haïti, en 1804. Elle entraîne aussi, à Paris, des émeutes populaires dues aux difficultés d’approvisionnement en sucre et à la flambée des prix. Le blocus anglais de 1806, qui coupe la route des Antilles aux produits coloniaux français, va pousser la France à rechercher d’autres ressources sucrières. En 1811, Napoléon, craignant de nouvelles émeutes, promet 1 million de francs à qui produira le premier pain de sucre à partir de la betterave. Ce sera chose faite quelques mois plus tard.
Entre les producteurs de canne et de betterave, la « guerre des sucres » est aussi une bataille d’idées. Les uns défendent le modèle esclavagiste ; les autres sont les tenants d’un progressisme qui promeut l’innovation scientifique pour améliorer le sort humain. Les hostilités culminent pendant la Restauration (1814-1830), lorsque Villèle, planteur de l’île Bourbon (aujourd’hui La Réunion) et antiabolitionniste, devient président du Conseil. En 1848, l’abolition de l’esclavage en France signe la défaite des planteurs de canne. La production massive de betteraves se déploie dans l’Europe du XIXe siècle, modelant les paysages et ouvrant une nouvelle ère dans l’histoire du capitalisme français, même si la canne reste la première source de sucre au monde.
L’époque voit émerger de part et d’autre de l’Atlantique les firmes géantes et les monopoles, à l’origine d’un puissant lobby dont les méthodes, mêlant étroitement les intérêts privés à la décision politique, perdurent aujourd’hui. A l’autre bout de la chaîne, le sucre devient l’une des principales sources d’apport calorique pour les ouvriers des usines britanniques, une « nourriture addictive pour prolétaires », selon les mots de l’anthropologue américain Sidney Mintz. Tout au long des XIXe et XXe siècles, la consommation augmente « de façon phénoménale », indique l’économiste Pierre Dockès. En France, elle est passée d’environ 5 kilos par an et par habitant en 1860 à 20 kilos en 1900, pour culminer à 35 kilos aujourd’hui, quatre fois plus que les recommandations de l’Organisation mondiale de la santé. Les Etats-Unis en consomment le double, le Brésil jusqu’à 60 kilos et l’Australie 50 kilos. Des pays comme le Japon et la Chine restent relativement en retrait, même si la consommation y a augmenté ces dernières décennies, jusqu’à atteindre 10 kilos par an et par habitant en Chine.
Des lobbys au poids colossal
On trouve désormais du sucre partout, ou presque. Avec l’industrialisation de l’alimentation, une large part de notre consommation est devenue invisible, cachée dans des produits transformés, dont les effets néfastes sont de plus en plus documentés.« De nombreuses études montrent que l’excès de sucre, notamment sous forme de boissons sucrées, est l’un des responsables de l’épidémie catastrophique d’obésité dans le monde, et est associé à un risque accru de caries dentaires, de pathologies cardiovasculaires, de diabète de type 2 ou d’hypertension », constate Mathilde Touvier, médecin et directrice de l’équipe de recherche en épidémiologie nutritionnelle à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale. De nouvelles maladies sont apparues en même temps que se répandaient de nouveaux sucres. Les sirops de fructose, fabriqués notamment à partir du maïs, sont accusés de générer des pathologies graves telles que la stéatose hépatique non alcoolique (NASH), la maladie du « foie gras ».
Les plus riches se détournent désormais du sucre, tandis que les maux qui lui sont liés touchent les catégories sociales les moins aisées. « On assiste à un renversement de valeurs : le peuple qui, hier, ne méritait pas le sucre, est soupçonné aujourd’hui de s’empiffrer, souligne Paul Ariès. A chaque époque, les mêmes discours moralisateurs stigmatisent les plus pauvres. »
L’un des faits marquants de cette évolution reste sans conteste l’influence des intérêts privés et des groupes transnationaux. « Leur poids politique est devenu colossal, constate le politiste. Grâce au marketing, ils ont remplacé les Eglises comme prescripteur alimentaire, et parviennent largement à imposer les règles du jeu aux gouvernants. » « Comme le sucre traverse toute la chaîne alimentaire, les pressions sont multiples et à tous les niveaux », observe aussi Nina Holland, chargée de campagne au sein de l’ONG Corporate Europe Observatory, qui enquête à Bruxelles sur le rôle des lobbys à l’échelle européenne. Dans un rapport intitulé « Une cuillère pleine de sucre » publié en 2016, l’ONG en a identifié plusieurs dizaines : « Ils n’ont pas tous les mêmes intérêts car les représentants des producteurs, de même que les fabricants qui extraient le sucre, veulent qu’on leur paye un prix raisonnable, alors que les entreprises qui l’utilisent s’organisent à différents niveaux pour qu’il soit vendu le moins cher possible. Mais, au final, tous ont le même objectif : vendre le plus possible de sucre. C’est ce qui les réunit. »
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Les politiques de santé publique se heurtent régulièrement aux intérêts de ces lobbys, devenus des acteurs à part entière de la vie politique. C’est ce qu’a constaté Mathilde Touvier, dont l’équipe a contribué à mettre au point le Nutri-score, un système d’étiquetage des produits alimentaires qui permet en un coup d’œil de repérer leur qualité nutritionnelle, en tenant compte notamment de la teneur en sucres. « Depuis cinq ans, plusieurs entreprises déploient un arsenal de stratégies pour démanteler le dispositif, avec des approches très structurées auprès des politiques, des parlementaires, des scientifiques qu’ils sont arrivés à rallier à leur cause »,décrit-elle.
La pression s’exerce également dans le domaine environnemental. Le Brésil a annulé en 2019 le décret qui interdisait la plantation de canne à sucre en Amazonie. De son côté, la France a fait machine arrière en 2020 sur l’interdiction des néonicotinoïdes, ces puissants insecticides dits « tueurs d’abeilles » qu’elle a réintroduits pour lutter contre la jaunisse de la betterave et « soutenir la filière betterave sucre », au nom de la « souveraineté alimentaire ».
Pour les sociologues Daniel Benamouzig et Joan Cortinas Muñoz, le problème est devenu « systémique ». Les deux chercheurs de la chaire Santé de Sciences Po, auteurs, en 2019, d’une « cartographie des activités politiques des acteurs du secteur agroalimentaire en France », y passent au crible la façon dont les stratégies industrielles « se coordonnent et pèsent ensemble sur les politiques publiques ». Cela passe notamment par la mise en avant de contre-arguments scientifiques, « pour discréditer les résultats de recherches pointant les effets négatifs d’un produit. Il s’agira par exemple de souligner que les effets addictifs du sucre sont certes prouvés sur des modèles animaux, mais pas chez l’homme », détaillent-ils. Les deux chercheurs préconisent que les moyens engagés par les firmes soient soumis à déclaration avec la même transparence que dans le secteur pharmaceutique, « car les sujets santé relèvent du bien public ». Une façon d’éclairer ce « travail politique des entreprises » qui, dans le cas du sucre, fait perdurer, plus que jamais, un système inégalitaire et coûteux en vies humaines.
« L’idée que le sucre est mauvais est récente », mais, « sous bien des aspects, il a toujours été nuisible. Et pourtant on l’aime toujours », constate, laconique, l’historien James Walvin dans son Histoire du sucre, histoire du monde (La Découverte, 2020). Près de deux siècles après l’abolition de l’esclavage, entre plaisir des papilles et pouvoir corrupteur, sa douceur garde, aujourd’hui encore, un fort goût d’amertume.
<https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/12/24/la-puissance-politique-du-sucre-entre-delices-et-dominations_6107186_3232.html>
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18- Guadeloupe : de l'usage important de pesticides malgré le traumatisme du chlordécone, AFP, 24/12/21, 13:00

En Guadeloupe, malgré le scandale du chlordécone qui traumatise la population, l'utilisation d'autres pesticides reste importante, y compris dans les jardins, selon plusieurs études.
Les cancers de la prostate liés à l'exposition au chlordécone, un pesticide largement utilisé pendant des décennies aux Antilles alors que sa toxicité et son caractère persistant dans l'environnement étaient connus depuis les années 1960, ont été reconnus mercredi comme maladie professionnelle. 
Car la population continue d'être exposée à ce pesticide interdit en France en 1990 mais qui a continué à être autorisé dans les champs de bananes des Antilles par dérogation ministérielle jusqu'en 1993, infiltrant les sols pour des centaines d'années. 
Plus inquiétant : l'utilisation d'autres pesticides reste importante, selon plusieurs études, et leurs interactions peuvent en renforcer les effets nocifs.
L'étude ChlEau-Terre, chargée de "dresser un état des lieux général de la contamination de la Guadeloupe continentale par les pesticides", bouclée en 2018, a mis en évidence "des résidus de pesticides pour 79% des bassins versants (un espace terrestre drainé par un cours d'eau et ses affluents, NDLR) analysés en Grande-Terre et 84% de ceux en Basse-Terre".
Au total, selon la même source, "37 molécules différentes (...) étaient détectées, dont plus de la moitié correspondent à des pesticides aujourd'hui interdits, qui ne sont plus utilisés mais qui persistent dans l'environnement".
C'est le cas du chlordécone mais d'autres pesticides, "notamment des herbicides (glyphosate, AMPA) puis des insecticides, des fongicides et des nématicides" se retrouvent également dans le sol. 
Or, une étude associant le CNRS, l'université du Mont-BLanc, le Cirad et le CEA, publiée en février 2021 a montré que le glyphosate --très utilisé aux Antilles depuis la fin des années 1990 en raison de son coût réduit-- "a induit une augmentation de l'érosion du sol qui a conduit à la libération du chlordécone stocké dans les sols des champs pollués".
"Le principe de précaution ne s'applique pas assez sur notre territoire", a noté auprès de l'AFP Olivier Serva, député de la Guadeloupe, qui espère voir une agriculture plus propre se développer sur l'île, avec "zéro produits phytosanitaires".
- Pesticides à domicile -
Selon le recensement agricole de 2020, rendu public en décembre 2021, la part des exploitations certifiées bio (certains agriculteurs de l'île se revendiquent de l'agro-écologie sans avoir les certifications) en Guadeloupe a augmenté de 1,7 point entre 2010 et 2020, soit désormais 600 ha sur une surface agricole utile de 31.800 ha.
"C'est surtout une conversion des surfaces cultivées en canne à sucre", détaille Alexandre Ducrot, chef du service statistiques à la Daaf de Guadeloupe.
Dans une étude publiée fin 2018, l'association Générations futures cartographiait les départements français ayant consommé le plus de glyphosate en 2017 et la Guadeloupe y occupait la sixième place. De quoi inquiéter Dominique Théophile, sénateur de Guadeloupe, qui avait alors interpellé le gouvernement dans une question écrite. 
"En 2019, 57 tonnes de substances actives ont été déclarées vendues en Guadeloupe dont 68% concernent les herbicides. 39% de la totalité des PPP (pesticides) sont représentés par le glyphosate. On observe une diminution constante depuis 2015", selon une source préfectorale. 
Mais l'utilisation des pesticides se fait également à domicile.
Selon un rapport de l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) de juin 2021, "94,8% des ménages guadeloupéens ont utilisé des pesticides au moins une fois dans l'année", notamment des aérosols, en raison de la prolifération des insectes.
Dans leurs jardins aussi, les Guadeloupéens utilisent des pesticides, souvent interdits à la vente, mais stockés depuis leur achat.
"Au moment de l'enquête, près de 24% des produits stockés chez les ménages en Guadeloupe étaient interdits à la vente", selon le rapport.
Le scandale du Chlordécone est souvent mentionné aux Antilles pour expliquer la défiance vis-à-vis de l'Etat, qui a resurgi avec la crise sanitaire et alimenté la défiance face aux vaccins anti-Covid et la contestation contre la vaccination obligatoire pour certains métiers en contact avec la population.
<https://www.lexpress.fr/actualites/1/societe/guadeloupe-de-l-usage-important-de-pesticides-malgre-le-traumatisme-du-chlordecone_2164962.html>
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19- Avec la société Epiterre, les agriculteurs développent des prestations de service environnemental, Actu-environnement, 24/12/21
Florence Roussel 

Encouragés à changer leurs pratiques mais bien souvent freinés par les pertes de rendement et donc de revenus que cela engendre, les agriculteurs cherchent de nouveaux revenus en lien avec la protection de l'environnement. Le principe des paiements pour services environnementaux fait lui aussi son chemin, porté surtout par les collectivités locales.
À la rencontre de ses deux tendances, le syndicat agricole majoritaire, la FNSEA, vient d'annoncer la création d'une société baptisée Epiterre avec l'association agréée de protection de l'environnement Imagin'rural. Les deux acteurs travaillent ensemble depuis plusieurs années sur une démarche du même nom afin de proposer aux collectivités ou aux entreprises des projets ruraux pour compenser leurs impacts ou développer des projets de territoires permettant de regagner de la biodiversité. Déjà plus d'une quinzaine de projets, relevant soit d'une nécessité pour des entreprises de compenser leurs activités, soit d'une volonté de renforcer leur politique de responsabilité sociétale des entreprises (RSE), ont été lancés dans plusieurs régions (Centre-Val-de-Loire, Occitanie, PACA, AURA…). « Cette démarche Epiterre, par son expertise et son ancrage territorial, se positionne aujourd'hui comme un acteur de référence dans ce domaine », estiment les deux acteurs qui souhaitent désormais la structurer sous la forme sociétaire. Christiane Lambert, présidente de la FNSEA, présidera Epiterre et Fabienne Sigaud, directrice d'Imagin'Rural, en assurera la direction générale.
<https://www.actu-environnement.com/ae/news/societe-epiterre-prestation-service-environnental-38797.php4>
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20- Reportage. Dans les vignes de Fontbonau, un enjeu de taille, Le Monde, 25/12/21, 17h00 
Rémi Barroux (envoyé spécial à Montbrison-sur-Lez, Drôme)

A la tête du domaine drômois, Jérôme Malet a appris que savoir tailler est vital pour prévenir les maladies et résister aux aléas climatiques qui touchent les ceps. Il se fait conseiller par un maître tailleur italien, Massimo Giudici. 
« Ce n’est pas seulement l’année, avec son tour des quatre saisons, qui est comparée à la vie humaine ; chaque saison contient une vie entière, traversée par différents êtres vivants, chacun doté d’une vie propre. » Cette phrase tirée du livre de l’autrice japonaise Ryoko Sekiguchi pourrait être la devise de Jérôme Malet en son domaine viticole de Fontbonau (Drôme). De même que sa définition des trois temps pour décrire la saisonnalité d’un aliment : « hashiri », « sakari » et « nagori », l’équivalent en quelque sorte de primeur, de pleine saison et d’arrière-saison.
Sur l’une des tables qui meublent le vaste salon, doucement chauffé par une belle flambée, au milieu de nombreux ouvrages consacrés à la viticulture ou à l’arboriculture, on aperçoit La Vigne et ses plantes compagnes, de Léa et Yves Darricau (Rouergue, 2019), et puis La Botanique du jardinier, de Geoff Hodge (Marabout, 2014)… mais aussi des livres consacrés au Japon, dont Nagori (P.O.L., 2018). Jérôme Malet aime à glisser cet ouvrage dans les mains du visiteur pour exprimer son attachement à la nature, à ses cycles, à ses vies. Plus qu’une simple inclination, c’est à un respect total du vivant que le viticulteur s’est voué.
« Un écosystème complet »
A Montbrison-sur-Lez, au cœur de la Drôme provençale, autour de la magnifique bâtisse (une ancienne magnanerie), le propriétaire, 58 ans, et son vigneron et œnologue, Bertrand Degat, 32 ans, un passionné de la Loire qui s’est installé ici, en 2017, ne sont pas peu fiers de faire découvrir l’immense écrin de nature. Dix-sept hectares de vignes – plantées surtout en grenache, avec 3,5 hectares de syrah et 1,5 hectare de blancs (roussanne et viognier) –, quatre de chênes truffiers, la même superficie pour les oliviers, 2 hectares de lavandes, 2 encore pour le verger et potager, et une quinzaine d’hectares de bois, sillonnés de sentiers qui permettent de rejoindre les parcelles de vignes, comme autant de clairières dans ce décor arboré. Un magnifique espace avec le massif de la Lance, qui culmine à 1 340 mètres. « L’idée, c’est d’avoir un écosystème complet, avec l’eau qui est très importante [le nom du lieu vient de « fontaine de bonne eau »], celle de la pluie, du ruissellement et de l’Aigue longue, la petite rivière toute proche », précise Jérôme Malet.
Une eau donc de qualité et abondante, un air plus frais, un coin (très) reculé et agricole – « on n’est pas dans le Luberon [voisin], ici, on a peu de touristes »… Bref, la nature dans tous ses beaux états, voilà ce qui a motivé Jérôme Malet à quitter le Roussillon pour la Drôme.
C’est en 2017 que ce viticulteur, père de trois enfants (Adèle, Eloi et Armand, âgés de 19 à 23 ans) – sans oublier Philia, une petite et jeune chienne de race jack russel, impeccable dans la recherche de truffes, sa spécialité –, a abandonné le domaine familial Sarda-Malet, dans la périphérie de Perpignan, et sa cinquantaine d’hectares, pour acquérir Fontbonau. « Je suis venu chercher de l’altitude et de la fraîcheur – ici, on est à 350 mètres d’altitude et 200 kilomètres plus au nord –, le coin est perdu et le tracteur ne voit jamais le bitume, contrairement à la plupart des domaines enserrés dans un réseau routier ou à proximité d’une voie ferrée. Enfin, j’étais inquiet du manque d’eau. A Sarda-Malet, on crevait de soif », précise le propriétaire.
> Lire aussi Climat : les pistes du projet Laccave pour sauver les vignes
Ici, ce dimanche 28 novembre, alors que la pluie tombe, transformée par endroits en légers flocons par le froid automnal, l’eau n’est pas un souci. Et le mistral, le vent qui descend la vallée du Rhône toute proche, a vite fait de ramener quelques rayons de soleil. « C’est un vrai médicament, on peut vraiment être en bio facilement. Pour ne pas l’être, il faut vraiment le vouloir », assure Jérôme Malet. Fontbonau est bien sûr en bio et passera en biodynamie dans les prochains mois pour l’ensemble de ses productions – raisins, olives, truffes, lavande… –, une obligation pour obtenir la certification.
Ceps malades
Le tableau serait idyllique si le réchauffement climatique et les menaces sanitaires ne venaient compliquer la donne. Le vignoble français, européen aussi, souffre. Manque d’eau, grosses chaleurs, gels tardifs, maladies du bois et de la feuille, moindres rendements… Ce constat, Jérôme Malet le partage avec son complice Massimo Giudici, venu prodiguer ses conseils. Le quadragénaire italien, originaire d’Udine, dans le Frioul, est maître tailleur depuis une quinzaine d’années. Il travaille pour la société italienne Simonit & Sirch, spécialiste internationale de la taille des vignes, qui dispose de trois filiales, en France, en Afrique du Sud et dans la Napa Valley, en Californie. La société conseille une cinquantaine de domaines en France, dont moult grands châteaux. Il assiste Jérôme Malet depuis deux ans.
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Massimo Giudici pousse un cri d’alarme. Selon lui, une bonne partie de la vigne en Europe est malade de l’intérieur. Malade de ses ceps. « Beaucoup meurent dès la première année tant ils sont nécrosés à l’intérieur, avec un flux de sève si pourri qu’elle ne peut monter. » Pour ce spécialiste, le sujet est tabou et peu de vignerons veulent en parler. Dans un très grand château bordelais qu’il suit, et dont il taira le nom, le technicien dit pouvoir écarter « un quart des pieds de vigne », tous malades. En fait, explique le maître tailleur, le mal survient en amont chez les pépiniéristes. « Pour faire leurs greffes, ils récupèrent un matériel de base, des sarments, sur des vignes qui ne sont pas en bon état, déjà atteintes par l’esca [une pourriture du bois provoquée par des champignons qui touche les ceps] ou le court-noué [maladie virale transmise par un nématode qui pique les racines]. Les plants achetés par les viticulteurs ne sont plus du tout de la qualité que l’on rencontrait il y a une vingtaine d’années. »
A Fontbonau, le problème n’est pas si important, mais Jérôme Malet et Bertrand Degat restent très attentifs à la santé des végétaux qui les entourent. A la vigne, l’étape de la taille est essentielle, car c’est elle qui permet de respecter ou non la physiologie de la plante, insiste le maître italien : « Un pied de vigne en bonne forme résiste mieux aux ravageurs, aux contraintes hydriques, sans nécrose. Le bois vivant est une réserve de sucre et d’amidon. » Massimo Giudici emploie une image simple mais explicite : le cep, quand il est en bonne santé, arrive à pomper l’eau pour alimenter les feuilles qui transpirent et en ont besoin. S’il est nécrosé de l’intérieur, non. « C’est une question hydraulique simple, il faut que le tuyau soit bien formé et ne soit pas obstrué par du bois mort. »
Et de montrer aux viticulteurs, sécateur en main, comment pratiquer ces gestes essentiels. « Alors que tout le monde, du nord au sud, d’est en ouest, a l’habitude de couper les vieux bois, nous, on coupe les rameaux de l’année. » Selon lui, le problème n’est pas de limiter l’espace de chaque pied mais, au contraire, de lui laisser de la place. « Et la taille gobelet est éminemment favorable », une taille appliquée sur les parcelles du domaine drômois. L’Italien et ses deux disciples de Fontbonau l’assurent : « Il faut respecter la plante, elle n’est pas juste un support pour le raisin. »
Recherche de fraîcheur et de calme
La prestation de Massimo Giudici n’est pas donnée. Selon le niveau d’intervention, elle peut coûter de 10 000 euros à 20 000 euros par an. Mais la société Simonit & Sirch veut aussi faire partager ses compétences au plus grand nombre par le biais d’une plate-forme en ligne, Vinemasterpruners.com, ainsi que des ouvrages très pédagogiques publiés par les Editions France Agricole.
Jérôme Malet, lui, veut le meilleur pour Fontbonau. Ses modèles de vignerons ont pour nom Eloi Dürrbach (mort le 12 novembre), le créateur de Trévallon, prestigieux domaine dans la région d’Aix-en-Provence, Jacques Reynaud de Château Rayas (son neveu, Emmanuel, est aujourd’hui à la tête du domaine), non loin de Châteauneuf-du-Pape, ou encore Jean-Marie Raveneau, à Chablis. Il a depuis longtemps une préférence pour la vallée du Rhône et le grenache, qui l’ont attiré à Fontbonau, à la recherche de fraîcheur et de calme, tout en lui permettant de conserver le soleil qu’il affectionne tant. A la recherche aussi de vins qu’il peut assembler à son goût, en maîtrisant la production. Ici, loin de la quinzaine de vins, dans tous les formats possibles, sec ou doux, qu’il proposait sur les terres catalanes, il offre trois jolies cuvées parcellaires : deux rouges, grenache en majesté, et un blanc, avec roussanne et une touche de viognier (de 15 euros à 25 euros).
De son passé au domaine Sarda-Malet et de son ascendance – le grand-père maternel qui avait acheté les vignes, et son père, Max, qui travaillait au marché de Rungis, en région parisienne, avant de se consacrer au domaine –, Jérôme Malet a beaucoup appris. « Il n’était pas question de manger un fruit ou un légume qui n’était pas de saison, insistait mon père. » Le respect du cycle de la nature déjà.
<https://www.lemonde.fr/le-monde-passe-a-table/article/2021/12/25/dans-les-vignes-de-fontbonau-un-enjeu-de-taille_6107296_6082232.html>
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À PROPOS DE LA FONDATION POUR LA NATURE ET L'HOMME (FNH)…
NOS PROGRAMMES
— Génération climat <http://www.generation-climat.org/>, un programme de soutien aux jeunes porteurs de projets en France et à l’étranger.
— J’agis pour la nature <https://jagispourlanature.org/>, des activités de bénévolat nature partout en France.
— Mon Restau Responsable <https://www.monrestauresponsable.org/>®, un outil gratuit destiné à accompagner les restaurants collectifs qui souhaitent proposer à leurs convives une cuisine saine, de qualité et respectueuse de l’environnement.
— L’affaire du siècle <https://laffairedusiecle.net/>, une campagne de mobilisation pour soutenir l'action en justice contre l'Etat pour le climat. 
— The Freaks <https://www.the-freaks.fr/>, un collectif d'artistes et de personnalités qui s'engagent à adopter de nouveaux comportements pour lutter contre la sur-consommation, la pollution, le réchauffement climatique et protéger la biodiversité.
— Le temps est venu <https://letempsestvenu.org/>, 100 propositions pour prendre la mesure des changements à entreprendre pour opérer une transition écologique socialement juste.
— Baromètre des mobilités <http://barometremobilites-quotidien.org/>, une analyse annuelle des pratiques de mobilité des Français.
LES PUBLICATIONS DU THINK TANK
— Les rapports et contributions  <https://www.fondation-nicolas-hulot.org/articles/?category=think-tank&think-tank=rapport-contributions>
— Les Points de vue & Editos <https://www.fondation-nicolas-hulot.org/articles/?think-tank=les-points-de-vue-editos&category=think-tank> 
— Les Talks <https://www.fondation-nicolas-hulot.org/articles/?think-tank=les-talks&category=think-tank> 
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